Le rendez-vous des marchés financiers - Novembre 2025
Marchés financiers & économie : les points clés
- Malgré les doutes sur les valorisations des entreprises de l'IA, les marchés actions continuent de grimper.
- Les États-Unis et la Chine sont parvenus à un accord de désescalade commerciale ;
- Le FMI a relevé ses prévisions économiques et table désormais sur une croissance mondiale de 3,2 % en 2025, soit une révision à la hausse de 0,4 point ;
- La FED a baissé une nouvelle fois ses taux directeurs de 0,25 points de base ;
- L’agence de notation Standard & Poor’s a abaissé la note souveraine de la France de AA- à A+.
Les grandes actualités géopolitiques et les performances sur les marchés financiers
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Les marchés financiers mondiaux poursuivent leur ascension
Sur le mois écoulé, du 5 octobre au 5 novembre, les marchés financiers mondiaux affichent une performance globalement positive.
Aux États-Unis, les principaux indices continuent de progresser : le Dow Jones gagne 1,06 %, le S&P 500 s’adjuge 0,74 %, et le Nasdaq enregistre une hausse notable de 2,18 %, malgré certaines inquiétudes sur une éventuelle bulle spéculative autour des valeurs liées à l’intelligence artificielle.
En Europe, cette dynamique se fait également ressentir. Le CAC 40 progresse de 1,28 %, tandis que le FTSE MIB, principal indice italien, enregistre un léger gain de 0,17 %. Le DAX 30, référence allemande, cède toutefois du terrain, perdant 1,6 % sur la période.
Du côté de l’Asie, la tendance reste positive : le Shanghai Composite avance de 0,9 %, et le Nifty 50, indice phare de la Bourse indienne, s’apprécie de 2 %

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Saison des résultats : Wall Street surperforme les attentes
La première salve de publications trimestrielles vient de tomber, et les signaux sont au vert — surtout du côté américain. Cette saison des résultats s’annonce particulièrement robuste : 85 % des entreprises du S&P 500 ont publié des bénéfices supérieurs aux attentes, portées par la vigueur persistante du secteur technologique et le soutien massif de l’intelligence artificielle.
D’après les données de FactSet, le bénéfice par action moyen des sociétés de l’indice a progressé de 10,7 % entre le troisième trimestre 2024 et le troisième trimestre 2025. Un chiffre calculé sur la base des résultats déjà publiés par plus de 60 % des entreprises du S&P 500, dont la plupart des plus grandes capitalisations boursières.
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Nvidia pulvérise un nouveau record de valorisation
Rien ne semble pouvoir arrêter Nvidia. Le géant californien des semi-conducteurs vient d’inscrire un nouveau record à son palmarès, avec une capitalisation boursière de 5 100 milliards de dollars — soit davantage que Tesla, Meta (Facebook) et Netflix réunis.
Depuis le début de l’année, le cours de l’action du concepteur de processeurs, cartes graphiques et logiciels d’intelligence artificielle s’est envolé de près de 60 %, porté par une demande toujours plus forte dans le secteur de l’IA générative et des infrastructures cloud.
Avec une telle valorisation, Nvidia dépasse désormais le PIB de la France ou de l’Allemagne, un symbole fort de la domination croissante de la technologie dans l’économie mondiale. L’entreprise représente à elle seule 8 % de l’indice S&P 500, une concentration inédite pour une seule société depuis plus de quarante ans, selon les données de S&P.
Microsoft et Apple, qui complètent le podium des plus grandes capitalisations mondiales, affichent chacune une valeur de marché avoisinant 4 000 milliards de dollars. Une performance qui souligne l’ascension irrésistible de Nvidia au cœur de la révolution de l’intelligence artificielle.
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La note de la dette souveraine française encore sous pression
- S&P sévit
Nouvelle alerte sur la dette française. L’agence de notation Standard & Poor’s a abaissé la note souveraine de la France de AA- à A+, assortie d’une perspective stable. Une décision qu’elle justifie par la montée des tensions politiques et « une série de votes de confiance négatifs » rendant plus difficile la consolidation budgétaire engagée par le gouvernement.
Selon S&P, la France, dont la dette publique atteint désormais près de 118 % du PIB, ne parviendrait pas à mettre en œuvre les réformes nécessaires pour réduire durablement son déficit. L’agence anticipe même une hausse du ratio dette/PIB à 121 % d’ici 2028. Elle estime que l’instabilité politique pèsera sur l’investissement, la croissance et la capacité de l’État à tenir ses engagements budgétaires.
Cette dégradation fait de S&P la deuxième agence, après Fitch, à retirer à la France sa note « double A ».
Du côté des marchés, la réaction reste mesurée, mais les tensions s’accroissent. La société de gestion Altitude IS observe que « l’écart entre les taux à dix ans OAT et Bund, à 86 points de base, flirte désormais avec des niveaux inédits depuis la crise des dettes souveraines ». Et d’ajouter : « S’il n’y a pas lieu de s’alarmer outre mesure — la Banque centrale européenne disposant d’outils puissants et un secteur bancaire bien plus solide qu’en 2011-2012 —, cette situation renforce malgré tout l’incertitude des investisseurs. Comme souvent, les banques et les sociétés les plus exposées au marché domestique français en subissent les premiers les effets. »
- Moody’s patiente
L'agence de notation américaine, Moody’s, pour sa part, s’est montrée plus clémente. Elle a maintenu la note française à Aa3, équivalente à AA- chez S&P. L'agence n’en demeure pas moins prudente, pointant un « risque accru que la fragmentation du paysage politique français continue de nuire au fonctionnement des institutions législatives ».
Cette instabilité, souligne Moody’s, pourrait freiner la capacité du gouvernement à répondre efficacement aux défis budgétaires : déficit élevé, dette en progression et coût de l’emprunt en hausse. L’agence redoute également un ralentissement des réformes structurelles, notamment celle des retraites, suspendue jusqu’en 2028.
Malgré ces incertitudes, Moody’s rappelle les atouts fondamentaux de la France : une économie diversifiée, des ménages et entreprises aux bilans solides, un secteur bancaire robuste et des institutions publiques expérimentées. Autant d’éléments qui continuent, pour l’heure, de soutenir la crédibilité financière du pays.
Analyse du FMI : une économie mondiale plus résiliente qu’attendu
Contre toute attente, l’économie mondiale résiste mieux que prévu à la nouvelle guerre commerciale initiée par Donald Trump. Dans ses dernières Perspectives économiques mondiales, le Fonds monétaire international (FMI) a même relevé ses prévisions : il table désormais sur une croissance mondiale de 3,2 % en 2025 et 3,1 % en 2026, soit une révision à la hausse de 0,4 point par rapport à son estimation d’avril dernier.
Les hausses de tarifs douaniers américaines, finalement plafonnées entre 10 % et 20 % pour la plupart des partenaires commerciaux, se sont révélées moins déstabilisantes qu’escompté. Selon le FMI, ces droits de douane n’auraient « pas exercé un effet aussi négatif qu’anticipé » sur la dynamique économique mondiale.
La première puissance économique du globe, les États-Unis, devraient enregistrer une croissance de 2 % en 2025 et 2,1 % en 2026, tandis que la zone euro progresserait de 1,2 % puis 1,1 % sur la même période. De son côté, la Chine maintient un rythme solide, avec 4,8 % de croissance en 2025 et 4,2 % en 2026.
Cependant, l’institution de Washington appelle à la prudence. Elle souligne plusieurs facteurs de fragilité : la fin des importations de produits dits de « pré-alimentation », l’aggravation de l’endettement public mondial et la flambée spéculative autour de l’intelligence artificielle, que le FMI compare à la bulle Internet des années 1990. Autant de menaces susceptibles d’ébranler une stabilité économique encore fragile.
États-Unis : l’économie US défie les pronostics
La croissance américaine continue de déjouer les prévisions. La progression du PIB au deuxième trimestre 2025, dans sa lecture finale, a été revue à la hausse à +3,8 %, alors que le consensus tablait sur 3,3 %. Et la dynamique semble loin de s’essouffler : selon la Fed d’Atlanta, l’activité pourrait encore croître de 3,9 % au troisième trimestre.
D’après une étude de S&P Global, la probabilité d’une récession dans les douze prochains mois ne dépasserait plus 30 %, et ce malgré la hausse des droits de douane et l’enlisement du shutdown budgétaire.
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Un « shutdown » qui interroge
Le blocage budgétaire au Congrès, centré sur le financement fédéral et la prolongation des subventions santé, paralyse une partie de l’administration américaine depuis le 1er octobre. On entre ainsi dans la sixième semaine du conflit.
Selon les économistes, l’impact sur la croissance reste modéré — 0,1 % du PIB par semaine de blocage —, les dépenses gelées ne représentant qu’une faible part du budget fédéral (6,4 % du PIB).
Mais la situation inquiète : survenant à l’approche des fêtes de fin d’année, ce shutdown pourrait fragiliser la consommation, moteur traditionnel de l’économie américaine.
« Les entreprises s’inquiètent : United Airlines prévient d’un impact sur les réservations, Delta évoque des risques opérationnels et la National Retail Federation appelle à une réouverture rapide pour éviter un coup dur à la saison des fêtes », souligne Pierre-Alexis Dumont, directeur des investissements chez Sycomore AM.
Autre difficulté : l’économie avance désormais à vue, les publications de statistiques officielles étant suspendues durant la fermeture fédérale.
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Le temps des incertitudes
Les barrières commerciales imposées par Donald Trump ne semblent pas encore peser lourdement sur l’activité, mais les risques s’accumulent : dépendance américaine aux terres rares venues de Chine, tensions commerciales persistantes avec le Canada, et volatilité accrue des échanges.
En octobre, l’indice PMI manufacturier s’est légèrement redressé, passant de 52,2 à 52,5 points, au-dessus des attentes. « Les performances de l’économie manufacturière américaine se sont encore améliorées, soutenues par la production et les nouvelles commandes. Cependant, la croissance reste tirée par la demande intérieure, les exportations ayant reculé sous l’effet des droits de douane », note S&P Global.
En parallèle, l'indice des directeurs d'achat pour le secteur non-manufacturier de l'Institute for Supply Management a, lui, dépassé les attentes. Il est ressorti à 52,4 contre 50,7 en septembre et un consensus de 50, signalant ainsi une nette accélération de la croissance.
Si la hausse des prix sur certains biens importés est perceptible, elle demeure contenue. L’inflation sous-jacente a même ralenti à 3 %, un niveau inférieur aux anticipations et désormais engagé sur une trajectoire plus favorable, bien que toujours au-dessus de la cible de la Réserve fédérale.
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Un marché de l’emploi en perte de vitesse
Côté emploi, le ralentissement se confirme. En août, seules 22 000 créations nettes ont été enregistrées — un plancher depuis 2021. Mais selon le dernier rapport ADP, le secteur privé américain a créé 42 000 emplois le mois dernier, après en avoir détruit 32 000 en septembre.
Selon le Bureau of Labor Statistics, le nombre de postes disponibles est tombé à 9,5 millions en juin, soit 1,6 emploi par demandeur, en baisse pour le deuxième mois consécutif.
Le taux de chômage, estimé par la Fed de Chicago à partir de données privées (les chiffres officiels n’étant plus publiés depuis le début du shutdown), reste stable à 4,3 %.
Si les entreprises licencient peu, le taux d’embauche demeure à l’un des niveaux les plus faibles des vingt-cinq dernières années.
Cette prudence se reflète dans la confiance des ménages. Selon le Conference Board, l’indice de confiance des consommateurs américains a reculé à 94,6 en octobre, après 95,6 en septembre — un repli modéré mais révélateur du climat d’incertitude.
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Nouvelle baisse des taux de la Fed
La Réserve fédérale américaine (Fed) a annoncé une nouvelle baisse de ses taux directeurs d’un quart de point, la deuxième en un peu plus d’un mois. Cette décision ramène la fourchette des taux entre 3,75 % et 4 %, marquant un tournant notable dans la stratégie monétaire de la banque centrale.
La Fed justifie cet assouplissement par la dégradation progressive du marché de l’emploi. Les créations de postes ralentissent, fragilisées par les politiques commerciales et migratoires plus restrictives, qui pèsent à la fois sur la disponibilité de la main-d’œuvre et sur la consommation intérieure.
Pourtant, la pression inflationniste ne faiblit pas. En septembre, les prix à la consommation ont progressé de 3 % sur un an, contre 2,9 % le mois précédent, selon l’indice CPI publié par le département du Travail. Sur un mois, la hausse s’est toutefois légèrement modérée (+0,3 %, après +0,4 % en août), malgré le renchérissement des prix de l’énergie.
Face à ces signaux contrastés, la Fed cherche à prévenir un ralentissement trop marqué de l’économie tout en maintenant la stabilité financière. Lors de la conférence de presse suivant la réunion du comité de politique monétaire, Jerome Powell a souligné les divisions persistantes au sein du conseil : « Une réduction supplémentaire des taux lors de la réunion de décembre n’est pas acquise, loin de là. »
Dans le même mouvement, le président de la Fed a annoncé la fin du resserrement quantitatif à compter du 1er décembre. La banque centrale reprendra ses achats d’actifs financiers, injectant ainsi de nouvelles liquidités dans le système. Cette mesure vise à soutenir le marché obligataire et à atténuer l’impact du ralentissement temporaire lié au shutdown fédéral.
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Rencontre Chine–États-Unis : une trêve fragile mais stratégique
Après des mois de tensions commerciales et diplomatiques, Donald Trump et Xi Jinping ont décidé de mettre en pause l’escalade qui opposait Washington et Pékin. Les deux dirigeants se sont retrouvés en Corée du Sud pour un entretien de 90 minutes, au terme duquel ils ont conclu un accord de désescalade commerciale, marquant une tentative de stabilisation des relations économiques entre les deux premières puissances mondiales.
Ce compromis vise à prévenir toute nouvelle vague de tarifs punitifs et à rouvrir les canaux de communication rompus depuis plusieurs mois. Les États-Unis menaçaient d’imposer 100 % de droits de douane sur les importations chinoises à compter du 1er novembre, tandis que Pékin préparait des mesures de rétorsion ciblant notamment les exportations de terres rares, essentielles à l’industrie technologique américaine.
- Les principaux points de l’accord
Le texte dévoilé à l’issue de la rencontre prévoit :
- la réduction temporaire des droits de douane les plus élevés ;
- la suspension, par la Chine, de certaines restrictions sur les exportations stratégiques ;
- la création d’un canal permanent de concertation économique destiné à prévenir de nouvelles escalades.
- Les deux gouvernements insistent : il ne s’agit ni d’un accord global, ni d’un traité commercial, mais d’un cadre provisoire de coopération. Son objectif premier est de restaurer la confiance et d’éviter un choc récessif mondial à un moment où la croissance ralentit des deux côtés du Pacifique.
Preuve de la bonne volonté des différentes parties prenantes, la Chine a annoncé prolonger d'un an la suspension d'une partie des droits de douanes imposés aux produits américains, pour les maintenir à 10 %. Elle le fait peu après la signature par le président américain d'un décret abaissant de 20 à 10% une surtaxe douanière infligée à de nombreux produits chinois.
- Une trêve tactique plus qu’une paix durable
Si cette détente a été saluée par les marchés, les économistes demeurent prudents. Les questions de fond — subventions industrielles, transferts de technologies, propriété intellectuelle — n’ont pas été abordées.
L’accord ressemble donc davantage à une trêve tactique, dictée par l’urgence économique et politique, qu’à une véritable normalisation des relations commerciales.
Pour Washington, cette pause constitue avant tout un sursis stratégique : elle offre du temps pour réorganiser les chaînes d’approvisionnement et réduire la dépendance américaine vis-à-vis de la Chine, sans aggraver la pression inflationniste intérieure.
Zone euro : un léger rebond économique mais des incertitudes subsistent
L’économie de la zone euro montre des signes de redressement. Selon Eurostat, le produit intérieur brut (PIB) de la zone euro a progressé de 0,2 % au troisième trimestre 2025 par rapport au trimestre précédent, dépassant légèrement les prévisions (+0,1 %). Ce rebond reflète un regain de confiance des acteurs économiques et la bonne tenue des économies italienne et espagnole.
Pour autant, cette croissance reste « loin d’être impressionnante », tempère Jack Allen-Reynolds, analyste chez Capital Economics.
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Des indicateurs économiques encourageants
La fin de l’année s’annonce positive sur le plan économique. Les indices de confiance européens ont progressé plus fortement qu’attendu en octobre : l’indice économique global passe de 95,6 à 96,8, l’indice industriel de -10,1 à -8,2, et celui des services de 3,7 à 4.
Cette confiance se traduit par une consommation plus soutenue des ménages. Au deuxième trimestre 2025, la consommation réelle par habitant a augmenté de 0,3 %, après un recul de 0,1 % au trimestre précédent. Dans le même temps, le revenu réel par habitant a progressé de 0,5 %, contre +0,1 % au premier trimestre.
Le marché de l’emploi demeure stable : le taux de chômage s’est maintenu à 6,3 % en septembre.
Autre signe positif, l’indice composite des directeurs d’achat (PMI) de S&P Global a grimpé de 51,2 en septembre à 52,5 en octobre, marquant le dixième mois consécutif de croissance et atteignant son niveau le plus élevé depuis 29 mois.
L’enquête souligne que « l’activité économique de la zone euro a progressé en octobre à son rythme le plus rapide depuis mai 2023, s’éloignant de la cadence modérée observée en début d’année, grâce à l’accélération de l’activité dans le secteur des services et à des conditions de demande favorables ».
Pour Cyrus de la Rubia, chef économiste à la Hamburg Commercial Bank : « Enfin, il y a de nouveau quelque chose de positif à signaler pour l’économie de la zone euro. Le secteur des services a connu une solide progression en octobre. En ce qui concerne les nouvelles affaires, il faut remonter à mai 2024 pour observer une augmentation aussi forte. »
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Des incertitudes persistent
Cette dynamique pourrait toutefois être fragilisée par les hausses de droits de douane américains. Pour l’instant, il est difficile d’en mesurer l’impact. On note néanmoins que la zone euro a enregistré un excédent de 1,0 milliard d’euros dans ses échanges de biens avec le reste du monde en août 2025, contre 3,0 milliards un an plus tôt.
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BCE : la lutte contre l’inflation touche à sa fin
La Banque centrale européenne (BCE) semble approcher de son objectif : l’inflation revient au niveau jugé compatible avec sa politique monétaire. En octobre, le taux d’inflation annuel de la zone euro est estimé à 2,1 %, contre 2,2 % en septembre, se rapprochant ainsi de la cible de 2 % à moyen terme.
Comme anticipé par les marchés, la BCE a choisi de laisser ses taux d’intérêt inchangés, confirmant une pause prolongée dans sa politique monétaire. Le taux de rémunération des dépôts reste à 2 %, le taux de refinancement à 2,15 % et la facilité de prêt marginal à 2,40 %.
Dans son communiqué, l’institution de Francfort souligne que l’inflation est désormais stabilisée autour de sa cible et que les perspectives économiques restent globalement solides, malgré un environnement international tendu et des tensions commerciales persistantes avec les États-Unis.
Christophe Boucher, directeur des investissements chez ABN Amro Investment Solutions commente : « Les pressions inflationnistes restent orientées à la baisse, mais il faudrait un écart significatif par rapport à l’objectif pour que la BCE reprenne ses réductions. Sa position actuelle offre néanmoins une visibilité appréciable aux acteurs économiques, tout en laissant la porte ouverte à une politique plus accommodante si la reprise devait faiblir. »
Chine : le piège déflationniste
L’objectif de 5 % de croissance annuelle fixé par Pékin semble désormais s’éloigner. La deuxième économie mondiale a enregistré un PIB en hausse de seulement 4,8 % au troisième trimestre 2025, marquant le rythme le plus faible depuis la fin 2024. Après des croissances de 5,4 % au premier trimestre et 5,2 % au deuxième, les chiffres récents soulignent un ralentissement notable.
