Loi Sapin 2 et Assurance-Vie : de nouvelles contraintes pour l'épargnant !

Le 3 novembre 2016, le Sénat a adopté en deuxième lecture le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (dit "Sapin 2"). Les sénateurs ont maintenu les dispositifs prévus à l’article 21 bis qui permettent (i) de bloquer temporairement, en cas de crise grave, les rachats sur contrats d'assurance-vie, et (ii) de moduler les règles de constitution et de reprise de la provision pour participation aux bénéfices. Le contexte de taux bas a accéléré l’adoption de cette loi qui a aujourd’hui deux objectifs : éviter une crise importante en cas de remontée des taux et encadrer les rémunérations des fonds en euros. L’article 21 bis de la loi Sapin 2 prévoit désormais le renforcement des pouvoirs macro prudentiels du Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) afin de préserver le secteur de l’assurance-vie en cas de risque systémique.

Si la presse spécialisée et généraliste s’est faite l’écho en 1ère lecture de ces mesures particulièrement contraignantes pour l’épargnant français, article prévoyant initialement que le HCSF sur proposition du gouverneur de la Banque de France pouvait « suspendre, retarder ou limiter, pour tout ou partie du portefeuille, le paiement des valeurs de rachat, la faculté d’arbitrages ou le versement d’avances sur contrat », il est nécessaire de rappeler que l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) disposait déjà de cette faculté néanmoins limitée à un niveau microprudentiel c’est-à-dire à une compagnie d’assurance déterminée. Lors du krach boursier de 2008 lié aux subprimes, il avait été question un moment de la mettre en application pour protéger certains acteurs français des répercussions de cette crise américaine sur le marché français. Ces mesures conservatoires ne pourront d’ailleurs être prises que pour faire face à des situations exceptionnelles telles que la préservation de la « stabilité du système financier » ou la prévention des « risques représentant une menace grave et caractérisée pour la situation financière des compagnies d’assurance, mutuelles et prévoyances ».

Confirmées en 2ème lecture devant l’Assemblée nationale le 29 septembre 2016, ces mesures conservatoires ont été cependant largement assouplies en 2ème lecture devant le Sénat le 3 novembre 2016. Pour faire face aux mêmes conditions exceptionnelles précitées et en vertu des nouvelles dispositions de l’article 21 bis 5 ter a), b), b bis) nouveau et c), le HCSF n’est plus en mesure que de respectivement :

  • « Limiter temporairement l’excercice de certaines opérations ou activités, y compris l’acceptation de primes ou versements » ;
  • « Restreindre temporairement la libre disposition de tout ou partie des actifs » ;
  • « Limiter temporairement, pour tout ou partie du portefeuille, le paiement des valeurs de rachat » ; et
  • « Retarder ou limiter temporairement, pour tout ou partie du portefeuille,[] la faculté d’arbitrages ou le versement d’avances sur contrat ».

Le HCSF pourra renouveler pour une période de trois mois les dispositions prévues à l’article 5 ter à l’exception du c) dont les mesures ne pourront être maintenues au maximum dans la limite de 6 mois consécutifs.

Les sénateurs ont justifié leur décision afin d’assurer tout d’abord la constitutionnalité des nouvelles mesures conservatoires. Ils ont ensuite estimé que les anciennes dispositions de l’article 21 bis 5 ter c) portaient « atteinte au droit de propriété et risquaient d'avoir des conséquences sur l'assurance-vie, placement préféré des Français. Il s'agissait de préserver les droits des épargnants en matière de contrats d'assurance-vie. Limiter à six mois les mesures de limitation temporaire par le HCSF du paiement des valeurs de rachats sur certains contrats d'assurance-vie serait donc une garantie pour les droits des épargnants. »[1].

