Réforme fiscale et nouvelles conditions de changement de régime matrimonial

Le régime matrimonial organise l'ensemble des rapports juridiques et économiques des époux au cours de leur vie commune. Le couple a le choix entre plusieurs régimes matrimoniaux qui définiront leurs futurs rapports patrimoniaux.

Lorsque les époux ne choisissent pas un contrat de mariage, c’est le régime de la communauté légale qui s’applique par défaut[1].

Etant donné les changements que peut connaître un couple tout au long de la vie, sur le plan familial (naissance d’un enfant, décès, séparation de faits…), professionnel (changement d’emploi, création d’entreprise…) et financier (donation, succession, liquidation judiciaire…), le régime matrimonial choisi initialement peut ne plus être adapté à leur nouvelle situation.

Aussi, la Loi a prévu la possibilité d’y apporter des aménagements par l’insertion d’avantages matrimoniaux (clause préciputaire, apport en communauté, attribution intégrale, stipulation de bien propre…) ou encore d’en changer totalement, afin qu’il reste adapté aux intérêts de la famille.

L’article 1397 du Code Civil précise ainsi la procédure à suivre et les conditions à remplir pour apporter ces modifications ou en changer.

En effet, un commerçant marié sous le régime de la séparation de biens[2] afin de protéger le patrimoine de son épouse de ses créanciers professionnels, peut souhaiter, lors de sa retraite, lui transmettre une part plus importante de ses biens personnels accumulés pendant sa vie active.

Le couple pourra opter par exemple, pour le changement d’un régime séparatiste vers un régime communautaire.

A l’inverse, un jeune couple marié sans contrat de mariage, en communauté légale à défaut d’avoir bénéficié d’un conseil adapté, pourra découvrir tardivement les risques d’un tel régime sur le patrimoine du conjoint, lorsqu’un contrat séparatiste l’aurait davantage protégé des créanciers de l’époux entrepreneur.

 

Quelles étaient les conditions pour aménager ou changer son régime matrimonial et quelles sont les principales modifications apportées par la nouvelle Loi du 23 mars 2019[3] ?

Jusqu’au 25 mars 2019, il était nécessaire de patienter 2 ans après le mariage, avant de pouvoir changer de régime matrimonial. Désormais, ce délai ne s’applique plus.

Si cette Loi simplifie la procédure, le changement doit rester conforme à l’intérêt de la famille et exprimer un accord mutuel des deux époux.

Les conjoints doivent s’adresser à un notaire qui établira une nouvelle convention matrimoniale sous la forme d’un acte authentique qui devra, sous certaines conditions, être homologuée par un juge aux affaires familiales.

En l’absence d’enfant, aucune homologation judiciaire ne sera requise.

En cas de présence d’enfants mineurs, avant cette nouvelle Loi, l’acte notarié devait être systématiquement homologué par le juge aux affaires familiales. Cette homologation ne sera désormais plus obligatoire, mais pourra être exigée par le notaire si les intérêts de l’enfant mineur doivent être sauvegardés.

Ainsi, lorsque l'un ou l'autre des époux a des enfants mineurs, le notaire devra saisir le juge des tutelles s'il estime que le changement de régime matrimonial porte préjudice aux enfants.

Pour ce qui concerne les enfants majeurs, l’article 1397, alinéa 2 du code civil précise qu’ils «sont informés personnellement de la modification envisagée. Chacun d’eux peut s’opposer à la modification dans le délai de trois mois ». En cas d’opposition de leur part, le changement de régime devra être homologué par le juge.

Les modifications ou le changement de régime sont également communiqués aux créanciers qui pourront s’y opposer pendant 3 mois. Dans ce cas, l’homologation du juge sera requise.

Après « une appréciation d’ensemble », le juge se prononcera sur la conformité de ces aménagements ou changements à l’intérêt de la famille (Cass. 1re civ., 6/1/1976) et confirmera qu’ils ne sont pas destinés à léser les créanciers.

 

Le coût d’un changement de régime matrimonial :

Les émoluments du notaire :

Le notaire perçoit des émoluments pour la rédaction de l’acte authentique et ses conseils :

  • les droits proportionnels : ils s’appliquent lorsque le changement de régime matrimonial implique de lister et estimer le patrimoine des époux, par exemple lors du passage d’une communauté légale à une communauté universelle ou l’apport d’un bien à la communauté.

 

  • les émoluments de liquidation du régime matrimonial: par exemple lors du passage d’un régime de communauté à un régime de séparation.

Ces frais seront fonction du montant et de la nature des biens meubles ou immeubles qui sont mentionnés dans le contrat.

Les droits d’enregistrement et autres taxes à payer :

  • un droit fixe pour l’enregistrement de l’acte auprès de l’administration fiscale : 125 €

 

  • la taxe de publicité foncière en cas de mutation du propriétaire d’un bien immobilier : par exemple, lors de l’apport en communauté, la modification du contrat en communauté universelle ou la mutation des biens propres en biens communs : 0,715% de la valeur du droit réel immobilier transmis à l’autre époux.