Les tensions commerciales, la méfiance des ménages et la crise immobilière pèsent lourdement sur la dynamique économique chinoise.
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La consommation, symbole des difficultés
La confiance des ménages reste fragile, entraînant une réduction des dépenses et des investissements. Cette prudence se traduit par une baisse des prix à la consommation pour le huitième mois consécutif en septembre. L’indice CPI s’affiche à -0,3 % sur un an, selon le Bureau national des statistiques (BNS), une baisse plus modérée qu’en août (-0,4 %), mais supérieure aux attentes des économistes (-0,2 %). Une spirale déflationniste qui tombe bien mal pour la Chine.
Car le secteur immobilier, pilier de l’économie et principal réceptacle de l’épargne des ménages, ne montre aucun signe de reprise. En septembre, le prix de l’immobilier neuf a reculé de 0,4 % sur un mois et de 2,2 % sur un an. Or, sans un marché immobilier solide, il est difficile d’espérer un regain d’activité économique et de confiance des ménages.
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Une activité économique qui déçoit
L’activité reste poussive. Le PMI manufacturier officiel a reculé en octobre de 49,8 à 49, tandis que le PMI manufacturier de S&P Global est tombé à 50,6 contre 51,2 en septembre. Le PMI des services reste stable à 50,1, confirmant un ralentissement généralisé.
Malgré ce contexte, la Chine affiche une amélioration notable de son commerce extérieur. En septembre 2025, les exportations ont progressé de 8,3 % sur un an, tandis que les importations ont augmenté de 7,4 %, dépassant largement les prévisions des économistes de Bloomberg (+6,6 % pour les exportations, +1,9 % pour les importations).
Les convictions de Scala Patrimoine sur les marchés financiers
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Un mois d’octobre porteur pour les marchés actions
Le mois d’octobre s’est révélé particulièrement favorable pour les marchés actions. Les places boursières des pays développés ont progressé en moyenne de 2,5 %, soutenues une fois encore par la vigueur du secteur technologique, à l’image du Nasdaq, en hausse de 4,8 % (en USD). Dans le même temps, le dollar s’est raffermi de 1,8 %, confirmant son rôle de valeur refuge.
Les marchés émergents ont également poursuivi leur ascension, enregistrant une performance de +6 % en euros, malgré la correction observée en Chine — conséquence de données macroéconomiques décevantes, d’un ralentissement de l’activité manufacturière et de doutes persistants sur la trajectoire des investissements.
Le rebond des actions indiennes, soutenu par d’excellents résultats au troisième trimestre, ainsi que la forte progression des bourses sud-coréennes et taïwanaises, ont contribué à cette dynamique.
Le Japon s’est distingué comme le marché le plus performant (en devise locale), porté par l’arrivée au pouvoir de Sanae Takaichi, partisane de politiques budgétaires et monétaires expansionnistes.
- Des facteurs de soutien solides aux actifs risqués
Plusieurs éléments expliquent la bonne orientation des marchés financiers :
- Un accord temporaire entre Washington et Pékin, prévoyant une réduction de 10 % des tarifs américains et la suspension des mesures non tarifaires chinoises à l’encontre des États-Unis (notamment la levée des restrictions sur les terres rares et la reprise des importations de soja).
- Une inflation maîtrisée aux États-Unis, qui a conforté la Réserve fédérale dans sa décision d’abaisser une nouvelle fois ses taux, désormais compris entre 3,75 % et 4,00 %.
- Une excellente saison de résultats d’entreprises : les bénéfices du S&P 500 affichent une croissance annuelle de 10,7 %, dépassant largement les attentes de 7,9 %. Les perspectives pour 2025 et 2026 ont, elles aussi, été relevées à +11,2 % et +14,0 % respectivement.
Cependant, quelques nuages s’amoncellent à l’horizon :
- Le shutdown américain, désormais le plus long de l’histoire (35 jours), engendre un manque de visibilité sur la conjoncture, faute de publications macroéconomiques officielles.
- Un regain d’inquiétudes chez certains grands acteurs de Wall Street concernant les valorisations des méga-cap technologiques, malgré leurs excellents résultats — à l’image de Palantir.
- Une position neutre mais constructive sur les marchés actions
En cette fin d’année, nous maintenons une approche constructive sur les marchés actions — une période historiquement favorable, portée par la détente géopolitique et la solidité des résultats d’entreprises.
Nous restons toutefois neutres sur les marchés développés, en raison de plusieurs incertitudes persistantes :
le manque de visibilité sur l’inflation, le marché du travail et la consommation américaine, malgré des indicateurs de croissance robustes, ainsi que les fragilités budgétaires en Europe et la lente reprise de l’activité allemande, malgré les dizaines de milliards d’euros de dépenses annoncées en début d’année.
Des éléments de soutien demeurent néanmoins. Aux États-Unis, la consommation résiste malgré un marché de l’emploi moins dynamique, tandis que les publications de résultats continuent de surprendre positivement. Et en Europe, la BCE a ajusté sa politique monétaire avec justesse, créant un environnement plus favorable à la reprise.
Nous conservons par ailleurs un biais positif envers les marchés émergents, portés par le repli du dollar et la vigueur des valeurs asiatiques. La région reste toutefois hétérogène : la correction chinoise et le rebond indien du mois dernier rappellent la nécessité d’une allocation équilibrée et sélective. Des pays comme la Corée du Sud, Taïwan ou le Vietnam offrent de réelles opportunités, stimulées par la montée en puissance de l’intelligence artificielle et le développement des échanges intra-asiatiques.
- Une allocation diversifiée et sélective
La diversification sectorielle demeure essentielle dans la construction de portefeuille.
Aux États-Unis, le secteur technologique reste le principal moteur des performances boursières : depuis l’essor de l’intelligence artificielle générative, il concentre près de 80 % des gains du marché. À moyen terme, ce segment demeure incontournable, les entreprises liées à l’IA continuant de tirer la croissance mondiale.
Néanmoins, la forte concentration des marchés et des valorisations élevées appellent à la prudence : toute déception, qu’elle soit d’ordre monétaire ou microéconomique, pourrait engendrer des ajustements significatifs.
Dans ce contexte, nous préconisons un rééquilibrage des portefeuilles, en intégrant des marchés et secteurs à fort potentiel tels que la santé, l’industrie, la défense ou encore les valeurs financières européennes, qui profitent toujours de la pentification de la courbe des taux.
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Les marchés obligataires : entre détente mesurée et vigilance accrue
- Une accalmie bienvenue sur les marchés européens
Le mois d’octobre a offert un répit au marché obligataire européen. La légère détente observée sur les taux allemands, tant sur les maturités courtes que longues, a soutenu la performance des dettes souveraines de la zone euro. Ce mouvement a été accompagné d’un resserrement des spreads sur les dettes périphériques, notamment en Espagne et en Italie.
Les anticipations d’inflation, désormais mieux ancrées en Europe, ont également contribué à cette baisse des taux longs. Le phénomène a été particulièrement marqué au Royaume-Uni, où les Gilts ont enregistré leur plus forte détente depuis la fin de 2023.
Au Japon, les taux souverains ont suivi une trajectoire similaire, profitant de l’apaisement des craintes entourant le programme budgétaire de la nouvelle Première ministre.
- La dette émergente en pleine lumière
La dette émergente poursuit sa dynamique positive. Elle bénéficie à la fois de la faiblesse du dollar, de rendements réels attractifs et d’une inflation globalement maîtrisée. Ces facteurs lui confèrent un avantage compétitif face aux obligations des marchés développés.
Toutefois, certaines pressions haussières sur les taux souverains devraient persister.
Aux États-Unis, la Réserve fédérale s’est montrée plus prudente en fin de mois quant à une éventuelle troisième baisse de taux en décembre, après avoir déjà abaissé son taux directeur pour la seconde fois en octobre. Cette position plus réservée a provoqué une remontée des taux en fin de période.
En Europe, les tensions politiques en France, la réforme du système de retraites néerlandais et les dépenses publiques accrues en Allemagne devraient également maintenir une certaine tension sur les rendements.
- Des signaux contrastés sur le marché du crédit
Sur le marché du crédit privé américain, les faillites de First Brands et Tricolor, ainsi que les pertes essuyées par plusieurs banques régionales exposées à ces dossiers, ont ravivé la volatilité et les craintes d’un effet de contagion.
Néanmoins, les bilans d’entreprises solides, le taux de défaut en repli et la résilience des établissements systémiques rassurent sur la stabilité du marché.
Selon une étude récente de la BIS (Banque des règlements internationaux), les ratios de service de la dette des entreprises en Europe et aux États-Unis demeurent largement inférieurs à ceux observés lors de la crise financière de 2008.
Les perspectives restent donc positives pour le crédit, notamment en Europe, où les fondamentaux des sociétés cotées demeurent robustes. Le marché primaire a d’ailleurs retrouvé de la vigueur, dissipant les doutes sur la capacité des entreprises à se refinancer.
- Investment Grade : un segment toujours porteur
Nous restons globalement positifs sur le marché obligataire, avec une préférence affirmée pour le crédit Investment Grade européen.
Les rendements demeurent attractifs et la demande reste soutenue, portée par des investisseurs à la recherche de portage stable dans un environnement de taux en transition.
Sur le segment des taux, une approche prudente s’impose. Les besoins de financement massifs des États européens et américains devraient continuer à exercer une pression haussière sur les taux longs.
Dans ce contexte, nous recommandons une duration courte, afin de limiter l’exposition au risque de correction sur la partie longue de la courbe.
À l’inverse, les taux longs français et américains ne reflètent pas encore pleinement les préoccupations budgétaires ni le risque d’un rebond des anticipations d’inflation, susceptibles de peser sur les valorisations.
Pour un investisseur en euro, l’exposition aux obligations américaines en dollar apparaît peu attrayante : la trajectoire de la Fed, engagée dans un cycle de baisse des taux, pèse sur le billet vert, tandis que le coût de couverture de change neutralise le différentiel de rendement offert par le marché américain.
- Des opportunités sélectives sur le marché du crédit européen
Notre biais positif se concentre sur le crédit Investment Grade européen, combinaison équilibrée de rendement attractif, stabilité des émetteurs et faible taux de défaut (inférieur à 1 %).
Nous privilégions les stratégies de portage (buy and hold), qui continuent d’offrir un rapport rendement/risque particulièrement compétitif.
Les spreads de crédit, bien que proches de leurs plus bas historiques, demeurent compatibles avec une baisse progressive des taux courts et moyens termes, ce qui renforce notre vision constructive.
Le niveau actuel constitue, selon nous, une opportunité d’entrée intéressante pour les investisseurs obligataires.
- L’effet stabilisateur de la désinflation
La désinflation en Europe soutient le marché obligataire en maintenant des rendements réels positifs, même dans un contexte de compression des spreads.
Nous continuons d’apprécier les obligations financières subordonnées, qui permettent d’améliorer le rendement moyen d’un portefeuille sans altérer significativement sa qualité de crédit.
Malgré un resserrement des écarts de spreads avec les obligations corporate classiques, ce segment bénéficie de fondamentaux solides et d’un cadre réglementaire renforcé, plus strict qu’outre-Atlantique, ce qui conforte sa résilience.
Sur le High Yield, nous restons extrêmement sélectifs : seule une exposition limitée aux meilleures signatures et maturités courtes nous semble justifiée, à condition que le rendement additionnel compense clairement le risque accru.
- Une certaine prudence sur les taux étatiques
Nous restons vigilants sur le segment des taux souverains. Les besoins de financement élevés, tant en Europe qu’aux États-Unis, pourraient continuer de tirer les rendements longs vers le haut. Nous privilégions donc les obligations souveraines européennes de court terme, qui constituent une alternative pertinente aux instruments monétaires, compte tenu d’une meilleure visibilité sur la politique de la BCE. Le risque de duration reste bien réel. Les taux longs français et américains ne reflètent pas encore la situation budgétaire respective de ces deux économies.
Par ailleurs, le risque de remontée des anticipations d’inflation demeure un facteur de tension pour la partie longue de la courbe.
Enfin, pour les investisseurs en zone euro, l’exposition au marché obligataire américain ne semble pas opportune : les facteurs macroéconomiques (cycle de baisse de taux de la Fed) et les coûts de couverture élevés réduisent significativement l’intérêt de ce positionnement.
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Stratégies Alternatives : une préférence affirmée pour les approches Long/Short actions
Nous maintenons une allocation globalement prudente à l’égard des investissements alternatifs dans leur ensemble. Cependant, au sein de cet univers hétérogène, une préférence claire se dégage pour les stratégies actions Long/Short, qui nous paraissent particulièrement pertinentes dans le contexte de marché actuel.
Dans un environnement marqué par une forte dispersion des performances sectorielles et géographiques, ces stratégies offrent une approche équilibrée : elles exploitent à la fois les opportunités de sous-évaluation (positions longues) et les excès de valorisation (positions courtes) sur les titres cotés.
Leur atout majeur réside dans leur capacité à réduire l’exposition directionnelle aux marchés actions, tout en préservant un potentiel de performance même lors des phases de correction ou d’incertitude accrue.
Grâce à leur flexibilité, les gérants Long/Short peuvent ajuster rapidement leurs expositions en fonction des conditions de marché, cherchant à générer de la valeur quelles que soient les configurations économiques.
Ces stratégies constituent ainsi un instrument efficace de diversification, offrant une décorrélation bienvenue face aux indices boursiers traditionnels et contribuant à stabiliser la performance globale d’un portefeuille dans un environnement de volatilité persistante.
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L’or : une demande toujours soutenue
Le bond de l’or en septembre, avec l’once flirtant avec les 3 900 dollars, confirme la résilience persistante du métal jaune. Malgré des performances déjà exceptionnelles cette année, nous restons positifs sur l’or, soutenus par plusieurs facteurs structurels.
La baisse des taux réels, conséquence de l’assouplissement des taux directeurs, ainsi que l’affaiblissement du dollar américain, continuent de renforcer l’attrait du métal précieux. À cela s’ajoute l’escalade des tensions géopolitiques, qui alimente la recherche de valeur refuge, et une perte de confiance croissante parmi certains acteurs économiques.
Notons également que la demande institutionnelle et privée, portée par les banques centrales et les ménages, demeure solide, particulièrement dans les économies asiatiques et émergentes, confirmant le rôle stratégique de l’or comme actif de préservation de richesse et de diversification.
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Produits structurés : un placement sur mesure
Nous conservons une conviction forte en faveur des produits structurés. Bien plus qu’un simple instrument d’exposition, ils offrent une solution sophistiquée de personnalisation, permettant d’ajuster avec précision l’accès aux marchés ainsi que le couple rendement-risque selon les objectifs de l’investisseur.
Ces instruments se révèlent particulièrement pertinents pour ceux qui souhaitent tirer parti de marchés ou de secteurs à fort potentiel de croissance à moyen terme, tout en intégrant des mécanismes de protection face aux risques de correction. Cette approche est d’autant plus stratégique dans des périodes où les valorisations des marchés sont élevées.
La diversification reste un principe central, tant sur le plan des sous-jacents que des structures utilisées. Grâce à leur flexibilité, les produits structurés permettent d’optimiser la performance d’un portefeuille dans l’environnement actuel, tout en s’adaptant aux besoins spécifiques de distribution. Ils constituent ainsi un pilier pertinent dans toute stratégie de rente personnalisée, combinant rendement, protection et adaptabilité.
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Private Equity : opportunités dans les actifs non cotés
L’intérêt des investisseurs institutionnels pour les marchés non cotés continue de croître, malgré un contexte économique marqué par l’incertitude. Cette dynamique, renforcée par la baisse progressive des taux d’intérêt prévue en 2025, oriente également les flux vers des fonds plus accessibles au grand public.
Bien que le marché manifeste des signes d’attentisme, notamment en raison des incertitudes politiques et économiques, nous restons confiants dans le potentiel du private equity.
Certaines stratégies se distinguent particulièrement :
- Les stratégies secondaires, offrant des opportunités de valorisation attractives et une stabilité relative.
- Les fonds de co-investissement, qui combinent optimisation des rendements et maîtrise des coûts.
- Les stratégies de dette privée, telles que la dette mezzanine ou le growth buyout, qui soutiennent le développement des entreprises en phase de croissance.
- Le capital-risque, notamment dans les secteurs technologiques et liés à la transition énergétique, qui suscite un regain d’intérêt et propose des perspectives captivantes pour les startups innovantes.
- Allocation conseillée
Pour exploiter pleinement le potentiel des investissements non cotés tout en maîtrisant les risques, nous préconisons une approche diversifiée et long terme, articulée autour de :
- Marchés secondaires : stabilité et rendements robustes.
- Capital-risque : exposition ciblée à des opportunités à haut rendement dans les secteurs innovants.
- LBO (Leveraged Buyout) : bénéficier de l’effet de levier pour optimiser les performances.
- Growth equity : tirer parti de la croissance d’entreprises matures et prometteuses.
- Dette mezzanine : diversification et rendement attractif.
Cette allocation vise à conjuguer performance et gestion proactive des risques, tout en restant réactive aux évolutions du marché. Elle privilégie également les secteurs stratégiques, tels que la santé et la transition énergétique, offrant un potentiel de croissance durable et structuré.
Loi de finances pour 2026 : tour d’horizon des principaux amendements adoptés
Article mis à jour des amendements adoptés au 3 novembre 2025
Le chemin législatif s’annonce long et semé d’embûches. Les travaux de la commission des finances, visant à modifier le projet initial de loi de finances, ont été rejetés. La version originale du projet est donc celle actuellement débattue à l’Assemblée nationale.
Pour autant, de nombreuses propositions de la commission pourraient revenir sous la forme d’amendements. Près de 2 500 amendements ont été déposés et seront examinés par les parlementaires dans les semaines à venir.
Voici un état des lieux des principaux amendements adoptés à ce stade. Il convient de rappeler que le vote final de la loi de finances n’interviendra qu’à la fin décembre. Cela laisse donc la porte ouverte à de nombreuses évolutions.
La fiscalité patrimoniale
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Les mesures concernant l’Impôt sur le revenu
Les parlementaires ont rejeté le gel du barème de l’impôt sur le revenu. Une mesure qui aurait pourtant rapporté environ 2 milliards d’euros à l’État. Les tranches du barème seront donc revalorisées de 1,1 %.
Le plafond des dépenses éligibles au crédit d’impôt pour les services à la personne est également abaissé, passant de 12 000 à 10 000 euros par an (et de 15 000 à 13 000 euros pour la première année d’utilisation). Les majorations par enfant à charge ou membre du foyer de plus de 65 ans restent inchangées. Cependant, le plafond global avec ces majorations sera désormais limité à 13 000 euros (16 000 euros la première année).
Par ailleurs, la réduction d’impôt sur les dépenses d’accueil en établissement spécialisé, notamment en Ehpad, sera convertie en crédit d’impôt. Cette possibilité se concrétisera toutefois dans la limite de 10 000 euros par personne. Enfin, un amendement rétablit la défiscalisation totale des heures supplémentaires et complémentaires.
Enfin, les députés ont adopté l’amendement qui supprime la mesure visant à revenir sur la réduction d’impôt relative aux indemnités journalières perçues par les patients souffrant d’affections de longue durée.
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La hausse de la Contribution sociale généralisée (CSG)
La hausse de la CSG semble désormais actée. Jusqu’ici fixée à 9,2 % pour les revenus du capital, la CSG augmentera de 1,4 point, portant le total des prélèvements sociaux sur ces revenus à 18,6 %.
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Un abattement sur les successions revu à la hausse pour les enfants du conjoint ou du partenaires de Pacs
Un amendement du budget 2026 propose un abattement spécifique au moment de la succession pour les enfants de conjoints ou partenaires de PACS n’ayant aucun lien de parenté avec le défunt. Il sera de 15 932 euros, au lieu de 1 594 euros actuellement
La fiscalité de l’épargne
Deux amendements concernent les placements préférés des Français. Pour le Plan d’épargne retraite (PER), la période pour utiliser le plafond de déduction fiscale des versements volontaires pourrait être prolongée de trois à cinq ans. Pour l’assurance-vie, il sera possible de transmettre par anticipation aux bénéficiaires les primes versées avant le 1er octobre 2025, dans la limite de 152 000 euros.
