Dirigeants : de nouveaux leviers pour optimiser votre rémunération avec la Loi Pacte

De nombreux dirigeants d’entreprise s’interrogent au sujet de l’optimisation de leur rémunération, qu’ils soient sous le statut de travailleurs non-salariés (TNS) ou de salarié au titre de leur mandat social.

Ils souhaitent être conseillés, sur la création d’un package de rémunération efficient dans une problématique de sortie de leurs bénéfices tout en maîtrisant la pression des charges sociales et l’effet de cliquet fiscal qu’une telle stratégie pourrait engendrer. Le souhait d’appréhender la rente qu’ils percevront à la retraite est également un enjeu important pour les dirigeants.

Dirigeants : de nouveaux leviers pour optimiser votre rémunération avec la Loi Pacte

Dans un contexte fiscal mouvant, il est important de prendre du recul afin de prendre les bonnes décisions. L’année 2018 en a été le parfait exemple avec la mise en place du crédit d’impôt modernisation du recouvrement – (CIMR). Pour rappeler ce dispositif, les bénéfices (BIC, BNC, et BA) et rémunérations des dirigeants qui contrôlent la société (SAS, SARL, etc.) perçus en 2018 n’étaient pas imposés (ils étaient neutralisés par le crédit d’impôt modernisation du recouvrement – CIMR) mais un dispositif anti-abus était instauré afin d’éviter les effets d’aubaine.

Pour arbitrer entre bonus versé en salaires ou en dividendes en 2018, il fallait justifier de cette hausse (surcroît d’activité, évolution objective des responsabilités et des performances du dirigeant) afin de pouvoir bénéficier d’une taxation au taux moyen d’impôt sur le revenu, plus avantageuse que le PFU (30%) en cas de versement de dividendes.

Ainsi, il y avait un intérêt à constater des revenus exceptionnels en 2018 lorsque le taux marginal d’imposition était significatif (30%, 41% ou 45 %), que la différence entre le taux marginal et le taux moyen était forte (revenu exceptionnel pour une grande part en début de tranche à 30% ou 41 %) et lorsque le revenu exceptionnel n’entrainait pas une taxation à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR), puisqu’aucun crédit d’impôt ne permettait de la réduire en 2018.

Il est vrai que l’arbitrage entre la rémunération et les dividendes n’est pas nouveau et l’ingénierie pour définir un choix n’a pas été facilitée depuis le 1er janvier 2013[1]. En effet, depuis cette date la part des dividendes perçus par le travailleur non salarié (gérant majoritaire de SARL, associé unique d’EURL, associé de SNC, dirigeants de SEL), son conjoint, son partenaire pacsé ou ses enfants mineurs, dans une société relevant de l’IS, est assujettie à cotisations sociales pour la fraction supérieure à 10 % du capital social, des primes d’émission et des sommes versées en compte courant détenus par le travailleur indépendant.

Depuis ce moment, le nombre de création de sociétés en SAS a explosé, afin d’éviter l’assujettissement à cotisations sociales des dividendes. Nous ne pouvons que conseiller de ne pas choisir la forme d’une société au motif que des dividendes distribués sont exonérés de cotisations sociales.

La rémunération est un terme vaste et revêt trois principales composantes : la rémunération immédiate, potentielle et différée. L’audit de la rémunération comprend donc l’analyse de ces trois « briques » et ne s’arrête pas uniquement à la rémunération immédiate, ces briques étant interdépendantes.

 

L’arbitrage rémunération dividendes : un choix cornélien 

Chaque année, à la période de clôture des comptes, le dirigeant s’interroge sur la meilleure solution pour se verser une partie de son bénéfice tout en limitant le coût des charges sociales et de sa fiscalité personnelle. Ce « bonus » pourra être versé sous la forme d’une rémunération ou de dividendes.

Concernant la rémunération, les cotisations sociales payées constituent la contrepartie de la réalisation d’un aléa éventuel, il s’agit d’une logique d’assurance. Aujourd’hui, nous constatons que la proportion entre le montant de cotisations versées et le total des prestations espérées diminue.

Afin de rééquilibrer les déséquilibres budgétaires rencontrées par les régimes sociaux, un certain nombre de cotisations sociales ont été déplafonnées, sans que la prestation versée soit elle aussi déplafonnée. En termes de « retour sur investissement » pour chaque dirigeant, il n’est pas productif de payer une cotisation au-delà d’une certaine rémunération. En effet, la prestation payée ne pourra plus alors augmenter et on peut alors parler d’une « taxe sociale ».

Ce qui pose problème, c’est le poids excessif des cotisations obligatoires n’apportant aucune prestation à ceux qui les versent.

Ainsi, le pourcentage des cotisations sociales versées à perte (c’est-à-dire non productives de droits) augmente au fur et à mesure que la rémunération progresse et cela s’est accentué depuis la fusion AGIRC ARCCO le 1er janvier 2019[2].

