Cartes à collectionner : un marché lucratif… mais fiscalement piégeux

L’achat et la revente de cartes Pokémon, Panini, Yu-Gi-Oh! ou encore Magic connaissent un essor fulgurant auprès des collectionneurs. Un marché longtemps réservé aux passionnés, mais qui attire désormais un nouveau public : les investisseurs, souvent très jeunes, en quête de placements alternatifs.

La flambée des prix des cartes à collectionner

Les prix des cartes Pokémon ont connu une envolée spectaculaire, en particulier pour celles éditées à la fin des années 1990. Symbole de cette frénésie, la carte la plus chère jamais vendue est la mythique « Pikachu Illustrator », dont la valeur atteint 5 275 000 dollars. Il n’en existerait que 39 exemplaires dans le monde. L’un des heureux propriétaires n’est autre que le youtubeur américain Logan Paul.

Parmi les cinq cartes Pokémon les plus chères, figurent également le « Dracaufeu Topsun japonais Scarce Blue Back » (493 230 dollars), le Dracaufeu Première Édition (420 000 dollars), le Tortank Galaxy Star Holo (360 000 dollars) ainsi que la « Tsunekazu Ishihara GX Black Star – carte promotionnelle » (237 230 dollars).

Du côté de Panini, les enchères s’envolent elles aussi. Un collectionneur a ainsi déboursé 1,5 million de dollars pour une carte de Lionel Messi. Celle-ci représente l’attaquant argentin lors de la saison 2004-2005, sa première saison avec le FC Barcelone. Seuls 838 exemplaires de cette carte existent à travers le monde.

Il s’agit d’un record historique. Jamais auparavant une vignette de football n’avait atteint un tel montant. Le précédent record remontait à 2022. Il s’agissait de la carte de la légende brésilienne Pelé pour 1,33 million de dollars.

Enfin, la carte « Magic : The Gathering » la plus chère jamais vendue est « The One Ring ». Commercialisée en 2023 dans l’extension Le Seigneur des Anneaux, elle se distingue par une singularité absolue : un seul et unique exemplaire existe dans le monde, imprimé en écriture elfique. Cette pièce hors norme a été acquise pour 2 millions de dollars par le rappeur américain Post Malone, lui-même collectionneur averti, consacrant un peu plus encore la dimension mythique de cette carte devenue légendaire.

Un investissement risqué et volatil

Pourtant, derrière l’engouement, la réalité est plus nuancée. Toutes les cartes ne se valent pas. La grande majorité n’a strictement aucune valeur marchande.

Seules quelques pièces rares, en parfait état de conservation et souvent anciennes – donc difficiles à dénicher – peuvent constituer un investissement réellement rentable. À cette rareté intrinsèque s’ajoute une forte volatilité : la valeur d’une carte peut s’envoler comme s’effondrer brutalement.

Mais un autre élément est souvent oublié : la fiscalité. Oui, la vente de cartes à collectionner peut-être… imposable. Plusieurs régimes coexistent, et la taxation dépend notamment de la fréquence des ventes, de leur montant et même de la nature de la carte.

Une fiscalité des cartes à collectionner à plusieurs visages

Le régime fiscal diffère selon que les collectionneurs effectuent des ventes ponctuelles ou régulières.

  • La fiscalité des ventes occasionnelles

– Le régime des biens de consommation

C’est le régime qui s’applique aux revendeurs amateurs. En principe, les cartes à collectionner relèvent de la catégorie des biens meubles corporels. À ce titre, le vendeur bénéficie d’une exonération totale d’impôt si le montant de chaque transaction n’excède pas 5 000 euros.

Au-delà de ce seuil, la plus-value est soumise au régime d’imposition des cessions de biens meubles, avec un taux forfaitaire de 36,2 %.

– Le régime des objets de collection

Dans certains cas, des cartes peuvent être qualifiées d’objets de collection. Cette appréciation se fait au cas par cas, sous le contrôle d’un juge. En pratique, cette catégorie concerne plus fréquemment les timbres, les étiquettes de vin ou les cartes postales. Mais certaines cartes à jouer peuvent y être rattachées.

Lorsque la cession d’un objet de collection dépasse 5 000 euros, le vendeur est redevable d’une taxe forfaitaire de 6 % du prix, à laquelle s’ajoute la CRDS de 0,5 %.

  • La fiscalité des ventes habituelles

Lorsque les opérations d’achat-revente deviennent régulières, l’administration fiscale peut considérer qu’il s’agit d’une activité commerciale. Les revenus sont alors imposés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC).

Le statut de micro-entreprise permet d’exercer cette activité avec un chiffre d’affaires plafonné à 188 700 euros, tout en bénéficiant d’une franchise de TVA jusqu’à 93 500 euros.

En optant pour le régime micro-BIC, le vendeur profite d’un abattement forfaitaire de 71 % sur ses recettes pour le calcul de l’impôt sur le revenu. Un montant auquel, il convient d’ajouter les cotisations sociales au taux de 12,4 %.

  • La fiscalité des cartes NFT

Les cartes de collection existent également sous forme numérique, via la blockchain : ce sont les NFT, pour non-fungible tokens. Dans ce cas, c’est le régime fiscal applicable aux crypto-actifs qui s’applique. Les plus-values générées lors de la vente de cartes NFT sont soumises au prélèvement forfaitaire unique de 30 %.