La fiscalité des grandes fortunes
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La Contribution différentielle sur les hauts revenus (CDHR) retouchée
Les députés ont décidé de prolonger la CDHR jusqu’à ce que le déficit public repasse sous les 3 % du PIB. L’assujettissement se fera sur le même seuil que celui de la CEHR (revenu net imposable). Certaines réductions et crédits d’impôt ne seront pas pris en compte. Par ailleurs, le mécanisme de décote sera ajusté pour les contribuables ayant un revenu fiscal inférieur à 330 000 € (célibataires) ou 660 000 € (couples).
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Le retour de l’Exit tax
Une « exit tax 2.0 » sera mise en place pour les Français quittant le pays. Parmi les amendements adoptés, il est prévu que les plus-values latentes seront imposées au départ et remboursées si elles sont conservées pendant plus de quinze ans.
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L’Impôt sur la fortune immobilière (IFI) recentré
L’IFI se transforme en impôt sur la fortune improductive. L’assiette s’élargit aux biens immobiliers, bijoux, œuvres d’art, cryptomonnaies, véhicules de collection, yachts ou certains contrats d’assurance-vie investis dans des supports non productifs. Le seuil d’imposition est fixé à 2 millions d’euros. Un abattement d’1M€ pour un bien au choix et une réduction de 30 % pour la résidence principale pourrait s'appliquer. Le barème progressif laisse place à un taux unique de 1 % sur la part du patrimoine taxable dépassant le seuil.
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La Taxe sur les holdings patrimoniales vidée de sa substance ?
Cette taxe ciblera uniquement les actifs détenus à des fins purement fiscales, excluant la trésorerie nécessaire à la stratégie des PME et ETI familiales. Les biens somptuaires concernés incluent désormais les aéronefs non commerciaux, vins et alcools, et chevaux de course. Le seuil de détention pour être redevable passe à 50 % (contre 33,33 % initialement).
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La réforme du Pacte Dutreil
Les députés ont adopté une série d’amendements qui proposent d’écarter les biens non professionnels des exonérations accordées par le pacte Dutreil sur la transmission des entreprises. Les députés ont aussi allongé la durée de détention minimale des actions par ceux à qui une entreprise est ainsi transmise. De six ans, celle-ci est portée à huit ans. Dernier changement, au moins l’un de ceux à qui l’entreprise est transmise devra être âgé de 18 à 60 ans.
La fiscalité immobilière
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Un nouveau soutien à l’investissement immobilier
Le soutien aux investisseurs immobiliers se traduira par un nouveau dispositif d’incitation, plutôt qu’un statut spécifique de bailleur privé. À partir du 1er janvier 2026 et jusqu’au 31 décembre 2028, les particuliers acquérant un bien neuf ou en VEFA pour le louer en nu à une personne extérieure à leur foyer fiscal pourront amortir 2 % du prix d’acquisition (dans la limite de 5 000 euros par an et par foyer fiscal). Les biens doivent être loués sous deux ans, pour au moins neuf ans, avec possibilité de prolongation de l’amortissement.
Un mécanisme de soutien à la rénovation énergétique des logements anciens est également prévu. Le doublement du déficit foncier sur le revenu global sera prorogé jusqu’à fin 2027. Le plafond sera porté à 21 400 euros, reportable sur huit ans au lieu de six.
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Une exonération des dons familiaux aux primo accédants
Un abattement temporaire au titre des dons de sommes d’argent consentis dans un cadre familial a été voté. Cela concerne ainsi les arrière-grands-parents et arrière-petits-enfants, grands-parents et petits-enfants et parents et enfants. Ces donations peuvent aller jusqu’à 100 000 € par donateur, affectés à l’acquisition ou à la construction de la résidence principale. Les montants sont cependant limités à 300 000 € par enfant donataire.
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Un allégement de la fiscalité sur les plus-values
Enfin, la durée de détention nécessaire pour bénéficier de l’exonération d’impôt sur la plus-value de cession d’une résidence secondaire passera de 22 à 17 ans.
Présent d’usage ou don manuel : le cadeau d’Ousmane Dembélé à sa mère relance le débat fiscal
Le débat entre présent d’usage et don manuel ne passionne pas seulement les fiscalistes. Il touche en réalité tous les contribuables susceptibles d’offrir — ou de recevoir — un cadeau important. Le dernier exemple en date vient du monde du football. Celui d’Ousmane Dembélé, lauréat du Ballon d’Or 2025, et d’un virement réalisé à sa mère il y a quelques années.
Un « cadeau d’anniversaire » à 200 000 euros
En 2017, alors qu’il évoluait au Borussia Dortmund, l’international français avait offert à sa mère, Fatimata Dembélé, une somme de 200 000 euros à l’occasion de son quarantième anniversaire. Selon le joueur, il s’agissait d’un simple « cadeau d’anniversaire », un geste filial qu’il estimait exonéré d’impôts.
Mais l’administration fiscale n’a pas la même lecture. Pour le fisc, ce transfert s’apparente à un revenu imposable plutôt qu’à un présent d’usage. Une divergence d’interprétation qui a conduit Mme Dembélé à contester la taxation devant le tribunal administratif de Rennes.
Une affaire aux contours flous
Le rapporteur public a estimé que la taxation était justifiée. Fatimata Dembélé était alors employée par une société gérant l’image de son fils. Par ailleurs, le virement avait été effectué six mois après l’anniversaire, sur un compte espagnol non déclaré.
La mère du joueur a cependant demandé la décharge de la cotisation supplémentaire d’impôt sur le revenu, aux prélèvements sociaux et aux pénalités infligées.
Présent d’usage ou don manuel : où est la frontière ?
La question n’est pas anodine. En droit français, la distinction entre présent d’usage et don manuel est essentielle. Car c'est elle qui détermine si un transfert d’argent doit être déclaré et taxé.
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L’occasion du cadeau
Un présent d’usage est un cadeau offert à l’occasion d’un événement particulier : anniversaire, mariage, réussite à un examen, Noël, naissance, etc. La Première chambre civile de la Cour de cassation l’a rappelé. Il s’agit d’un don fait conformément à un usage social et n’excédant pas une certaine valeur. Un transfert sans lien avec un événement précis ne peut donc pas être considéré comme un présent d’usage. Le juge l'a souligné dans un arrêt du 25 septembre 2013.
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La proportionnalité du don
La valeur du cadeau doit rester proportionnée à la fortune, aux revenus et au train de vie du donateur. L’article 852 du Code civil précise que le caractère de présent d’usage « s’apprécie à la date où il est consenti et compte tenu de la fortune du disposant ».
Aucune limite chiffrée n’est fixée par la loi, mais la pratique recommande de ne pas dépasser : 2 % du patrimoine, ou 2,5 % des revenus annuels. En clair : plus le donateur est fortuné, plus ses cadeaux peuvent être généreux — à condition qu’ils ne « l’appauvrissent » pas.
Un concept souple, mais risqué
Le présent d’usage peut prendre diverses formes : argent, bijoux, mobilier, véhicule, œuvres d’art, titres financiers… Il bénéficie d’un régime fiscal avantageux. Celui-ci n'est, en effet, ni imposable au titre des droits de donation, ni rapportable à la succession.
Mais l’absence de critères stricts rend la frontière avec le don manuel particulièrement floue.
Les juges apprécient au cas par cas la nature du cadeau.
Quelques exemples illustrent cette variabilité
Pour la Cour d’appel de Paris, un chèque offert par une mère à ses enfants à l’occasion de Noël, pour un montant total de 200 000 francs (soit environ 30 500 €) au regard d’un patrimoine familial de 8,2 millions de francs (1,25 M€), a été reconnu comme un présent d’usage.
À l’inverse, la Cour de cassation a refusé cette qualification lorsqu’un époux avait remis un chèque bancaire à son épouse. Le montant, complété par cette dernière, s’élevait à 60 754,30 francs (9 250 €), sans que l’occasion du cadeau soit précisée.
De même, un chèque de 200 000 € remis par un dirigeant à un ancien collaborateur pour son départ à la retraite n’a pas été considéré comme un présent d’usage. La Cour a relevé que deux ans s’étaient écoulés entre le départ effectif à la retraite et la remise du chèque, ce qui rendait le lien avec l’événement trop éloigné (Cour d’Appel de Paris, 2024).
Ce que l’on peut relever dans le cas d’espèce
Dans l’affaire de Madame Dembélé, plusieurs éléments posent question :
- Le versement n’a pas été effectué au moment précis de l’anniversaire annoncé, mais six mois après. L’occasion particulière paraît moins clairement mise en avant.
- Le montant (200 000 €) est relativement élevé, surtout si on le rapporte au contexte (bien que la fortune de l’auteur du don soit déjà probablement élevée à ce moment-là,). La proportionnalité peut donc être discutée.
- Le fait que la bénéficiaire soit employée par une société liée à l’auteur du don pourrait faire basculer la qualification vers un revenu déguisé plutôt qu’un simple présent affectif.
- Le virement a transité par un compte étranger non déclaré, ce qui peut complexifier la situation sous l’angle fiscal ou de dissimulation.
Les conseils de Scala Patrimoine
En l’absence de cadre précis, la prudence reste de mise. Les experts recommandent de conserver toutes les preuves du caractère de présent d’usage : relevé bancaire à la date de l’événement, copie de l’ordre de virement, facture ou courrier explicatif.
Car en cas de requalification en don manuel, les conséquences sont lourdes : droits de donation exigibles, rappel fiscal au décès, et possible remise en cause du partage successoral.
L’affaire Dembélé illustre à quel point la ligne entre générosité familiale et don fiscalement taxable peut être ténue. Entre affection et imposition, le juge devra trancher : s’agissait-il d’un simple cadeau d’anniversaire, ou d’un don dissimulé ? La décision attendue des juges administratifs pourrait bien rappeler à chacun que le fisc ne plaisante pas avec les cadeaux.
Projet de Loi de Finances pour 2026 : les mesures qui concernent votre patrimoine
Enfin ! Le gouvernement Lecornu II a levé le voile sur son projet de loi de finances pour 2026. Ce budget, très attendu, reprend dans ses grandes lignes le texte élaboré par François Bayrou avant sa chute politique.
Selon le Haut Conseil des finances publiques, les nouvelles mesures fiscales devraient générer 13,7 milliards d’euros de recettes supplémentaires, réparties entre entreprises et ménages.
L’objectif affiché est clair : réduire le déficit public. L'idée étant de le ramener de 5,4 % en 2025 à 4,7 % en 2026.
Les plus fortunés mis à contribution
L’essentiel de l’effort reposera sur les ménages les plus aisés. Le projet prévoit en effet la création d’une taxe sur le patrimoine financier, visant notamment les holdings, doublée d’un impôt complémentaire sur les très hauts revenus. Montant attendu : 2,5 milliards d’euros.
À ces mesures s’ajoutera la poursuite de la rationalisation des niches fiscales et sociales. Celle-ci devrait rapporter près de 5 milliards d’euros.
Certaines propositions alternatives, comme la mise en place d’une « taxe Zucman » sur les plus grandes fortunes, n’ont finalement pas été retenues. Le statut du bailleur privé ne verras pas non plus le jour. Les députés lui préférant un nouveau dispositif de soutien à l'investissement locatif.
Reste que la route s’annonce périlleuse. Dans un climat d’instabilité chronique, le gouvernement devra faire preuve d’une grande habileté pour maintenir sa trajectoire budgétaire. Les débats parlementaires promettent d’être houleux, et nul doute que le texte subira de nombreux amendements avant son adoption définitive, prévue au 31 décembre 2025.
Gel du barème de l’imposition sur le revenu ?
Le barème de l’IR est - habituellement - indexé chaque année sur l’inflation, afin de tenir compte des effets de la hausse des prix.
Pour assurer une contribution de chacun, les barèmes de l’impôt sur le revenu et de la CSG devaient etre maintenus en 2026 à leur niveau actuel. Cela aurait eu pour conséquences d’augmenter mécaniquement les impôts de certains ménages, et de rendre imposable de nouveaux ménages qui ne l’étaient pas. Le législateur attendait de 2,2 Md€ de cette disposition. Mais les députés ont décidé de revenir sur cette disposition. Le barème serait ainsi bien indexé sur l'inflation.
Suppression de l’abattement forfaitaire de 10 % pour les retraités ?
Le projet de loi de finances pour 2026 initial prévoyait de supprimer l’actuel abattement proportionnel de 10 % sur les pensions de retraite. Celui-ci sera toutefois remplacer par un abattement forfaitaire de 2 000 € pour un célibataire et 4 000 € pour un couple. Cette réforme devait en principe protéger les contribuables touchant les pensions les plus faibles. Mais par amendement, les députés ont choisi de ne pas appliquer cette disposition.
Création d’une taxe sur le patrimoine financier des holdings patrimoniales
Le gouvernement entend frapper au cœur des stratégies d’optimisation fiscale avec la mise en place d’une nouvelle taxe sur le patrimoine financier des holdings patrimoniales. Inspiré de dispositifs existant déjà aux États-Unis ou en Irlande, ce mécanisme vise à contrer la pratique des « cash box » : ces sociétés servant de réceptacle à des revenus non distribués, échappant ainsi à l’impôt.
Concrètement, la taxe s’appliquerait aux holdings dont l’activité est majoritairement patrimoniale, caractérisée par une prépondérance de revenus passifs, et dans lesquelles une personne physique – ou son cercle familial – détient au moins un tiers des droits.
Le budget préliminaire fixe le taux à 2 % de la valeur vénale des actifs non professionnels détenus dans ces holdings, à condition que leur bilan excède 5 millions d’euros. Seules les structures percevant plus de 50 % de revenus passifs seraient concernées, les actifs qualifiés d’« outils professionnels » restant exclus du dispositif.
Par souci d’équité, la taxe ne se limiterait pas aux holdings françaises : les résidents fiscaux de l’Hexagone détenant de telles structures à l’étranger seraient également redevables.
Selon les estimations de Bercy, près de 4 000 ménages vont etre concernés par cette mesure. Mais la complexité technique du dispositif, les risques de contentieux et les difficultés d’application suscitent déjà de vifs débats. Les discussions parlementaires s’annoncent donc déterminantes pour préciser les contours et la portée réelle de cette nouvelle fiscalité patrimoniale.
Prorogation de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR)
Le gouvernement Lecornu II a confirmé, dans son projet de loi de finances pour 2026, la prorogation d’un an de la contribution différentielle sur les hauts revenus.
Instauré par la loi de finances pour 2025, ce dispositif vise à garantir un taux d’imposition effectif minimal de 20 % pour les contribuables les plus aisés. Il s’applique aux ménages dont le revenu annuel atteint au moins 250 000 euros pour une personne seule et 500 000 euros pour un couple.
Initialement conçue comme une mesure temporaire, limitée à l’année 2025, cette contribution exceptionnelle sera finalement maintenue en jusqu'à ce que le déficit public tombe en dessous de 3 % du PIB.
Réforme du statut des jeunes entreprises innovantes (JEI)
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale introduit un resserrement des conditions d’accès au statut de jeune entreprise innovante (JEI). Désormais, la part des dépenses de recherche et développement (R&D) exigée dans la masse salariale pour bénéficier de ce régime passerait de 20 % à 25 %.
Cette modification, en apparence technique, aura des conséquences concrètes : elle devrait réduire le nombre de start-up éligibles à ce dispositif particulièrement prisé. Actuellement, près de 4 500 entreprises en bénéficient en France.
Elargissement du Dispositif « Coluche » en faveur des associations
Le gouvernement prévoit de doubler le plafond des dons éligibles au dispositif « Coluche », qui offre une réduction d’impôt de 75 %. Le plafond passerait ainsi de 1 000 à 2 000 euros par donateur.
Cette mesure vise à soutenir les associations d’intérêt général sans but lucratif œuvrant en faveur des plus démunis. Elle concernerait notamment les organismes qui accompagnent les personnes en difficulté, fournissent repas et soins médicaux, ou facilitent le relogement des victimes de violences domestiques.
Suppression de niches fiscales jugées inefficaces
Le projet de loi de finances pour 2026 prévoit la suppression de 23 niches fiscales, jugées « obsolètes ou inefficaces », parmi les 474 existantes. Certains dispositifs concernent un grand nombre de foyers.
• Réduction d’impôt pour frais de scolarité dans le secondaire et le supérieur
Aujourd’hui, les parents d’enfants au collège, au lycée ou dans l’enseignement supérieur bénéficient d’une réduction d’impôt de 61 €, 153 € ou 183 € selon le niveau d’études. Si cette réduction reste modeste pour chaque foyer, elle touche 4,5 millions de contribuables et coûte plus de 240 millions d’euros aux finances publiques. Le projet de loi de finances pour 2026 proposait donc de la supprimer. Mais l'Assemblée nationale est revenue sur ce projet. En l'état actuel des choses, cette réduction d'impôt est donc maintenue.
• Défiscalisation des indemnités journalières pour affection longue durée (ALD)
Les malades reconnus en ALD bénéficient d’une prise en charge intégrale par l’Assurance Maladie. Actuellement, en cas d’arrêt maladie, ils peuvent déduire de leur impôt sur le revenu l’intégralité des indemnités journalières versées par la Sécurité sociale, un avantage fiscal représentant 700 millions d’euros pour l’État. Le projet de loi prévoyait la suppression de cette exonération. Par amendement, les députés ont finalement maintenu la défiscalisation de ces indemnités journalières.
• Crédits d’impôts pour la formation des chefs d’entreprise et pour le rachat d’une entreprise par ses salariés
• Déductions des dépenses engagées par les sportifs professionnels pour leur reconversion
Ces mesures s’inscrivent dans une logique de rationalisation fiscale et de maîtrise des dépenses publiques. Mais elles devraient susciter aussi de vifs débats, tant elles touchent des catégories de contribuables très diverses.
Suspension de la réforme des retraites
Le gouvernement Lecornu a annoncé la suspension de la réforme des retraites jusqu’en janvier 2028. Concrètement, cela signifie aucun relèvement de l’âge légal de départ ni allongement de la durée d’assurance pendant cette période.
Cette pause, si elle répond à des préoccupations sociales fortes, aura cependant un coût estimé à 1,8 milliard d’euros d’ici 2027.
Le statut du bailleur privé ne verra pas le jour
Écarté lors de la présentation du projet de loi de finances pour 2026, le statut du bailleur privé ne verra finalement pas le jour. Les députés lui préférant un nouveau dispositif d’incitation. À partir du 1er janvier 2026 et jusqu’au 31 décembre 2028, les particuliers acquérant un bien neuf ou en VEFA pour le louer en nu à une personne extérieure à leur foyer fiscal pourront amortir 2 % du prix d’acquisition (dans la limite de 5 000 euros par an et par foyer fiscal). Les biens doivent être loués sous deux ans, pour au moins neuf ans, avec possibilité de prolongation de l’amortissement.
Contribution additionnelle sur certains avantages sociaux
Le projet de loi de finances 2026 prévoit également de taxer certains avantages accordés par les employeurs. Sont concernées les sommes versées sous forme de titres-restaurant, de chèques vacances, de chèques cadeaux ou d’autres avantages sociaux et culturels.
Le législateur appliquerait ainsi une contribution patronale additionnelle de 8 % à ces dispositifs.
Projet de Loi de Finances pour 2026
Le rendez-vous des marchés financiers - Octobre 2025
Marchés financiers & économie : les points clés
- Les marchés actions américains poursuivent leur ascension, portés par une saison des résultats exceptionnelle au deuxième trimestre, notamment chez les géants de la tech.
