Quels sont les placements privilégiés par les grandes fortunes ?
L’Association Française du Family Office (AFFO), en partenariat avec le cabinet EY, a dévoilé la 10e édition de son baromètre annuel. Cette publication, devenue incontournable, éclaire les sensibilités et les orientations d’investissement des grandes fortunes et des family offices. Cette année, près de 65 répondants – membres et partenaires de l’AFFO – représentant ensemble pas moins de 585 familles, ont partagé leur vision à travers un questionnaire détaillé.
Le règne du capital-investissement
Le capital-investissement s’impose, plus que jamais, comme l’axe central des allocations patrimoniales, représentant 37,5 % des investissements réalisés. Près de la moitié des sondés envisagent même d’accroître encore leur exposition à cette classe d’actifs dans les mois à venir, selon les auteurs du baromètre.
Pour Guillaume Lucchini, associé fondateur du multi-family office Scala Patrimoine, ce constat ne saurait surprendre : « Le capital-investissement constitue une opportunité stratégique pour les grandes fortunes en quête de diversification au-delà des classes d’actifs traditionnelles. Investir dans des entreprises non cotées, souvent à fort potentiel de croissance, permet non seulement de viser une performance attractive – avec un rendement moyen annuel de 13 % sur les dix dernières années selon France Invest – mais aussi de traverser les cycles économiques grâce à une gestion active et à un horizon d’investissement de long terme. » Par ailleurs : « Ce type d’investissement revêt également une dimension émotionnelle : pour les familles, les entrepreneurs ou les sportifs de haut niveau, il s’agit souvent d’un engagement porteur de sens, leur permettant de prendre part à des aventures entrepreneuriales en y apportant bien plus que des capitaux. »
Des allocations diversifiées mais raisonnées
Si le capital-investissement domine, les autres grandes classes d’actifs conservent leur place dans les portefeuilles. Les actions cotées représentent 17,3 % des investissements, suivies par l’immobilier d’investissement (12,8 %), la dette (cotée ou privée) à 10,8 %, et les liquidités à hauteur de 9 %.
Guillaume Lucchini souligne : « L’immobilier reste une valeur refuge dans l’imaginaire patrimonial français. Il conjugue revenu régulier et valorisation à long terme. Malgré les tensions actuelles du marché, il demeure essentiel de rester exposé à la pierre, un placement tangible et rassurant. »
Il insiste particulièrement sur le marché parisien : « À Paris, la demande locative reste structurellement forte, soutenue par une attractivité internationale, un bassin d’emploi dense, et une offre limitée. Ces fondamentaux assurent au marché une résilience notable, même dans un contexte incertain. »
Au-delà, les infrastructures (2,9 %), les hedge funds et produits structurés (5,3 %), les forêts, vignobles et fonciers agricoles (2,1 %), ainsi que les investissements dits « passion » – art, voitures de collection – (0,9 %), complètent les portefeuilles. Les matières premières, les métaux précieux et les cryptomonnaies, bien que médiatisés, ne représentent qu’une fraction marginale des allocations (respectivement 0,5 %, 0,5 %, et 0,4 %).
Des secteurs porteurs, entre innovation et résilience
En 2024, les investissements se tournent prioritairement vers des secteurs alliant solidité structurelle et fort potentiel d’innovation. En tête : la technologie (63 %), la santé (49 %), l’immobilier (41 %), l’industrie (33 %) et l’énergie (31 %).
Guillaume Lucchini y voit une parfaite résonance avec les attentes des clients de Scala Patrimoine : « La technologie et la santé concentrent l’intérêt des investisseurs en raison de leur capacité d’innovation, mais aussi parce qu’elles répondent à des enjeux sociétaux majeurs. Tandis que la transformation numérique façonne notre quotidien, la santé bénéficie d’une dynamique portée par le vieillissement démographique, les avancées médicales et l’émergence de soins personnalisés. »
Les préoccupations des grandes fortunes
Les priorités des familles et grandes fortunes restent claires. La protection des leurs (100 %) et la transmission intergénérationnelle de leur patrimoine – matériel comme culturel – (98 %) s’affirment comme des préoccupations majeures.
Les évolutions fiscales (89 %), la transformation numérique (83 %), la gouvernance (82 %), ainsi que la sécurité, continuent d’occuper une place centrale dans leurs réflexions. Parallèlement, de nouveaux risques émergent : l’intelligence artificielle (74 %) et la cybersécurité (78 %) suscitent un intérêt croissant.
Les familles demeurent aussi attentives à la philanthropie (71 %), à la transition énergétique et à la neutralité carbone (56 %), autant de sujets inscrits dans une vision patrimoniale de long terme.
Guillaume Lucchini souligne le poids des enjeux fiscaux et géopolitiques dans les stratégies d’allocation : « La dissolution de l’Assemblée nationale en 2024 a provoqué une onde d’inquiétude chez de nombreux investisseurs, entrepreneurs et sportifs de haut niveau. Le spectre d’une remise en cause du dispositif Dutreil ou d’un retour de l’Impôt de solidarité sur la fortune plane à nouveau. »
Avant d’ajouter : « À cela s’ajoutent les tensions géopolitiques internationales. Qu’il s’agisse du projet de hausse des droits de douane impulsé par Donald Trump ou du récent conflit entre l’Iran et Israël, ces événements réactivent la prudence des familles, qui cherchent à sécuriser leur patrimoine dans un environnement de plus en plus incertain. »
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