En effet, le dirigeant assimilé salarié ressort perdant de cette mesure avec un surcroit de cotisations retraite dû à l’augmentation de sa contribution aux charges sociales totales (qui passe de 28% à 40%) et à une assiette de salaire soumise à cotisations plus importante avec l’application d’un taux unique de 21.59% dès le premier euro au-dessus de 1 Plafond annuel de la Sécurité Sociale (PASS) qui s’établit à 40 524€ à 2019, contre 4 PASS (162 092€) auparavant.

Ainsi au-delà de 4 fois le plafond de la sécurité sociale (162 096€/ an), les cotisations sociales versées ne sont pas productives de droits.

Le versement d’un bonus en dividendes au-delà de 4 PASS de rémunération prend alors tout son sens. En effet la pression fiscale et sociale grâce à la flat tax sera de 30% au global (12.8% au titre de l’impôt sur le revenu et 17.2% au titre des prélèvements sociaux).

Il conviendra donc d’apprécier si l’économie fiscale et sociale engendrée par le versement d’un bonus en dividendes est supérieure à :

  • l’économie d’impôt sur les sociétés dans le cas où le bonus est versé sous forme de rémunération (le salaire et les charges sociales étant des charges déductibles du résultat) ;
  • l’économie d’impôt sur le revenu compte tenu du taux marginal d’impôt sur le revenu du dirigeant

Par ailleurs, il ne sera pas nécessaire de justifier que la rémunération totale du dirigeant si le bonus est versé sous forme de salaires, soit une rémunération normale.

En effet, si l’administration considère que la rémunération du dirigeant est excessive[3], elle demande la réintégration de la fraction excédentaire dans les bénéfices imposables[4] de l’entreprise. Cette fraction excédentaire se trouve donc réintégrée dans l’assiette de l’impôt sur les sociétés avec la possibilité d’une majoration de retard de 40 %.

Afin d’apprécier la répartition optimale entre salaire et dividendes, il n’existe donc pas de solution préétablie. Il est nécessaire de raisonner au cas par cas en prenant en compte plusieurs paramètres tels que le taux d’imposition à l’impôt sur les sociétés, le taux marginal des cotisations sociales et d’imposition du dirigeant et de procéder à des simulations.

 

L’opportunité offerte par la loi PACTE pour un redessiner la rémunération globale du dirigeant et capitaliser pour sa retraite

Depuis, l’entrée en application de la loi PACTE, la suppression du forfait social pour les entreprises de moins 50 salariés pour les plans d’épargne salariale (PEE, PERCO) ainsi que la participation et l’intéressement a rebattu les cartes de l’optimisation de la rémunération. Ces solutions incontournables d’optimisation de la rémunération du dirigeant sont, en effet, exonérées de charges sociales mais également d’impôt sur le revenu.

Pour les entreprises dont l’effectif est compris entre 50 et moins de 250 salariés, l’exonération de charges sociales subsiste uniquement sur l’intéressement.

Les chefs d’entreprise et leurs conjoints ont accès aux dispositifs d’épargne salariale ouverts à leurs salariés : intéressement, plans d’épargne salariale (PEE, PERCO) et participation.

Les dirigeants peuvent déployer ce dispositif d’épargne salariale dans leur société opérationnelle mais également dans leur holding.

4 cas sont à envisager :

Cas n°1 : le dirigeant est salarié de la société opérationnelle sans holding personnelle ; il est éligible aux 4 dispositifs mentionnés ci-dessus.

Cas n°2 : le dirigeant travailleur non salarié (TNS) est aussi éligible.

Cas n°3 : le dirigeant est salarié avec une holding personnelle. Il est éligible aux dispositifs dans sa holding si ces derniers sont déployés au préalable dans la société opérationnelle.

Cas n°4 : la holding du dirigeant salarié n’est pas éligible au PEE/PERCO/Intéressement/Participation si la société opérationnelle n’en dispose pas elle-même.

Il conviendrait d’introduire ces outils d’épargne salariale en amont de l’arbitrage salaire-dividendes compte tenu de l’économie réalisée sur la masse salariale et de la non-imposition à l’impôt sur le revenu (ii).

Afin d’anticiper la création d’une rente de retraite par capitalisation, il parait judicieux d’activer les leviers offerts par l’épargne salariale afin de bénéficier d’un package de rémunération globale efficient, c’est-à-dire avec le minimum de pression sociale et fiscale qui n’engendrera pas de prestations futures.

Le dirigeant pourrait prétendre à un package de rémunération maximal de 70 512€ / an non soumis à charges sociales et à l’impôt sur le revenu dont le détail serait le suivant :

  • participation : 30 393€ (3/4 du PASS)
  • intéressement : 30 393€ (3/4 du PASS)
  • PEE : 3 242€ (8% PASS)
  • PERCO : 6 484€ (16% PASS)

 

Nous invitons les dirigeants à se faire accompagner par un spécialiste qui apportera le conseil et le recul nécessaire pour appréhender parfaitement les enjeux liés à ces outils.

 

 

[1] Article 11 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013

[2] https://scala-patrimoine.fr/2018/11/06/la-fusion-agirc-arcco-les-plus-hauts-revenus-mis-a-contribution-sur-la-partie-de-la-retraite-complementaire/

[3]Article 39. 1. §1 du Code général des impôts (CGI)

[4] Article 111. c. du Code général des impôts (CGI)