- Les Etats-Unis basculent dans le "shutdown", le pays est - en partie - paralysé pour la quinzième fois depuis 1981 ;
- L’agence de notation Fitch Ratings a abaissé la note de la dette souveraine française, qui passe de AA- à A+, suscitant de nouvelles interrogations sur la solidité financière du pays.
- Alimenté par la gourmandise des banques centrales et les incertitudes géopolitiques, l’or a atteint un sommet historique, franchissant pour la première fois la barre des 3 820 dollars l’once.
- La Réserve fédérale américaine (Fed) a abaissé ses taux directeurs de 0,25 point de pourcentage.
Les grandes actualités géopolitiques et les performances sur les marchés financiers
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Les tensions internationales
Le monde est secoué par de profondes turbulences géopolitiques. Depuis 2022, le conflit opposant la Russie et l’Ukraine s’enlise, tandis que les États-Unis et, plus particulièrement, les puissances européennes apportent un soutien discret mais constant à Kiev, sous la présidence de Volodymyr Zelensky. Cette tension permanente électrise les pays environnants. Dernier épisode en date : plusieurs drones russes ont violé l’espace aérien polonais avant d’être abattus. Il convient de rappeler que la Pologne est membre de l’OTAN, ce qui ajoute une dimension internationale et inquiétante à l’incident.
Au Moyen-Orient, la situation demeure particulièrement préoccupante. Depuis le 7 octobre 2023, un conflit meurtrier oppose Israël au mouvement islamiste palestinien Hamas. Une guerre implacable se déroule dans la bande de Gaza, dont les répercussions se font sentir bien au-delà de la région.
Récemment, Israël a franchi un nouveau cap en éliminant des dirigeants du Hamas en plein cœur de Doha, au Qatar, un acte qui marque une escalade significative dans ce conflit déjà sanglant. Dans ce contexte, Donald Trump a lancé une initiative diplomatique majeure visant à mettre un terme aux hostilités. Il a présenté un plan de paix en vingt points, prévoyant la libération immédiate et totale des otages, l’arrêt des combats et le désarmement du Hamas. Ce plan a été approuvé par Israël, tandis que la réponse du Hamas reste désormais attendue, dans un climat d’incertitude qui plane sur la région.
Ces événements majeurs ont des conséquences directes sur les marchés mondiaux, stimulant la demande d’or et provoquant un léger rebond des cours du pétrole, reflet tangible de l’incertitude qui traverse la planète.
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La note de la France abaissée
L’annonce n’aura surpris personne, mais elle n’en demeure pas moins symbolique. L’agence de notation Fitch Ratings a dégradé la note de la dette souveraine française, qui passe de AA- à A+, avec perspective stable. Une décision qui intervient dans un climat politique incertain, marqué par le remplacement de François Bayrou par Sébastien Lecornu à Matignon.
Selon Fitch, la France souffre d’une dette trop élevée et d’une trajectoire budgétaire qui peine à convaincre. Avec un déficit public estimé à 5,8 % du PIB, l’agence doute fortement de la capacité du pays à ramener la barre sous les 3 % d’ici 2029.
Le contexte électoral n’arrange rien : à l’approche de la présidentielle de 2027, Fitch estime que les marges de manœuvre pour une consolidation budgétaire sont encore plus limitées. Le risque d’un blocage politique durable plane au-dessus des perspectives financières du pays.
Pour le Financial Times, le constat est sévère : la France est désormais reléguée du cercle des pays dits "core" vers celui des "periphery". Un symbole fort : l’État français emprunte aujourd’hui à des taux plus élevés que certaines de ses propres champions nationaux comme L'Oréal, Airbus ou AXA.
Sur les marchés, la réaction reste mesurée. Les investisseurs avaient largement anticipé ce déclassement. Le taux à 10 ans (OAT) est même redescendu à 3,42 % après avoir frôlé les 3,53 %, et l’écart avec l’Allemagne demeure contenu, autour de 75-80 points de base.
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Les performances des marchés financiers
Dans le sillage de l’annonce d’un partenariat stratégique entre OpenAI et Nvidia, prévoyant un investissement progressif pouvant atteindre 100 milliards de dollars dans les infrastructures d’OpenAI, les marchés américains ont connu une période flamboyante, marquée par un nouveau grand chelem des indices phares. En septembre, les trois principaux indices américains – le Dow Jones (+2,5 %), le S&P 500 (+4,2 %) et le Nasdaq (+6,5 %) – ont tous inscrit de nouveaux records historiques.
La saison des résultats du deuxième trimestre a confirmé l’extraordinaire dynamique bénéficiaire des géants technologiques. Les « 7 magnifiques » (Nvidia, Microsoft, Apple, Amazon, Alphabet, Tesla et Meta) ont affiché une croissance de leur bénéfice par action (BPA) de 28 % sur un an au deuxième trimestre, contre seulement 7 % pour le reste des sociétés composant le S&P 500.
Le S&P 500 se négocie désormais à 23 fois les bénéfices futurs, avec un ratio cours/ventes de 3x, témoignant d’une valorisation soutenue mais robuste.
L’élan des marchés américains a entraîné dans son sillage les principaux indices boursiers mondiaux. En Europe, le CAC 40 progresse de 3,2 %, tandis que le FTSE MIB, indice italien, gagne 1,3 %. Le DAX 30, référence de la Bourse allemande réalise, quant à lui, un modeste + 0,3 %.
En Asie, la progression est plus modeste : le Shanghai Composite avance de 0,2 %, et le Nifty 50, indice phare de la Bourse indienne, s’apprécie de 0,9%.

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L’or va de record en record
L’or attise plus que jamais les convoitises. Depuis le début de l’année, le précieux métal jaune a enregistré une progression spectaculaire de plus de 45 %, stimulée par la perspective de baisses de taux aux États-Unis, les tensions géopolitiques persistantes et le regain d’inquiétude quant à la stabilité des devises.
Symbole de sécurité et de valeur refuge, l’or est aussi l’actif de prédilection des banques centrales. Elles en détiennent aujourd’hui davantage que les Bons du Trésor américains. Depuis l’embargo sur les réserves en devises imposé à la Russie, de nombreux pays émergents - Chine, Inde, Turquie - s’efforcent de garantir leur stabilité et leur indépendance financière vis-à-vis du dollar américain en accumulant de l’or. Entre 2022 et 2025, les acquisitions des banques centrales ont plus que triplé, dépassant désormais le seuil symbolique des 1 000 tonnes annuelles.
Dans ce contexte, l’once d’or a atteint un nouveau sommet historique, franchissant la barre des 3 820 dollars.
L’argent, fidèle compagnon du métal jaune, suit le mouvement. Pour la première fois depuis 2011, son cours dépasse les 40 dollars l’once.
Etats-Unis : inquiétudes sur le front de l’emploi
Mauvaise nouvelle pour l’économie mondiale : l’OCDE prévoit un net ralentissement de la croissance dans les mois à venir, pointant du doigt, entre autres facteurs, la hausse spectaculaire des droits de douane instaurée par l’administration Trump. Selon ses projections, le PIB mondial progresserait de 2,9 % en 2026, contre 3,2 % en 2025.
Aux États-Unis, la croissance devrait également marquer le pas, passant de 1,8 % cette année à 1,5 % l’an prochain. La France, quant à elle, pourrait voir son rythme de croissance accélérer légèrement, de 0,6 % en 2025 à 0,9 % en 2026, alors que l’OCDE anticipait jusqu’ici un taux de 1,2 %.
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Les taxes douanières freinent-elles l’emploi aux États-Unis ?
Aux États-Unis, le PIB du deuxième trimestre a été révisé à la hausse, atteignant 3,8 % — nettement au-dessus des 3,3 % anticipés par les analystes. Cette révision confirme la solidité de l’économie américaine, après un recul de 0,5 % enregistré au cours des trois premiers mois de l’année.
Parallèlement, les inscriptions hebdomadaires au chômage ont chuté de 14 000 unités par rapport à la semaine précédente, pour s’établir à 218 000 lors de la troisième semaine de septembre.
Pourtant, le secteur privé américain montre des signes de ralentissement. En août, l’ADP n’a enregistré que 54 000 créations d’emplois, loin des 75 000 attendues, tandis que les chiffres des NFP ont déçu, avec un taux de chômage en hausse à 4,3 %.
Selon les gérants de la société de gestion Altitude IS, « le marché du travail manifeste des signes flagrants d’essoufflement. En août, seules 22 000 créations de postes ont été enregistrées, contre une moyenne mensuelle de 200 000 lorsque l’économie fonctionne à plein régime. Tout indique que les entreprises américaines ont freiné leurs embauches sous l’effet des taxes douanières, des incertitudes politiques, du déploiement de l’intelligence artificielle, des pénuries de main-d’œuvre et du coût élevé du crédit. Les postes à pourvoir ont continué de se réduire, retrouvant leur niveau de 2018. »
Le rapport Challenger Gray souligne, quant à lui, une hausse des licenciements en août, avec 85 979 départs contre 62 075 en juillet. Comme si cela ne suffisait pas, le Bureau of Labor Statistics a révisé à la baisse les créations d’emplois précédemment publiées. Entre avril 2024 et mars 2025, l’économie américaine a finalement créé 911 000 emplois de moins que prévu, soit l’équivalent de 76 000 postes manquants chaque mois.
Autrement dit, l’emploi américain commence à tousser à l’orée de l’hiver.
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Des indicateurs économiques décevants
Les difficultés du marché de l’emploi ne constituent pas le seul nuage assombrissant l’horizon économique des États-Unis. La confiance des consommateurs semble, elle aussi, s’étioler. En septembre, l’indice de confiance des consommateurs établi par l’Université du Michigan a chuté plus fortement que prévu. Alors qu’une baisse de 58,2 à 55,4 points était anticipée, l’indicateur s’est finalement effondré à 55,1 points, traduisant une inquiétude palpable parmi les Américains.
- Une perte de confiance
Cette érosion de la confiance se répercute directement sur l’activité économique. Le secteur manufacturier, par exemple, continue de montrer des signes de contraction, pour le sixième mois consécutif en août. L’indice ISM manufacturier a certes progressé légèrement, passant de 48,0 en juillet à 48,7, mais demeure en deçà du seuil critique de 50 points, frontière entre expansion et repli. Les économistes tablaient, eux, sur 49,0 points.
De son côté, l’indice PMI manufacturier a reculé davantage que prévu, s’établissant à 52 points alors qu’une baisse à 52,2 points était attendue. Le secteur des services n’est pas épargné : son indice PMI a également enregistré une contraction plus marquée que prévu, tombant de 54,5 à 53,9 points, contre 54 points anticipés par les analystes.
Enfin, l’indice PMI composite de S&P Global, qui synthétise les performances des secteurs manufacturier et des services, a suivi cette tendance déclinante. Attendu stable à 54,6 points, il a finalement glissé à 53,6 points en septembre, confirmant un ralentissement généralisé de l’économie américaine.
- Un nouveau Shutdown
Et, pour parachever ce tableau, le pays s’enfonce dans un nouveau « shutdown ». Autrement dit, une paralysie partielle de l’administration fédérale américaine, conséquence directe de l’impasse budgétaire qui paralyse le Congrès. Faute d’accord sur les allocations, le président et les parlementaires n’ont pas su dégager de compromis ; l’État fédéral se retrouve ainsi privé des ressources nécessaires pour rémunérer une large partie de ses fonctionnaires.Ce scénario n’a malheureusement plus rien d’exceptionnel : on dénombre pas moins de quinze « shutdowns » depuis 1981. Reste à savoir si les tractations en cours permettront, cette fois, de dessiner rapidement un terrain d’entente rapidement..
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L’inflation américaine progresse légèrement mais reste sous contrôle
Donald Trump a porté les tarifs douaniers moyens sur les produits étrangers à 17,3 %, atteignant ainsi un niveau inédit depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Pourtant, malgré cette politique protectionniste, le déficit commercial des États-Unis a continué de croître, atteignant 78,3 milliards de dollars en juillet … une situation qui risque de faire froncer les sourcils de la Maison-Blanche.
Pour l’instant, cette flambée des droits de douane n’a pas encore eu d’impact significatif sur les prix à la consommation. Les entreprises américaines ont en grande partie absorbé ces coûts, tandis que les stocks accumulés grâce à des achats anticipés ont tempéré la hausse. Mais cette situation pourrait évoluer rapidement, à l’image du rebond de l’indice des prix à la production en juillet, qui atteint 3,7 % sur un an, son niveau le plus élevé depuis mars.
Malgré ces signaux, l’inflation est aujourd’hui contenue. Elle ressort à 2,7 % sur un an pour le mois d’août, contre 2,6 % en juillet. Une progression modeste, conforme aux attentes des économistes.
Hors éléments volatils, l’indice PCE « cœur » reste stable à 2,9%. Sur un mois, l’indice PCE progresse de 0,3 %, tandis que l’indice cœur avance de 0,2 %. Ces niveaux confortent l’idée d’un atterrissage en douceur de l’inflation américaine.
Au-delà de la seule dynamique des prix, les données du Bureau of Economic Analysis (BEA) montrent une hausse du revenu personnel de 0,4 % et une progression des dépenses de consommation de 0,6 % sur le mois. Pour les analystes, cette combinaison de croissance maîtrisée et de consommation soutenue pourrait inciter la Réserve fédérale à poursuivre ses baisses de taux d’ici la fin de l’année.
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FED : entre prudence et pressions politiques
La parole de la Réserve fédérale américaine demeure scrutée avec une attention quasi obsessionnelle par les marchés. Après de longs mois d’attente, la Fed a timidement amorcé la deuxième phase de son cycle d’assouplissement monétaire. Elle a ainsi réduit ses taux directeurs d’un quart de point, tout en laissant la porte ouverte à deux nouvelles baisses d’ici la fin de l’année, prévues en octobre et en décembre. Mais l’institution doit avancer sur un terrain délicat, entre le spectre de la stagflation et les pressions politiques croissantes. Les fameux « dot plots » confirment une trajectoire menant à un taux dit « neutre » d’environ 3 % d’ici 2026.
Lors de la conférence de presse qui a suivi la décision, le président Jerome Powell a insisté sur le risque baissier « significatif » pesant sur l’emploi. La réduction des taux devrait donc s’effectuer avec prudence et lenteur, probablement jusqu’en mai prochain, date à laquelle Powell quittera son poste.
Pendant ce temps, Donald Trump avance ses pions pour exercer un contrôle indirect sur la politique monétaire de la Fed. À mesure que le mandat de Powell approche de son terme, des hommes de confiance sont progressivement installés à des postes stratégiques au sein de la banque centrale.
C’est le cas de Stephen Miran, récemment nommé à la Fed. Ancien économiste à la Maison-Blanche, Miran défend une ligne économique clairement inspirée de la vision trumpiste. Lors de la dernière réunion, il s’est distingué en étant le seul à plaider pour une baisse des taux de 0,5 %, alors que l’ensemble de ses collègues s’accordait sur une réduction plus mesurée de 0,25 %. En mai 2026, Donald Trump aura la possibilité de nommer un nouveau président à la tête de la Fed, consolidant ainsi son emprise sur l’institution.
Zone Euro : la timidité de la BCE
À quoi faut-il s’attendre pour la croissance européenne ? Selon sa dernière étude, la Banque centrale européenne (BCE) esquisse un scénario plus optimiste qu’annoncé auparavant. L’institution de Francfort table désormais sur une progression du PIB de la zone euro de 1,2 % en 2025, soit 0,3 point de plus que dans ses prévisions de juin. Cette embellie, toutefois, ne devrait pas s’inscrire dans la durée : la BCE anticipe un léger ralentissement à 1 % en 2026, avant un regain de dynamisme en 2027, avec une croissance portée à 1,3 %.
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L’emploi résiste …
L’économie de la zone euro a enregistré une progression timide de 0,1 % au deuxième trimestre 2025, marquant sa performance la plus faible depuis la fin de l’année 2023. À titre de comparaison, le premier trimestre avait offert un rebond plus vigoureux, avec une hausse du PIB de 0,6 %.
Dans ce contexte, l’indice composite Flash PMI HCOB, ajusté des variations saisonnières, confirme la résilience de l’activité privée. En septembre, il s’est maintenu au-dessus du seuil symbolique de 50,0 pour le neuvième mois consécutif, indiquant une nouvelle phase d’expansion. Avec un score de 51,2, légèrement supérieur à celui d’août (51,0), l’indicateur pointe vers une croissance certes modérée, mais qui n’en demeure pas moins la plus soutenue depuis mai 2024. Les analystes, qui tablaient sur 51,1, voient ainsi leurs anticipations légèrement dépassées.
La locomotive allemande a largement contribué à cette dynamique. Outre-Rhin, l’activité globale a bondi en septembre, affichant sa plus forte expansion depuis mai 2023, un record égalé seulement en mai 2024. En revanche, le contraste demeure saisissant avec la France, où l’activité s’est contractée pour un treizième mois consécutif, illustrant la persistance des difficultés hexagonales.
Un autre rayon de lumière nous vient du marché du travail. Au deuxième trimestre, l’emploi a poursuivi sa progression, avec une hausse de 0,1 % tant dans la zone euro que dans l’Union européenne par rapport au trimestre précédent. Une preuve supplémentaire de la robustesse de l’emploi, qui continue de jouer un rôle d’amortisseur face aux vents contraires de l’économie.
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…. Le secteur manufacturier souffre
Le sentiment économique dans la zone euro a connu, en septembre, une légère embellie. L’indice mensuel mesurant la confiance dans les vingt pays partageant l’euro s’est établi à 95,5, dépassant ainsi les prévisions des économistes, qui tablaient sur 95,2. Pour rappel, il s’était fixé à 95,3 en août.
Dans l’industrie, le climat économique demeure morose, passant de -10,2 en août (révisé de -10,3) à -10,3 ce mois-ci, une performance néanmoins supérieure aux attentes du consensus, qui anticipait -10,9. Le secteur des services, quant à lui, enregistre un indice de sentiment de 3,6 en septembre, en léger recul par rapport à 3,8 en août (révisé de 3,6), et se situant tout juste en dessous de la moyenne des prévisions à 3,7. Du côté des consommateurs, la confiance reste stable à -14,9, conforme aux anticipations des analystes et inchangée par rapport au mois précédent.
La production industrielle, corrigée des variations saisonnières, a poursuivi sa progression en juillet 2025, enregistrant une hausse de 0,3 % sur un mois. Sur un an, la croissance atteint 1,8 %, reflétant un dynamisme modéré mais continu dans l’ensemble de la zone euro.
Malgré le renchérissement des droits de douane, les exportations de biens vers le reste du monde ont résisté, culminant à 251,5 milliards d’euros en juillet 2025, en légère hausse de 0,4 % par rapport à la même période l’an dernier (250,4 milliards d’euros).
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La politique monétaire mise sur pause
Lors d’une conférence de presse très attendue, Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne, a annoncé la fin de la période de « désinflation » qui traversait l’Europe. Selon l’institution monétaire, le taux d’inflation actuel se rapproche désormais de l’objectif fixé à 2 %. En août 2025, l’inflation annuelle de la zone euro est estimée à 2,1 %, contre 2,0 % en juillet, selon une estimation préliminaire d’Eurostat, l’office statistique de l’Union européenne.
Face à cette stabilité des prix, la BCE a choisi de maintenir ses taux d’intérêt inchangés, son taux de dépôt demeurant à 2 %. Christine Lagarde a précisé que l’inflation se situe « là où nous voulons qu’elle soit », tout en rappelant que la politique monétaire resterait souple et ajustée « réunion après réunion », sans trajectoire préétablie. Celle-ci ajoutant que « l'économie de la zone euro résiste mieux que prévu aux droits de douane américains, ce qui laisse les risques d'inflation tout à fait contenus ».
