Guillaume Lucchini décrypte pour Le Monde le dispositif du Logement Locatif Intermédiaire
Depuis la disparition du dispositif Pinel à la fin de l’année 2024, les promoteurs mettent en avant une nouvelle solution d’investissement : le logement locatif intermédiaire (LLI), désormais ouvert aux particuliers depuis le début de l’année 2025. Mais ce dispositif est-il réellement avantageux pour les investisseurs ? Guillaume Lucchini, associé fondateur de Scala Patrimoine, répond aux questions de la journaliste Laurence Boccara et en éclaire les enjeux pour les lecteurs du Monde.
Un dispositif désormais ouvert aux particuliers
Créé par la loi de finances pour 2014, le Logement Locatif Intermédiaire était jusqu’alors réservé aux acteurs institutionnels. Porté par des bailleurs sociaux comme Action Logement ou CDC Habitat, ce dispositif, assorti de plusieurs avantages fiscaux, s’adressait uniquement aux grandes structures du secteur.
La fin du régime Pinel a toutefois rebattu les cartes. Le législateur a levé en 2025 la restriction réservant le dispositif aux seuls professionnels, permettant ainsi aux particuliers d’y accéder. Mais cette accessibilité reste encadrée : l’investissement ne peut se faire qu’à travers une structure juridique — une société civile immobilière (SCI), soumise à l’impôt sur le revenu ou à l’impôt sur les sociétés, ou bien via une SCPI ou un FPI (fonds de placement immobilier).
Plusieurs promoteurs, ainsi que des banques et intermédiaires, ont d’ores et déjà saisi l’opportunité. Des offres dédiées à ce nouveau marché sont proposées, certaines prenant même à leur charge les frais de création de société.
Les objectifs du dispositif
Comme le souligne Le Monde, le logement locatif intermédiaire vise à renforcer l’offre locative à des prix accessibles. Il s’adresse à une population aux revenus modestes, trop aisés pour bénéficier d’un logement social, mais insuffisants pour accéder au marché libre.
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Les caractéristiques des logements concernés
Les biens éligibles au LLI peuvent être neufs ou anciens. Les anciens doivent avoir été rénovés pour être acceptés. Ils doivent respecter plusieurs critères précis. Les loyers sont plafonnés. Les ressources des locataires sont également limitées. Le propriétaire s’engage à louer pendant au moins 15 ans. La durée peut aller jusqu’à 20 ans maximum. Une rupture de bail avant la fin peut avoir des conséquences. Cela peut entraîner la perte des avantages fiscaux. Le propriétaire peut aussi devoir rembourser les aides reçues.
Autre condition : investir dans une zone dite « tendue ». Ces zones ont une forte demande locative. Elles sont classées A, A bis, B1, parfois B2 et C sur dérogation. Les logements doivent être bien situés. Ils doivent être proches des transports en commun. Ils doivent aussi être proches des infrastructures urbaines.
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Les avantages pour l’investisseur
Pour compenser le niveau de loyer inférieur au marché, le dispositif propose des incitations fiscales. D'une part, une TVA réduite à 10 %, contre 20 % habituellement. Et d'autre part, un crédit d’impôt sur la taxe foncière pouvant courir sur une période de vingt ans.
Le dispositif ne fixe aucune limite en matière de montant investi, de prix de revient ou de nombre de logements détenus. Il échappe par ailleurs au plafonnement global des niches fiscales. Selon les promoteurs, les efforts commerciaux consentis permettent d'acquérir des biens LLI à des prix inférieurs de 10 à 20 % à ceux du marché classique.
L’analyse de Scala Patrimoine
Guillaume Lucchini apporte un regard nuancé sur ce dispositif : « Une durée de blocage de quinze ans, des loyers encadrés… ces contraintes pèsent lourdement sur la rentabilité. Il peut s’avérer plus judicieux d’acheter du neuf hors dispositif, en négociant un bon prix et en conservant la liberté de fixer son loyer. En ce moment, les promoteurs accordent des remises significatives et prennent à leur charge les frais de notaire. »
Le rendez-vous des marchés financiers - Mai 2025
Marchés financiers & économie : les points clés
- Après les turbulences de la première semaine d’avril, les marchés financiers semblent retrouver un peu de sérénité. La volatilité, mesurée par l’indice VIX, s’est nettement repliée, passant de 52 à 25 points depuis le 9 avril.
- La Chine affirme sa volonté de renouer le dialogue avec l’administration américaine, dans l’espoir de parvenir à un accord commercial équilibré entre les deux superpuissances économiques.
- Aux États-Unis, la stagflation s’impose de plus en plus comme un scénario crédible aux yeux des analystes.
Quelles performances sur les marchés financiers ?
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Conflit entre l'Inde et le Pakistan
Les tensions entre l’Inde et le Pakistan semblent avoir franchi un seuil critique, faisant craindre une dangereuse escalade.
En réponse à l’attentat du 22 avril survenu dans la région du Cachemire indien, New Delhi a mené des frappes ciblées contre ce qu’elle qualifie d’« infrastructures terroristes ». De son côté, l’armée pakistanaise affirme avoir abattu cinq avions de chasse indiens ainsi qu’un drone de combat, marquant une intensification sans précédent du conflit.
Malgré la gravité de la situation et la volatilité potentielle qu’elle pourrait induire, les marchés financiers demeurent, pour l’heure, étonnamment impassibles face à cette montée des tensions militaires entre les deux puissances nucléaires.
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Marchés actions : une tempête boursière brève, mais d’une rare intensité
La tempête qui a balayé les marchés boursiers début avril fut aussi brève que spectaculaire. Entre le 2 et le 9 avril, dans le sillage des annonces fracassantes de Donald Trump visant à durcir les droits de douane sur les importations américaines, pas moins de 12 000 milliards de dollars se sont évaporés des places financières américaines.
Mais à partir du 9 avril, les grands indices boursiers ont repris leur ascension, amorçant un net rebond. Ainsi, sur l’ensemble de l’année 2025, le S&P 500 affiche un recul limité de 3,1 %. En Europe, la tendance est nettement plus positive : le CAC 40 progresse de 4,5 %, tandis que le DAX 30 s’envole de 16 %. La Bourse italienne, incarnée par le FTSE MIB, grimpe quant à elle de 12 %.
En Asie, la situation est plus contrastée. L’indice chinois Shanghai Composite reste proche de l’équilibre (+0,5 %), tandis qu’en Inde, le Nifty 50 enregistre une hausse de 3 %.
Malgré ce rétablissement rapide, Pierre-Alexis Dumont, directeur des investissements chez Sycomore AM, prévient : « Le mois d’avril restera dans les annales de l’histoire boursière. Certes, l’incertitude fait partie intégrante de la vie des marchés financiers, mais la remise en cause simultanée de plusieurs piliers fondamentaux — la monnaie de réserve mondiale, le libre-échange, l’indépendance de la Réserve fédérale et le statut de valeur refuge des bons du Trésor américain — est sans précédent. »
Si les entreprises devront composer avec un nouvel ordre commercial mondial, les analystes conservent une certaine confiance. Aux États-Unis, les bénéfices des sociétés cotées devraient progresser en moyenne de 16 % en 2025 par rapport à 2024. En Europe, la croissance attendue des profits avoisine les 14 % pour l’année.

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Les tensions se matérialisent aussi sur les marchés obligataires
Les tensions restent vives sur le marché des obligations d’État américaines, un colosse financier pesant près de 29 000 milliards de dollars. Dans un climat marqué par la crainte d’une inflation durable, l’explosion de la dette publique et des politiques commerciales jugées erratiques, les rendements obligataires se sont fortement tendus ces dernières semaines.
Le taux des Treasuries à dix ans s’établit désormais à 4,33 %, contre 2,50 % pour son homologue allemand, le Bund. Ce différentiel traduit non seulement les inquiétudes liées à la trajectoire budgétaire des États-Unis, mais aussi l’anticipation d’un retour des tensions inflationnistes, ravivées par les récentes hausses tarifaires américaines.
Sur le segment des obligations d’entreprises, les primes de risque — ou spreads de crédit — s’élargissent, particulièrement pour les dettes les moins bien notées. Ce mouvement reflète la nervosité des investisseurs face à un environnement devenu plus incertain et potentiellement plus volatil.
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Coup de froid sur le baril de pétrole
Les prix du pétrole brut ont lourdement chuté, tombant à 60 dollars le baril. À l’origine de cette dégringolade : l’annonce par l’OPEP d’une nouvelle augmentation de la production attendue pour le mois de juin — la seconde en deux mois après celle de mai. Cette décision, représentant un surplus de 411 000 barils par jour, a profondément déséquilibré le marché.
Au sein même du cartel, des tensions couvaient déjà. L’Irak et le Kazakhstan ont récemment excédé leurs quotas de production, fragilisant davantage la cohésion du groupe. Cette nouvelle hausse semble donc être autant un signal politique qu’une réponse économique : une façon pour certains membres de l’OPEP d’affaiblir leurs partenaires les plus indisciplinés.
Mais cette décision est aussi interprétée comme une manœuvre diplomatique à l’égard de Washington, à la veille d’une visite de Donald Trump au Moyen-Orient. En avril, le baril américain a ainsi perdu 18,6 %, sa plus forte baisse mensuelle depuis novembre 2021.
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L’or, un anxiolytique financier
Face au climat d’incertitude, les investisseurs cherchent à sécuriser leurs avoirs.
Valeur refuge par excellence, l’or suscite donc un engouement croissant, tant auprès des investisseurs privés que de certaines banques centrales désireuses de réduire leur dépendance au dollar. L’once d’or atteint ainsi de nouveaux sommets, franchissant brièvement la barre des 3 500 dollars l’once établi le 22 avril dernier, soit une envolée de près de 40 % en l’espace d’un an.
Le manque de visibilité sur la scène internationale incite les investisseurs à la prudence vis-à-vis des actifs risqués, favorisant les « safe haven ». Par ailleurs, les incertitudes concernant l'indépendance de la Réserve Fédérale américaine exercent une pression à la baisse sur le dollar, rendant l'or plus attractif pour les investisseurs internationaux. Enfin, les banques centrales, en particulier celles des pays émergents, continuent d'accumuler de l'or dans le cadre d'une stratégie de diversification de leurs réserves et de réduction de leur dépendance au dollar.
Donald Trump anesthésie le commerce mondial
Ce premier trimestre a été marqué par un événement majeur : les 100 premiers jours du second mandat de Donald Trump à la Maison-Blanche. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ces débuts ont été pour le moins mouvementés. Pour financer de vastes baisses d’impôts sur le revenu, il a enclenché une véritable guerre commerciale avec les principaux partenaires des États-Unis.
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Une offensive tarifaire sans précédent
Trump avait donné rendez-vous aux Américains le 2 avril dernier pour célébrer ce qu’il a lui-même baptisé le « Jour de la Libération » (« Liberation Day »), marquée par l’instauration de nouveaux droits de douane massifs sur les importations. Objectif affiché : rééquilibrer la balance commerciale des États-Unis.
La mesure phare ? Un tarif universel de 10 % sur l’ensemble des produits importés aux États-Unis.
Dans le même temps, un système de surtaxes personnalisées a été instauré, ciblant plus durement les pays affichant les déficits commerciaux les plus importants vis-à-vis des États-Unis. Ces taxes varient entre 20 % et 49 %.
Pour l’heure, ces taux sont gelés — à l’exception notable de la Chine. Washington a en effet décidé de frapper un grand coup en imposant une surtaxe de 145 % sur tous les produits chinois entrant sur son territoire. En représailles, Pékin a riposté avec des droits atteignant désormais 125 % sur les biens américains.
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Négociations tous azimuts : l’art du deal version Trump
Fidèle à sa philosophie exposée dans son livre "The Art of the Deal", Donald Trump semble avoir misé sur une stratégie de confrontation, afin de négocier ensuite en position de force avec ses partenaires commerciaux.
Les dirigeants japonais espèrent trouver un accord avec l’administration américaine avant fin juin sur les droits de douane. La Chine, elle-même, se dit prête à négocier.
Une approche confirmée par Scott Bessent, actuel secrétaire au Trésor, qui a déclaré s’attendre à une « désescalade imminente » du conflit commercial avec la Chine. Des pourparlers sont en préparation, et Donald Trump a d’ores et déjà esquissé une ouverture, annonçant que : « Les droits de douane sur les produits chinois baisseront considérablement… mais ne seront pas ramenés à zéro ».
Les discussions se poursuivent également avec l’Europe, tandis que Washington vient de conclure un accord stratégique avec l’Ukraine portant sur les minerais critiques.
Pour les analystes d’Altitude Investment Manager « ceci implique que la mondialisation des échanges, qui a été le leitmotiv au cours des 80 dernières années, sera continuellement freinée. »
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Les anticipations de l’OMC
Malgré ces avancées, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) exprime une vive inquiétude face aux orientations protectionnistes de l’administration Trump. Ces mesures font craindre un net ralentissement des échanges internationaux et une fragmentation accrue de l’économie mondiale.
Selon les dernières estimations de l’OMC, le volume du commerce mondial de marchandises pourrait reculer de 0,2 % à 1,5 % en 2025, en fonction de l’ampleur des restrictions douanières effectivement mises en œuvre.
Le repli serait particulièrement marqué en Amérique du Nord, où les exportations pourraient s’effondrer de 12,6 %, tandis que les importations reculeraient de 9,6 %. À l’inverse, l’Asie devrait faire preuve de résilience, avec une croissance modérée mais positive de 1,6 % pour ses exportations comme pour ses importations. L’Europe, de son côté, enregistrerait une remontée timide, estimée à 1,0 % pour les exportations et 1,9 % pour les importations.
Face à ces turbulences, la directrice générale de l’OMC, Ngozi Okonjo-Iweala, a rappelé le rôle central des membres de l’organisation. « Les membres doivent plus que jamais se mobiliser pour redonner de l’élan à l’OMC et garantir des conditions de concurrence équitables à l’échelle mondiale », a-t-elle souligné.
États-Unis : la fin de l’exceptionnalisme américain ?
La théorie de l’exceptionnalisme américain repose sur la place hégémonique que doit occuper les Etats-Unis à travers le monde. Pour David Ross, gérant actions internationales chez La Financière de l'Échiquier (LFDE) cette position est largement mise à mal par la politique initiée par Donald Trump : « Depuis le « Libération Day », les marchés ont commencé à évaluer le risque d’une politique erratique. L’une des forces de l’économie américaine ces 30 dernières années a été sa stabilité, exempte de grands changements de politiques. Aujourd’hui, l’exceptionnalisme américain n’est plus. »
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L’emploi américain résiste … pour l’instant
Si certains signaux avancés vacillent, la résilience de l’économie américaine demeure. La confiance des consommateurs s’effrite, en témoigne le repli marqué de l’indice du Conference Board, qui a perdu 7,2 points en un mois pour s'établir à 92,9 — un recul plus fort qu’attendu, les analystes tablant sur 93,5.