 

  • La taxe de sécurité immobilière due en cas de mutation immobilière : 0,10 % de la valeur du droit réel immobilier transmis à l’autre époux comme pour la taxe de publicité foncière.

Par ailleurs, si le changement de régime matrimonial crée une indivision post-communautaire, un éventuel partage constaté par un acte entraînera l'exigibilité du droit de partage au taux de 2,5 %, ce qui est par exemple le cas, lors de la transformation d’un régime communautaire en régime séparatiste.

Lorsque le changement de régime matrimonial requiert l’homologation judiciaire, les époux devront également payer les frais de l’avocat qui présentera cette demande d’homologation.

 

L’exonération d’une partie de ces taxes jusqu’au 1er janvier 2020 :

Depuis la Loi de Finance du 30 décembre 2005, l’article 1133 bis du CGI dispose que « les actes portant changement de régime matrimonial en vue de l’adoption d’un régime communautaire, ne donnent lieu à aucune perception au profit du Trésor. »

Ainsi, un changement de régime matrimonial par exemple en séparation de biens vers un régime communautaire, est exonéré de droits d’enregistrement et de taxe de publicité foncière jusqu’au 31 décembre 2019.

En effet, l’article 1133 bis du CGI a été abrogé dans la Loi de Finance 2019.

  • De ce fait, jusqu'au 31 décembre 2019, les actes qui consistent à adopter un régime de communauté sont exonérés du droit fixe et de la Taxe de Publicité Foncière (mais pas de la contribution de sécurité immobilière).

 

A partir du 1er janvier 2020, cette exonération sera supprimée.

Ainsi, un bien propre d’un conjoint valorisé 1M€ apporté en communauté, subira une taxe supplémentaire à partir du 1er janvier 2020 sur la part transmise au conjoint, soit (500 000 € x 0,715%) + 125€ = 3 700 €.

Pour les couples ayant l’objectif d’apporter des changements à leur régime matrimonial et notamment de le faire évoluer vers un régime communautaire, il est encore possible de consulter un notaire et d’enregistrer ces modifications avant la fin de l’année afin de bénéficier de l’exonération de ces taxes.

 

[1] Lorsqu’aucun contrat de mariage n’est établit, les époux relève de la communauté légale, soit depuis le 1er février 1966, le régime de la communauté réduite aux acquêts. Ce régime matrimonial a pour caractéristique principale la répartition des biens des époux en trois masses : une masse propre pour chacun des époux et une masse commune.

  1. civ. art. 1401 : "La communauté se compose activement des acquêts faits par les époux ensemble ou séparément durant le mariage, et provenant tant de leur industrie personnelle que des économies faites sur les fruits et revenus de leurs biens propres."
  2. civ. art. 1402 al. 1 : "Tout bien, meuble ou immeuble, est réputé acquêt de communauté si l'on ne prouve qu'il est propre à l'un des époux par application d'une disposition de la loi."

[2] La séparation de biens est régie par les articles 1536 à 1543 du Code civil. Elle repose sur un principe d’indépendance entre les époux. A la dissolution du régime, aucun des époux n’a vocation à participer à l’enrichissement de l’autre.

[3] Loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.


Les obligations non cotées : investir dans le tissu productif tout en étant décorrélé des marchés

Comme nous avons pu l’évoquer dans un précédent article, le financement participatif permet aux investisseurs de placer une partie de leur épargne dans des projets qu’ils souhaitent soutenir et voir aboutir et de diversifier leurs investissements (coté et non coté).

Dans un contexte où les rendements en fonds euros sont atones et la volatilité boursière accrue, l'investissement dans les TPE ou les PME au travers des obligations non cotées, permet d’obtenir des rendements intéressants, fonction à la fois de la notation du risque crédit du projet ainsi que de l’horizon d’investissement.

L’actualité récente nous a démontré que la volatilité des fonds d’obligations cotées offrant de beaux rendements historiques pouvait d’un jour à l’autre être victime d’une décollecte massive et donc d’une chute potentielle importante détruisant ainsi le capital de l’épargnant.

 

Qu’est-ce qu’une obligation ?

Une obligation est un titre de créances, émise généralement par des sociétés publiques ou privées, des institutions financières, voire des Etats, pour emprunter des fonds sur les marchés dits obligataires.

La personne qui souscrit à une obligation (particulier ou personne morale) est le prêteur. Il prête à l'émetteur (société ou Etat). Le prêteur est en principe assuré, sauf en cas de défaillance de l'émetteur, de recevoir régulièrement un intérêt fixe ou variable, et de voir sa créance remboursée à l'échéance de l'obligation. Il est donc important d’avoir conscience qu’il y a un risque de perte en capital et de bien prendre en considération la notation du risque crédit de la société émettrice.

L’obligation se définit par le nom de l'émetteur, le taux d'intérêt (fixe ou variable), la date d'échéance (dite de maturité), une période de versement des intérêts (annuelle, semestrielle, trimestrielle, etc...) et l'année d'émission.

Les principaux concepts liés à une obligation sont :

  • coupon couru, c'est à dire le montant du coupon en pourcentage et prorata temporis depuis la dernière date de paiement,
  • le taux actuariel qui est le taux de rendement réel de l'obligation, et
  • le nominal qui désigne la valeur nominale d’une obligation.