Cet immobilisme inquiète certains observateurs, à l’image de Wilfrid Galand, directeur stratégiste chez Montpensier-Arbevel : « Alors que la croissance reste atone et que le moral des entreprises stagne en dessous du seuil d’expansion, la BCE ne peut se contenter d’appeler les autorités de l’Union à poursuivre les réformes. Elle doit au contraire prendre des risques et assouplir significativement les conditions financières en Europe, notamment en ralentissant le rythme de réduction de son bilan pour détendre les taux longs et créer les conditions d’un rebond de l’optimisme. »
Une prise de position qui reflète l’inquiétude partagée par une large partie des analystes économiques, soucieux de voir la BCE soutenir la dynamique de croissance plutôt que de s’en tenir à la prudence.
La croissance chinoise à la peine
Selon la dernière étude de l’OCDE, la deuxième puissance économique mondiale devrait voir sa croissance ralentir sensiblement dans les prochaines années : +4,7 % en 2025, puis +4,3 % en 2026. Une décélération notable, nourrie par une consommation bridée par une épargne de précaution tenace — héritage des séquelles de la pandémie et de l’effondrement du marché immobilier — et par le poids grandissant des barrières commerciales américaines. Pékin entend toutefois maintenir le cap de son programme de relance en 2025 afin de contenir ces turbulences.
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Un essoufflement manifeste
Si le PIB chinois a affiché une progression stable de 5,4 % au premier trimestre 2025, les signaux d’alerte se multiplient. La production industrielle, censée croître de 5,7 % en août, n’a progressé que de 5,2 %, soit son plus faible rythme depuis un an.
Le secteur manufacturier reste englué dans la contraction : l’indice PMI officiel a certes légèrement progressé à 49,8 en septembre, contre 49,4 en août, mais demeure sous la barre des 50 points, seuil symbolique entre expansion et repli.
Côté consommation, les ventes au détail n’ont augmenté que de 3,4 % en août, loin des 3,9 % attendus, atteignant leur plus bas niveau depuis novembre 2024. Le marché de l’emploi, lui aussi, s’assombrit : le chômage s’est établi à 5,3 %, son plus haut niveau en six mois.
« L’environnement externe reste marqué par de fortes instabilités et incertitudes, et les performances économiques de la Chine continuent de faire face à de nombreux risques et défis », a reconnu Fu Linghui, économiste en chef du Bureau national des statistiques (BNS).
La déflation, enfin, s’installe insidieusement : l’indice des prix à la consommation s’est contracté de 0,4 % sur un an en août, confirmant la difficulté de Pékin à enrayer cette spirale déflationniste.
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Une guerre commerciale loin d’être éteinte
À cela s’ajoute une confrontation commerciale toujours vive avec Washington. Les exportations chinoises vers les États-Unis ont chuté de 11,8 % en août par rapport au mois précédent, signe que les nouvelles taxes pèsent lourdement.
Une trêve temporaire a bien été conclue entre les deux puissances, valable jusqu’au 9 novembre : elle fixe à 30 % les droits de douane américains sur les produits chinois et à 10 % ceux appliqués par Pékin sur les marchandises venues d’outre-Atlantique. Une pause stratégique, plus qu’une véritable détente.
Dans ce contexte, la Chine tente de diversifier ses débouchés. L’Afrique apparaît comme l’un des terrains privilégiés de cette réorientation. En 2025, les exportations chinoises vers le continent ont bondi de 25 %, pour atteindre 122 milliards de dollars, une croissance bien supérieure à celle enregistrée avec d’autres régions.
L’Afrique représente désormais 6 % des exportations totales de la Chine, soit la moitié de ce que pèsent encore les États-Unis. Une proportion appelée à croître rapidement, au rythme du repli des échanges sino-américains.
Les convictions de Scala Patrimoine sur les marchés financiers
Le mois de septembre s’est distingué par une grande effervescence sur les marchés financiers, galvanisés par la première baisse de taux décidée par la FED. Ce pivot monétaire, longuement anticipé, a insufflé un nouvel élan aux places financières mondiales.
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Les marchés actions : la diversification comme impératif
L’impact s’est révélé particulièrement manifeste sur les marchés émergents, dopés par la progression des actions chinoises. Le secteur technologique, en plein essor, a été le principal moteur de cette dynamique. Il convient toutefois de préciser que cette vigueur repose avant tout sur le retour des investisseurs domestiques : l’allocation de l’épargne des ménages chinois vers les actions demeure faible — environ 5 % —, mais connaît une tendance haussière. À l’inverse, les investisseurs étrangers se montrent toujours réservés face aux incertitudes structurelles de l’économie chinoise.
Ce sursaut boursier contraste avec la torpeur persistante des indicateurs macroéconomiques. Les mesures de relance engagées par Pékin n’ont, pour l’heure, produit qu’un impact limité sur la demande intérieure, qui tarde à se redresser.
- La FED accélère, la BCE joue la prudence
Aux États-Unis, la Réserve fédérale a choisi d’abaisser ses taux directeurs à la fourchette de 4,00 %−4,25 %, sous la pression d’un marché de l’emploi en ralentissement. Cette décision intervient dans un contexte économique contrasté : les nouvelles prévisions de la Fed révèlent une croissance et une inflation révisées à la hausse pour 2026, tandis que le taux de chômage devrait reculer par rapport à 2025, rendant l’interprétation des signaux économiques particulièrement délicate.
L’économie américaine se trouve ainsi à la croisée des chemins entre mesures de soutien et tensions inflationnistes potentielles, amplifiées par la politique anti-immigration et l’introduction de nouveaux tarifs douaniers, dont l’impact sur les prix reste partiellement indéterminé. Un risque immédiat s’est matérialisé avec le « shutdown » de l’administration fédérale le 1er octobre, suite à l’absence d’accord budgétaire. Ce blocage, dont le coût est estimé à 0,2 % de croissance du PIB par semaine, n’a jusqu’à présent pas provoqué de réaction sur les marchés, la dernière paralysie similaire, fin 2018, ayant duré 35 jours.
En Europe, la Banque centrale européenne semble avoir atteint son objectif : l’inflation se stabilise autour de sa cible. Les défis se déplacent désormais sur le terrain budgétaire, avec un endettement public qui reste préoccupant, la France cristallisant une part des inquiétudes. Malgré ce contexte politique tendu, les marchés financiers français ont suivi la tendance haussière mondiale en septembre (+2,62 %), soutenus notamment par la performance remarquable du secteur bancaire.
- Un positionnement neutre les actions des principaux marchés financiers développées
Nous conservons une position neutre sur les actions des marchés développés, en raison des incertitudes structurelles persistantes. L’ampleur du ralentissement économique aux États-Unis demeure difficile à anticiper, tandis que le risque inflationniste lié aux tarifs douaniers et les tensions budgétaires en Europe et outre-Atlantique pèsent sur l’appétit pour le risque.
Malgré ces contraintes, certains fondamentaux continuent d’apporter un soutien. Aux États-Unis, les indicateurs de consommation se montrent résilients, même dans un contexte de détérioration du marché de l’emploi, et les résultats des entreprises dépassent régulièrement les attentes.
En Europe, l’ajustement monétaire opéré par la BCE est survenu au moment opportun, offrant un appui tangible aux économies de la zone.
Notre préférence se porte sur les actions des marchés émergents, stimulées notamment par les valeurs chinoises et un dollar en dépréciation. Dans cette région, nous recommandons une allocation diversifiée, afin de tirer parti de la dynamique tout en maîtrisant les risques.
- Une certaine prudence sur les marchés financiers chinois
Il est encore prématuré de miser fortement sur la Chine, en l’absence de reprise tangible de la demande intérieure, ou sur l’Inde, confrontée à des tensions persistantes avec son principal partenaire économique, les États-Unis. D’autres marchés asiatiques, tels que la Corée du Sud, Taïwan ou le Vietnam, apparaissent en revanche prometteurs. Ces pays profitent à la fois de l’essor de l’intelligence artificielle et de l’accélération des échanges intra-asiatiques, offrant des perspectives de croissance particulièrement attractives.
Sur le plan sectoriel, la diversification demeure essentielle. Nous continuons à privilégier le secteur technologique américain, malgré des valorisations élevées. Depuis l’émergence de ChatGPT, ce segment a généré près de 80 % des revenus de la zone, imposant sa prédominance et orientant les stratégies d’investissement aux États-Unis. Par ailleurs, une normalisation de la politique monétaire constitue un soutien direct pour ces entreprises à forte capacité de croissance.
Nous maintenons notre prudence sur les secteurs exposés aux tensions commerciales et aux tarifs douaniers, dont les impacts restent partiellement intégrés. Enfin, le secteur bancaire européen conserve un potentiel intéressant, bénéficiant de la pentification de la courbe des taux, qui pourrait encore se renforcer, et présentant des valorisations structurellement plus attractives que celles de ses homologues américains.
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Les marchés obligataires : des signaux contrastés
Le mois de septembre a été marqué par une activité exceptionnelle sur le marché obligataire européen. Plus de 200 milliards d’euros de dette ont été émis sur le marché primaire, un niveau inédit depuis 2021. La demande des investisseurs est restée soutenue, illustrée par un ratio de couverture massif de 4,66x, témoignant d’un appétit intact pour le crédit.
- Les marchés souverains : un rebond des taux longs
L’augmentation des taux souverains en Europe a entraîné une hausse mécanique des rendements du crédit, particulièrement sur le segment Investment Grade (IG), où l’effet taux explique près des trois quarts du rendement. Parallèlement, les spreads de crédit ont continué de se resserrer, tant sur l’IG que sur le High Yield (HY), tandis que l’écart entre les obligations corporate et financières atteignait un niveau historiquement étroit. Cette combinaison de rendements en hausse et de spreads serrés a permis au marché obligataire de terminer le mois sur une note positive.
Le marché souverain, en revanche, a montré des signes de tension. Les taux longs, notamment les emprunts à 30 ans, ont fortement bondi début septembre aux États-Unis, au Royaume-Uni, en France et au Japon. Cette flambée traduit la méfiance croissante des investisseurs face aux réalités budgétaires et aux défis d’endettement des États.
En France, l’incertitude politique a accentué cette tension, planant sur les décisions budgétaires à venir. Le 12 septembre, l’agence Fitch a ainsi abaissé la note souveraine du pays. Si le taux français à 10 ans s’est stabilisé au-dessus de 3,50%, le spread avec l’Allemagne (OAT/Bund) est demeuré étonnamment stable. Toutefois, cette situation ne reflète pas pleinement le risque budgétaire accru auquel la France est confrontée. La volatilité sur les taux français pourrait donc perdurer, tandis que d’autres agences de notation doivent encore se prononcer. À titre de comparaison, des voisins comme l’Espagne et l’Italie ont récemment vu leur note relever, plaçant la France en position de « mauvais élève » au sein de l’Europe.
- Une incertitude persistante sur les politiques monétaires
Du côté des banques centrales, la BCE semble avoir opéré un pivot au moment opportun, parvenant à stabiliser l’inflation autour de sa cible. La Fed, en revanche, a cédé à diverses pressions — qu’elles soient liées au marché du travail ou aux injonctions de l’exécutif — en réduisant ses taux directeurs de 25 points de base. Une mesure qui n’offre qu’une visibilité limitée. L’incertitude demeure quant à l’ampleur réelle et au rythme du cycle de baisses attendu en 2026, dans un contexte où l’inflation pourrait, contre toute attente, repartir à la hausse.
- Un attrait confirmé pour l’Investment Grade européen
Nous restons globalement optimistes sur le marché obligataire, avec une conviction particulièrement marquée en faveur du crédit Investment Grade européen. Les rendements proposés demeurent attractifs et la demande robuste, malgré les émissions massives des entreprises et des États.
Sur le segment des taux, la prudence reste de mise. Les besoins de financement considérables en Europe et aux États-Unis risquent de peser sur les rendements des maturités longues. Dans ce contexte, nous privilégions une duration courte, afin de limiter l’exposition aux risques de correction sur la partie longue de la courbe. Les obligations souveraines européennes à court terme apparaissent ainsi comme une alternative pertinente aux instruments monétaires, offrant une visibilité renforcée grâce à la politique monétaire solidement ancrée de la BCE.
Les taux longs français et américains ne semblent pas refléter pleinement l’ampleur des préoccupations budgétaires actuelles. Par ailleurs, le risque d’une hausse des anticipations d’inflation pèse sur la partie longue. Pour un investisseur en euros, l’exposition aux obligations américaines libellées en dollars apparaît peu opportune : la tendance macroéconomique, notamment la baisse des taux de la Fed, pèse sur le dollar, et le coût de couverture annule largement le supplément de rendement offert par le marché américain.
Notre conviction la plus forte demeure le crédit Investment Grade européen. Nous privilégions les stratégies de portage (buy and hold) dans ce segment, en raison des rendements attractifs et de la stabilité attendue, le taux de défaut restant inférieur à 1 %.
- Les opportunités dans les obligations financières subordonnées
Nous maintenons notre intérêt pour les obligations financières subordonnées. Malgré un resserrement des spreads par rapport aux obligations corporate, ce segment bénéficie de fondamentaux solides, soutenus par une réglementation renforcée, et permet d’augmenter le rendement moyen du portefeuille tout en restant exposé à des émetteurs de qualité investment grade.
Sur le segment du High Yield, notre approche reste sélective. Nous privilégions uniquement les maturités courtes et les émetteurs les plus solides, à condition que le surcroît de rendement compense de manière adéquate le risque accru.
Sur le segment obligataire classique, nous faisons preuve de prudence. Les besoins de financement massifs en Europe et aux États-Unis pourraient exercer une pression haussière sur les rendements des maturités longues. En conséquence, nous favorisons les obligations souveraines européennes à court terme, que nous considérons comme une alternative pertinente aux instruments monétaires, grâce à une meilleure visibilité sur la politique de taux de la BCE.
- Les risques liés à une exposition au dollar
Le risque de duration demeure tangible, incitant à privilégier les maturités courtes. Les taux longs français, quant à eux, semblent déconnectés de la réalité budgétaire actuelle. La situation américaine n’est guère plus rassurante : le déficit et la trajectoire de la dette ne se reflètent pas pleinement dans les taux longs, laissant planer un risque latent sur cette partie de la courbe. À cela s’ajoute la hausse des anticipations d’inflation, facteur supplémentaire de tension pour les obligations à long terme.
S’agissant des obligations libellées en dollars américains, l’exposition au risque de change apparaît peu judicieuse pour un investisseur européen. Les fondamentaux du couple euro/dollar continuent de pénaliser le billet vert, et le coût de couverture vient largement neutraliser le supplément de rendement offert par le marché américain.
Les marchés financiers alternatifs : une préférence pour les stratégies actions Long/Short
Nous maintenons une position globalement défavorable vis-à-vis des investissements alternatifs. Néanmoins, une préférence marquée se dessine pour les stratégies actions Long/Short, susceptibles de jouer un rôle stratégique dans la couverture partielle d’une allocation actions classique. Dans un contexte caractérisé par de fortes dispersions de valorisation, ces stratégies exploitent simultanément la sous-évaluation des titres (positions longues) et la surévaluation (positions courtes).
Le Long/Short se distingue ainsi par sa capacité à limiter le risque directionnel tout en offrant un potentiel de surperformance en période d’incertitude. Sa flexibilité permet de saisir des opportunités quel que soit le contexte économique, assurant une décorrélation précieuse par rapport aux indices boursiers traditionnels.
L’or : le métal jaune qui défie les incertitudes
Le bond de l’or en septembre, qui a vu l’once frôler les 3 900 dollars, confirme la résilience de ce métal précieux. Malgré une performance déjà exceptionnelle cette année, notre opinion reste favorable à l’égard de l’or.
Plusieurs facteurs structurels continuent de soutenir sa valeur : la baisse des taux réels liée à l’assouplissement des politiques monétaires, l’affaiblissement du dollar américain, l’escalade des tensions géopolitiques et une perte de confiance croissante parmi les acteurs économiques. À cela s’ajoute une demande robuste, tant institutionnelle que privée, portée par les banques centrales et les ménages, en particulier dans les économies asiatiques et émergentes.
Les produits structurés : une réponse sur mesure aux problématiques soulevées par les marchés financiers
Nous continuons à accorder une confiance affirmée aux produits structurés. Bien plus qu’un simple vecteur d’exposition, ils représentent une solution sophistiquée de personnalisation, permettant d’ajuster avec précision l’accès aux marchés et d’optimiser le couple rendement-risque selon les objectifs de l’investisseur.
Ces instruments se révèlent particulièrement pertinents pour ceux qui souhaitent s’engager sur des marchés ou des secteurs à fort potentiel de croissance à moyen terme, tout en bénéficiant de mécanismes de protection efficaces contre les risques de correction. Cette approche prend une importance accrue dans un contexte de valorisations élevées. La diversification reste essentielle, tant au niveau des sous-jacents que des structures employées, pour maximiser l’efficacité et limiter les risques.
Grâce à leur grande flexibilité, les produits structurés offrent aux investisseurs une opportunité d’optimisation de portefeuille adaptée aux conditions actuelles du marché. Ils s’intègrent aisément aux besoins de distribution et constituent ainsi un pilier stratégique dans toute démarche de rente personnalisée.
Les actifs non cotés : private equity et private debt au cœur des stratégies d’investissement
L’intérêt des investisseurs institutionnels pour les actifs non cotés ne cesse de croître, malgré un contexte économique marqué par l’incertitude. Cette dynamique, soutenue par la baisse progressive des taux d’intérêt en 2025, attire également des flux vers des fonds plus accessibles au grand public, élargissant ainsi le spectre de l’investissement alternatif.
- Des stratégies secondaires qui se démarquent
Le marché, bien que prudent face aux incertitudes politiques et économiques, laisse entrevoir un potentiel solide pour le private equity. Parmi les options les plus attractives, les stratégies secondaires se distinguent par leur capacité à offrir des valorisations prometteuses tout en limitant les risques.
Les fonds de co-investissement continuent, eux aussi, de figurer au centre des priorités des investisseurs, alliant optimisation des rendements et maîtrise des coûts.
Parallèlement, les stratégies de dette privée, telles que la dette mezzanine ou le growth buyout, connaissent un intérêt croissant pour soutenir les entreprises en phase de croissance. Le capital-risque, particulièrement dans les secteurs technologiques et liés à la transition énergétique, enregistre un regain de popularité, offrant des perspectives captivantes pour les startups innovantes.
- Vers une allocation diversifiée et équilibrée
Pour exploiter pleinement le potentiel des actifs non cotés tout en limitant les risques, l’adoption d’une stratégie diversifiée et de long terme apparaît indispensable. Cette approche inclut :
- Les stratégies secondaires, prisées pour leur stabilité et leurs rendements robustes.
- Une exposition au capital-risque, ciblant les opportunités à haut rendement dans les secteurs innovants.
- Les investissements en LBO (Leveraged Buyout), permettant de tirer parti de l’effet de levier.
- Le growth equity, offrant une participation dans la croissance d’entreprises matures et prometteuses.
- La dette mezzanine, avec ses taux attractifs, comme outil clé de diversification.
Dans un environnement économique en perpétuelle évolution, cette allocation vise à concilier performance et gestion proactive des risques. La vigilance sur les tendances du marché reste essentielle, tout en capitalisant sur les opportunités offertes par des secteurs stratégiques tels que la santé et la transition énergétique.

Rétrocommissions : l’AMF sonne la fin d’une époque
La récente sanction infligée à la société de gestion Altaroc Partners par l’Autorité des marchés financiers (AMF) pourrait bien constituer un tournant décisif pour l’ensemble de la profession. Derrière ce que l’on nomme déjà « l’affaire Altaroc » se joue en réalité l’avenir des rétrocommissions, ces rémunérations versées à une grande partie des conseillers en investissements financiers (CIF) par les sociétés dont ils distribuent les produits.
Un rappel à l’ordre sans ambiguïté
La commission des sanctions de l’AMF a condamné Altaroc Partners et deux de ses dirigeants à une amende de 1,3 million d’euros. En cause : la diffusion d’informations jugées inexactes, trompeuses ou insuffisamment claires dans près de 87 % de ses supports de communication.