Cependant, le marché du travail américain affiche une résilience notable. En avril, 177 000 emplois ont été créés dans le secteur non agricole, contre 185 000 en mars. Ce chiffre dépasse nettement les attentes des analystes, qui tablaient sur seulement 138 000 créations, soit un écart favorable de 42 000 postes.
Le taux de chômage, quant à lui, demeure stable à 4,2 %, signe d’une certaine solidité de l’économie malgré un environnement international tendu.
Cependant, quelques ombres viennent ternir ce tableau. La dynamique salariale ralentit, avec une hausse des rémunérations limitée à +0,2 % en avril. Surtout, les chiffres de l’emploi des mois précédents ont été révisés à la baisse : pas moins de 58 000 emplois ont été retranchés des données initialement publiées pour février et mars.
Autre signal préoccupant : le chômage de longue durée progresse. Désormais, 23,5 % des chômeurs sont sans emploi depuis plus de 27 semaines, un indicateur souvent associé à une détérioration sous-jacente du marché du travail.
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Stagflation : le scénario prend de l’ampleur
Le risque d’un scénario de stagflation — cette combinaison redoutée de stagnation économique et d’inflation persistante — semble désormais plus tangible aux États-Unis. Les craintes des investisseurs sont doubles : d’une part, celles liées à un net ralentissement de la croissance, voire à une récession ; d’autre part, celles relatives aux tensions inflationnistes provoquées par la récente flambée des droits de douane.
En tenant compte des hausses tarifaires annoncées par l’administration Trump, la croissance du PIB américain devrait plafonner à 1,8 % cette année, bien en deçà des 2,7 % anticipés en début d’année. Ce ralentissement marque une rupture brutale dans le cycle économique, et ce, dans un contexte de désordre commercial mondial.
Sur le front des prix, les données les plus récentes offrent un répit relatif. L’inflation sous-jacente (Core CPI), indicateur privilégié de la Réserve fédérale, a fléchi de 3,3 % en janvier à 3,1 % en février, pour atteindre 2,8 % en mars. Mais ces chiffres restent provisoires, car ils ne tiennent pas encore compte des effets potentiels — et difficilement quantifiables à ce stade — de la hausse des droits de douane sur les prix à la consommation. Une incertitude soulignée par Jerome Powell, président de la Fed, qui s’est montré préoccupé par les pressions inflationnistes à venir.
Le ressenti des ménages va dans le même sens. Selon l’enquête de l’Université du Michigan, les anticipations d’inflation à long terme atteignent désormais leur plus haut niveau depuis trois décennies, illustrant une perte de confiance dans la stabilité future des prix.
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L'inflexibilité de la FED
Pour mémoire, la Fed poursuit un double mandat : contenir l’inflation autour de sa cible de 2 %, tout en favorisant des conditions de plein emploi. Mais la conjoncture actuelle rend l’équation particulièrement délicate. Pour l’heure, le président de la Fed demeure donc inflexible sur une éventuelle baisse de taux, résistant aux pressions politiques et privilégiant une approche rigoureusement fondée sur les données économiques.
David Kohl, chef économiste de Julius Baer, ne cache pas son inquiétude : « Nous relevons à 50 % la probabilité d’une stagnation prolongée dans les mois à venir, réunissant les critères d’une récession. Le renforcement des droits de douane sur les importations américaines accroît les risques de ralentissement, mais il fait aussi grimper les anticipations d’inflation, alimentant un climat d’incertitude sans précédent. Contrairement aux récessions classiques, généralement déflationnistes, ce contexte pourrait déboucher sur une véritable stagflation, marquée par une croissance atone et des tensions inflationnistes persistantes. »
Zone euro : une économie qui résiste, malgré les vents contraires
Bien que le FMI ait revu à la baisse sa prévision de croissance pour la zone euro en 2025 — de 1 % à 0,8 % — les premiers signes conjoncturels de l’année laissent entrevoir une certaine résilience économique. Au premier trimestre, le PIB de la zone euro a progressé de 0,4 %, une performance légèrement supérieure aux anticipations.
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Un premier trimestre encourageant
Le dynamisme reste contrasté entre les pays. L’Espagne (+0,6 %) et l’Italie (+0,3 %) endossent le rôle de locomotives. En revanche, la France (+0,1 %) et l’Allemagne (+0,2 %) peinent à redémarrer pleinement.
Parmi les principaux indicateurs économiques publiés ces dernières semaines, on peut citer l’indice composite de l’activité globale publié par la Hambourg Commercial Bank (HCOB). Celui-ci s’est replié à 50,1 en avril, son plus bas niveau depuis quatre mois, après 50,9 en mars. Rappelons qu’un indice supérieur à 50 signale une expansion de l’activité, tandis qu’un chiffre inférieur suggère une contraction.
Si l’indice des services est passé en zone de repli (49,7), la surprise est venue du secteur manufacturier : son indice s’est redressé à 51,2, signe d’une reprise modeste mais réelle dans l’industrie.
Par ailleurs, le moral des investisseurs, mesuré par l’indice Sentix, s’est redressé plus vite que prévu. Après une chute brutale en avril à -19,5, consécutive à l’annonce de nouveaux droits de douane américains, il est remonté à -8,1 en mai, bien au-delà des attentes des analystes (-12,5).
Sur le front de l’emploi, le taux de chômage a été révisé à la hausse de 0,1 point en février, à 6,2 %. Toutefois, sur un an glissant, il recule de 0,3 point. En mars, 12,9 millions de personnes étaient sans emploi dans la zone euro, un chiffre en baisse.
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La BCE poursuit prudemment sa détente monétaire
Malgré les incertitudes croissantes liées aux tensions commerciales et géopolitiques, la Banque centrale européenne poursuit l’assouplissement de sa politique monétaire. Fin avril, elle a procédé à une septième baisse consécutive de ses taux depuis juin 2024, abaissant le taux de dépôt de 0,25 point, à 2,25 %.
Cette décision a été rendue possible par le reflux progressif de l’inflation : celle-ci s’est établie à 2,2 % en mars, un niveau légèrement supérieur à la cible officielle de la BCE, mais en ligne avec la trajectoire de désinflation amorcée depuis plusieurs mois.
Dans ce contexte, la politique monétaire de la BCE n’est désormais plus considérée comme « restrictive ». Elle aurait atteint une zone dite de « neutralité », c’est-à-dire un niveau — estimé entre 1,75 % et 2,25 % — qui ne stimule ni ne freine sensiblement l’activité économique.
La BCE reste toutefois sur ses gardes. Son orientation dépendra largement de l’évolution des données macroéconomiques et de l’environnement géopolitique.
Si les représailles tarifaires de l’Union européenne restent limitées, leur impact inflationniste devrait être marginal. La baisse durable des prix de l’énergie pourrait continuer d’exercer un effet désinflationniste, compensant partiellement les hausses de prix induites par les perturbations commerciales.
Enfin, un ralentissement plus marqué de l’activité économique renforcerait les pressions à la baisse sur les prix, laissant à la BCE une marge de manœuvre en cas de choc conjoncturel.
Christine Lagarde assume pleinement cette prudence stratégique : « La plupart des indicateurs de l’inflation sous-jacente suggèrent un retour durable de l’inflation vers notre objectif de 2 % à moyen terme. Toutefois, les perturbations croissantes du commerce mondial accentuent les incertitudes qui pèsent sur nos perspectives. Dans ce climat d’instabilité exceptionnelle, nous adopterons une approche guidée par les données, en évaluant à chaque réunion la posture appropriée. Aucun engagement ne sera pris par avance quant à la trajectoire des taux. »
Chine : un accord commercial possible avec les États-Unis ?
Alors que de nombreux économistes prévoyaient un ralentissement de la croissance chinoise à 4 %, contre une estimation de 4,6 % formulée en janvier, les dernières semaines ont révélé une vigueur économique inattendue. Au cours du premier trimestre, le produit intérieur brut a ainsi progressé de 5,4 %, surpassant les prévisions de 5,1 % et enregistrant une hausse de 1,2 point par rapport au trimestre précédent. Une performance d’autant plus remarquable que les relations commerciales avec les États-Unis n’ont cessé de se tendre ces derniers mois.
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Croissance : un souffle inattendu
Ce dynamisme trouve en partie son origine dans l’envolée des exportations, en hausse de 12 % sur un an — un chiffre trois fois supérieur aux anticipations des analystes. Les consommateurs américains, anticipant une augmentation des droits de douane, ont intensifié leurs achats de produits chinois, qui affichent une croissance de 9 %.
Malgré les incertitudes liées à la guerre commerciale, les autorités chinoises se veulent rassurantes. Elles affirment disposer d’un éventail d’outils politiques et d’une marge de manœuvre suffisante pour soutenir l’activité économique.
Depuis le début de l’année, Pékin a ainsi déployé plusieurs mesures destinées à stimuler la demande intérieure. L’une des plus concrètes consiste en l’allocation de 300 milliards de yuans supplémentaires afin de subventionner l’achat de véhicules, de smartphones et d’électroménagers.
Cette semaine, la Chine a annoncé une nouvelle série de mesures destinées à soutenir son économie. La Banque centrale chinoise a ainsi abaissé le taux de réserve obligatoire de 0,5 %, libérant des liquidités pour encourager les prêts. Dans le même élan, le taux appliqué aux premiers achats immobiliers, pour les crédits d’une durée supérieure à cinq ans, a été réduit de 2,85 % à 2,6 %. Par ailleurs, Pékin prévoit d’alléger encore les exigences de réserve imposées aux banques et d’injecter des capitaux dans des secteurs jugés stratégiques, tels que l’industrie, l’innovation technologique et les services.
Mais une ombre significative vient ternir ce tableau : l’indice PMI manufacturier est tombé à 49,0, signalant une contraction de l’activité industrielle — un seuil critique, sous la barre symbolique des 50, et son niveau le plus bas depuis deux ans.
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Guerre commerciale : le paroxysme des tensions
Les relations commerciales sino-américaines atteignent aujourd’hui un point de rupture. Selon l’Organisation mondiale du commerce, les échanges de marchandises entre les deux puissances pourraient chuter de 80 %.
Washington a imposé de nouveaux droits de douane atteignant un taux prohibitif de 145 % sur les importations chinoises. Pékin a riposté par des surtaxes allant jusqu’à 125 %. Toutefois, les smartphones et les ordinateurs sont exclus de ces nouvelles taxes américaines. Une taxation excessive aurait, en effet, fait grimper le prix moyen d'un IPhone de 1 200 à près de 2 300 dollars.
Il est à noter que les exportations chinoises vers les États-Unis ne représentent que 2 % du PIB de la Chine. En revanche, une part importante de ces biens — terres rares, métaux industriels, panneaux solaires, composants électroniques — demeure difficilement substituable à court terme pour les États-Unis. La Chine pourrait, en parallèle, intensifier ses échanges avec les pays de la région, réorientant ainsi une partie de son commerce.
Dans une manœuvre de représailles, Pékin a suspendu les livraisons de sept terres rares stratégiques. Or, la Chine concentre 70 % de la production mondiale de ces ressources essentielles et fournit près des trois quarts des importations américaines dans ce secteur, ce qui lui confère un levier d’influence considérable.
Néanmoins, les autorités chinoises ont récemment tenté de désamorcer les tensions, déclarant leur volonté d’ouvrir un dialogue avec l’administration américaine afin de parvenir à un accord mutuellement satisfaisant.
Les convictions de Scala Patrimoine sur les marchés financiers
Les cent premiers jours de Donald Trump à la Maison-Blanche, dans le cadre de son second mandat à la présidence des États-Unis, n'ont pas été de tout repos. Les marchés actions ont connu d'importants épisodes de volatilité, des mouvements qui n’ont pas épargné les marchés obligataires.
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Les marchés actions : la nouvelle politique américaine électrise les marchés
Le mois de mai 2025 s'ouvre dans un climat boursier marqué par une forte instabilité, principalement provoquée par les incertitudes entourant les annonces tarifaires américaines. Les secousses successives sur les marchés actions ont mis en lumière la nervosité ambiante des investisseurs face à l’évolution du contexte géopolitique et économique.
- Une multitude de facteurs d’incertitude pèse sur les marchés
Le rebond observé après le 8 avril a permis d’effacer en grande partie les pertes enregistrées en début de mois, ramenant les principaux indices à des niveaux proches de ceux d’avant les annonces tarifaires. Cette reprise a été favorisée par la suspension partielle de certaines mesures douanières, ainsi que par les déclarations apaisantes de Donald Trump évoquant une possible relance des négociations commerciales avec la Chine.
Cependant, cette embellie reste fragile, plusieurs zones d’ombre continuant de hanter les marchés.
D’une part, le ralentissement économique aux États-Unis. Si la croissance américaine montre des signes d’essoufflement, une décélération plus marquée que prévu pourrait susciter une correction brutale des marchés.
D’autre part, les perspectives des entreprises. Bien que les résultats du premier trimestre aient été globalement satisfaisants — avec une croissance à deux chiffres des bénéfices, tant outre-Atlantique qu’en Europe — les anticipations pour les trimestres à venir demeurent incertaines. De nombreuses entreprises préfèrent suspendre leurs prévisions, faute de visibilité sur l’évolution du contexte macroéconomique.
Enfin, l’impact des mesures tarifaires. Les sociétés les plus tournées vers l’international, en particulier dans les secteurs de l’aéronautique, de l’automobile et du luxe, sont particulièrement exposées. Les groupes européens ne sont pas en reste, eux aussi fragilisés par les tensions commerciales. À ce stade, l’impact réel sur les résultats annuels de 2025 demeure difficile à quantifier.
- Quelle stratégie adopter face à l’incertitude ?
Dans un tel environnement, la prudence reste de mise. Nous recommandons d’adopter une position neutre sur les marchés actions, évitant toute prise de risque excessive à l’heure où la visibilité est réduite et où la menace d’une nouvelle correction plane toujours.
Une diversification judicieuse des allocations s’impose, tant sur le plan géographique que sectoriel, afin de limiter les biais et d’absorber les chocs potentiels. Il conviendrait notamment de rééquilibrer les portefeuilles entre la zone euro et les États-Unis, tout en explorant avec discernement les opportunités offertes par certains marchés émergents — à l’instar de l’Inde, dont les valorisations apparaissent aujourd’hui plus attrayantes qu’il y a six mois.