Il existe plusieurs méthodes de remboursement des obligations émises par un émetteur. La méthode de remboursement la plus souvent rencontrée est le remboursement in fine où la totalité du principal est remboursée le jour de la dernière échéance. Les intérêts sont quant à eux versés tout au long de la durée de vie de l'obligation. Beaucoup d’émetteurs intègrent également des clauses de rachat et des possibilités de remboursement anticipé.

Le remboursement par amortissement est possible mais uniquement pour les obligations non cotées.

 

Comment est notée une obligation ?

Les agences de notations comme Standard & Poors, Moody’s, Fitch publient des analyses financières sur les actions et les obligations et notamment la dette à long terme des Etats.

Standard & Poors utilise une échelle de notation, allant de AAA à D.

L’échelle de notation est divisée en deux catégories : la catégorie dite "investment grade" et la catégorie dite spéculative.

  • Catégorie "investment grade"

AAA – valeurs de tout premier ordre

AA+, AA, AA- – haut de la fourchette

A+, A, A- – notation intermédiaire

BBB+, BBB, BBB- – bas de la fourchette et peut comporter certaines caractéristiques spéculatives.

  • Catégorie spéculative (Junk bond)

BB+, BB, BB- – éléments dits spéculatifs

B+, B, B- – absence de caractéristiques d’investissement souhaitables

CCC+, CCC, CCC- – obligations de très mauvaise qualité

CC – hautement spéculatives

C, SD et D – notations les plus basses. Perspectives extrêmement faibles d’atteindre un niveau propice à l’investissement

Concernant les obligations non cotées françaises, la Banque de France établit également une notation. La cotation de la Banque de France est une appréciation sur la capacité d’une entreprise à honorer ses engagements financiers à un horizon de un à trois ans.

Cette cotation est importante puisqu’elle permet à la fois d’évaluer le risque de crédit d’une entreprise utilisée pour la politique monétaire et la réglementation prudentielle et de faciliter le dialogue entre le prêteur et l’entreprise en mettant à disposition une référence commune et reconnue. Cette cotation est composée d’une cote d’activité et d’une cote de crédit.

La cote d’activité exprime le niveau d’activité de l’entreprise. Dans la très grande majorité des cas, ce niveau est fonction du chiffre d’affaires.

La cote de crédit est notamment fondée sur :

  • l’examen de la situation financière de l’entreprise et son évolution prévisible après analyse de la rentabilité et de la structure du bilan ; La dimension « groupe » est également prise en compte dans cette analyse;
  • l’appréciation portée sur l’environnement économique de l’entreprise;
  • les entreprises qui lui sont apparentées ou avec lesquelles elle entretient des relations commerciales ou économiques étroites;
  • l’existence d’incidents de paiement-effets ou de procédures judiciaires.

La notation de la Banque de France ainsi que la durée détermineront le taux d’intérêt proposé par l’émetteur. Plus la notation Banque de France est faible et se rapproche de 5 (équivalent B+ Standard&Poors) et d’une date d’échéance importante, plus le risque de défaut sera important et donc le taux d’intérêt proposé par l’émetteur sera élevé.

 

Dans quelle enveloppe financière loger les obligations non cotées ?

Traditionnellement, l’investisseur verra ses obligations non cotées logées dans un compte titre déposé chez le partenaire bancaire de la plateforme. Pour rappel, les coupons perçus dans le compte titres seront soumis à l’impôt sur le revenu, soit au barème soit au prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30%.

La Loi Pacte adoptée le 11 avril dernier, permet de loger des obligations non cotées dans un PEA PME. La fiscalité sera d’autant plus attrayante pour les plans ouverts depuis au moins 5 ans car les coupons perçus des obligations seront exonérés d’impôts sur le revenu mais soumis aux prélèvements sociaux (17.20%). Ainsi l’économie de prélèvements sociaux atteindrait 12.80% pour une personne soumise au PFU de 30%.
Cela permettra donc de capitaliser sur cette économie durant la durée du prêt pouvant aller jusqu’à 7 ans !

Il est également possible de loger ces obligations non cotées dans des contrats d’assurance-vie via des fonds professionnels spécialisés, permettant ainsi de bénéficier d’une enveloppe fiscale attrayante.

Il convient de rappeler cependant que ces investissements restent peu liquides et risqués. De nombreux intervenants se développent sur ce marché. Il convient donc de se faire accompagner pour sélectionner les plateformes présentant les taux de défaut les plus bas et analyser les projets ayant le plus de probabilités d’aboutir.


Guillaume Lucchini : « L’indépendance du CGP nécessite de la transparence au niveau de la rémunération »

Newsletter Patrimonia – juillet 2019 – Guillaume Lucchini

[Article]  Guillaume Lucchini s'est exprimé au sujet du contrat d'assurance-vie sans rétro-commission Scala Life, dans la newsletter de Patrimonia : « L’indépendance du CGP est essentielle et nécessite une transparence au niveau de la rémunération, d’où notre choix d’être rémunéré sur des honoraires de conseil comme un cabinet d’avocat »

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