Mais au-delà de ce grief, l’Autorité s’attaque à un modèle économique solidement ancré : celui des rétrocessions non justifiées. Le rappel est net : ces commissions ne sont légitimes que si elles correspondent à un service réel et tangible rendu au client.
Le système des rétrocommissions fragilisé
Aujourd’hui, près de 95 % des conseillers en gestion de patrimoine (CGP) et CIF reposent leur rémunération sur ce mécanisme. Les clients ne paient donc pas directement leurs conseils : ce sont les sociétés de gestion qui, via les rétrocommissions, assurent la rémunération. Seuls 5 % des cabinets ont fait le choix de l’indépendance, en alignant pleinement leurs intérêts sur ceux de leurs clients grâce à un modèle de facturation entièrement basé sur les honoraires.
Or, dans le cas du private equity — où les capitaux sont immobilisés sur de longues périodes sans possibilité d’arbitrage — la tentation existe pour certains conseillers de se faire plus discrets… tout en continuant de percevoir leurs commissions.
Un signal fort au marché en faveur de l’indépendance
En choisissant de frapper Altaroc, l’AMF vise un acteur majeur : le plus important distributeur de commissions à destination des CGP, qui avait fait des rétrocessions un levier d’acquisition clients. L’« effet martingale » du private equity trouve ici ses limites.
Le message du régulateur est sans ambiguïté : il ne s’agit pas de bannir les rétrocommissions, mais de les conditionner strictement à une valeur ajoutée démontrable.
Deux exigences ressortent de cette décision :
- Les rétrocessions doivent être justifiées et ne pas aller à l’encontre de l’intérêt du client.
- Les sociétés de gestion doivent garantir un suivi rigoureux et un conseil de qualité, tout au long de la durée de vie du fonds.
Un bouleversement qui dépasse le simple cadre d'Altaroc
Les conséquences pourraient être profondes. Les cabinets de petite taille, notamment unipersonnels, risquent de peiner face à ces nouvelles obligations. La concentration du marché devrait donc s’accélérer, tant du côté des CGP que des sociétés de gestion.
Pour séduire les distributeurs, ces dernières devront désormais développer des outils de suivi plus sophistiqués et fournir des solutions « clé en main », au risque d’alourdir encore la complexité du système.
Vers un modèle plus transparent et indépendant ?
Guillaume Lucchini, associé fondateur du multi family office Scala Patrimoine, salue cette évolution avec enthousiasme : « Chez Scala Patrimoine, nous défendons depuis toujours un modèle limpide : un conseil 100 % transparent, indépendant, et exclusivement rémunéré par des honoraires. La décision de l’AMF va clairement dans le bon sens, puisqu’elle replace l’intérêt du client au cœur du dispositif. Nous avons toujours considéré que le système des rétrocessions ouvrait la porte à de nombreux conflits d’intérêts. Voir l’Autorité exiger désormais que ces rétrocessions soient adossées à une véritable prestation constitue, selon nous, une avancée majeure. C’est le premier pas vers un écosystème plus vertueux. Certaines sociétés de gestion ont déjà pris les devants en amorçant ce virage, mais l’obstacle reste de taille. La véritable question est désormais de savoir si l’ensemble de la profession saura s’adapter à ce nouveau paradigme. »
Venture capital : l’heure du rebond ?
Difficile de savoir si la « start-up nation », tant vantée par certains responsables politiques français, est réellement devenue une réalité tangible. Ce qui est certain, en revanche, c’est que le capital-risque irrigue aujourd’hui une large part de l’économie hexagonale. Pas moins de 2 975 start-ups, PME innovantes et licornes françaises sont accompagnées par les acteurs du venture et du growth, générant plus de 140 000 emplois.
Pourtant, dans un contexte économique mondial marqué par l’incertitude, le secteur traverse une zone de turbulences. Les levées de fonds ralentissent, les investissements se contractent, et les faillites se multiplient. Quelques signaux positifs demeurent toutefois, à commencer par l’abondance de liquidités disponibles au sein des fonds, laissant entrevoir un possible rebond dans les prochains mois.
Un net ralentissement du marché du venture capital
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2024 : l’atterrissage forcé
Au-delà des incertitudes macroéconomiques, les investisseurs composent avec un climat d’attentisme, nourri par les incertitudes politiques et fiscales qui pèsent sur l’ensemble du secteur du private equity
Si quelques opérations d’envergure ont permis aux levées de fonds et aux investissements de reprendre timidement des couleurs, l’absence quasi totale d’introductions en Bourse et le ralentissement brutal des fusions-acquisitions ont refroidi l’enthousiasme des limited partners (LP).
Résultat : les fonds de venture capital rationnent désormais leur capital disponible.
Selon une étude de France Invest, qui représente plus de 460 sociétés de gestion françaises, les fonds de capital-risque et de croissance ont levé près de 6,8 milliards d’euros en 2024, soit une progression de 34 % par rapport à 2023. Un chiffre qui doit toutefois être relativisé : 18 % de ces montants proviennent de deux levées exceptionnelles. Hors de ces opérations hors normes, la collecte reste néanmoins positive, à +11 %.
Mais le tableau n’est pas sans ombre. Le nombre de fonds levés s’est replié à 105 en 2024, contre 111 en 2023, son plus bas niveau depuis 2021. Pire encore, la durée moyenne de levée de fonds continue de s’allonger : 22,5 mois en 2024, contre 19,8 l’année précédente.
« C’est un phénomène observé sur l’ensemble du private equity », souligne Alexis Dupont, directeur général de France Invest. « En 2021 et 2022, les levées se concluaient en un temps record. Aujourd’hui, nous assistons à un retour à la normale, dans un contexte macroéconomique plus contraint. »

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Les défaillances en forte hausse
Les difficultés s’observent aussi du côté des entreprises. Selon le baromètre publié par ScaleX Invest, spécialiste de l’évaluation des risques dans la tech, les défaillances de start-up post-série A — celles ayant levé plus de 5 millions d’euros — ont explosé : 64 cas recensés en 2024, soit une hausse de 48 % par rapport à 2023, déjà une année record.
La proportion d’entreprises présentant un risque élevé de faillite est ainsi passée de 8 % à 10 % en un an. Un indicateur préoccupant qui témoigne de la fragilité persistante de l’écosystème.
Les valorisations médianes pre-money des séries A en Europe se sont, par contre, maintenues à un niveau stable au cours des trois dernières années. Dans le même temps, la taille des tours de financement a progressé, dépassant désormais la moyenne observée sur les cinq dernières années.
Mais la comparaison transatlantique reste peu flatteuse. Au troisième trimestre 2024, les valorisations pre-money des séries A aux États-Unis étaient environ 38 % supérieures à celles enregistrées en Europe. Même constat pour la taille médiane des tours : malgré leur progression, les financements européens demeurent nettement en deçà des standards américains, confirmant l’écart structurel entre les deux marchés.
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Les sorties en capital-risque : une reprise timide
Selon une étude publiée par Conatus Finance, l’année 2024 a enregistré une timide reprise des sorties, atteignant près de 34 milliards d’euros, soit une progression de 24 % par rapport à 2023. Cette embellie s’est concentrée sur quelques grandes transactions, essentiellement dans les sciences de la vie et l’intelligence artificielle, deux secteurs en pleine effervescence.
Mais ce regain reste encore insuffisant au regard des attentes du marché. En France, la tendance est même à l’essoufflement : le nombre de sorties a reculé de 15 % sur l’année, avec un second semestre particulièrement morose. La French Tech n’a recensé que 350 opérations, contre 414 en 2023, qui constituait un millésime record.
Le montant global des sorties illustre cette stagnation : 12,6 milliards d’euros en 2022, 12,3 milliards en 2023, puis 12 milliards en 2024. Une érosion progressive qui confirme la difficulté des entrepreneurs français à offrir des perspectives de liquidité attractives, dans un environnement où les investisseurs restent frileux et sélectifs.
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Une tendance partagée en Europe et aux États-Unis
Malgré ces vents contraires, le capital-risque européen continue d’attirer. Les investisseurs étrangers renforcent même leur présence : leur part dans les fonds français est passée de 30 % en 2023 à 38 % en 2024.
L’Europe dans son ensemble suit une trajectoire similaire à celle de la France : en 2024, les 4 287 start-up du continent ont levé 45 milliards de dollars, contre 47 milliards en 2023.
Aux États-Unis, en revanche, le marché semble reprendre des couleurs. Le capital-risque y a atteint 209 milliards de dollars levés en 2024, soit une progression de près de 30 % sur un an, selon
PitchBook. Les start-ups spécialisées dans l’intelligence artificielle concentrent une part colossale de ce dynamisme, représentant à elles seules 46,4 % des capitaux levés. Hélas, les sorties (fusions-acquisitions et IPO) n'ont pas suivi la même dynamique. La valeur totale des sorties s’est limitée à 149,2 milliards de dollars aux États-Unis, un chiffre bien inférieur aux 841,5 milliards de 2021.
Pour Adrien Tourbet, responsable des investissements non cotés au sein du Multi-Family Office Scala Patrimoine, la comparaison reste sans équivoque : « La tendance observée en Europe reflète largement celle des États-Unis : ralentissement des levées et sélection accrue. Mais les ordres de grandeur n’ont rien de comparable. La profondeur du marché américain et sa capacité d’investissement demeurent incomparables. Les États-Unis s’imposent ainsi, plus que jamais, comme le moteur du venture capital mondial. »
La France dans le creux de la vague sur le premier semestre 2025
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Un contexte économique difficile
Le capital-risque français vit un coup d’arrêt brutal en 2025. Dans un contexte d’incertitude politique et de ralentissement économique — la croissance nationale devrait péniblement dépasser les 0,9 % —, les fonds préfèrent conserver leurs participations plutôt que de miser sur de nouvelles pépites.
Résultat : les jeunes pousses tricolores voient l’accès aux capitaux se resserrer comme rarement auparavant.
« Le marché reste englué dans une phase d’attentisme. C’est un semestre compliqué pour l’ensemble de la classe d’actifs du private equity », reconnaît le président de France Invest.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : les 314 sociétés de la French Tech n’ont levé que 2,8 milliards d’euros au premier semestre, soit une chute de 35 % en valeur et de 24 % en volume. Le marché a toutefois été soutenu par quelques tours emblématiques : Knave (100 M€), Alice&Bob (100 M€), Pennylane (75 M€), Wandercraft (66 M€) et Nabla (61 M€).
Côté fonds, certains acteurs tirent malgré tout leur épingle du jeu. Cathay Innovation a réussi à clore un fonds thématique dédié à l’intelligence artificielle pour un montant record de 1 milliard de dollars.
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Le paradoxe du « dry powder »
Un élément nourrit l’espoir d’un rebond. Les réserves disponibles des fonds européens atteignent des niveaux historiques. D’après l’étude Capital under management & dry powder d’Invest Europe, le « dry powder » des fonds de venture capital s’élevait à 59 milliards d’euros fin 2024, soit 6 milliards de plus en un an — du jamais vu. Pour mémoire, ce montant n’était que de 42 milliards en 2020.
Adrien Tourbet, responsable des investissements non cotés chez Scala Patrimoine, appuie cette perspective : « Le marché des levées de fonds en venture capital connaît un net ralentissement, reflet d’une conjoncture plus prudente et sélective. Mais la bonne nouvelle est que les niveaux de dry powder restent historiquement élevés. Ce capital disponible pourrait se redéployer activement et stimuler une vague de rachats et d’opérations stratégiques dans les prochains mois. »
Quelles perspectives pour le marché du venture capital ?
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La France décroche face à ses voisins
Si l’attentisme domine en Europe, la France souffre plus que ses voisins. Les incertitudes politiques — après le départ du gouvernement Bayrou et sous la menace d’une possible dissolution de l’Assemblée nationale — pèsent lourdement sur la confiance des investisseurs.
En termes de levées, l’Allemagne (3,6 Md€, -2 %) a pris une longueur d’avance grâce à un marché du Growth Equity particulièrement dynamique (+17 % en valeur), tandis que la France enregistre un effondrement de près de 30 %. Les deals supérieurs à 100 M€, qui structuraient le marché français, s’écroulent de 87 %.
Le Royaume-Uni conserve son rôle de locomotive européenne, avec 7,4 Md€ levés — plus que la France et l’Allemagne réunies. Mais la tendance reste négative outre-Manche également, avec un recul de 12 % en valeur et de 36 % en volume.
Après l’exubérance de 2021, la correction se poursuit donc, avec un retour à une approche plus sélective, plus stratégique.
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Les secteurs qui résistent
Malgré le climat atone, certains secteurs continuent de séduire les investisseurs. Le secteur des Logiciels est en tête du classement publié par France Invest, avec 891 M€ levés au 1er semestre 2025, soit -39 % en valeur, mais +57 % en volume (38 % des deals). La dynamique est portée par l’essor fulgurant des projets liés à l’intelligence artificielle générative et agentique.
La Greentech occupe la deuxième position avec 515 M€, en forte baisse en valeur (-54 %), mais stable en volume.
Enfin, les Fintech occupent la troisième marche du podium avec 487 M€, en hausse de +53 % en valeur malgré une contraction en volume (-23 %).
« Dans un environnement marqué par l’incertitude, la France reste en retrait. Pourtant, certains secteurs, comme les logiciels, prouvent leur résilience. L’innovation, notamment dans l’intelligence artificielle, pourrait redéfinir le paysage entrepreneurial français dans les années à venir », analyse Franck Sebag, associé EY et leader des Fast Growing Companies.
La santé confirme également son retour en grâce : selon PitchBook, les start-ups du secteur ont levé 48 % de plus qu’en 2024. Quant à la défense, dopée par les engagements des pays membres de l’OTAN, elle attire désormais une génération de VCs émergents, portés par un alignement inédit de facteurs géopolitiques et institutionnels.
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Vers un « darwinisme » du venture capital ?
En définitive, le marché du venture capital entre dans une nouvelle ère, plus rationnelle, où les valorisations s’ajustent et où la sélectivité se renforce.
« Le marché du venture capital entre dans un cycle plus rationnel, marqué par des valorisations ajustées et une sélectivité accrue, proche d’un darwinisme renforcé. Si le rythme s’est durci, ce n’est pas une mauvaise nouvelle pour les investisseurs de long terme, qui trouvent un terrain plus sain pour déployer leur capital. Pour les entrepreneurs, cela signifie un accès plus exigeant aux financements, mais aussi des investisseurs plus engagés et durables », conclut Adrien Tourbet
Crédit, prix, baisses des taux : faut-il investir dans l'immobilier ?
Guillaume Lucchini, associé fondateur du multi family office indépendant Scala Patrimoine, et Ludovic Huzieux, cofondateur d’Artémis Courtage, étaient les invités de Pauline Gratelle dans l’émission SMART Patrimoine sur B Smart TV pour évoquer le marché immobilier.
Après plusieurs années de turbulences, celui-ci semble amorcer une phase de normalisation. L’offre de crédit s’est sensiblement accrue, les banques adoptant une stratégie offensive de conquête commerciale. Résultat : le volume des prêts accordés est en nette progression, une évolution salutaire pour l’ensemble du secteur. Les taux, quant à eux, demeurent globalement stables.
Pauline Gratelle. Comment analysez-vous la situation actuelle du marché immobilier. Comment s’inscrit-elle dans le cadre d’une stratégie patrimoniale ?
Guillaume Lucchini. Le marché immobilier reste intrinsèquement lié à celui du crédit. Depuis 2022, la forte remontée des taux d’intérêt a mécaniquement réduit le pouvoir d’achat des acquéreurs. Dans le même temps, nombre de vendeurs refusaient d’ajuster leurs prix aux nouvelles conditions du marché. Ce double mouvement a provoqué une véritable paralysie des transactions, tant sur le résidentiel que sur l’immobilier tertiaire — en particulier le bureau, qui a enregistré une contraction marquée.
Mais 2025 a constitué un véritable tournant. La Banque centrale européenne a initié une baisse des taux, rapidement répercutée par les établissements bancaires auprès des investisseurs. Concrètement, cela représente une diminution de l’ordre de 1,5 point sur les crédits à 20 ans.
Deux facteurs nourrissent aujourd’hui ce rebond.
D’abord, les vendeurs acceptent désormais de revoir leurs prétentions et consentent à céder leurs biens à des prix plus en phase avec la réalité du marché. De l’autre côté, les acquéreurs, conscients des opportunités, se positionnent à nouveau.
S’ajoute une dimension environnementale cruciale : les diagnostics de performance énergétique (DPE). Les biens classés comme « passoires thermiques » sont progressivement exclus du marché locatif. Or, la mise aux normes entraîne des coûts de rénovation souvent prohibitifs, incitant certains propriétaires à céder plutôt qu’à réhabiliter.
Pauline Gratelle. Faut-il attendre une nouvelle détente des taux ou saisir dès maintenant les opportunités ?
Guillaume Lucchini. Les périodes de crise ouvrent généralement des fenêtres d’investissement privilégiées. Elles offrent aux acheteurs une marge de négociation accrue et une position de force. Nous l’observons notamment à Paris intramuros, où de beaux actifs — par exemple dans le très prisé 6ᵉ arrondissement — se négocient aujourd’hui avec des décotes avoisinant 20 % par rapport aux niveaux d’il y a deux ans.
Pour des investisseurs capables de mobiliser le levier du crédit, le moment est particulièrement propice. D’autant plus que, si les taux venaient à reculer encore, il resterait toujours possible de renégocier ses conditions d’emprunt.
Beaucoup se réfèrent encore aux taux exceptionnellement bas observés avant la crise sanitaire. Mais la situation actuelle, marquée par une correction des prix, ouvre des perspectives d’acquisition plus intéressantes qu’une hypothétique baisse future des taux — laquelle pourrait mécaniquement entraîner un rebond des prix.
À cela s’ajoute un facteur d’incertitude : la conjoncture politique française. Une hausse de la fiscalité immobilière n’est pas à exclure, et une telle mesure risquerait de figer à nouveau le marché. C’est pourquoi nous recommandons à nos clients d’agir dès maintenant, en profitant de la liquidité retrouvée du marché et des conditions de négociation favorables.
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BrainEver lève 33 M€ pour combattre la maladie de Charcot
La biotech française BrainEver vient de franchir une étape décisive dans sa croissance en réalisant une levée de fonds en série B de 33 millions d’euros. Une opération qui doit lui permettre de lancer ses premiers essais cliniques chez l’homme dès fin 2025. Objectif : trouver enfin un traitement contre la terrible maladie de Charcot.

Une lueur d’espoir face à une maladie sans issue
La sclérose latérale amyotrophique (SLA), plus connue sous le nom de maladie de Charcot, touche environ 250 000 patients dans le monde. Implacable, elle entraîne la dégénérescence progressive des neurones moteurs, privant peu à peu les malades de la marche, de la parole, de la déglutition… jusqu’à la respiration. Aujourd’hui, aucune thérapie curative n’existe.
Et pourtant, une start-up française fait renaître l’espoir. Fondée en 2015 par Bernard Gilly, aujourd’hui CEO, et le professeur Alain Prochiantz (Collège de France), BrainEver s’est donné pour mission de s’attaquer aux maladies neurodégénératives liées à l’âge : SLA, Parkinson, glaucome. Son approche repose sur des années de recherches menées au Collège de France et au CNRS.
Des résultats précliniques prometteurs
Au cœur de ses travaux, un projet baptisé BREN02 : le développement d’une homéoprotéine recombinante humaine, l’Engrailed-1 (hEN1). Les premiers tests sur modèles animaux – souris et primates – se sont ainsi révélés spectaculairement encourageants.
« La maladie de Charcot est liée à un vieillissement anormal de certains neurones impliqués dans le fonctionnement musculaire », explique Bernard Gilly au Figaro. « L’idée est d’injecter aux patients cette protéine, capable de rajeunir les neurones et de leur rendre un fonctionnement normal. »
Une seule injection suffirait à rajeunir les motoneurones de trois mois chez la souris – un effet considérable, quand on sait que leur espérance de vie moyenne est de 36 mois. Mieux encore : l’opération peut être répétée.