Concernant la Chine, les marchés semblent anticiper une réduction prochaine des droits de douane actuellement en vigueur, ce qui pourrait être bénéfique aux deux économies. Toutefois, le risque que ces droits demeurent durablement plus élevés que par le passé ne peut être écarté. Couplé à la contraction attendue du commerce mondial et à la dépendance structurelle de la Chine à la demande extérieure, ce contexte appelle à une grande prudence dans toute exposition à ce marché.
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Les marchés obligataires : un attrait pour les titres européens
Les marchés obligataires n’ont pas échappé aux remous qui ont agité l’ensemble des actifs financiers. Aux États-Unis, le taux souverain à dix ans a enregistré de fortes variations, oscillant entre 4 % et 4,5 %, avant de se replier vers 4,15 %. Ce mouvement erratique traduit l’inquiétude persistante des investisseurs face à une politique monétaire encore incertaine et à un environnement géopolitique instable.
En Europe, en revanche, les obligations ont retrouvé leur statut de valeurs refuges. Et ce, en dépit des récentes annonces de plans de relance budgétaire. Le mois d’avril a vu la courbe des taux s’infléchir durablement, portée par une demande accrue pour les dettes souveraines perçues comme plus sûres.
- Des opportunités sur le marché obligataire européen
L’inflation sur le Vieux Continent semble désormais contenue, ce qui réduit le risque d’une résurgence brutale des tensions inflationnistes. Dans ce contexte, la Banque centrale européenne pourrait poursuivre l’assouplissement de sa politique monétaire. Le taux de dépôt, actuellement fixé à 2,25 %, pourrait prochainement passer sous la barre symbolique des 2 %, offrant ainsi un soutien non négligeable aux obligations européennes.
La relative stabilité des anticipations d’inflation, la solidité de l’euro, ainsi que la lisibilité accrue de la trajectoire monétaire européenne, sont autant de facteurs qui devraient limiter la volatilité sur les marchés obligataires du continent.
- Quelle stratégie adopter dans ce contexte ?
Nous maintenons une vision constructive sur les obligations européennes. La maîtrise de l’inflation et le biais accommodant de la BCE créent un environnement favorable aux stratégies de portage, même si les rendements se révèlent désormais moins généreux qu’en 2024.
Dans cette optique, nous privilégions clairement les obligations souveraines européennes par rapport aux Treasuries américains. Ces derniers souffrent d’une trajectoire monétaire plus incertaine et exposent les investisseurs à un risque de change non négligeable.
Sur le segment du crédit, notre préférence va au crédit investment grade européen, dont la solidité et la résilience constituent des atouts majeurs. Les spreads y apparaissent plus stables à court terme que ceux observés outre-Atlantique, rendant le portage toujours pertinent, en particulier sur des maturités intermédiaires et des émetteurs de qualité.
Les obligations financières subordonnées, bien qu’affectées récemment par une montée du sentiment « risk-off », continuent d’offrir un couple rendement/risque attractif. L’élargissement des spreads s’inscrit dans le sillage du repli des actions bancaires, mais les fondamentaux du secteur demeurent sains, portés par une régulation renforcée.
Enfin, nous restons sélectifs sur le segment high yield, que nous ne conservons que sur des maturités courtes et pour les signatures les mieux notées. Ce choix n’est justifié que si l’écart de rendement avec le crédit investment grade compense adéquatement le risque supplémentaire assumé.
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Les marchés alternatifs : une gestion adaptée aux mouvements boursiers
Dans le cadre de notre approche de gestion prudente et diversifiée, nous continuons de privilégier les stratégies alternatives long/short actions, particulièrement bien adaptées aux environnements marqués par la volatilité, l’incertitude et une forte dispersion des performances.
Les marchés actuels, soumis à des rotations sectorielles rapides et à des réactions parfois vives aux annonces politiques, économiques ou monétaires, constituent un terrain fertile pour ces approches souples et opportunistes.
Les stratégies long/short se distinguent par leur capacité à capitaliser sur les inefficiences du marché : elles permettent aux gérants de prendre des positions longues sur des titres jugés sous-évalués, tout en se positionnant à la baisse sur ceux estimés surévalués. Cette double exposition confère à ces stratégies une résilience précieuse, en offrant à la fois un potentiel de performance dans des contextes porteurs, et une protection contre les phases de correction.
Dans un environnement aussi complexe que celui que nous connaissons actuellement, cette flexibilité devient un atout stratégique. Les stratégies long/short actions permettent en effet une décorrélation bienvenue vis-à-vis des indices traditionnels, ce qui en fait un complément pertinent dans une allocation d’actifs soucieuse de réduire la volatilité globale du portefeuille tout en conservant des moteurs de performance.
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Les Produits structurés : un placement sur-mesure
Nous conservons une vue favorable sur les produits structurés, qui offrent une exposition maîtrisée aux marchés financiers, tout en permettant de moduler à la fois le niveau de risque et le rendement cible selon les objectifs de l’investisseur.
Les périodes marquées par une volatilité accrue, comme celle que nous traversons actuellement, ouvrent des fenêtres d’opportunité particulièrement attractives pour ce type d’instruments. Ils peuvent être conçus pour tirer parti de la nervosité des marchés, tout en intégrant des mécanismes de protection partielle du capital ou des barres de rendement conditionnel.
En plus de leur vocation offensive, les produits structurés peuvent également jouer un rôle défensif, en agissant comme outil de couverture. Par exemple, ils permettent de réduire l’exposition directe aux actions tout en conservant un potentiel de performance lié à cette classe d’actifs.
La correction récente de certains secteurs de l’économie américaine — notamment ceux qui avaient jusqu’ici affiché des valorisations tendues — constitue par ailleurs une opportunité d’entrée intéressante pour structurer des produits adossés à ces segments dépréciés.
En définitive, les produits structurés s’affirment comme une alternative de choix pour les investisseurs souhaitant maintenir une exposition aux marchés actions tout en amortissant leur volatilité intrinsèque. Leur souplesse de construction en fait une solution stratégique pour diversifier et optimiser un portefeuille dans l’environnement incertain qui prévaut actuellement.
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Les Actifs non cotés (Private Assets) : une vision de long terme
L’intérêt des investisseurs institutionnels pour les actifs non cotés continue de croître, malgré un contexte économique marqué par des incertitudes. Cette dynamique, soutenue par la baisse progressive des taux d’intérêt en 2024, oriente également les flux vers des fonds plus accessibles au grand public. Bien que le marché montre des signes d’attentisme, notamment en raison des incertitudes politiques et économiques, nous restons confiants quant au potentiel du private equity.
Les stratégies secondaires demeurent particulièrement attrayantes en raison de leurs opportunités de valorisation prometteuses. Par ailleurs, les fonds de co-investissement restent au cœur de nos priorités, combinant optimisation des rendements et maîtrise des coûts.
Les stratégies de dette privée, telles que la dette mezzanine et le growth buyout, gagnent en popularité pour accompagner les entreprises en phase de croissance. De plus, le capital-risque, en particulier dans les secteurs technologiques et liés à la transition énergétique, connaît un regain d’intérêt, offrant des perspectives captivantes pour les startups innovantes.
- L’allocation conseillée
Pour exploiter pleinement le potentiel des investissements non cotés tout en limitant les risques, nous recommandons une stratégie diversifiée et de long terme. Cette approche inclut :
- Des stratégies secondaires pour leur stabilité et leurs rendements robustes.
- Une exposition au capital-risque, visant des opportunités à haut rendement dans des secteurs innovants.
- Des investissements dans le LBO (Leveraged Buyout) pour tirer parti de l’effet de levier.
- Le growth equity, qui permet de bénéficier de la croissance d’entreprises matures et prometteuses.
- La dette mezzanine, grâce à ses taux attractifs, comme un outil clé de diversification.
Face aux évolutions constantes de l’environnement économique, cette allocation vise à combiner performance et gestion proactive des risques. Nous restons attentifs à l’évolution du marché, tout en capitalisant sur les opportunités qu’il offre, en particulier dans des secteurs stratégiques comme la santé et la transition énergétique.

Rosk, le « LinkedIn de la restauration »
Florent Malbranche et Jean Lebrument, les cofondateurs de Brigad, entament un nouveau chapitre entrepreneurial avec le lancement de Rosk, une start-up née d’une ambition claire : répondre à la pénurie de main-d’œuvre dans le secteur de la restauration.
Deux experts au service d’un secteur en mutation
Acteurs aguerris de l’écosystème hôtellerie-restauration, Malbranche et Lebrument n’en sont pas à leur coup d’essai. Il y a une dizaine d’années, ils fondaient Brigad, une plateforme facilitant la mise en relation entre travailleurs indépendants et établissements, aussi bien dans la restauration que dans le médico-social.
Aujourd’hui, avec Rosk, ils visent l'optimisation du recrutement des professionnels de la restauration grâce à une application mobile intuitive, conçue comme un levier d’accès à l’emploi et à l’évolution professionnelle.
Dans un premier temps, la plateforme proposera donc des missions d’intérim en Île-de-France avant d’élargir son offre aux contrats à durée indéterminée. Un choix stratégique, tant l’intérim constitue une porte d’entrée idéale pour tester les compétences et faire face aux variations saisonnières de l’activité.
La demande est bien présente. « Il y a 200 000 postes à pourvoir dans la restauration et plus d’un million en Europe. Avec Rosk, nous voulons lancer une nouvelle expérience de l’emploi dans la restauration », souligne ainsi l'un des associés, Florent Malbranche.

La restauration collective en ligne de mire
Rosk fait le pari de commencer par la restauration collective – un secteur souvent négligé mais regorgeant d’opportunités : cantines scolaires, entreprises, EHPAD, hôpitaux… La start-up cible en priorité les métiers les plus qualifiés, tels que chef, sous-chef, chef pâtissier ou chef de partie, encore peu couverts par les plateformes traditionnelles.
Mais l’ambition de Rosk dépasse le simple recrutement. L’application se veut un véritable écosystème, proposant également de la formation continue, un accompagnement communautaire, et à terme, des outils de gestion RH comme le suivi des plannings.
« Trop de professionnels talentueux quittent le secteur faute de perspectives ou de reconnaissance. Rosk, c’est notre réponse à une urgence : redonner envie de rester et de grandir dans ces métiers », affirme Florent Malbranche.
Un constat qui reflète une réalité bien connue : le secteur souffre d’un déficit chronique de personnel et d’un turn-over particulièrement élevé. En facilitant l'accès à l'emploi et en valorisant les carrières, Rosk espère attirer — et surtout retenir — les talents qui désertent souvent la profession, rebutés par la pénibilité des horaires et l'absence de perspectives à long terme.
Un spin-off de Brigad
Pour concrétiser cette ambition, Rosk s’appuie sur un modèle économique basé sur les commissions perçues sur chaque contrat signé via sa plateforme. La jeune pousse est un spin-off issu de la société Brigad. Elle vient d'ailleurs de réaliser une levée de fonds visant à soutenir le développement technologique de la solution, renforcer sa présence en France et, à terme, explorer des marchés internationaux.
Composée aujourd’hui d’une dizaine de collaborateurs, la start-up prévoit de renforcer ses effectifs en recrutant des profils clés pour accompagner sa croissance. Déjà, plus de 1 000 professionnels et 200 établissements ont pris part aux premières phases de test en Île-de-France.
Reste à voir si l’appétit des investisseurs sera comblé… mais une chose est sûre : la table est mise pour une belle réussite. Bonne dégustation.
Paris Match : expatriation et placements financiers, les conseils de Guillaume Lucchini
Changer de pays, c’est embrasser une aventure exaltante… mais ce choix peut profondément bouleverser la gestion de votre patrimoine. Certains produits d’investissement français, par exemple, ne sont pas reconnus à l’étranger. Tandis que les règles fiscales locales peuvent remettre en question votre stratégie financière. Interrogé par les journalistes Léo Monégier et Silvia Simao, Guillaume Lucchini, associé fondateur du cabinet Scala Patrimoine, décrypte les enjeux liés à l'expatriation et livre ses recommandations dans une interview exclusive pour Paris Match.
Expatriation : une analyse au cas par cas s’impose
Tous les expatriés ne partagent pas les mêmes réalités ni les mêmes contraintes, qu’elles soient d’ordre fiscal ou financier. Chaque situation mérite donc une étude personnalisée. « Avant tout départ, il est essentiel d’examiner en détail ses placements afin d’en vérifier la compatibilité avec ses projets de vie. Par exemple, l’ouverture d’un PEA (Plan d’Épargne en Actions) est interdite depuis l’étranger. Toutefois, si ce plan a été ouvert avant le départ de France, il peut être conservé. A la condition cependant de ne pas résider dans un État ou territoire non coopératif sur le plan fiscal », avertit Guillaume Lucchini.
Autre point crucial : la gestion de la résidence principale lors d’un départ à l’étranger. Fiscalement, un bien immobilier perd son statut de résidence principale dès lors que son occupant passe moins de 185 jours par an en France. A fortiori s’il est mis en location. « Cependant, la législation accorde une certaine latitude aux expatriés en leur permettant de vendre ce bien dans un délai d’un an après leur départ, tout en bénéficiant d’une exonération sur les plus-values immobilières », précise le fondateur de Scala Patrimoine.
Le rôle stratégique de l’assurance-vie luxembourgeoise
Si l’assurance-vie reste un pilier de l’épargne en France, son régime fiscal particulier peut entrer en conflit avec celui du pays d’accueil. Une solution existe cependant : l’assurance-vie luxembourgeoise. Elle est plus souple et s’adapte mieux aux contraintes fiscales locales.
« Ce type de contrat, généralement accessible à partir de 250 000 euros, permet d’investir dans la devise de son choix », explique Guillaume Lucchini. Il précise : « Il peut s’agir de l’euro ou d’une autre monnaie. » Il met toutefois en garde : « Chaque pays appliquant ses propres règles, il est essentiel de rester vigilant. » Par exemple, en Espagne, si aucune garantie décès complémentaire n’a été souscrite, le contrat peut être assimilé à un simple compte-titres. Dans ce cas, il perd ses avantages fiscaux.
L’immobilier, un placement toujours prisé dans le cadre d'une expatriation
L’investissement immobilier reste une valeur refuge, même pour les expatriés. Un expatrié bénéficie généralement de revenus confortables. « Cela lui permet d’avoir une capacité d’épargne solide. Pour optimiser ses placements, il peut utiliser l’effet de levier du crédit. En France, les taux fixes sont encore largement disponibles. Contrairement à d’autres pays, ces taux sont attractifs pour ceux ayant une forte capacité d’emprunt. » conclut Guillaume Lucchini.
Le multi-family office, un modèle d’avenir selon Scala Patrimoine
Le 1er avril, L’Agefi a réuni près de mille participants lors du Salon des carrières dans la finance, Talent for Finance. Étudiants, jeunes actifs et professionnels s’y sont retrouvés pour échanger autour des métiers de la finance. Guillaume Lucchini, fondateur du multi-family office Scala Patrimoine, faisait partie des intervenants. Il y a partagé sa vision de l’évolution des métiers du conseil en gestion de patrimoine.
