Migueline Rosset (Avocate) : « Lors d’un divorce, les SCI s’avèrent très complexes à liquider »

Avocate spécialisée en droit de la famille, des personnes et de leur patrimoine, Migueline Rosset nous explique comment s’organise le partage des biens après le divorce, et se penche en particulier sur le devenir des biens professionnels détenus par un entrepreneur.

Comment gérer son patrimoine en cas de divorce ? 

Il faut comprendre qu’en cas de divorce, les deux personnes du couple ont la faculté et le pouvoir de gérer le patrimoine. Lorsqu’on arrive devant le juge, si on n’est pas en divorce amiable, il va falloir demander au juge d’être celui qui va être autorisé à gérer le patrimoine, ce qui est particulièrement important lorsque le patrimoine est constitué de biens immobiliers.

Comment s’organise le partage des biens après le divorce ? 

Alors, après le divorce, on va prendre le patrimoine des époux. On va remonter à la date des effets du divorce, c’est-à-dire la date à laquelle le juge ou les parties, si elles se sont mises d’accord sur ce point-là, feront remonter les effets du divorce. Et en général, c’est la date de séparation des époux.

Sauf quelques exceptions, on prendra à cette date-là l’image du patrimoine et on va lui appliquer les règles précisées par le Code civil et par la jurisprudence.

Je vais vous donner un exemple. L’un des époux, après la séparation, a continué à payer l’emprunt seul. Il va falloir le récompenser, d’une certaine manière, de ce paiement qu’il a fait pour le compte de la communauté ou de l’indivision, suivant le régime matrimonial des époux. Le Code civil prévoit que ce remboursement va avoir lieu selon la règle du profit subsistant. Cette règle vient dire que tout ce que l’époux a payé doit lui être remboursé pour sa part évidemment, mais doit être remboursé, revalorisé.

Et la jurisprudence est venue préciser que cette revalorisation, elle se fait au regard de la valeur d’acquisition. Vous comprenez que dans certains cas, la valeur d’acquisition, si elle est ancienne, vient à revaloriser considérablement le paiement de l’emprunt qui aura été fait par l’époux. Cela peut donc être une véritable stratégie patrimoniale que de tout faire pour payer l’emprunt, au moment de la séparation.

Qu’en est-il pour les biens professionnels d’un entrepreneur ? 

Tout dépend du régime matrimonial sur lequel les époux sont mariés. Lorsqu’ils sont mariés, sous le régime de la séparation des biens et que l’autre époux n’a pas pris des parts dans cette société : c’est assez simple. L’époux qui est propriétaire des parts de la société peut les conserver. Lorsque le régime de la communauté des biens prévaut, l’époux entrepreneur en devra l’autre moitié à l’époux. Ça peut poser des difficultés, notamment dans le cadre de start-ups. Comment pouvons nous les valoriser, notamment lorsqu’elles sont déficitaires, mais avec un potentiel économique certain ? C’est assez compliqué.

Quels sont vos conseils pour protéger son patrimoine d’un éventuel divorce ? 

Le premier conseil, c’est de choisir soigneusement son régime matrimonial. En revanche, il convient d’être vigilant lorsque vous avez le projet de créer une Société civile immobilière (SCI). Car, au moment du divorce, c’est une catastrophe. C’est une catastrophe pour plusieurs raisons. D’une part, cela ne se liquide pas comme tout le reste du patrimoine. Et d’autre part, ce n’est pas le même juge qui est compétent. Et enfin, il faut parfois refaire des comptes, souvent sur plus de 20 ans. La SCI est donc vraiment à proscrire.