Une levée de fonds stratégique
Dans un climat économique peu favorable aux start-up françaises de la deeptech, BrainEver réussit un tour de force. Elle concrétise une levée de fonds supérieure à 30 M€. Une opération menée par Critical Path Ventures et le Conseil européen de l’innovation (EIC). Elle attire aussi les investisseurs historiques Ibionext et Relyens. C’est une deuxième levée importante après celle de 2015. Cette année-là, BrainEver avait obtenu près de 20 millions d’euros grâce à Bpifrance Life Sciences Venture.
« Ce financement est essentiel », explique Bernard Gilly. « Il nous aide à préparer l’essai clinique et accélère la validation de notre approche thérapeutique sur la SLA. Il redonne aussi de l’espoir aux patients », ajoute-t-il. « Dans un marché contraint, il confirme la solidité scientifique de notre projet. Il valide également la pertinence de notre stratégie. »
Vers de nouvelles applications
Outre la SLA, BrainEver veut étendre ses recherches à d’autres maladies neurodégénératives. Cela inclut la maladie de Parkinson et certaines dégénérescences rétiniennes. Ces travaux sont menés dans un laboratoire commun avec le Collège de France, le CNRS et l’INSERM.
Un premier essai clinique de phase I/II doit débuter avant la fin de l’année. Il sera conduit à l’université d’Utrecht, centre européen de référence pour la lutte contre la SLA.
Là où tout semblait perdu, la science ouvre, une nouvelle fois, une brèche vers les espoirs les plus insensés.
Le rendez-vous des marchés financiers – Septembre 2025
Marchés financiers & économie : les points clés
- Les marchés financiers poursuivent leur belle dynamique, aux États-Unis et en Europe ;
- La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, et le président américain, Donald Trump, ont scellé un accord commercial portant sur les droits de douane ;
- En France, l’hypothèse de nouvelles élections législatives gagne du terrain. Une perspective qui alimente l’incertitude et ravive les inquiétudes des investisseurs quant à la stabilité des institutions ;
- Depuis Jackson Hole, le président de la Réserve fédérale américaine a entrouvert la porte à une nouvelle baisse des taux d’intérêt.
Quelles performances sur les marchés financiers ?
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Rencontre entre Trump et Poutine en Alaska
Le 15 août dernier, sur la base interarmées d’Elmendorf-Richardson à Anchorage, en Alaska, Donald Trump et Vladimir Poutine se sont retrouvés pour une rencontre très attendue. En terre américaine, le président des États-Unis et son homologue russe ont échangé pendant près de trois heures.
Au cœur des discussions : la guerre en Ukraine. Mais ni cessez-le-feu, ni avancée concrète n’en sont sortis. Tout au plus, une invitation à Moscou, qui a laissé les observateurs sur leur faim.
D’après le politiste russe Andreï Kolesnikov, Vladimir Poutine aurait surtout cherché à gagner du temps, tout en maintenant un lien de proximité avec Donald Trump. « Un temps dont il a besoin pour repousser la ligne de front le plus à l’ouest possible, avant de figer la situation dans un accord ultérieur », analyse-t-il.
Trois jours plus tard, le 18 août, c’était au tour de Volodymyr Zelensky de s’entretenir avec le président américain à Washington. Là encore, la réunion n’a pas permis d’avancer notable. Seules les « garanties de sécurité » pour l’Ukraine ont été évoquées, sans qu’aucun engagement formel ne soit scellé.
Quant au prix Nobel de la paix auquel Donald Trump semble aspirer avec insistance, il lui faudra encore patienter.
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USA – Europe : un accord commercial déséquilibré ?
Après des mois de tractations intenses, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, et le président américain, Donald Trump, ont scellé, le 27 juillet dernier en Écosse, un accord commercial sur les droits de douane.
L’enjeu est colossal : chaque jour, plus de 4,2 milliards d’euros de biens et de services traversent l’Atlantique. L’Europe représentant le deuxième déficit commercial le plus important pour les États-Unis, juste après la Chine.
- Les contours de l’accord transatlantique
Les principales dispositions sont les suivantes :
- Les États-Unis imposent désormais un tarif douanier de 15 % sur la majorité des produits européens, notamment l’automobile, les semi-conducteurs et les produits pharmaceutiques.
- L’aéronautique bénéficie d’une exemption totale.
- L’acier et l’aluminium restent soumis à un droit de 50 %.
En contrepartie, l’Union européenne s’engage à :
- Supprimer toutes les taxes sur les produits manufacturés américains.
- S’approvisionner en énergie aux États-Unis pour un montant de 750 milliards de dollars sur les trois prochaines années.
- Ouvrir son marché agricole à certaines exportations américaines dites « non sensibles », pour 7,5 milliards d’euros (huile de soja, semences, céréales, fruits à coque, cacao, ketchup, biscuits, etc.).
- Investir 600 milliards de dollars aux États-Unis d’ici 2028, notamment dans le secteur militaire, tout en facilitant l’accès aux produits agricoles et maritimes américains.
- Un accord asymétrique, mais diplomatiquement utile
À première vue, l’accord semble déséquilibré, taillé sur mesure pour Washington qui a imposé ses conditions. Mais il doit davantage être lu comme un compromis diplomatique que comme une simple victoire commerciale. « Si cet accord peut sembler décevant pour l’Europe, il a néanmoins le mérite de fixer un cadre clair aux échanges transatlantiques. Il offre de la visibilité aux entreprises et, in fine, aux investisseurs », souligne un gérant d’actifs.
Même tonalité du côté d’Apolline Menut, économiste chez Carmignac : « L’Europe a réussi à protéger certains secteurs stratégiques des surtaxes les plus lourdes. Cela réduit l’incertitude sur les chaînes d’approvisionnement, même si des zones d’ombre subsistent. » Elle rappelle aussi que l’accord s’inscrit dans le contexte de la guerre en Ukraine : « Le lobbying européen a permis deux avancées : Trump a donné un ultimatum sévère de 50 jours à la Russie et a accepté de poursuivre les livraisons d’armes financées par l’UE. »
Pour Robert Schramm-Fuchs, gestionnaire de portefeuille, il était important d’offrir une certaine stabilité aux entreprises : « Même s’il ne s’agit pas d’un accord commercial parfait, il a évité l’escalade des droits de douane, ce qui garantit une certaine stabilité aux industries clés des deux côtés. »
- Premiers effets : l’Allemagne en première ligne
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. L’excédent commercial européen a chuté de 37 milliards à 26 milliards d’euros en un an au deuxième trimestre 2025. L’Allemagne, pilier industriel de l’Europe, encaisse le choc : ses exportations vers les États-Unis reculent de 3,9 % au premier semestre, avec des plongeons spectaculaires dans l’automobile (–8,6 %) et les machines-outils (–7,9 %).
Après un record de 71 milliards d’euros d’excédent en 2024, Berlin accuse déjà une baisse de 13 %. Selon Commerzbank, les exportations européennes vers les États-Unis pourraient dégringoler de 20 à 25 % d’ici deux ans.
- Japon, Vietnam… et la Chine en suspens
L’Europe n’est pas la seule à céder du terrain. Quelques semaines plus tôt, le Japon avait conclu un accord similaire avec Washington : droits réciproques de 15 %, investissements nippons de 550 milliards de dollars et ouverture accrue de son marché aux produits américains, y compris automobiles et agricoles.
Le Vietnam a, lui aussi, obtenu un compromis : la taxe américaine initialement fixée à 46 % sur ses exportations a été réduite à 20 %, mais un droit de 40 % reste appliqué aux produits soupçonnés d’être réexportés depuis des pays tiers.
Quant à la Chine, le bras de fer reste en suspens. Donald Trump a signé un décret prolongeant la trêve commerciale jusqu’au 10 novembre 2025. Les discussions se poursuivent donc entre les deux superpuissances.
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Les marchés actions prolongent leur dynamique
Les principaux indices boursiers mondiaux ont poursuivi leur ascension tout au long du mois d’août. En tête, le Shanghai Composite, emblème des marchés chinois, s’offre un bond spectaculaire de près de 9 %. Derrière lui, l’EuroStoxx 50 et le Nasdaq affichent une progression solide de 3,9 % sur la même période. Le CAC 40, malgré une tendance positive, peine à suivre le rythme effréné de ses homologues et ne progresse « que » de 2,5 %.

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Nvidia : encore et toujours au sommet sur les marchés financiers
La saison des résultats du deuxième trimestre a confirmé la bonne santé des entreprises américaines. Les sociétés du S&P 500 affichent une croissance bénéficiaire d’environ 9 %, un rythme légèrement supérieur à la moyenne des dix dernières années. Près de 80 % d’entre elles dépassent ainsi les attentes des analystes. Pour l’heure, les groupes américains ont su contenir la hausse des droits de douane en réorganisant leurs chaînes d’approvisionnement, en ajustant leurs prix et en appliquant une discipline stricte en matière de coûts. Il s’agit de la meilleure performance enregistrée depuis le troisième trimestre 2023.
Dans ce contexte favorable, un nom s’impose encore et toujours : Nvidia. La pépite de Santa Clara a franchi un cap historique le 9 juillet dernier en devenant la première entreprise mondiale à voir sa capitalisation boursière dépasser les 4 000 milliards de dollars (environ 3 400 milliards d’euros).
Au cours du dernier trimestre, le chiffre d’affaires de 46,74 milliards de dollars est légèrement au-dessus des anticipations de Wall Street. La firme réalise 26 milliards de bénéfices nets sur 3 mois ! La division consacrée aux data centers — véritable moteur de l’intelligence artificielle grâce à ses processeurs surpuissants — enregistre à elle seule une croissance fulgurante de 56 %, à 41,1 milliards de dollars. Quant au bénéfice ajusté par action, il atteint 1,05 dollar, dépassant le consensus de 4 cents. Une performance qui confirme, une fois de plus, la domination sans partage du géant californien.
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Les taux français sous pression
La menace d’une dissolution de l’Assemblée nationale et de nouvelles élections législatives plane sur la France et inquiète les investisseurs. Cette incertitude politique se traduit directement sur le marché obligataire.
Le rendement de l’emprunt d’État français à 30 ans a progressé de 4,5 points de base, pour atteindre 4,444 % — un sommet inédit depuis novembre 2011. Sur l’échéance à 10 ans, la hausse s’établit à 3 points de base, à 3,532 %. Un contraste frappant avec l’Allemagne : le Bund à 10 ans, valeur refuge et étalon de la zone euro, a reculé de 1,5 point de base pour s’établir à 2,707 %.
Outre-Atlantique, le mouvement est également à la baisse. Les rendements des bons du Trésor américain se sont repliés, avec un taux à 10 ans glissant de 2,6 points de base, à 4,24 %.
Les États-Unis : la Fed assouplie sa position
À Jackson Hole, Jerome Powell a entrouvert la porte à une baisse des taux, ravivant l’optimisme des marchés financiers. Mais derrière les sourires de Wall Street, l’économie américaine envoie des signaux contrastés. Inflation tenace, industrie en berne, emploi vacillant.
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Le rendez-vous annuel de Jackson Hole
Comme chaque été, au mois d’août, le petit village de Jackson Hole, niché au cœur des montagnes du Wyoming, a concentré l’attention du monde financier. C’est là que, selon la tradition, les banquiers centraux se retrouvent pour un symposium devenu incontournable.
Cette année encore, le président de la Réserve fédérale américaine, Jerome Powell, a livré un discours scruté à la loupe par les investisseurs. S’il a reconnu que le marché de l’emploi montrait désormais des signes de fragilité et que la croissance pouvait ralentir, il a aussi laissé entrevoir une perspective qui réjouit Wall Street : l’ouverture possible d’un nouveau cycle de baisse des taux.
Les marchés ne s’y sont pas trompés : ils anticipent désormais, à plus de 87 %, une réduction des taux directeurs dès septembre. « Powell a indiqué que les perspectives de base pourraient justifier un ajustement de la politique monétaire, invoquant des risques croissants pour l’emploi, tout en qualifiant la situation actuelle d’inhabituelle », analyse Valentin Bissat, chef économiste chez Mirabaud Asset Management.
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Vers une politique monétaire plus accommodante ?
Toutefois, le patron de la Fed a nuancé les espoirs d’un assouplissement rapide et massif. En affirmant que l’institution « procéderait avec prudence », il a écarté l’hypothèse d’une baisse agressive de 50 points de base, comme le suggérait le secrétaire au Trésor, Scott Bessent. Car un obstacle persiste : l’inflation.
Les chiffres en témoignent : l’inflation annuelle a accéléré pour le deuxième mois consécutif, atteignant 2,7 % en juillet 2025, son plus haut niveau depuis février, légèrement au-dessus des prévisions (2,6 %). L’inflation sous-jacente (core CPI) progresse, elle, à 2,9 % sur un an.
Cette tendance est confirmée par les chiffres du PCE, l’indicateur d’inflation préféré de la Fed. Les économistes anticipent +0,3% en juillet, ce qui ferait grimper l’inflation annuelle à 2,9%, voire 3% selon certains — son plus haut niveau depuis mars 2024.
En cause, notamment, la flambée des droits de douane décidés par Donald Trump, qui commence à se refléter dans les prix. « Le narratif reste celui d’un effet ponctuel (“one-off”) lié aux tarifs douaniers, qui ne devrait pas générer de vague durable », estime Théodore Crouslé, analyste cross-asset chez SILEX. Mais il ajoute avec prudence : « Powell a néanmoins rappelé que tant que ces tarifs continuent de s’accumuler, on ne peut écarter le risque que leur répercussion sur les prix se prolonge. »
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Des signes tangibles de ralentissement
Les premiers effets du durcissement de la politique commerciale internationale voulue par Donald Trump commencent à se faire sentir. En juin, le déficit commercial des biens et services américains s’est réduit à 60,2 milliards de dollars, selon les chiffres du département du Commerce publiés mardi, soit une contraction de 16 % par rapport au mois précédent.
Une amélioration sur le papier, certes, mais qui ne parvient pas à masquer les signes tangibles de ralentissement de l’économie américaine.
L’indice ISM des services est ressorti à 50,1 en juillet, en recul par rapport aux 50,8 de juin et loin du consensus à 51,5. Un chiffre qui frôle dangereusement le seuil des 50, en dessous duquel l’activité est réputée entrer en contraction.
Même tendance dans l’industrie : l’ISM manufacturier a déçu les marchés en tombant à 48,0, après 49,0 le mois précédent. Les économistes sondés par Reuters anticipaient au contraire un léger rebond à 49,5.
À cela s’ajoute un autre signal inquiétant : la confiance des consommateurs. Pour la première fois en quatre mois, elle s’est nettement repliée en août, selon l’enquête préliminaire de l’Université du Michigan, tombant à 58,6 contre 61,7 en juillet — bien en-deçà des attentes du consensus, fixé à 62.
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L’emploi bat de l’aile
Les signaux de faiblesse du marché du travail américain se confirment. Les chiffres publiés début août sont sans appel : les créations d’emplois de juillet se sont effondrées à seulement 73 000, soit 27 % en deçà des prévisions. Pire encore, les données de mai et juin ont été lourdement révisées, avec un total de 258 000 postes retranchés.
« C’est un véritable signal d’alarme. L’économie ne crée quasiment plus d’emplois », alerte Heather Long, économiste en chef de la Navy Federal Credit Union, citée par Le Monde.
Quelques indicateurs offrent toutefois un tableau plus nuancé. Les demandes hebdomadaires d’allocations chômage ont reculé de 5 000, à 229 000, après avoir atteint un pic de huit semaines. Un chiffre légèrement meilleur qu’attendu. Côté salaires, la progression reste solide : +0,3 % sur un mois et +3,9 % sur un an, en ligne avec les anticipations.
Mais l’ombre domine toujours la lumière. Le taux de chômage est remonté de 4,1 % à 4,2 %, et le taux élargi — incluant les travailleurs à temps partiel contraint et les personnes découragées — s’est alourdi de 0,3 point, à 7,9 %.
Le secteur immobilier, quant à lui, a réservé une surprise positive : les mises en chantier ont bondi de 5,2 % en juillet, alors que les analystes attendaient une contraction de 1,8 %. Une embellie cependant ternie par le recul des permis de construire (-2,8 %) et la baisse continue de la confiance des promoteurs immobiliers, tombée de 33 à 32 en août.
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Le LEI : un indicateur qui inquiète
L’indice avancé de l’économie américaine (LEI – Leading Economic Index) retient plus que jamais l’attention des analystes. Conçu comme un baromètre de la conjoncture à venir, il compile dix indicateurs clés : nouvelles commandes industrielles, inscriptions au chômage, moral des ménages… autant de signaux censés tracer la trajectoire de l’économie américaine dans les prochains mois.
Or, le verdict est préoccupant. En juin, le LEI a reculé de 4 % sur un an, enregistrant sa 38ᵉ baisse au cours des 40 derniers mois. C’est le troisième mois consécutif qu’il envoie un signal de récession. La faiblesse des commandes industrielles et la chute de la confiance des consommateurs en sont les principaux moteurs. Résultat : l’indice plonge désormais à son plus bas niveau depuis 11 ans.
Entre prudence monétaire et pressions politiques, la Réserve fédérale avance sur une ligne de crête. Le ralentissement de l’activité et la fragilité du marché du travail rappellent l’urgence d’agir, tandis que l’inflation et les tensions commerciales imposent de ne pas céder trop vite. Dans ce climat d’incertitude, chaque statistique devient un test grandeur nature pour l’économie américaine. Et le moindre mot de Jerome Powell, une boussole fragile pour les investisseurs.
Zone euro : une croissance atone
Malgré la guerre commerciale qui l’oppose aux États-Unis, l’économie européenne se maintient tant bien que mal en territoire positif. Au deuxième trimestre 2025, le PIB de la zone euro a progressé de 0,1 %. Une croissance infime, qui illustre surtout la fragilité d’un moteur économique déjà ralenti et désormais assiégé par des vents contraires.
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Des indicateurs en berne
La détérioration des relations commerciales transatlantiques commence à laisser des traces visibles. En juin 2025, l’excédent commercial de la zone euro s’est établi à 7 milliards d’euros, soit trois fois moins qu’un an plus tôt (20,7 milliards en juin 2024).
Même constat du côté de l’industrie : selon Eurostat, la production industrielle a reculé de 1,3 % en juin par rapport à mai. Un signal préoccupant qui s’ajoute à l’affaiblissement de la consommation des ménages : -0,2 % au premier trimestre, après une hausse de 0,4 % en fin d’année 2024.
La confiance des ménages s’érode également. L’indicateur de la Commission européenne ressort à -15,5 en août, là où les économistes espéraient -14,9. L’indice du sentiment économique (ESI) confirme cette tendance, tombant à 95,2 points contre 95,7 en juillet, bien en deçà de son seuil de long terme (100).
Seule éclaircie : en Allemagne, l’indice Ifo du climat des affaires a progressé légèrement en juillet (88,6 points contre 88,4 en juin), atteignant son plus haut niveau depuis l’été dernier. Une amélioration timide, mais encore trop fragile pour rassurer les marchés.
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Quelques signaux positifs
Deux données viennent toutefois tempérer ce tableau assombri. D’une part, l’indice PMI composite, baromètre de l’activité globale dans la zone euro, s’est redressé pour le troisième mois consécutif, à 51,1 en août, au-dessus du seuil de 50 qui marque la frontière entre expansion et contraction.
D’autre part, le marché du travail résiste mieux que prévu. L’emploi a progressé de 0,1 % au deuxième trimestre, après +0,2 % au premier. Le chômage reste contenu à 6,2 %, tandis que les salaires négociés ont bondi de 4 % sur un an, après +2,5 % au trimestre précédent.