Multi-family office : les enjeux d’un métier d’exigence
Interrogé par Ludivine Garnaud, rédactrice en chef des événements du groupe Agefi, Guillaume Lucchini a donné sa définition du multi-family office.
« C’est un cabinet de conseil qui accompagne les familles dans la gestion, l’organisation et la transmission de leur patrimoine. » Selon lui, une condition est indispensable pour exercer ce métier : « Proposer un accompagnement totalement indépendant, sans conflit d’intérêts, reposant sur une rémunération exclusivement fondée sur les honoraires. »
Hélas, constate-t-il, le mot “conseil” est souvent galvaudé. Ce métier, historiquement lié aux établissements bancaires, s’est longtemps limité à la distribution de produits financiers. Dans ce cadre, la rémunération provenait essentiellement de la vente. « Issu du monde du droit, j’ai toujours été convaincu que le conseil devait incarner l’indépendance, l’absence de conflits d’intérêts et une réelle valeur ajoutée », confie-t-il.
La demande pour un accompagnement sincère, structurant et transparent ne cesse d’augmenter. Ce besoin est particulièrement fort chez les chefs d’entreprise.
« J’ai fondé Scala Patrimoine en m’inspirant du modèle des avocats. Le conseil ne doit pas être biaisé par des enjeux commerciaux liés à la vente de produits financiers. Grâce à une rémunération transparente et fondée sur les honoraires, nos clients nous paient directement. Nous ne sommes donc redevables ni à un assureur, ni à une société de gestion. »
Le rôle du family officer repose aussi sur une collaboration étroite avec des experts extérieurs. Il travaille avec des professionnels du chiffre et du droit : experts-comptables, notaires ou avocats. Cette synergie crée une véritable valeur ajoutée pour les clients.
Les métiers du patrimoine : un avenir prometteur
À l’image des professions juridiques, les métiers liés à la gestion de patrimoine embrassent toutes les dimensions de la vie de leurs clients — bien au-delà des seules questions financières auxquelles on les a trop souvent cantonnés. « On oublie que le cœur de notre métier est avant tout de protéger nos clients, de les sécuriser face aux aléas de l’existence : perte d’emploi, incapacité, décès… »
Pour Guillaume Lucchini, la gestion de patrimoine se rapproche du droit par sa dimension réflexive et structurante : « Les objectifs de nos clients, leurs envies, leurs projets évoluent avec le temps. Il faut être en mesure d’accompagner cette temporalité. »
Un virage technologique
L’avenir de la profession, selon lui, s’annonce sous les meilleurs auspices. Dans un cadre juridique et fiscal en constante évolution, les opportunités sont nombreuses. Toutefois, le métier devra se repenser à l’aune des révolutions technologiques en cours. « L’émergence du digital et de l’intelligence artificielle nous invite à réinventer notre rôle. Les clients n’auront plus besoin d’un professionnel pour souscrire un fonds indiciel. En revanche, ils auront plus que jamais besoin d’un accompagnement humain, structuré, indépendant. »
Le fondateur de Scala Patrimoine est convaincu que le métier tendra vers un modèle davantage inspiré du multi-family office : un accompagnement global, centré sur l’organisation, la structuration et la transmission.
La notion d’indépendance et de transparence sera donc cruciale. « De plus en plus de jeunes font le pari d’un métier d’accompagnement, rémunéré directement par le client, et porteur de valeur ajoutée juridique et fiscale. C’est ainsi qu’émergera une nouvelle génération de professionnels formés avec exigence, prêts à exercer la profession qu’ils désirent : bien loin du rôle de simples vendeurs de produits », conclut-il.
Impôts 2025 : calendrier de la déclaration, barème, taux individualisé… Ce qui change
Le service en ligne de déclaration des revenus est officiellement ouvert depuis le 10 avril 2025. Comme chaque année, les contribuables sont invités à s’acquitter de leur devoir fiscal en respectant un calendrier précis.
Les dates de déclaration
Le portail de déclaration en ligne, accessible via le site impots.gouv.fr, est ouvert depuis le 10 avril. Selon leur département de résidence, les contribuables disposent d’un délai s’étendant jusqu’au 5 juin 2025 pour remplir leur déclaration de revenus de 2024. Ce calendrier s’applique également à l’Impôt sur la fortune immobilière (IFI), dont les échéances demeurent identiques.
Les usagers optant pour une déclaration papier devront, quant à eux, veiller à l’envoyer avant le 20 mai 2025.
Sauf cas particuliers, l’avis d’imposition sera adressé aux contribuables entre le 25 juillet et le 1er août 2025.

Impôts sur le revenu : un barème réajusté
Conformément aux dispositions du budget 2025, les tranches du barème de l’impôt sur le revenu ont été revalorisées de 1,8 %. Et ce afin de compenser l’effet de l’inflation sur les foyers. D’après le ministère de l’Économie et des Finances, près de 619 000 foyers fiscaux sortiront ainsi du champ de l’imposition sur le revenu.

Les contribuables peuvent dès à présent utiliser le simulateur officiel de calcul de l’impôt 2025, basé sur les revenus perçus en 2024. Cet outil leur permettra d’obtenir une estimation du montant à régler ainsi que de leur revenu fiscal de référence. Ce simulateur tient compte des nouvelles tranches d’imposition.
Vérification et correction de la déclaration d'impôts
Qu’elle soit effectuée en ligne ou sur papier, la déclaration de revenus est préremplie des informations connues de l’administration fiscale. Il appartient toutefois au contribuable de vérifier leur exactitude — notamment en ce qui concerne la situation familiale, l’adresse ou les montants indiqués — et, le cas échéant, de corriger ou compléter les données (revenus supplémentaires, charges déductibles, réductions ou crédits d’impôt).
Par ailleurs, ceux ayant télédéclaré dans les délais bénéficieront d’un droit à rectification : le service dit de « télécorrection » sera accessible du 30 juillet au 3 décembre 2025 inclus, permettant ainsi de modifier la déclaration après réception de l’avis d’imposition.
L’an dernier, l’administration fiscale a détecté 16 milliards d’euros de fraudes, dont 11 milliards ont pu être recouvrés.
Taux individualisé : une évolution majeure
Parmi les nouveautés notables figure la généralisation du taux individualisé pour les couples mariés ou pacsés, soumis à l’imposition commune. Dès septembre 2025, ce taux s’appliquera par défaut, sur la base des données issues de la déclaration effectuée ce printemps.
Lors d’une conférence de presse, Amélie de Montchalin, ministre chargée des Comptes publics, a souligné l’enjeu de cette réforme : « C’est le fruit d’une volonté de corriger les inégalités concrètes dans la vie des Français. Cette mesure permet une répartition plus équitable de l’impôt au sein des foyers fiscaux, en tenant compte des écarts de revenus entre conjoints, sans altérer le montant global dû par le couple. »
Jusqu’alors, le taux par défaut imposait une répartition à parts égales. Ce système pénalisait souvent le conjoint aux revenus les plus modestes. Désormais, chaque membre du couple se verra appliquer un taux de prélèvement ajusté à ses revenus personnels.
Toutefois, ceux souhaitant conserver le taux unique de foyer pourront en faire la demande lors de leur déclaration. La ministre a confirmé cette possibilité : « Ceux qui veulent continuer à utiliser un taux unique pourront évidemment le faire. Mais la norme devient le taux individualisé. Cela concerne environ 10 millions de foyers, soit 20 millions de personnes. »
L’essor de l’application mobile
La déclaration via mobile connaît un engouement croissant. En 2024, près de 500 000 Français ont déclaré leurs revenus exclusivement via tablette ou smartphone. Face à ce succès, l’administration a renforcé les fonctionnalités de l’application mobile.
Comme l’a annoncé Amélie de Montchalin, « il est désormais possible d’y changer son adresse ou de modifier une déclaration déjà signée, que ce soit via le site internet ou l’application. »
Le rendez-vous des marchés financiers - Avril 2025
Marchés financiers & économie : les points clés
- Les marchés financiers décrochent violemment. La hausse des droits de douane inquiètent les investisseurs.
- Le 2 avril dernier, Donald Trump a mis ses menaces à exécution en imposant une augmentation des droits de douane sur les produits en provenance de ses principaux partenaires commerciaux. Les taux personnalisés sont toutefois gelés, à l'exception de celui applicable à la Chine.
- L'Allemagne déploie un plan de relance d'envergure, consacrant 500 milliards d'euros à la modernisation de ses infrastructures et au renforcement de son secteur de la défense.
- La Réserve fédérale d'Atlanta a, une nouvelle fois, révisé à la baisse ses prévisions de croissance du PIB américain pour le premier trimestre 2025, désormais estimé à -3,7 %.
- Les signes annonciateurs d’une récession se précisent : les pressions inflationnistes persistent, la Fed dispose de marges de manœuvre limitées, la hausse des droits de douane fragilise les chaînes logistiques et pèse sur la consommation, tandis que les entreprises devront inévitablement répercuter ces coûts sur leurs prix.
Quelles performances sur les marchés financiers ?
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La peur gagne les marchés financiers US
Une grande nervosité plane de nouveau sur les marchés financiers. Le VIX, indice mesurant la volatilité et communément surnommé "indice de la peur", a bondi de près de 30 points en quelques jours, atteignant un pic de 57,30 %.
Les investisseurs s'inquiètent des décisions politiques de Donald Trump, notamment à travers les projets de hausses drastiques des droits de douane. Ces dernières semaines, les grands indices boursiers se sont écroulés. Depuis le 1er janvier, le Nasdaq a chuté de 20 %, tandis que le S&P 500 a reculé de 15 %. Le Dow Jones accuse, quant à lui, une baisse de 12 %.
Pour Philippe Ferreira, Deputy Head of Economics & Cross-Asset Strategy chez Kepler Cheuvreux Solutions : « Le risque majeur pour les marchés est que la stratégie de la nouvelle administration américaine paraisse si chaotique qu’elle engendre une incertitude généralisée, susceptible de provoquer une récession et une défiance à l’égard des actifs américains dans leur ensemble. On l’oublie souvent, mais la crédibilité demeure le principal atout immatériel d’un débiteur. »
Pour l’instant, les entreprises américaines résistent bien. La saison des résultats du quatrième trimestre 2024 s’est révélée solide, avec une progression de 13 % du bénéfice par action ordinaire (BPA) du S&P 500. Pour 2025, les prévisions tablent encore sur une croissance à deux chiffres du BPA, en dépit des incertitudes ambiantes.
Les marchés asiatiques ne sont pas en reste. La Bourse de Tokyo subit une pression importante, avec un Nikkei 225 en recul de 21 % depuis le début d’année. L’Inde résiste mieux, le Nifty 50 enregistrant une baisse de 6,7 %.
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Séances de capitulation sur les marchés financiers européens
L'Europe subit également de plein fouet la nouvelle politique commerciale américaine. Le STOXX Europe 600 cède tout de même 7,2 % Le CAC 40 a perdu 6 % entre le 1er janvier et le 8 avril, tandis que le DAX 30 allemand abandonne, quant à lui, près de 1,5 %. La Bourse italienne, le FTSE MIB, perd 3,7 %.
Les européennes bénéficient pourtant des plans de relance mis en place par l'Union européenne et l'Allemagne, visant à renforcer le secteur européen de la défense. Les entreprises de cette industrie connaissent d’ailleurs une ascension fulgurante, avec une hausse moyenne de 28 % depuis le début de l’année !
En Chine, l’indice Shanghai Composite enregistre une baisse de 5 %, témoignant d’une approche prudente des investisseurs sur les marchés financiers chinois.
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Un nouveau record pour l’Or
Face au climat d’incertitude, exacerbé notamment par le début de mandat de Donald Trump, les investisseurs cherchent à sécuriser leurs avoirs.
Valeur refuge par excellence, l’or suscite donc un engouement croissant, tant auprès des investisseurs privés que de certaines banques centrales désireuses de réduire leur dépendance au dollar. L’once d’or atteint ainsi de nouveaux sommets, s’échangeant désormais autour de 3 160 dollars, soit une envolée de près de 40 % en l’espace d’un an.
Le cours du Baril de Brent fléchissait de 14 % à 64,24 dollars, suite à l'onde de choc provoquée par l'annonce de droits de douane instaurés par les États-Unis plus élevés qu'attendu
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Les taux européens s’envolent
L'Allemagne a mis en œuvre un plan de relance d'envergure, principalement orienté vers le renforcement de ses capacités militaires. Cette initiative a provoqué un véritable séisme sur les marchés obligataires, le pays étant traditionnellement reconnu pour sa gestion rigoureuse des finances publiques.
Dans son sillage, les coûts d’emprunt des États européens ont connu une envolée spectaculaire. En Allemagne, le rendement de l’emprunt d’État à 10 ans a bondi de près de 70 points de base depuis le 2 décembre 2024, passant de 2 % à 2,5 %. La même dynamique s’observe en France, où l’Obligation Assimilable du Trésor (OAT) à 10 ans progresse de 2,9 % à 3,3 % sur la même période.
Cette flambée des taux d’intérêt soulève naturellement des inquiétudes quant à la soutenabilité des finances publiques à moyen terme, notamment en France, où l’équilibre budgétaire demeure un enjeu majeur.
De l’autre côté de l’atlantique, aux États-Unis, les rendements des obligations du Trésor sont restés stables. L’obligation américaine à 10 ans est payée 3,95 %.

Le spectre d’une récession plane au-dessus des États-Unis
La décision de Donald Trump d’augmenter drastiquement les droits de douane ravive les craintes d’une guerre commerciale avec les principaux partenaires des États-Unis. Une situation qui suscite l’inquiétude de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Face à ces tensions, l’organisation intergouvernementale a revu à la baisse ses prévisions de croissance pour les États-Unis. Malgré ce ralentissement, le produit intérieur brut américain devrait tout de même progresser de 2,2 % cette année et de 1,6 % en 2026.
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Le "Liberation Day"
Donald Trump avait donné rendez-vous aux Américains le 2 avril dernier pour célébrer ce qu'il a appelé le "Jour de la Libération" ("Liberation Day"), marqué par l'instauration de nouveaux droits de douane sur les importations. Une stratégie visant à rééquilibrer la balance commerciale du pays tout en finançant les nombreuses réductions d'impôts promises lors de sa campagne électorale.
Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il a tenu parole. Aucun analyste n’anticipait des droits de douane "réciproques" d'une telle ampleur. Sa mesure phare consiste en l’application d’un tarif universel de 10 % sur tous les produits importés aux États-Unis, sans exception, et ce, dès le 5 avril.
