La Fusion AGIRC ARCCO : les plus hauts revenus mis à contribution sur la partie de la retraite complémentaire

Les régimes de retraite complémentaire Arrco et Agirc, qui couvrent la quasi-totalité des salariés et anciens salariés du secteur privé, fusionneront le 1er janvier 2019. Cette unification, qui met fin à la distinction entre régime des cadres et régime des non-cadres, est prévue par l’Accord National Interprofessionnel (ANI) du 17 novembre 2017.
Cette fusion instaure un compte de points et une liquidation unique pour les actifs, un paiement unique pour les nouveaux retraités, ainsi qu’une adhésion et un compte de cotisations uniques pour les entreprises.

Pas de changement sur les principes de fonctionnement

Un système par points : chaque année, les cotisations sont converties en points de retraite qui alimentent un compte ouvert au nom de chaque salarié. Les salariés se constituent ainsi des droits futurs à la retraite. Pour connaître le montant de votre retraite, il suffit de multiplier votre nombre de points acquis à la retraite par la valeur du point à la date de retraite (fixé tous les ans).

Une mission dintérêt général : la gestion et la gouvernance s’opèrent dans le respect de principes généraux de transparence et d’efficacité du service rendu.

Un système par répartition : les cotisations versées par les salariés et leurs employeurs permettent de verser immédiatement les retraites aux retraités actuels. La répartition instaure un principe de solidarité entre les générations successives et entre les différents secteurs d’activité.

Pilotage et gestion par les partenaires sociaux : les partenaires sociaux sont les gestionnaires exclusifs des régimes de retraite complémentaire. Ils négocient les accords, fixent les orientations, définissent les mesures pour assurer l’équilibre financier de la retraite complémentaire (valeurs du point et du salaire de référence).

Les changements à compter du 1er janvier 2019

Une caisse de retraite unifiée sans référence catégorielle : à l’issue de l’ANI signé le 17 novembre 2017, le régime AGIRC-ARRCO ne comportera plus de référence catégorielle et reprendra les obligations respectives des régimes précédents.
La notion de « cadres » nécessitera désormais une négociation interprofessionnelle par les partenaires sociaux concernant leur encadrement (Prévoyance notamment ANI 13 mars 2018).

Un compte unique de points de retraite : chaque participant au régime, qu’il justifie d’un statut cadre ou non-cadre, disposera d’un compte de points de retraite complémentaire unique.
Pour les salariés, la valeur du point ARRCO restera inchangée, contrairement à celle du point AGIRC, calculée à partir d’un taux de conversion. Pour les personnes déjà à la retraite avant le 1er janvier 2019, la fusion AGIRC-ARRCO engendrera peu de changements, à l’exception de l’âge de demande de la pension de réversion.

Modification du calcul des cotisations : le calcul des cotisations sera effectué sur deux tranches de rémunération. Les cotisations AGFF et GMP vont fusionner, tandis que la cotisation CET sera redéfinie.
Les cotisations s’effectueront avec un taux dappel de 127 % (contre 125 % actuellement), selon une répartition de 60 % pour l’employeur et de 40 % pour le salarié.
Les taux pour les cotisations de retraite complémentaire seront calculés ainsi [1]:

Quels sont les impacts ? 

Augmentation des coûts salariaux des entreprises : le taux global de cotisation sera plus élevé que celui actuellement retenu et s’appliquera à toutes catégories de salariés.

Régime unique de retraite complémentaire sans référence à la catégorie socioprofessionnelle : la disparition du régime des cadres aura plusieurs conséquences.
– Le dispositif de prévoyance prévu à l’article 7 de la Convention Collective Nationale du 14 mars 1947 sera supprimé et impliquera donc des négociations pour la notion de « Cadres » (Régime de prévoyance spécifique pour les Cadres – ANI 13 mars 2018).
– La garantie minimum de points (GMP) qui avait pour objet d’attribuer un minimum de points AGIRC aux salariés cadres et assimilés, dont la rémunération était inférieure au plafond de la sécurité sociale, sera également supprimée. Elle sera remplacée par une nouvelle contribution, dénommée CEG (contribution d’équilibre général), ayant pour objet de compenser les charges financières résultant des départs à la retraite entre 62 et 67 ans et de maintenir les droits des salariés cadres ayant bénéficié de la GMP.

En pratique

  • Salarié cadre rémunéré 60000€ bruts annuels : l’augmentation du taux de cotisation au-delà de 1 Plafond de la Sécurité Sociale (PASS) rogne légèrement son salaire net, mais permet également d’engranger des points supplémentaires pour la retraite.

En revanche, il subit la hausse du taux d’appel et les nouvelles contributions techniques, sans compensation pour sa future pension.

  • Salarié cadre rémunéré 220000€ bruts annuels : le salarié ressort perdant de cette mesure avec un surcroit de cotisations retraite de 52%, notamment dû à l’augmentation de sa contribution aux charges sociales totales (qui passe de 28% à 40%) et à une assiette de salaire soumise à cotisations plus importante avec l’application dun taux unique de 21.59% dès le premier euro au-dessus de 1 PASS (39 732), contre 4 PASS (158 928) auparavant.

Compte tenu de l’augmentation du taux d’appel (127% versus 125%), du rendement du changement de répartition des cotisations et de la création de deux tranches uniques de cotisations, le rendement du régime va diminuer.
Les salariés cadres ayant un revenu supérieur à 1 PASS (39 732 en 2018) ressortiront perdant de cette mesure.

Face à l’essoufflement du système de retraite par répartition, le gouvernement souhaite favoriser le recours aux dispositifs de retraite par capitalisation.
En effet, l’article 20 de la loi PACTE encourage un système de retraite par capitalisation, afin de préparer la réforme des retraites et compléter les retraites versées dans le cadre du système par répartition. En 2017, les prestations versées au titre du régime par répartition atteignaient 316 milliards d’euros[1], contre 6 milliards[2] au titre de fonds d’épargne retraite par capitalisation.
L’enjeu est double : permettre aux salariés d’une part de bénéficier d’une retraite supplémentaire plus rentable que celle garantie par le régime par répartition et aux entreprises d’autre part de diminuer leurs charges patronales grâce aux avantages sociaux liées à ces dispositifs (forfait social faible voire quasi nul).
Il parait donc judicieux d’être accompagné dans le choix de ces dispositifs, qui offrent une réelle opportunité d’optimisation tant pour les salariés que pour les entreprises.

[1] Rapport annuel du Conseil d’Orientation des Retraites – Juin 2018

[2] Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques , 2017 (DREES)

[1] L’Accord national interprofessionnel (ANI) du 17-11-2017, art.35 et art.36