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La BCE lève le pied
Dans ce contexte contrasté, la Banque centrale européenne adopte une posture d’attente. Après avoir ramené son taux de dépôt de 4 % à 2 % au fil de huit baisses successives, l’institution de Francfort annonce désormais qu’elle se contentera d’« ajustements marginaux » d’ici la fin de l’année.
L’objectif est clair : donner du temps aux baisses de taux pour se diffuser pleinement dans l’économie réelle, alors même que l’inflation converge vers la cible de 2 %. Selon Eurostat, l’inflation annuelle s’est établie à 2,0 % en juillet, stable par rapport à juin et nettement en retrait par rapport aux 2,6 % de l’été 2024.
Si la zone euro évite pour l’instant la récession, elle demeure vulnérable, coincée entre la faiblesse de la demande interne, la fragilité industrielle et un environnement géopolitique sous tension.
Économie française : un optimisme fragile face aux vents contraires
Les dernières prévisions de la Banque de France invitent à l’optimisme : au troisième trimestre, le produit intérieur brut devrait progresser de 0,3 %. Un signe encourageant qui témoigne d’une résilience de l’économie hexagonale malgré un climat politique et social chargé d’incertitudes. Mais derrière cette façade de croissance, plusieurs indicateurs rappellent que la reprise reste fragile
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Le moral des ménages vacille
Premier signal d’alerte : l’automobile. Les ventes de voitures neuves s’enfoncent dans le rouge, avec une baisse de près de 8 % au premier semestre. Juin a même marqué le sixième mois consécutif de recul, affichant une chute de 6,7 % par rapport à l’an dernier. Face à la conjoncture et au flou entourant l’avenir du véhicule électrique, les ménages reportent leurs achats.
Le moral des Français reflète cette prudence. Après trois mois de stabilité, la confiance des ménages a reculé en août, perdant un point pour s’établir à 87, son plus bas niveau depuis octobre 2023. Un affaissement qui illustre le malaise grandissant face à l’incertitude politique.
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Une crise institutionnelle à venir
Car au-delà des chiffres, c’est bien le climat institutionnel qui pèse sur les perspectives. L’appel de François Bayrou à un vote de confiance accentue l’impression d’instabilité. Et la possibilité d’une dissolution de l’Assemblée nationale, évoquée par l’Élysée, semble désormais le scénario le plus probable aux yeux des gérants d’actifs. De nouvelles élections législatives pourraient donc être convoquées d’ici quarante jours.
Dans ce contexte, les marchés se préparent à une période de fortes turbulences. « La volatilité pourrait être intense, au gré des sondages et jusqu’aux élections », avertit Wilfrid Galand, directeur et stratégiste chez Montpensier Arbevel. Selon lui, « l’ensemble des actifs de la zone euro, y compris l’euro lui-même, pourraient être affectés, la France restant en première ligne. Le rendement des obligations d’État françaises à dix ans (OAT) pourrait même frôler la barre des 4 % ».
Les gérants d’Altitude IS rappellent cependant que la prime de risque exigée par les investisseurs reste inférieure aux pics atteints en 2012, en pleine crise de la dette européenne. « Quant au coût d’une assurance contre un défaut français, mesuré par le Credit Default Swap (CDS), il demeure contenu à 35 points de base, dans la moyenne de la zone euro. »
Ainsi, l’économie française avance sur un fil : soutenue par une croissance qui résiste, mais menacée par une instabilité politique qui pourrait, à tout moment, enterrer les derniers espoirs d’un rebond durable.
Chine : entre deux eaux
Malgré la guerre commerciale menée par l’administration Trump, l’économie chinoise continue d’afficher une solidité surprenante. Si l’on en croit les chiffres officiels transmis par Pékin, le pays affiche une croissance du PIB de 5,2 % au deuxième trimestre 2025, contre 5,4 % trois mois plus tôt. Un léger fléchissement, certes, mais qui permet au pays de rester dans la trajectoire fixée par les autorités : « environ 5 % » sur l’année. Le gouvernement déploie tous les leviers à sa disposition pour préserver cette dynamique.
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Une trêve fragile avec Washington
Forts avec les faibles, faibles avec les forts. Donald Trump, qui a su imposer sa loi à ses partenaires commerciaux les moins puissants, se heurte à une tout autre résistance face à la Chine de Xi Jinping. Contrainte de négocier, la Maison-Blanche a accordé à Pékin un sursis : une trêve commerciale de 90 jours, repoussant l’échéance au 10 novembre.
Les surtaxes douanières restent en place — 30 % côté américain, 10 % côté chinois —, mais le climat est loin des tensions les plus explosives du printemps. Pékin, anticipant le risque d’un accès restreint au marché américain, a rapidement diversifié ses débouchés. L’Asie du Sud-Est et l’Europe absorbent désormais une part croissante des exportations chinoises. Résultat : un excédent commercial record en juin, frôlant les 115 milliards de dollars. Les exportations, elles, ont bondi de 5,8 % sur un an, selon les chiffres des douanes.
Mais ce répit pourrait être de courte durée. L’accord signé entre Washington et Hanoï menace d’ouvrir un nouveau front. Le texte prévoit une taxation de 40 % sur les produits « réexportés », c’est-à-dire peu transformés localement, contre 20 % pour les autres biens. Une disposition qui vise explicitement les pratiques de contournement reprochées à Pékin.
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Relance massive, fragilités persistantes
Pour maintenir une croissance supérieure à 5 %, Pékin a mis en œuvre un plan de relance d’envergure. Déficit public porté à un niveau inédit de 4 % du PIB, investissements massifs, assouplissement monétaire : l’arsenal est impressionnant. Le gouvernement a également ciblé la consommation en accordant jusqu’à 15 % de rabais sur des biens allant de l’électronique aux automobiles.
Derrière ce volontarisme se dessinent pourtant des signes de vulnérabilité. Les indicateurs avancés signalent un essoufflement. En juillet, le PMI composite est tombé à 50,2 (contre 50,7 le mois précédent), frôlant la zone de contraction. Le PMI manufacturier a reculé à 49,3, en deçà des prévisions. À l’inverse, les services ont montré un sursaut, grimpant à 52,6, au-delà des attentes.
Les échanges extérieurs, eux, ont surpris positivement : +7,2 % d’exportations en rythme annuel, contre 5,6 % anticipés. Mais la consommation intérieure donne des signaux moins positifs. Les ventes au détail ont reculé de 0,14 % en juillet, tandis que les immatriculations automobiles ont chuté de 1,5 %. Les subventions incitant au remplacement des voitures thermiques par des modèles électriques semblent déjà perdre de leur efficacité.
Autre ombre au tableau : les investissements en immobilisations des entreprises privées — hors immobilier — ont diminué de 1,5 % sur un an, confirmant un climat d’incertitude et de prudence.
La Chine continue donc de défier les pronostics en affichant une croissance vigoureuse malgré l’hostilité commerciale américaine. Mais sous la surface, la mécanique s’essouffle : consommation hésitante, investissement privé en repli, dépendance accrue aux mesures de soutien public.
Les convictions de Scala Patrimoine sur les marchés financiers
Le mois d'août a clôturé en territoire positif pour les marchés actions, tant aux États-Unis qu'en Europe, défiant la saisonnalité historiquement difficile de cette période. Cette performance est attribuable à une saison des résultats d'entreprises robuste, avec plus de 82 % des sociétés du S&P 500 dépassant les estimations. Sur les marchés obligataires, la France est, quant à elle, sous pression.
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Les marchés actions se maintiennent
Aux États-Unis, la saison des résultats a surpassé toutes les attentes : les bénéfices ont bondi de 11,7 %, bien au-delà des prévisions initiales, tandis que la révision de la croissance du PIB au deuxième trimestre est venue renforcer la dynamique. L’enthousiasme autour de l’intelligence artificielle continue de jouer le rôle de catalyseur, porté par les performances éclatantes des « Magnificent Seven » et de Nvidia, qui consolident la conviction des investisseurs dans la solidité de ce secteur.
- La Fed en soutien de l’économie américaine ?
Du côté macroéconomique, les signaux apparaissent plus contrastés. Si les indicateurs restent mitigés de part et d’autre de l’Atlantique, les anticipations d’une baisse des taux directeurs par la Fed alimentent l’optimisme des marchés.
À Washington, l’hypothèse d’une détente monétaire dès septembre gagne du terrain, portée par la dégradation des derniers rapports sur l’emploi. Une telle décision pourrait redonner de l’élan à l’économie américaine, à condition que le regain d’inflation lié aux nouveaux tarifs douaniers ne soit qu’un feu de paille.
En Europe, le PMI manufacturier est repassé au-dessus du seuil des 50 points en août, signe d’une reprise de l’activité pour la première fois depuis trois ans. La BCE s’apprête quant à elle à publier de nouvelles projections de croissance et d’inflation, intégrant les récents accords commerciaux. En France, deux échéances politiques et financières retiendront particulièrement l’attention : le vote de confiance et la révision potentielle de la note souveraine par Fitch.
- Des accords commerciaux en demi-teinte
Les négociations commerciales progressent, mais demeurent semées d’incertitudes. L’Europe a accepté de supprimer une partie de ses droits de douane sur les produits industriels en échange d’une réduction des taxes américaines sur les véhicules, ramenées de 27,5 % à 15 %. Une concession jugée déséquilibrée, puisque près de 70 % des exportations européennes restent soumises à des droits.
Les médicaments, eux, seront finalement taxés à 15 %, après la menace de Donald Trump de porter ces droits à 250 %. Le secteur aéronautique européen obtient en revanche une exemption, évitant une escalade potentiellement explosive.
L’Inde, de son côté, subit de plein fouet les nouveaux droits américains – 50 % sur une large part de ses exportations – ce qui pousse New Delhi à se rapprocher de Pékin. Les États-Unis restant son premier partenaire commercial, les secteurs clés comme le textile et les pierres précieuses risquent de payer le prix fort. La croissance indienne pourrait même repasser sous la barre des 6 %, selon certaines estimations.
La Chine, en revanche, tire parti de ce bras de fer : ses marchés financiers affichent des performances à deux chiffres depuis le début de l’année, dépassant ceux des États-Unis en devise locale. Pékin semble sortir renforcé de l’épreuve, même si des fragilités demeurent, notamment dans la consommation intérieure et l’immobilier.
- Diversification, maître-mot sur les marchés
Dans cet environnement incertain, le positionnement sur les marchés actions reste neutre. Septembre est historiquement un mois volatil, et la prudence s’impose malgré la solidité des résultats d’entreprise. La diversification demeure essentielle, même si certaines préférences sectorielles se dessinent, en particulier du côté des valeurs technologiques américaines, encore dopées par l’IA.
Les résultats du deuxième trimestre confirment que l’intelligence artificielle constitue désormais un moteur structurel de croissance. Les sociétés actives dans ce domaine continuent de capter une demande soutenue et seraient parmi les principales bénéficiaires d’une baisse de taux. À l’inverse, les secteurs sensibles aux tarifs douaniers, comme la pharmacie européenne, restent fragiles.
Les banques européennes – et tout particulièrement les Françaises – pâtissent, elles, du climat politique et du spectre d’une dégradation de la note souveraine. Si leur solidité n’est pas remise en cause, la pression pourrait persister à court terme.
Quant aux marchés émergents, l’heure est à la sélectivité. Les tensions commerciales poussent à la multiplication d’accords qui pourraient, à terme, profiter à certaines zones. Mais l’Inde reste lourdement pénalisée, et la Chine, malgré ses récents succès boursiers, conserve des faiblesses structurelles. Autant de raisons qui plaident pour une allocation diversifiée et mesurée.
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Les marchés obligataires : la France scrutée, la Fed attendue
Entre incertitudes politiques en France et attentes fébriles d’une décision de la Fed, les marchés obligataires traversent une phase de tension. Tandis que le souverain français voit ses taux longs s’écarter, l’Investment Grade européen apparaît comme un refuge solide. Aux États-Unis, les anticipations de baisse de taux entretiennent l’attrait, mais le risque de change impose une prudence accrue aux investisseurs en euros.
- Les regards tournés vers la France
En Europe, les marchés obligataires évoluent sous la pression d’un climat politique français délicat. Le vote de confiance du 8 septembre, suivi de la révision de la note de Fitch le 12, pourrait s’avérer décisif pour la préservation du double A de la France. Les inquiétudes budgétaires persistent : l’objectif de ramener le déficit à 4,6 % du PIB en 2026 semble de plus en plus incertain. Déjà, les taux en portent la marque. Le rendement du 10 ans français s’est de nouveau écarté de celui de l’Allemagne, frôlant les 80 points de base observés lors de la dissolution. La nervosité se concentre surtout sur la partie longue de la courbe : le 30 ans a progressé beaucoup plus fortement que les maturités courtes.
Pourtant, malgré cette tension sur la dette souveraine, les fondamentaux des marchés demeurent solides. L’élargissement des spreads pourrait même être perçu comme une opportunité d’achat sur certaines signatures. Dans ce contexte, l’Investment Grade reste à privilégier : il permet de bénéficier d’une revalorisation mécanique via les taux, tout en offrant un portage attractif pour l’investisseur en euros en quête de revenus réguliers et stables.
- États-Unis : un équilibre fragile
Outre-Atlantique, la stabilité du 10 ans contraste avec la baisse marquée des taux courts, portée par l’espoir d’une réduction de taux de la Fed dès septembre. Mais le marché pourrait vite être rattrapé par la réalité. Les chiffres récents de l’emploi ne confirment pas la détérioration attendue, ce qui va à l’encontre du discours de Jerome Powell à Jackson Hole, plaidant pour un assouplissement monétaire. Avec des anticipations de marché qui intègrent déjà près de 80 % de probabilité de baisse, un statu quo ferait l’effet d’une douche froide et nourrirait la volatilité.
Si les obligations américaines offrent un attrait certain en valeur absolue, elles restent périlleuses pour un investisseur en euros. Le risque de change peut en effet effacer tout avantage de rendement, comme l’ont montré les performances décevantes du premier semestre. Les stratégies de couverture existent, mais leur coût réduit fortement l’intérêt d’un portefeuille obligataire libellé en dollars.
- L’Europe, toujours au centre du jeu
Le paysage obligataire demeure marqué par l’incertitude politique en Europe et par une visibilité réduite aux États-Unis. Dans ce brouillard, nous restons confiants sur le marché obligataire européen. Les obligations américaines conservent un rôle de diversification à long terme, mais pour un investisseur en euros, le risque de change rend la stratégie de portage moins pertinente.
L’Investment Grade européen apparaît, lui, comme un choix solide : les rendements restent attractifs, la stabilité attendue est rassurante et le taux de défaut du segment demeure inférieur à 1 %.
- High Yield : prudence et sélectivité sur les marchés obligataires
Nous maintenons une approche sélective sur le High Yield, plus exposé au cycle économique. Ce segment ne nous paraît justifié que sur des maturités courtes et pour des signatures de qualité, lorsque le surplus de rendement compense réellement le risque.
Du côté des taux, notre préférence va aux souverains européens de court terme, une alternative crédible aux instruments monétaires, grâce à la lisibilité de la politique de la BCE. Nous restons prudents sur les maturités longues européennes et franchement négatifs sur les taux longs américains. La récente adoption par la Chambre des Représentants du “Big Beautiful Bill” — un plan budgétaire ambitieux porté par l’administration Trump — n’a fait qu’accroître les craintes sur l’endettement des États-Unis. Même s’il sera amendé par le Sénat, ce texte illustre le risque grandissant pesant sur les finances fédérales et laisse présager une volatilité persistante sur les taux longs.
- L’attrait du crédit européen Investment Grade
Sur le marché du crédit, notre conviction demeure : le segment Investment Grade européen allie robustesse et résilience. Ses spreads apparaissent plus stables à court terme que ceux du marché américain. Les obligations financières subordonnées offrent, de leur côté, un couple rendement/risque séduisant, soutenu par des fondamentaux bancaires solides et une régulation renforcée. Elles permettent d’améliorer le rendement moyen d’un portefeuille obligataire tout en restant dans l’univers Investment Grade.
En parallèle, nous restons vigilants sur le High Yield, en privilégiant les maturités courtes et les émetteurs les mieux notés, à condition que le rendement additionnel compense pleinement le risque accru.
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Les stratégies alternatives : exploiter les inefficiences de marché
Nous maintenons une posture de neutralité à l’égard des investissements alternatifs. Toutefois, dans le contexte actuel, les stratégies d’actions long/short nous paraissent particulièrement pertinentes.
Dans un environnement marqué par une volatilité accrue et des rotations sectorielles rapides, ces stratégies tirent leur force de leur capacité à déceler et exploiter les inefficiences de marché. Elles consistent à prendre simultanément des positions longues sur des titres jugés sous-évalués et des positions courtes sur ceux considérés comme surévalués.
Cette mécanique offre un double avantage : une protection face aux mouvements baissiers et une opportunité de surperformance dans les phases d’incertitude. Leur flexibilité constitue un atout majeur, permettant de générer de la valeur dans des conditions de marché contrastées, tout en conservant une décorrélation bienvenue vis-à-vis des indices traditionnels.
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Les produits structurés : adapter son niveau de risque
Les produits structurés continuent de séduire les investisseurs avertis. Ils offrent une porte d’entrée vers des marchés variés et des segments spécifiques, tout en permettant d’ajuster précisément le niveau de risque et de rendement. Ces instruments se révèlent particulièrement efficaces pour s’exposer à des secteurs porteurs à moyen terme, tout en bénéficiant d’un filet de protection contre les baisses. Dans un contexte de hausse des taux longs, les produits structurés liés aux taux deviennent d’autant plus attractifs, offrant un couple rendement-risque séduisant.
La diversification reste la clé : il s’agit à la fois de varier les sous-jacents et de multiplier les types de structures. Grâce à leur grande flexibilité, les produits structurés constituent une alternative pertinente pour optimiser un portefeuille dans l’environnement actuel. Ils trouvent également toute leur place dans une stratégie de rente, pouvant s’adapter aux besoins spécifiques de distribution de l’investisseur.
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Actifs non cotés : private equity et private debt
L’intérêt des investisseurs institutionnels pour les marchés non cotés ne faiblit pas, même dans un contexte économique empreint d’incertitudes.
- L’attrait pour les marchés secondaires
Cette dynamique, soutenue par la baisse progressive des taux d’intérêt en 2025, dirige également les flux vers des fonds plus accessibles au grand public. Si le marché montre quelques signes d’attentisme, liés aux aléas politiques et économiques, le potentiel du private equity reste solide. Les stratégies secondaires se distinguent par leurs opportunités de valorisation prometteuses, tandis que les fonds de co-investissement occupent une place centrale, offrant un équilibre entre rendement et maîtrise des coûts.
Les stratégies de dette privée, telles que la dette mezzanine ou le growth buyout, gagnent en popularité pour accompagner les entreprises en pleine croissance. Parallèlement, le capital-risque, particulièrement dans les technologies et la transition énergétique, suscite un regain d’intérêt, offrant des perspectives fascinantes pour les startups innovantes.
- Une allocation stratégique
Pour exploiter pleinement le potentiel des actifs non cotés tout en maîtrisant les risques, une approche diversifiée et de long terme est essentielle. Elle peut inclure :
- Les stratégies secondaires, pour leur stabilité et leurs rendements robustes.
- Une exposition au capital-risque, ciblant des opportunités à haut rendement dans des secteurs innovants.
- Les investissements en LBO (Leveraged Buyout), afin de tirer parti de l’effet de levier.
- Le growth equity, pour bénéficier de la croissance d’entreprises matures à fort potentiel.
- La dette mezzanine, avec ses taux attractifs, comme outil clé de diversification.
Dans un environnement économique en constante évolution, cette allocation vise à concilier performance et gestion proactive des risques. Elle reste attentive aux mutations du marché, tout en capitalisant sur les opportunités offertes, notamment dans les secteurs stratégiques que sont la santé et la transition énergétique.