En parallèle, un système de surtaxes personnalisées a été mis en place pour frapper plus durement les pays enregistrant les déficits commerciaux les plus élevés avec les États-Unis. Ces taxes « réciproques », oscillant entre 20 % et 49 %.
Mais pour l'instant ces taxes supplémentaires ont été suspendus pour une durée de 90 jours. Les 10% de base restent toutefois bien en place.
Seule exception : la Chine ! Le pays s'est vu imposer un malus très important. Les exportations en direction des USA sont désormais taxées de 125% ! La guerre commerciale avec la Chine prend ainsi une tournure encore plus folle.
Grand prince, le président américain a tenu à préciser : « ce sont des tarifs à prix cassé. On leur fait payer la moitié de ce qu’ils nous imposent. »
Toutefois, Donald Trump n’a pas totalement fermé la porte aux négociations, mais à des conditions strictes : « Renoncez à vos droits de douane, abaissez vos barrières, cessez de manipuler vos monnaies et commencez à acheter des dizaines de milliards de dollars de biens américains ! »

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Les investisseurs s'inquiètent
L’impact de ces décisions ne s’est pas fait attendre. Prenons l’exemple du secteur automobile : selon les bureaux d’analyse Oddo BHF et Bernstein, ces mesures entraîneront un surcoût de plus de 100 milliards de dollars pour l’ensemble de l’industrie, soit environ 6 700 dollars par véhicule.
Pierre Pincemaille, Secrétaire général de la Gestion chez DNCA Investments, estime que l’instabilité est loin de s’apaiser : « Les premiers mois de ce second mandat semblent dessiner les contours d’une administration plus idéologique que pragmatique. Seul le temps nous dira s’il s’agit d’une simple posture, mais les récentes déclarations du Président ont eu l’effet d’une douche froide. »
Ces propos font écho à une interview accordée par Donald Trump à Fox News : « Je ne regarde même pas le marché, car à long terme, les États-Unis seront extrêmement solides avec ce qui se passe ici », concédant tout de même « une période de transition nécessaire pour ramener la richesse en Amérique ».
Mais croire que les entreprises mondiales, notamment les constructeurs automobiles, pourront relocaliser leur production aux États-Unis en un claquement de doigts relèverait de l’illusion. La rigidité des chaînes logistiques empêche toute adaptation immédiate, et si ces décisions doivent impacter l’économie américaine, leurs effets ne se feront sentir qu’au bout de plusieurs années.
Comme le résume parfaitement l’analyste économique Thomas Veillet : « Bienvenue dans la Trumptonomie, une économie où l’on préfère les bras de fer aux poignées de main. »
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Hausse des droits de douane : quel impact sur l’économie mondiale ?
Sur le plan macroéconomique, la hausse des droits de douane aura inévitablement des répercussions à court et moyen terme sur l'inflation ainsi que sur les dépenses des consommateurs américains. Confrontées à une envolée des coûts de production, de nombreuses entreprises pourraient être contraintes de revoir à la baisse leur production, affectant ainsi l'emploi et la croissance économique.
L’Organisation de Coopération Économique (OCE) a d’ores et déjà révisé ses prévisions. Elle anticipe désormais une croissance du PIB mondial de 3,1 % en 2025, contre 3,3 % dans ses précédentes estimations publiées en décembre. Ce ralentissement traduit les incertitudes liées aux tensions commerciales grandissantes.
Pour Naeem Aslam, analyste chez Zaye Capital, « ces nouvelles barrières douanières réciproques font craindre une impasse économique prolongée ». Alors que les négociations entre les États-Unis et leurs principaux partenaires commerciaux se poursuivent, l'absence de solution concrète alimente l’inquiétude des investisseurs. « Ils redoutent des perturbations dans la chaîne d'approvisionnement, un ralentissement du commerce mondial et une pression accrue sur les bénéfices des entreprises », ajoute-t-il.
Toutefois, à plus long terme, certains observateurs adoptent une perspective plus optimiste. Philippe Ferreira, économiste chez Kepler Cheuvreux Solutions, estime que « les États-Unis pourraient, in fine, tirer parti de cette politique protectionniste. La hausse des droits de douane incite à relocaliser les investissements et à stimuler la production sur le sol américain, renforçant ainsi l’autonomie industrielle du pays ».
Reste à savoir si cette stratégie protectionniste portera ses fruits ou si elle ne fera qu’accroître les tensions économiques et diplomatiques à l’échelle mondiale.
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Les signes déjà visibles d’un ralentissement économique
Certaines analyses économiques, notamment celles de la Fed, signalent un fléchissement de l'activité, laissant présager l'imminence d'une récession. Le secrétaire au Trésor, Scott Bessent, reconnaît lui-même que l'économie américaine pourrait se dégrader à court terme.
Il n'est donc guère surprenant de voir la Fed d'Atlanta revoir une nouvelle fois à la baisse son estimation du PIB pour le premier trimestre 2025, l'évaluant désormais à -3,7 %. En intégrant les données relatives aux importations et exportations, elle anticipe désormais une contraction de -1,4 %, alors qu'il y a tout juste deux mois, elle prévoyait encore une croissance de + 3,8 % sur la même période.
Dans une récente publication, Gregory Daco, économiste chez EY, a lui aussi exprimé ses inquiétudes. Selon lui, la hausse des droits de douane pourrait entraîner une contraction du PIB de 2,7 % en 2025 et de 4,3 % en 2026, accompagnée d'une inflation supérieure de 4,5 points de pourcentage. Les analystes de JPMorgan estiment, quant à eux, que l’économie américaine a 40 % de chances d’entrer en récession.
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Une perte de confiance des acteurs économiques
Les derniers indicateurs macroéconomiques reflètent en partie cette perte de confiance.
L'indice de confiance des consommateurs, publié par le Conference Board, a chuté de 7,2 points en mars pour s'établir à 92,9. L'indice des anticipations — qui mesure les perspectives à court terme des ménages en matière de revenus, d'affaires et d'emploi — a plongé de 9,6 points pour atteindre 65,2, son niveau le plus bas depuis douze ans, bien en deçà du seuil de 80, généralement associé à l'annonce d'une récession imminente.
Les données de l'ISM Manufacturing PMI corroborent cette tendance. Cet indicateur s'est contracté à 49 en mars, contre 50,3 le mois précédent. Par ailleurs, les chiffres de l'emploi viennent renforcer ces préoccupations : les créations d'emplois non agricoles ont déçu en février avec 151 000 postes créés, alors que les prévisions oscillaient entre 160 000 et 200 000. Cette dynamique s'accompagne d'une hausse du taux de chômage, qui atteint désormais 4,1 %.
Le marché immobilier n'est pas épargné : la confiance des promoteurs continue de se dégrader, passant de 42 à 39 en mars.
Toutefois, une lueur d'espoir subsiste du côté de l'inflation, qui semble marquer une légère accalmie. L'indice CPI affiche une hausse de 2,8 % sur un an en février, contre 3 % en janvier, un chiffre inférieur aux 2,9 % anticipés par les analystes.
Zone Euro : un soutien massif au secteur de la défense
Le Vieux Continent ne saurait échapper aux effets de la politique commerciale agressive menée par Donald Trump. L’OCDE, pour la deuxième fois consécutive, a revu à la baisse ses prévisions de croissance pour 2025, notamment en Allemagne et en France. Ainsi, l’institution n’anticipe plus qu’une hausse de 0,4 % du PIB allemand cette année, contre 0,7 % auparavant. En France, la croissance attendue s’établit désormais à 0,8 %, soit une révision à la baisse de 0,1 point par rapport aux prévisions de décembre.
Face à ce ralentissement, les institutions européennes ainsi que les États membres déploient d’importants plans de relance afin de stimuler leurs économies et d’enrayer cette dynamique préoccupante.
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Une économie à bout de souffle ?
La croissance économique dans la zone euro a été réévaluée à la hausse par Eurostat pour l'année 2024, atteignant 0,9 % contre 0,7 % initialement prévu. Pourtant, cette embellie apparente ne saurait occulter les fragilités persistantes du Vieux Continent.
Les incertitudes, qu'elles soient géopolitiques, commerciales ou économiques, continuent de peser lourdement sur la croissance de la zone euro, freinant la reprise tant espérée. Ainsi, la Banque centrale européenne (BCE) a révisé ses prévisions, anticipant une croissance de seulement 0,9 % en 2025 et de 1,2 % en 2026, soit une baisse de 0,2 point de pourcentage par rapport à ses projections précédentes.
Selon les responsables économiques de l’institution : « Les révisions à la baisse pour 2025 et 2026 reflètent la diminution des exportations et la faiblesse persistante des investissements, en partie due à l'incertitude grandissante entourant la politique commerciale ainsi qu'à un climat politique globalement instable. »
Le moral économique s’est d’ailleurs dégradé en mars. L’indice mensuel du sentiment économique des vingt pays partageant l’euro s’est établi à 95,2, en deçà des 97,0 attendus par les analystes. En février, cet indice s'élevait encore à 96,3. Quant à la confiance des consommateurs, elle reste inchangée à -14,5.
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Une inflation maitrisée
Une lueur d’espoir émane toutefois du marché de l’emploi. Le taux de chômage dans la zone euro s’est replié à 6,1 % en février, contre 6,2 % en janvier 2025, alors qu’il était attendue stable. Par rapport à février 2024, où il s’élevait à 6,5 %, la tendance à la baisse se confirme. Le PMI manufacturier affiche également une surprise positive, remontant de 47,6 à 48,7, tandis que le secteur des services déçoit avec un indice de 50,4.
L’inflation, mesurée par l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH), a progressé de 2,2 % sur un an en mars, conformément aux attentes, contre 2,3 % en février. En excluant les éléments les plus volatils que sont l’alimentation non transformée et l'énergie, l’inflation sous-jacente s’est établie à 2,4 %, en deçà des 2,5 % anticipés, contre 2,6 % le mois précédent.
Malgré quelques signaux encourageants, l'économie européenne demeure sous tension, ballottée entre incertitudes et espoirs mesurés. La vigilance reste donc de mise pour les mois à venir.
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L’Europe lance la course à l’armement
Le discours prononcé par le vice-président JD Vance lors de la Conférence de Munich sur la sécurité a eu l'effet d'un véritable électrochoc pour les nations européennes. En effet, il y a déclaré que les garanties de sécurité offertes par les États-Unis seraient désormais subordonnées à l'adoption des priorités politiques américaines.
Cette annonce n’a pas laissé les institutions européennes indifférentes. Elles ont réagi promptement. Ursula von der Leyen, Présidente de la Commission européenne, a présenté un ambitieux plan d’investissement de 800 milliards d’euros, visant à « réarmer l’Europe ».
Cependant, il convient de noter que cette somme ne constitue pas une enveloppe budgétaire supplémentaire, ce qui aurait été difficile à envisager étant donné que les 750 milliards du plan « Renew » de 2020 peinent à être utilisés. Il s'agit en réalité d'une réaffectation de dépenses liées au réarmement, retirées du cadre contraignant du pacte de stabilité.
À cela s'ajoute l'initiative européenne ReArm, qui prévoit 150 milliards d’euros sous forme de prêts pour stimuler les investissements dans la défense.
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L’Allemagne active son plan de relance
Attendu depuis longtemps, l'Allemagne a dégainé son « bazooka » budgétaire et rompt (enfin) avec la doctrine d’austérité budgétaire du pays.
Le plan de Friedrich Merz se décline en trois grandes mesures. D’une part une exemption de l’application du « frein à l’endettement » pour les dépenses de défense. D’autre part, le lancement d’un fonds de 500 milliards d’euros destiné à la modernisation des infrastructures. Parmi cette somme, 100 milliards seront alloués à des projets visant à soutenir la transition climatique.
Enfin, une augmentation des déficits structurels est également prévue pour les Länder.
Si Berlin atteint son objectif de consacrer 3 à 3,5 % de son PIB à la défense, plus de 1 500 milliards d'euros pourraient être investis en à peine dix ans dans ce secteur.
Friedrich Merz a qualifié ce projet de « premier grand pas vers une nouvelle communauté européenne de défense ».
Wilfrid Galand, Directeur Stratégiste chez Montpensier Arbevel, voit dans ce plan de relance un véritable game changer économique : « Entre les dépenses supplémentaires pour le réarmement, l'endettement, l'autorisation accordée aux collectivités locales et le plan d'investissement tant attendu dans les infrastructures, c'est au minimum 15 % du PIB du pays qui devrait être injecté dans l'économie au cours de la prochaine décennie. L'impact additionnel sur la croissance outre-Rhin promet d’être considérable. Selon les premières estimations de Goldman Sachs, et en fonction de la rapidité de l’exécution, cet impact pourrait se situer entre 0,6 % et 1 % par an durant la période 2025-2027. »
Les convictions de Scala Patrimoine sur les marchés financiers
Le début du second mandat de Donald Trump n’a guère été accueilli avec enthousiasme par les investisseurs. Les mesures de rétorsion commerciale mises en œuvre par la nouvelle administration américaine ont jeté un froid saisissant sur les places boursières mondiales. Depuis le début de l’année, l’indice S&P 500 accuse une perte d’environ 17 % (à la date du 7 avril). Les marchés financiers sont en proie au doute, et certains analystes n’hésitent pas à évoquer des séances de véritable « capitulation ». Seul George W. Bush, en 2001, avait connu un début de mandat aussi éprouvant pour les marchés, à un stade similaire du cycle présidentiel.
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La chute des marchés actions
Le doute s’installe sur les marchés actions, sur fond de craintes d’escalade dans la guerre commerciale
- Un climat économique incertain
En mars, le climat économique s’est sensiblement détérioré aux États-Unis. L’indice avancé du Conference Board a atteint un creux inégalé depuis douze ans, traduisant une chute marquée de la confiance des consommateurs à l’égard des revenus, des entreprises et du marché de l’emploi. Ce pessimisme ambiant a pesé tout au long du mois sur les marchés actions, mais aussi sur le dollar, en recul de 4,2 % face à l’euro. Pour les investisseurs européens, cet affaiblissement a eu un double effet négatif.
En Europe, malgré l’enlisement des négociations en Ukraine, les annonces de soutien budgétaire ont marqué un tournant notable. L’Allemagne a dévoilé un ambitieux plan de relance de 500 milliards d’euros, axé sur l’énergie, les infrastructures et la défense. L’Union européenne a, de son côté, présenté des mesures destinées à renforcer la compétitivité et à relancer le réarmement industriel. Ces annonces ont brièvement porté les marchés européens début mars, avant que l’incertitude grandissante autour de la politique commerciale américaine ne vienne éclipser ces signaux positifs.
À l’approche de l’annonce tarifaire de l’administration Trump, prévue le 2 avril, les tensions ont de nouveau ressurgi, nourries par la perspective de représailles commerciales. L’annonce elle-même, plus agressive qu’attendu, a provoqué une violente correction des marchés les 3, 4 et 7 avril.
