L’ISF est mort, vive l’IFI
La loi de Finances pour 2018[1] ainsi que la loi de Financement de la sécurité sociale pour 2018[2], lesquelles fixent les grandes nouveautés fiscales et sociales applicables depuis le 1er janvier, ont été votées définitivement le 30 décembre 2017. La loi de Finances 2018 vient supprimer l’Impôt de Solidarité sur la Fortune (ISF), impôt vieux de 35 ans, et le remplacer par l’Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI). Outre le recentrage sur les actifs immobiliers, la réforme de l’impôt sur la fortune vient encadrer plus sévèrement la déduction des dettes et ne transpose qu’une partie des réductions d’impôts précédemment applicables.
Suppression de l’ISF et création de l’Impôt sur la fortune immobilière (IFI)
Depuis le 1er janvier 2018, l’ISF est supprimé et remplacé par IFI[3], dont l’assiette est limitée aux biens et droits immobiliers, à l’exclusion de tous les autres biens. Ainsi, votre patrimoine financier, notamment tous vos contrats d’assurance-vie, contrats de capitalisation, comptes-titres, PEA, comptes sur livret et autres liquidités sont donc désormais entièrement exonérés d’impôt sur la fortune (sous réserve de ce qui suit).
En revanche, tous les actifs immobiliers sont concernés, qu’ils soient détenus en direct ou via une société, ou encore au travers d’un contrat d’assurance-vie ou d’un contrat de capitalisation. Dans ce dernier cas, l’assiette imposable sera la valeur représentative des unités de comptes composées des actifs immobiliers (SCPI, OPCI, etc.).
Par ailleurs, il n’y a plus de distinction entre les redevables ayant un patrimoine inférieur ou supérieur à 2,57 millions d’euros, puisque tous les redevables doivent désormais déclarer leur patrimoine avec leur déclaration annuelle d’impôt sur le revenu (en complétant des annexes).
Certaines règles restent identiques au dispositif antérieur : seuil d’assujettissement (valeur nette du patrimoine d’au moins 1,3 million d’euros), barème, abattement de 30% sur la résidence principale, exonération des biens immobiliers affectés à l’activité professionnelle, exonération des bois et forêts et des baux ruraux à long terme, régime des impatriés, règle du plafonnement (selon laquelle la somme de l’IFI et de l’impôt sur le revenu ne pourra pas excéder 75% des revenus).
Ainsi, a priori, cette réforme profitera à tous les anciens contribuables ISF puisqu’elle n’induira aucune augmentation d’impôt, y compris pour les contribuables détenant majoritairement de l’immobilier, et aboutira au contraire à faire baisser voire à supprimer l’impôt sur la fortune des contribuables dont le patrimoine est essentiellement composé d’actifs financiers.
Toutefois, cette assertion est à relativiser au regard des nouvelles règles applicables aux dettes déductibles, lesquelles seront moins nombreuses, ce qui pourra entrainer corrélativement une augmentation de l’assiette imposable et donc de l’IFI.
Encadrement de la déductibilité des dettes
La loi de finances pour 2018 fixe désormais une liste limitative des dettes déductibles[4], laquelle exclue de plein droit les dépenses liées aux biens autres qu’immobiliers (prêts automobiles, découverts bancaires, dettes de quasi-usufruit, droits de successions non encore acquittés au 1er janvier de l’année – sauf s’ils se rapportent à des actifs immobiliers imposables), certaines impositions tels que l’impôt sur le revenu et les prélèvements sociaux, y compris l’impôt correspondant aux revenus des immeubles mis en location (revenus fonciers, BIC des locations meublées), ainsi que la taxe d’habitation (mais la taxe foncière reste déductible).
De plus, sont introduites des clauses anti-abus excluant ou restreignant la déduction de certaines dettes.
Ainsi, ne sont pas déductibles les dettes à caractère familial[5], ainsi que les dettes souscrites auprès de sociétés dont le redevable a le contrôle[6].
Un traitement particulier est désormais réservé aux crédits in fine[7] contractés pour l’achat d’un bien ou droit immobilier, puisque ceux-ci ne sont déductibles que partiellement, chaque année, à hauteur du montant total de l’emprunt diminué d’une somme égale à ce même montant multiplié par le nombre d’année écoulées depuis la souscription de l’emprunt et divisé par le nombre d’années total du prêt. Autrement dit, les prêts in fine sont traités fictivement comme s’ils s’amortissaient.
Par exemple, pour un crédit in fine d’un montant de 300 000 € d’une durée de 10 ans, souscrit le 1er janvier 2015 et à rembourser le 1er janvier 2025, la dette qui pourra être retenue au titre du passif déductible de l’IFI 2018 est de : 300 000 – (300 000 x 3/10) = 210 000€ (alors même que la dette réelle restant due par le contribuable est de 300 000€).
Quant aux crédits in fine ne prévoyant aucun terme pour le remboursement du capital, un mécanisme d’amortissement forfaitaire d’1/20ème par année écoulée est prévue par la loi.
Par ailleurs, pour les patrimoines immobiliers dont la valeur est supérieur à 5 millions d’euros, si le montant total des dettes est supérieur à 60 % de cette valeur, la fraction des dettes excédant ce seuil ne sera admise en déduction qu’à hauteur de 50 %. Toutefois, ce plafond de déduction ne sera pas applicable si le contribuable justifie que les dettes n’ont pas été contractées dans un objectif principalement fiscal.
Transposition partielle des dispositifs de réduction d’impôt
Notez enfin que si la réduction d’impôt de 75% pour les dons à des associations caritatives ou des fondations est maintenue, tel n’est pas le cas[8] de la réduction ISF-PME, qui permettait de bénéficier d’une réduction d’impôt de 50% en cas d’investissement au capital des PME (cf notre article « Investir au capital de PME non cotées pour réduire son ISF »).
Les conséquences de cette réforme de l’impôt sur la fortune ne seront pas les mêmes selon le montant et la composition de votre patrimoine. De plus, l’immobilier étant désormais l’actif le plus taxé en France (cf notre article « Les rendements de l’immobilier locatif érodés par les cumuls de hausse de la taxe foncière »), la question se pose de savoir s’il est judicieux de vendre vos biens immobiliers (cf notre article « Réforme de l’ISF : quels arbitrages réaliser sur votre patrimoine ? »).
[1] Loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.
[2] Loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018.
[3] Article 31 de la Loi de finances pour 2018.
[4] Article 974, I du CGI.
[5] Il s’agit des dettes contractées directement ou indirectement par l’intermédiaire d’une société auprès d’un membre de son foyer fiscal (couple marié, pacsé ou en concubinage notoire, et leurs enfants mineurs) ou auprès d’un membre du groupe familial (ascendants, descendants majeurs, frères et sœurs).
[6] Sauf si le redevable justifie du caractère normal des conditions du prêt et du caractère effectif des remboursements.
[7] Article 974, II du Code Général des Impôts.
[8] Article 31 de la Loi de finances pour 2018.
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