Vers la fin des fonds en euros?

Ce jeudi 29 septembre 2016, les députés réunis en séance publique ont adopté l’article 21 bis du projet de loi Sapin 2, article prévoyant le renforcement des pouvoirs macro prudentiels du Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) afin de préserver le secteur de l’assurance vie en cas de risque systémique. Le contexte de taux bas a accéléré l’adoption de cette loi qui a aujourd’hui deux objectifs : éviter une crise grave en cas de remontée des taux et encadrer les rémunérations des fonds en euros.

Si la presse spécialisée et généraliste s’est faite l’écho ces derniers jours de cette mesure particulièrement contraignante pour l’épargnant français, article prévoyant que le HCSF sur proposition du gouverneur de la Banque de France pourra « suspendre, retarder ou limiter, pour tout ou partie du portefeuille, le paiement des valeurs de rachat, la faculté d’arbitrages ou le versement d’avances sur contrat », il est nécessaire de rappeler que l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) disposait déjà de cette faculté néanmoins limitée à un niveau microprudentiel c’est-à-dire à une compagnie d’assurance déterminée. Lors du krach boursier de 2008 lié aux subprimes, il avait été question un moment de la mettre en application pour protéger certains acteurs français des répercussions de cette crise américaine sur le marché français. La loi Sapin 2 élargit aujourd’hui cette disposition en y intégrant par ailleurs le blocage possible des arbitrages ou des demandes d’avance, mesure limitée toutefois à 3 mois renouvelables.

Le deuxième volet de cette loi a pour objectif également de rappeler à l’assureur que dans un contexte actuel de taux de très faible (l’OAT à 10 ans étant à 0,12 % au 28 septembre 2016) il est inconcevable de proposer à l’épargnant un rendement garanti supérieur à 2%. Le texte prévoit ainsi de limiter la rémunération des fonds en euros en permettant au HCSF la possibilité de « moduler les règles de constitution et de reprise de la provision pour participation aux bénéfices ».

Il en ressort aujourd’hui pour l’épargnant français un double constat. Il est nécessaire pour lui de diversifier ses actifs sur plusieurs assureurs et de limiter son investissement en fonds en euros et cela à double titre. D’une part les rendements risquent de se dégrader fortement, la disparition même du fonds en euros est ces dernier mois fortement débattus, et d’autre part en cas de remontée des taux, les sorties du fonds en euros et les arbitrages sur unités de compte pourraient être gelés engendrant une indisponibilité des actifs sur contrat d’assurance vie.

Si les fonds en euros dernière génération vont tirer leur épingle du jeu de cette situation, il est fort à parier que leur limitation en montant sera monnaie courante à l’avenir. Certains assureurs ont d’ailleurs commencé à restreindre l’accès à leurs fonds en euros, Spirica ou Apicil pour ne citer qu’eux. Pour d’autres, le constat actuel nécessiterait des modifications plus en profondeur. Chez Axa, « la garantie totale en capitale devrait être repensée au profit d’une garantie partielle » selon Thomas Buberl son nouveau patron.

Il est désormais loin le temps du rendement sans risque. L’épargnant devra intégrer désormais la prime de risque dans l’élaboration de sa stratégie patrimoniale, ce qui nécessitera un minimum de réflexion et un accompagnement sur le long terme.