- La guerre commerciale est lancée
La Chine a répliqué sans délai, imposant des droits de douane de 34 %. Plusieurs partenaires commerciaux, quant à eux, oscillent entre mesures de rétorsion et appels à la négociation.
Les conséquences économiques restent encore difficiles à cerner, mais deux menaces majeures se dessinent pour la croissance américaine :
- Un choc de confiance, via la chute des marchés actions, susceptible d’affaiblir la consommation des ménages les plus exposés.
- Une poussée inflationniste, induite par la hausse des prix à l’importation, susceptible d’éroder à la fois le pouvoir d’achat et les marges des entreprises.
Dans ce contexte d’incertitude exacerbée, nous maintenons une position neutre sur les actions. Le rééquilibrage entre titres américains et européens, opéré le mois dernier, conserve toute sa pertinence : en mars, si les deux zones ont souffert, la pression s’est davantage concentrée sur les valeurs américaines, notamment celles du secteur technologique, historiquement survalorisées.
Les mesures tarifaires américaines semblent s’inscrire dans une redéfinition structurelle des relations commerciales mondiales, bien au-delà d’un simple levier de négociation. Ce changement de paradigme soulève de nombreuses questions encore sans réponse :
- Quel sera l’impact réel sur la croissance mondiale ?
- Quelle sera la réaction des banques centrales, en particulier celle de la Fed, prise en étau entre inflation importée et ralentissement de l’activité ?
- Les entreprises parviendront-elles à préserver leurs marges dans ce nouvel environnement ?
- The “flight to quality” is back
Dans ce climat d’incertitude, la prudence reprend ses droits. Le mouvement de « flight to quality » observé récemment illustre une perte de confiance généralisée, notamment à l’égard des titres les plus sensibles au cycle, bien que leurs fondamentaux ne justifient pas toujours une telle défiance. La correction pourrait se poursuivre, ouvrant potentiellement des points d’entrée intéressants une fois les perspectives clarifiées. La saison des résultats, qui s’ouvrira en avril, sera scrutée de près.
Dans les marchés émergents, la situation se tend en Asie, en particulier en Chine, pénalisée par les barrières douanières et sa forte dépendance à la demande mondiale. Un soutien budgétaire massif s’impose désormais pour relancer la consommation intérieure. L’Inde, davantage tournée vers son marché domestique, pourrait mieux tirer son épingle du jeu.
Dans ce contexte mouvant, nous privilégions une posture patiente et diversifiée. L’or, fidèle à son rôle de valeur refuge, affiche une progression remarquable de 20 % depuis le début de l’année. La décorrélation croissante entre les marchés actions et obligataires plaide, par ailleurs, en faveur d’une diversification accrue vers ces derniers.
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Les marchés financiers obligataires
L’annonce des nouveaux tarifs douaniers a provoqué un vif mouvement de repli vers les actifs dits sans risque, entraînant une détente marquée des taux souverains. Aux États-Unis, le rendement des emprunts à dix ans a cédé près de 40 points de base, revenant à son niveau de septembre 2024. Cette détente s’est propagée à l’ensemble de la courbe des taux, signe d’un repli généralisé des anticipations de croissance et d’inflation.
En Europe, la même dynamique s’est imposée : le Bund allemand a vu son rendement reculer d’environ 30 points de base, et ce malgré les tensions potentielles induites par les plans de financement massifs récemment annoncés.
- Un regain d’appétit pour les titres souverains
Les emprunts d’État confirment leur statut d’actifs refuges dans ce climat incertain. Les tensions commerciales actuelles n’ont, semble-t-il, pas encore été pleinement intégrées dans les valorisations, ce qui laisse, à notre sens, un potentiel de revalorisation supplémentaire pour les taux souverains. Aux États-Unis, les rendements demeurent sensiblement plus attractifs qu’en Europe, mais la trajectoire de la politique monétaire ainsi que le risque de change lié au dollar invitent à la prudence. Si certains facteurs continuent de soutenir la devise américaine, la poursuite des sorties de capitaux en dehors des actifs libellés en dollar pourrait accentuer la pression à la baisse.
Du côté du crédit, les obligations investment grade ont fait preuve d’une certaine résilience en mars. En revanche, les segments les plus sensibles au cycle – tels que les obligations hybrides ou les titres financiers subordonnés – ont davantage souffert, exposant les porteurs à un risque supérieur en cas de défaut, en raison de leur position subalterne dans la hiérarchie de remboursement.
Le segment high yield, en particulier aux États-Unis, a connu un élargissement plus prononcé des spreads, pénalisé par une qualité de crédit globale inférieure à celle observée en Europe. Le mouvement de « flight to quality » s’est également manifesté au sein de l’univers obligataire, renforçant la demande pour les titres les mieux notés et exerçant une pression sur les compartiments les plus risqués.
Dans ce contexte, nous maintenons une vision positive sur les obligations, tout en renforçant notre biais défensif.
- Positionnement stratégique : souverains et crédit européen en tête
Sur le segment souverain, la trajectoire de la Banque centrale européenne apparaît plus lisible que celle de la Réserve fédérale. L’inflation en zone euro demeure relativement contenue, laissant entrevoir de nouvelles baisses de taux dans les mois à venir. Dans une logique de couverture face au risque d’un net ralentissement de l’activité mondiale, nous privilégions les obligations souveraines européennes, susceptibles de bénéficier pleinement d’un assouplissement monétaire. À l’inverse, nous faisons preuve de davantage de prudence à l’égard des Treasuries américains, plus exposés à une politique monétaire incertaine et à un risque de change non négligeable.
En matière de crédit, notre préférence va au segment investment grade européen, dont les fondamentaux solides offrent un portage attractif. Les spreads y apparaissent plus stables à court terme que ceux de leurs équivalents américains, et les maturités intermédiaires sur des émetteurs de qualité nous semblent constituer un point d’entrée pertinent.
Les obligations financières subordonnées, bien qu’ébranlées récemment par le regain d’aversion au risque, conservent un couple rendement/risque intéressant. L’élargissement des spreads reflète davantage le recul des actions bancaires que la dégradation des fondamentaux, lesquels restent globalement solides, soutenus par un cadre réglementaire renforcé.
Nous demeurons toutefois sélectifs sur le segment high yield, que nous limitons à des maturités courtes et à des signatures de premier ordre, dès lors que l’écart de rendement justifie pleinement le risque additionnel.
Enfin, nous restons particulièrement attentifs aux publications économiques à venir. Celles-ci pourraient influer de manière significative sur la perception du risque crédit dans les prochains mois, à mesure que les conséquences de la guerre commerciale se précisent.
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Les Marchés Financiers dits « Alternatifs » : Une Approche Prudente
Dans le cadre de notre gestion prudente, nous continuons de privilégier les stratégies alternatives long/short actions, particulièrement pertinentes dans des environnements de marché caractérisés par une forte volatilité, une incertitude économique et une dispersion significative des performances sectorielles. Les rotations entre les secteurs sont rapides, et les marchés réagissent vivement aux annonces des autorités politiques, économiques et monétaires.
Ces stratégies se révèlent particulièrement adaptées pour tirer parti de ces conditions. Elles offrent à la fois une protection partielle contre les baisses de marché et un potentiel de surperformance dans un contexte complexe. Le principe du long/short actions permet aux gérants de capitaliser sur les inefficiences du marché en prenant des positions longues sur des actions considérées comme sous-évaluées et des positions courtes sur celles jugées sur-évaluées. Cette flexibilité est cruciale en période de volatilité, car elle permet de réduire la corrélation avec les indices boursiers traditionnels, offrant ainsi une diversification potentielle.
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Les Produits Structurés : une flexibilité appréciée
Nous maintenons une vision positive sur les produits structurés, qui offrent la possibilité de s'exposer à divers marchés tout en personnalisant le niveau de risque et l'objectif de rendement souhaités. Les périodes de volatilité accrue peuvent générer des opportunités intéressantes sur ces instruments. Ils peuvent également être utilisés comme outils de couverture pour diminuer l'exposition directe aux actions, par exemple.
La correction observée dans certains secteurs de l'économie américaine peut également constituer un point d'entrée pertinent pour des produits structurés adossés à ces valeurs. Ainsi, les produits structurés représentent une alternative intéressante pour les investisseurs souhaitant une exposition aux actions tout en cherchant à atténuer la volatilité inhérente à cette classe d'actifs. Leur flexibilité en fait une solution stratégique pour diversifier et potentiellement optimiser la performance d'un portefeuille dans l'environnement actuel.
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Les Actifs Non Cotés (Private Assets) : une classe d’actifs incontournable
L'appétit des investisseurs institutionnels pour les actifs non cotés poursuit sa trajectoire ascendante, malgré un environnement économique marqué par des zones d'ombre.
- Capital-Investissement : Une Allocation Stratégique
Cette dynamique, confortée par l'anticipation d'une détente progressive des taux d'intérêt initiée en 2024, oriente également les flux vers des véhicules d'investissement en capital-investissement plus accessibles à une clientèle élargie. Bien que le marché manifeste une certaine prudence, perceptible notamment au regard des incertitudes politiques et économiques actuelles, notre conviction quant au potentiel du private equity demeure solide.
Les stratégies secondaires conservent une attractivité particulière en raison des opportunités de valorisation qu'elles recèlent. Par ailleurs, les fonds de co-investissement demeurent au cœur de nos allocations, combinant une recherche d'optimisation des rendements et une gestion rigoureuse des coûts.
Les stratégies de dette privée, incluant la dette mezzanine et le growth buyout, gagnent en popularité pour accompagner le développement des entreprises en phase de croissance. De plus, le capital-risque, notamment dans les secteurs technologiques et liés à la transition énergétique, suscite un regain d'intérêt, offrant des perspectives de croissance captivantes pour les jeunes entreprises innovantes.
- Allocation Conseillée : Une Approche Diversifiée et de Long Terme
Afin d'exploiter pleinement le potentiel des investissements non cotés tout en maîtrisant les risques inhérents, nous préconisons une stratégie d'allocation diversifiée et orientée sur le long terme. Cette approche se décline comme suit :
- Stratégies secondaires : privilégiées pour leur stabilité et la robustesse de leurs rendements.
- Exposition au capital-risque : ciblant des opportunités de rendement élevé dans des secteurs à fort potentiel d'innovation.
- Investissements en LBO (Leveraged Buyout) : visant à tirer parti de l'effet de levier financier dans des opérations de rachat d'entreprises.
- Growth equity : permettant de bénéficier du potentiel de croissance d'entreprises matures et prometteuses.
- Dette mezzanine : considérée comme un outil clé de diversification grâce à ses taux potentiellement attractifs.
Face aux évolutions constantes du paysage économique, cette allocation stratégique vise à conjuguer performance et gestion proactive des risques. Nous restons vigilants quant à l'évolution du marché, tout en cherchant à capitaliser sur les opportunités qu'il présente, en particulier dans les secteurs stratégiques tels que la santé et la transition énergétique.

M. Rosset (avocate) : « Le régime matrimonial de la séparation de biens n'est pas toujours le plus adapté aux entrepreneurs »
Le choix d’un régime matrimonial par un chef d’entreprise requiert une attention particulière. Des outils comme la SCI ou la SARL de famille, bien que présentant des avantages, peuvent à ce titre receler des risques, notamment en cas de divorce ou de succession. Et notamment dans les familles recomposées. Pour nous éclairer sur ces enjeux, nous avons interrogé Migueline Rosset, avocate spécialiste en droit de la famille.
Scala Patrimoine. Quel régime matrimonial choisir pour un chef d'entreprise ?
Migueline Rosset. Il n'existe pas de réponse unique à cette question. Le choix du contrat de mariage est intrinsèquement lié à une pluralité de facteurs spécifiques à chaque situation. Il convient notamment de déterminer si l'entreprise a été constituée antérieurement à la célébration du mariage. De même, il est pertinent d'envisager si l'entrepreneur projette la création de nouvelles entreprises à l'avenir. La situation familiale, notamment la présence d'enfants actuels ou le désir d'en avoir, constitue également un élément déterminant.
Il est crucial de rectifier une idée reçue largement répandue : le régime matrimonial de la séparation de biens n'est pas systématiquement le régime le plus adapté au chef d'entreprise. En réalité, une analyse approfondie de chaque situation particulière s'avère indispensable. Il est impératif de considérer la dimension internationale des patrimoines. Un contrat de mariage conclu en France, tel qu'un régime de séparation de biens, pourrait ne pas être interprété de la même manière à l'étranger, notamment aux États-Unis. Un juge américain pourrait ainsi écarter l'application du contrat tel qu'il avait été initialement envisagé par les époux, et le considérer selon une qualification juridique différente.
Scala Patrimoine. Quelles sont les spécificités pour une famille recomposée ?
Migueline Rosset. Dans le contexte d'une famille recomposée, le chef d'entreprise est naturellement amené à considérer la protection de son conjoint survivant, de ses enfants, ainsi que l’optimisation de la transmission de son patrimoine professionnel. L'ensemble de ces préoccupations peut être abordé stratégiquement à travers le choix du régime matrimonial et la mise en place de dispositions testamentaires adaptées.
Une fois encore, une analyse individualisée de la situation s'avère indispensable. Il est nécessaire de déterminer précisément quelle est la ou les personnes que l'entrepreneur souhaite prioritairement protéger. L'objectif est de concilier la transmission du patrimoine entrepreneurial avec la sécurité du conjoint survivant, des enfants, ou des deux, en tenant compte des particularités de la structure familiale recomposée.
« Les SCI et les SARL de famille peuvent engendrer des difficultés spécifiques, notamment lors d'un divorce ou d'une succession »
Scala Patrimoine. Quels sont les risques associés à la SCI et à la SARL de famille ?
Migueline Rosset. Les Sociétés Civiles Immobilières (SCI) et les Sociétés à Responsabilité Limitée (SARL) de famille peuvent engendrer des difficultés spécifiques, notamment lors d'un divorce ou d'une succession. La question cruciale se pose alors de la gestion du partage ou de la transmission de ces structures. Une complexité particulière émerge en cas de divorce, lorsqu'un désaccord entre les époux rend le règlement des intérêts patrimoniaux délicat.
Cette mésentente peut également survenir au moment de la succession, spécialement dans le contexte de familles recomposées. La présence d'enfants issus de différentes unions au sein de la SCI ou de la SARL de famille peut exacerber les tensions. Des enfants non impliqués dans la gestion de la société peuvent contester l'attribution de droits à d'autres héritiers.
Une difficulté juridique notable réside dans le fait que le juge compétent pour statuer sur un divorce ou une succession n'est pas nécessairement celui qui sera chargé de résoudre les litiges liés au fonctionnement ou à la dissolution de la SCI ou de la SARL de famille. Cette séparation des compétences juridictionnelles constitue un facteur de complexité significatif.
En conséquence, une extrême prudence est recommandée lors du recours à ces outils de gestion patrimoniale. Une analyse approfondie des implications potentielles, notamment en cas d'évolution de la situation familiale, est indispensable. Et ce afin d'anticiper et de prévenir d'éventuels contentieux.
https://www.youtube.com/watch?v=-gJ6NmprOSQ&t=9s
Chefs d’entreprise : le bon contrat de mariage peut tout changer
Lorsqu’un chef d’entreprise se marie, le choix du régime matrimonial est une décision stratégique aux conséquences majeures. Contrairement aux idées reçues, la séparation de biens n’est pas toujours la solution idéale. Si elle permet de distinguer le patrimoine personnel des biens professionnels, elle n’offre pas systématiquement la meilleure du conjoint en cas de décès, ou dans le cadre d’une préparation à la transmission.
En réalité, chaque régime matrimonial présente des avantages et des limites qu’il convient d’analyser au regard des objectifs du dirigeant : protéger son patrimoine personnel des aléas de l’activité, sécuriser l’avenir de sa famille et assurer la pérennité de l’entreprise.
Surtout, la situation familiale est, par nature, mouvante. Naissance, recomposition familiale ou divorce sont autant de facteurs susceptibles d’imposer une adaptation du régime choisi. Il est donc essentiel d’opter pour un contrat équilibré, capable d’évoluer au fil du temps tout en offrant une protection adaptée aux enjeux patrimoniaux et professionnels du chef d’entreprise.
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Les principaux régimes matrimoniaux
Avant ou pendant le mariage, les mariés peuvent opter pour un régime qui déterminera la gestion de leurs biens et leurs responsabilités financières.
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La communauté réduite aux acquêts
En l'absence de contrat de mariage signé devant un notaire, les époux sont automatiquement soumis au régime légal. Aussi appelé régime de la communauté réduite aux acquêts.
« Les biens acquis avant le mariage, ainsi que ceux reçus pendant l'union par héritage ou donation, constituent des biens propres. Autrement dit, ils n'entrent pas dans la masse commune » précise d'emblée Migueline Rosset, avocate spécialiste en droit de la famille.
Les biens communs englobent, quant à eux, les revenus des époux et les biens acquis ensemble ou séparément durant le mariage. « Ainsi, si l’entreprise est créée par l’un des époux après le mariage, celle-ci appartient à la communauté » abonde l’avocate.
Une particularité mérite toutefois d'être soulignée : les fruits des biens propres, c'est-à-dire les revenus qu'ils génèrent, sont considérés comme des biens communs. Ainsi, si l'un des époux perçoit des loyers provenant d'un bien immobilier lui appartenant en propre, ces revenus seront intégrés à la communauté.
Si cet époux a contracté un emprunt pour acquérir ce bien, le remboursement de cet emprunt, lorsqu'il est effectué à l'aide de fonds communs, fait naître une créance de la communauté envers le patrimoine propre. Cette créance, appelée « récompense », sera évaluée et réglée lors de la liquidation du régime matrimonial, qu'elle intervienne à l'occasion d'un divorce, d'un décès ou d'un changement de régime matrimonial.
« Ce mécanisme vise à assurer un équilibre entre les intérêts des deux conjoints, en évitant qu'un époux ne s'enrichisse au détriment de la communauté par le biais de son patrimoine personnel. » explique Guillaume Lucchini, l’associé fondateur de Scala Patrimoine.
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La séparation de biens
Dans le cadre du régime de la séparation de biens, chaque conjoint conserve la pleine propriété des biens qu'il acquiert à titre personnel, qu'ils soient antérieurs ou postérieurs à l'union.
Toutefois, les conjoints peuvent, au cours de leur union, choisir d’acquérir ensemble certains biens, tels qu’un logement, un véhicule ou tout autre patrimoine, Indivis ou alors en commun. chaque époux devient propriétaire indivis du bien à hauteur de sa contribution financière.
« Ce régime se révèle ainsi particulièrement protecteur du patrimoine individuel de chaque époux, notamment lorsque l'un d'eux exerce une activité professionnelle susceptible d'engendrer des dettes. En cas de difficultés financières, seul l'époux débiteur voit son patrimoine personnel engagé, préservant ainsi les biens de l'autre conjoint » met en avant Guillaume Lucchini.
Cependant, cette protection trouve rapidement ses limites. Lorsqu'un entrepreneur sollicite un emprunt pour les besoins de son activité, les établissements financiers exigent fréquemment la caution du conjoint.
Comme le souligne l’avocate Migueline Rosset « Cette exigence, loin d'être anodine, altère la philosophie protectrice du régime séparatiste en exposant indirectement le patrimoine de l'époux non concerné par l'activité professionnelle. En pratique, le régime de la séparation de biens n'offre donc pas une étanchéité absolue ; il se distingue même par une certaine porosité lorsque des engagements conjoints sont souscrits. »
Par ailleurs, ce régime peut s’avérer inadapté dans certaines situations, notamment en cas de décès de l’un des époux. En l’absence de dispositions testamentaires précises ou de clauses de partage anticipé. Le patrimoine personnel du conjoint prédécédé entre dans la succession. La succession peut alors devenir conflictuelle du fait du nécessaire partage avec les enfants, notamment s’il y a des enfants d’une précédente union.
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Le régime de la participation aux acquêts
Le régime de la participation aux acquêts fonctionne, pendant le mariage, de manière similaire à celui de la séparation de biens. Chacun des époux conserve l'administration, la jouissance et la libre disposition de ses biens personnels. Cependant, au moment de la dissolution du mariage — par divorce ou par décès — il opère un rééquilibrage patrimonial : les gains et l'enrichissement acquis durant l'union sont alors partagés équitablement entre les conjoints.
- Une certaine compléxité
Pour Migueline Rosset, « ce régime peut présenter une petite complexité lors de sa liquidation. La principale difficulté réside dans la détermination précise du patrimoine initial de chaque époux qui est rarement reportée dans le contrat de mariage. Pour calculer la part à partager, on soustrait la valeur du patrimoine d’origine — auquel on ajoute les donations et les biens légués — à celle du patrimoine final. »
Seules les plus-values réalisées au cours de l’union sont susceptibles d’être partagées, tandis que les dettes demeurent la charge exclusive de l’époux qui les a contractées.
Pour cette raison, pour un chef d’entreprise, ce régime peut s’avérer périlleux.
En effet, si le patrimoine final d'un époux est inférieur à son patrimoine originaire, le déficit est supporté entièrement par cet époux. S'il lui est supérieur, l'accroissement représente les acquêts nets et donne lieu à participation.
- Le sort réservé aux entrepreneurs
Cependant si le patrimoine final d'un époux est inférieur à son patrimoine originaire, le déficit est supporté entièrement par cet époux.
Les gains issus de l’activité entrepreneuriale entrent dans l’assiette du partage lors de la liquidation du régime. Ainsi, sauf à vouloir protéger pleinement son conjoint en lui garantissant une part des fruits de la réussite, il peut être préférable pour l’entrepreneur d’opter pour un régime de séparation de biens pure et simple.
Cette solution offre une protection plus stricte de son patrimoine professionnel et évite qu’en cas de divorce, les fruits de son travail ne soient systématiquement partagés.
Il existe cependant désormais la possibilité d’exclure le patrimoine professionnel du patrimoine à prendre en compte.
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La communauté universelle
Le régime de la communauté universelle est un régime matrimonial dans lequel l'ensemble des biens des époux, qu'ils aient été acquis avant ou pendant le mariage, sont mis en commun. Ce régime englobe, en principe, les biens propres issus d'héritages ou de donations, sauf stipulation contraire prévue par contrat.
« Pour un chef d'entreprise, ce régime présente des risques : l'entreprise est incluse dans la communauté, exposant ainsi le conjoint aux dettes professionnelles » souffle toutefois Guillaume Lucchini.
L'un des principaux attraits de ce régime réside dans la protection patrimoniale qu'il offre au conjoint survivant. Les époux peuvent, en effet, insérer dans leur contrat de mariage une clause d'attribution intégrale. Cette disposition permet, au moment du décès de l'un des conjoints, que l'intégralité du patrimoine commun revienne au survivant, écartant ainsi les héritiers jusqu'au décès du deuxième époux. Cette clause, bien que protectrice, doit faire l'objet d'une réflexion approfondie, notamment pour les familles recomposées où les droits des enfants issus d'une première union pourraient s'en trouver limités.
« C'est un régime qui peut toutefois être adapté aux besoins spécifiques des époux », précise Migueline Rosset. « Ces derniers peuvent, par exemple, prévoir une clause dite "alsacienne". Cette clause permet aux époux, en cas de divorce, de récupérer les biens qu'ils avaient apportés à la communauté, préservant ainsi leur patrimoine personnel initial. »
Une autre modalité consiste à créer une société d'acquêts. Ce dispositif permet de distinguer certains biens du patrimoine commun tout en maintenant une partie des biens en propre. Les époux déterminent librement les biens qu'ils souhaitent inclure dans cette société, les autres demeurant exclus de la communauté. En cas de dissolution du mariage, seuls les biens rattachés à la société d'acquêts sont partagés, offrant ainsi une souplesse supplémentaire et une meilleure protection de certains actifs personnels.
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Les enjeux liés à l’internationalisation des patrimoines
L'internationalisation des patrimoines dans le cadre des régimes matrimoniaux est un enjeu juridique majeur. Lorsque les époux ont des liens avec plusieurs pays, la gestion de leurs biens, qu'ils soient immobiliers, financiers ou autres, se complexifie. Les différences de systèmes juridiques, de règles fiscales et d'approches culturelles du mariage entraînent des défis importants pour les couples transnationaux. Pour Guillaume Lucchini, « il est crucial de comprendre comment les régimes matrimoniaux s'appliquent au-delà des frontières, afin d'assurer la sécurité juridique et la protection des droits des individus dans un contexte international. »
Migueline Rosset fait toutefois une distinction entre l’environnement juridique européen et ceux applicables dans le reste du monde : « Dans le cadre de l'Union européenne, les différents régimes matrimoniaux applicables sont désormais mieux compris, notamment dans les pays latins, dont les systèmes juridiques sont, somme toute, assez proches du nôtre. »
Autrefois, un principe fondamental gouvernait les régimes matrimoniaux : le principe de mutabilité. Un concept mis en avant par l’avocate du cabinet MRA Société d’avocats : « Concrètement, cela signifiait que, lorsqu’un couple résidait depuis plus de dix ans dans un autre pays, leur régime matrimonial se modifiait automatiquement pour adopter celui du pays d’accueil, à moins qu’un contrat de mariage n’ait été rédigé. Cependant, cette règle de mutabilité a été abrogée. Bien qu'elle ne soit plus en vigueur, on la rencontre encore dans certains dossiers un peu anciens. »
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Exemple d’une cession d’entreprise crée après le mariage
Que se passe-t-il pour un entrepreneur lors de la cession de son actif professionnel ?
Migueline Rosset prend l'exemple d'un chef d'entreprise qui cède les parts de sa société, créée après son mariage, pour un montant d'un million d'euros. Dans ce cas, le seul régime matrimonial permettant à l'entrepreneur de disposer du produit de cette cession en son nom propre est celui de la séparation de biens. En effet, seul ce régime permet de considérer que l'intégralité de la somme appartient à l'entrepreneur, sans devoir la partager avec son conjoint.
Dans tous les autres régimes matrimoniaux, en revanche, le montant perçu doit être divisé en deux parts égales : une pour l’entrepreneur et l’autre pour son conjoint. (sauf à retenir la possibilité d’exclure le patrimoine professionnel du patrimoine dans le régime de la participation aux acquêts).
« Dans le cadre d’un régime communautaire, il convient néanmoins de distinguer deux éléments : d'une part, les parts sociales de la société, et d'autre part, la contrevaleur de ces parts. Ainsi, lors de la liquidation du régime matrimonial, les parts sociales – et la qualité d’associé qui y est attachée - seront attribuées à l'entrepreneur, tandis que la contrevaleur – c’est-à-dire la somme correspondant à la valeur de ces parts – devra être partagée entre les époux, en cas de décès ou de divorce. » tient à préciser Migueline Rosset.
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Sur quels éléments reposent le choix du régime matrimonial ?
Le choix d’un régime matrimonial est une décision délicate qui mérite une réflexion approfondie.
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Les facteurs à prendre en compte
Pour un chef d’entreprise, ce choix revêt une importance particulière, car il peut avoir des conséquences majeures sur la protection du patrimoine familial et la gestion des risques professionnels. Plusieurs facteurs doivent être pris en compte :
- La forme juridique de l’entreprise : SARL, SAS, SCI, entreprise individuelle, etc.
- La situation patrimoniale et familiale : S'agit-il d'un premier ou d'un second mariage ? Y a-t-il des enfants issus d’une précédente union ? Souhaite-t-on protéger son conjoint en cas de difficultés ?
- Les risques financiers liés à l’activité professionnelle : Quel est le degré de responsabilité personnelle de l’entrepreneur ? Existe-t-il des engagements de caution ?
- La protection du conjoint et des enfants : Quel niveau de sécurité financière souhaite-t-on garantir au conjoint en cas de décès ou de divorce ?
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Le régime de séparation de biens : une protection relative
Le régime de séparation de biens offre l’avantage d’isoler totalement les patrimoines respectifs des époux. Ce régime semble donc particulièrement adapté aux entrepreneurs soucieux de protéger leur patrimoine personnel des risques liés à leur activité professionnelle. Cependant, il ne constitue pas une solution infaillible. En effet, même sous ce régime, les engagements de caution pris au titre de l’activité professionnelle peuvent engager le patrimoine personnel de l’entrepreneur. Ces garanties sont fréquentes dans le cadre d’un prêt bancaire ou d’autres obligations professionnelles.
Par ailleurs, si l’entreprise prospère et que les patrimoines restent strictement séparés, le conjoint non entrepreneur peut se retrouver désavantagé en cas de divorce ou de décès, notamment s’il n’a pas contribué directement à la constitution du patrimoine professionnel.
D’autres régimes matrimoniaux peuvent mieux répondre aux besoins spécifiques d’un chef d’entreprise :
Le régime de la participation aux acquêts ou la société d’acquêts au sein d’un régime de communauté, légale ou universelle.
Précisions en cas d’entreprise créée avant le mariage, dans le cadre d’un régime de communauté (légale ou universelle), une entreprise créée avant le mariage reste un bien propre de l’entrepreneur. Toutefois, les revenus générés par l’exploitation de l’entreprise pendant le mariage, ainsi que les investissements réalisés avec des fonds communs, peuvent être soumis au partage en cas de dissolution du régime.
« Il n’existe pas de régime matrimonial universellement idéal pour un chef d’entreprise. Le choix dépend avant tout des objectifs patrimoniaux, de la situation familiale et de la nature des risques professionnels. » conclut ainsi Guillaume Lucchini.
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La famille recomposée : enjeux et stratégies patrimoniales
La famille recomposée, réalité désormais courante, soulève des enjeux patrimoniaux complexes. L’entrepreneur, confronté à cette situation, peut chercher à protéger son conjoint sans léser les enfants issus d’une précédente union et à assurer une transmission harmonieuse de son patrimoine, à l’abri des conflits familiaux. Des mécanismes juridiques existent pour répondre à ces préoccupations et s’adapter aux volontés spécifiques de chacun.
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Adapter son régime matrimonial
L’une des premières démarches consiste à adapter le régime matrimonial. En fonction des objectifs poursuivis, l’entrepreneur pourrait avoir intérêt, selon les cas, à opter pour le régime de la participation aux acquêts. Ce régime présente l’avantage d’offrir une certaine indépendance pendant la vie commune, tout en permettant un partage équitable des enrichissements réalisés durant le mariage au moment de sa dissolution. Comme nous l’avons évoqué précédemment, un régime communautaire, avec l’utilisation d’une société d’acquêts présente aussi un intérêt.
L’intégration d’une clause de préciput peut également se révéler précieuse. « Elle permet au conjoint survivant de prélever certains biens avant tout partage successoral, évitant ainsi une division immédiate de certains actifs stratégiques ou sentimentaux. » abonde ainsi l’avocate.
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Prendre soin de la rédaction de son testament
Par ailleurs, une attention particulière doit être portée au testament. Migueline Rosset explique pourquoi la rédaction du testament est essentielle : « cet instrument juridique permet d’organiser la répartition du patrimoine en conciliant les droits du conjoint survivant et ceux des enfants d’un premier et d’un second lit. L’entrepreneur peut ainsi prévoir des dispositions spécifiques afin de favoriser son conjoint tout en respectant la part réservataire due aux enfants ».
En parallèle, dans un souci de transparence et d’apaisement familial, Migueline Rosset recommande de rédiger ce que l’on peut appeler une « lettre testament ». « Bien qu’elle n’ait pas de valeur juridique contraignante, cette lettre permet au testateur d’expliquer les raisons ayant guidé ses choix. Une telle démarche peut favoriser la compréhension entre les héritiers et prévenir les contestations futures. »
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Une liberté encadrée
Enfin, nous signalerons que les enfants, en tant qu’héritiers réservataires, disposent d’un recours en cas d’atteinte à leur réserve héréditaire. Ils peuvent intenter une action en réduction pour demander la restitution de la part de l’héritage leur revenant de droit. Le juge, saisi de cette demande, veillera alors à rétablir l’équilibre entre la réserve héréditaire et la quotité disponible.
« Il convient de noter que l’action en réduction est encadrée par des délais stricts. Elle doit être exercée dans un délai de cinq ans à compter du décès, ou dans un délai de dix ans si l’atteinte à la réserve n’a été découverte que plus tard, à condition que l’action soit intentée dans les deux ans suivant cette découverte. Ces délais, rigoureux et impératifs, constituent un véritable couperet dont il est essentiel de tenir compte lors de la planification successorale. » prévient ainsi Migueline Rosset.
En conclusion, la gestion patrimoniale au sein d’une famille recomposée exige une approche réfléchie et personnalisée. En combinant les outils juridiques adéquats – adaptation du régime matrimonial, rédaction d’un testament, clause de préciput – et en privilégiant la transparence à travers une lettre testament, il est possible d’assurer la protection du conjoint survivant tout en préservant les droits des enfants, garantissant ainsi une transmission du patrimoine apaisée et équilibrée.
Conclusion
Contrairement aux idées reçues, le régime de la séparation de biens ne constitue pas toujours la solution idéale. Chaque situation patrimoniale, notamment celle d'un chef d'entreprise, présente des particularités qui rendent illusoire l'existence d'un modèle universel. Le choix du régime matrimonial doit ainsi être guidé par des objectifs clairs : protéger le patrimoine personnel, assurer la sécurité financière du conjoint et organiser une transmission équilibrée du patrimoine.
Aucun régime n’est parfait en toutes circonstances, et la situation familiale évolue au fil du temps. Il est donc essentiel d’opter pour un contrat modulable, régulièrement réévalué, afin d’assurer une protection optimale face aux risques professionnels et personnels.
Pour les familles recomposées, la planification successorale revêt une importance capitale. Un aménagement précis du régime matrimonial, couplé à des dispositions testamentaires ou à la souscription de contrats d'assurance-vie, peut garantir un équilibre entre les intérêts du conjoint survivant et ceux des enfants issus de différentes unions.
Capital investissement : une nouvelle dynamique ?
L’association France Invest a récemment dévoilé son baromètre annuel sur l’activité du capital investissement en France, en collaboration avec le cabinet d’audit Grant Thornton. Malgré un climat économique et politique incertain, le secteur du capital investissement amorce un redressement. La concrétisation des ventes par les fonds d’investissement se fait cependant attendre, laissant présager un marché encore partiellement figé.
Une hausse des levées de fonds
Les derniers mois ont été éprouvants pour les investisseurs. En France, la dissolution de l'Assemblée nationale a jeté un froid sur la confiance des acteurs économiques. Parallèlement, les nombreuses tensions géopolitiques et les menaces pesant sur le commerce international — notamment en raison de la politique de Donald Trump et de la hausse drastique des droits de douane — fragilisent l'activité économique mondiale.
Dans ce contexte incertain, le rebond des fonds de capital investissement en France constitue une nouvelle encourageante.
Si l'on exclut les fonds d'infrastructures, l'ensemble des sociétés de gestion opérant en France ont levé près de 25,2 milliards d'euros de capitaux en 2024, enregistrant une hausse de près de 1,5 milliard d'euros par rapport à l'année précédente (23,8 milliards d'euros en 2023).

Un second semestre 2024 plus favorable
Bertrand Rambaud, Président de France Invest, estime que ce rebond est un signal positif pour l’économie française : « On a une des incertitudes en France et à l’international, mais malgré cela notre industrie continue d’attirer les capitaux et investisseurs en priorité dans l’économie française. Et nous le savons bien c’est important pour le financement des grandes transitions économiques et stratégiques notamment pour la souveraineté du pays, et notamment le secteur de la défense »
Cette dynamique s'explique en grande partie par la progression significative des levées de fonds de taille intermédiaire, comprises entre 100 millions et 1 milliard d'euros. Ces dernières affichent une croissance de 36 % en volume et de 40 % en nombre sur un an.
Comme les années précédentes (exception faite de 2022), le second semestre 2024 s'est avéré plus dynamique que le premier, avec 15 milliards d'euros levés contre 10,2 milliards d'euros au premier semestre.
Enfin, les deals primaires - qui témoignent de la santé du secteur du capital investissement - représentent 34 % des investissements, tandis que les opérations secondaires demeurent largement majoritaires, avec une part de 66 %.
Un soutien à la transition énergétique
Les montants investis poursuivent leur progression en 2024, atteignant 26 milliards d'euros contre 22,4 milliards en 2023. Parallèlement, le nombre d'entreprises accompagnées suit cette tendance haussière, passant de 2 581 en 2023 à 2 692 en 2024.
Toutefois, plutôt que de se tourner vers de nouvelles opportunités, les gérants de fonds ont privilégié le soutien aux entreprises déjà présentes dans leur portefeuille. Ainsi, avec deux tiers des investissements consacrés au réinvestissement, l'année 2024 se distingue par un renforcement de l'accompagnement des entreprises dans leur croissance, notamment externe, et par une augmentation des opérations secondaires.

Parmi les différents secteurs d'activité, l'industrie demeure le premier domaine d'investissement, représentant 26 % des montants alloués et 24 % des opérations réalisées. Le secteur du numérique s'impose en seconde position avec 21 % des investissements, suivi par les biens et services de consommation (18 %) et le secteur médical et pharmaceutique (16 %).
En parallèle, les investissements des fonds d’infrastructures connaissent une légère progression, totalisant 10,9 milliards d'euros investis dans 189 projets. Les énergies renouvelables confirment leur prédominance, avec 4,3 milliards d'euros injectés dans 120 projets, illustrant la place grandissante des investissements verts dans les portefeuilles des investisseurs.
Une dynamique qui ne surprend pas Adrien Tourbet, responsable des investissements non cotés chez Scala Patrimoine : « cette évolution traduit une véritable lame de fond. Elle illustre la volonté des investisseurs d’orienter leurs capitaux vers des projets plus durables et de contribuer activement à la transition énergétique, un enjeu désormais majeur tant pour les États que pour les entreprises privées. »
Capital innovation : un rebond durable ?
Les différents segments du private equity présentent des dynamiques bien différentes.
Le « growth » est soutenu par quelques levées de fonds atypiques, mais ne parvient pas à dissimuler un ralentissement général de l'activité.
Le capital transmission affiche, de son côté, une progression significative, avec une hausse de 20 % en montants et de 17 % en nombre d'opérations. En revanche, le capital développement subit, lui aussi, un ralentissement, principalement en raison de la diminution des transactions primaires.
Enfin, les levées de fonds de capital innovation rebondissent par rapport à 2023, et ce, malgré une contraction du nombre de fonds actifs. Ainsi, 2,847 milliards d'euros ont été levés , contre moins de 2,5 milliards en 2023.
Toutefois, le climat demeure incertain pour les start-ups françaises. Jean-David Chamboredon, cofondateur et président d'ISAI, s'est exprimé à ce sujet pour Bpifrance, reconnaissant les difficultés actuelles du secteur. « Les levées de fonds sont devenues particulièrement ardues pour le capital-risque. Les souscripteurs cherchent d'abord à récupérer des liquidités avant d'envisager de nouveaux investissements. Depuis 2022, le nombre d'exits est resté limité, restreignant ainsi les flux de retour vers les souscripteurs et, par conséquent, la capacité des fonds à lever de nouveaux capitaux. »
Dans un environnement économique moins porteur, les investisseurs adoptent donc une posture plus sélective. Ils préfèrent engager leurs capitaux sur des montants plus réduits et concentrer leurs efforts sur des secteurs jugés stratégiques. Il faudra encore patienter avant d'assister à un retour du marché à son rythme de croisière.
Un marché toujours gelé ?
Selon le dernier communiqué de l'association France Invest, « le marché reste en deçà des attentes au regard de la croissance des investissements observée ces dernières années ».
L'élargissement des durées de détention des entreprises dans les portefeuilles des gérants d'actifs a entraîné une réduction du volume des cessions. En 2024, on recense ainsi 1 281 cessions, contre 1 276 en 2023 et 1 416 en 2022.
Nicolas Tixier, Partner et Head of Deal Advisory chez Grant Thornton, reconnait d'ailleurs que « le ralentissement de la vitesse d'exécution des sorties constitue un enjeu majeur en termes de retour aux LPs et de fluidité du cycle d'investissement ».
Toutefois, en intégrant le segment des infrastructures, les cessions ont généré près de 12,8 milliards d'euros pour les fonds en 2024, soit une hausse de 42 % par rapport à 2023. Cette augmentation en valeur, largement soutenue par de grandes opérations, est un signal encourageant. Cependant, la stabilité du nombre d'entreprises cédées traduit une stratégie où les investisseurs préfèrent accompagner la croissance des entreprises en portefeuille plutôt que de céder sous la pression des liquidités.
Après la pluie vient le beau temps ?
Un autre facteur d'incertitude pèse sur le marché : l'allongement des durées de levées de fonds.
Le temps écoulé entre le premier et le dernier closing est aujourd'hui nettement supérieur à celui observé en 2021-2022. En 2024, il fallait en moyenne 20,9 mois pour finaliser une levée de fonds, contre 14,9 mois en 2022. Néanmoins, l'analyse du rythme semestriel laisse entrevoir une légère amélioration, avec une baisse du temps nécessaire : 23,7 mois au second semestre 2023, contre 20,5 mois au second semestre 2024.
Une embellie qui a semble t-il été favorisée par une amélioration des conditions de financement pour les entreprises.
Bertrand Rambaud exprime ainsi l'espoir d'un retour à la normale dans les mois à venir : « L'enjeu pour l'industrie du capital investissement est désormais de maintenir sa dynamique et de confirmer la reprise des opérations de cession amorcée au second semestre. Ce levier est essentiel pour assurer le bon renouvellement du cycle d'investissement et garantir un retour de liquidités plus important pour nos investisseurs ».
Une attractivité renforcée à l’international
Le capital investissement français, incluant les fonds d’infrastructure, confirme son rayonnement sur la scène mondiale. En 2024, cette attractivité ne cesse de croître, comme en témoigne la part significative des capitaux levés à l’étranger, qui représente 56 % du total.
La répartition des fonds levés illustre cette tendance :
- 20 %, soit 7 892 M€, ont été investis par des acteurs internationaux hors d’Europe.
- 36 %, soit 13 850 M€, proviennent d’investisseurs européens.
- 44 %, soit 17 146 M€, ont été apportés par des souscripteurs français.
La place centrale des family offices
Les fonds de fonds demeurent les principaux investisseurs de cette classe d’actifs. En 2024, leur contribution s’élève à 7 milliards d’euros, soutenant ainsi de manière significative les activités des gestionnaires d’actifs.
Juste derrière eux, les entrepreneurs et les grandes fortunes, à travers leurs family offices, confirment leur rôle de second pilier du capital-investissement (hors infrastructure). Avec un engagement total de 4,4 milliards d’euros, ils représentent 17 % des souscriptions, devançant ainsi les compagnies d’assurance et les mutuelles, dont les investissements atteignent 3,31 milliards d’euros.

L’avis de Scala Patrimoine
Les nuages qui planent au-dessus du marché du capital investissement restent nombreux. Pour espérer un redémarrage durable, il faudra patienter jusqu’à une nette accélération des cessions. Toutefois, plusieurs signaux encourageants laissent entrevoir une reprise tant attendue : une dynamique de levée de fonds plus soutenue, le retour des investisseurs corporate et, bien sûr, la baisse des taux d’intérêt…
Ces incertitudes n’atteignent pas nos convictions. Nous demeurons confiants quant au potentiel du private equity sur le long terme, à condition d’adopter une approche diversifiée et de sélectionner les meilleurs fonds.
Dans l’univers du non coté, le choix des gérants s’impose comme un facteur déterminant. Les écarts de performance entre les fonds situés dans le premier et le dernier quartile sont considérables, rendant la sélection d’autant plus cruciale pour optimiser les rendements.