Le deuxième volet de cette loi a pour objectif également de rappeler à l’assureur que dans un contexte actuel de taux très faible (l’OAT à 10 ans étant à 0,12 % au 28 septembre 2016) il est inconcevable de proposer à l’épargnant un rendement garanti supérieur à 2%. Le texte prévoit ainsi de limiter la rémunération des fonds en euros en permettant au HCSF la possibilité de « moduler les règles de constitution et de reprise de la provision pour participation aux bénéfices ».[2]

Il en ressort aujourd’hui pour l’épargnant français un double constat. Il est nécessaire pour lui de diversifier ses actifs sur plusieurs assureurs et de limiter son investissement en fonds en euros et cela à double titre. D’une part les rendements risquent de se dégrader fortement, la disparition même du fonds en euros est fortement débattus, et d’autre part en cas de remontée des taux, les sorties du fonds en euros et les arbitrages sur unités de compte pourraient être limités temporairement pour tout ou partie du portefeuille, comme pour le paiement des valeurs de rachat. Seuls les contrats d’assurance-vie luxembourgeois, non soumis de fait à la loi Sapin 2, pourraient bien être la solution pour échapper à l’application de cet article 21 bis.

Côté français, si les fonds en euros dernière génération vont tirer leur épingle du jeu de cette situation, il est fort à parier que leur limitation en montant sera monnaie courante à l’avenir. Certains assureurs ont d’ailleurs commencé à restreindre l’accès à leurs fonds en euros, Spirica ou Apicil pour ne citer qu’eux. Pour d’autres, le constat actuel nécessiterait des modifications plus en profondeur. Chez Axa, « la garantie totale en capitale devrait être repensée au profit d’une garantie partielle » selon Thomas Buberl son nouveau patron.

Il est désormais loin le temps du rendement sans risque. L’épargnant devra intégrer désormais la prime de risque dans l’élaboration de sa stratégie patrimoniale, ce qui nécessitera un minimum de réflexion et un accompagnement sur le long terme. Il sera donc nécessaire désormais d’envisager un possible blocage de son épargne dans la durée pour pouvoir bénéficier d’un minimum de rendement.

De nombreux professionnels ont depuis quelques mois trouvé la parade en mettant en avant les « produits structurés », outil assurant la perception d’un rendement en fonction d’un cahier des charges prédéfini par contrat. Si ces outils peuvent pour certains être assimilés à des outils « sécurisés » en fonction des points d’entrée, ils n’en restent pas moins des unités de compte dont le capital ne sera garanti ou protégé que, si et seulement si, les conditions de marché prévues dans le cahier des charges ont bien été remplies.

[1] Compte rendu analytique officiel du 3 novembre 2016 sur la loi Sapin II.

[2] Article 21 bis 5 bis de la loi Sapin 2


Taxation des propriétaires occupants et généralisation de la taxation des plus-values latentes : une « folle rumeur » qui s’intensifie.

En mai dernier, Christian Eckert, secrétaire d’Etat chargé du Budget et des Comptes publics, a fermement démenti devant l’Assemblée Nationale, la « folle rumeur » selon laquelle le gouvernement souhaitait mettre en place une taxation des loyers implicites. L’Observatoire Français des Conjonctures Economiques (OFCE) vient cependant de rendre une note intitulée « Quelles réformes de l’imposition sur le capital pour les revenus » tendant vers une conclusion en faveur de cette taxation. Pourquoi de telles conclusions ? Deux constats viennent étayer ces réflexions. Le premier relatif aux « grands absents » des prélèvements sur le capital et le deuxième concernant l’impôt sur la fortune.

L’OFCE démontre en effet que la France se caractérise par un niveau élevé de prélèvements sur le capital. Ainsi, en 2012, le taux implicite d’imposition du capital s’élevait à 46,9%, soit le plus élevé d’Europe. La taxation pesant sur le capital (intérêts, revenus fonciers, dividendes et plus-values) représenterait des taux marginaux supérieurs proches de ceux qui touchent le travail. L’institut estime alors que la fiscalité du capital en France doit être « rationnalisée et simplifiée » et pointe du doigt les deux grands absents de la taxation du capital : « le logement principal » (et les plus-values réalisées sur celui-ci) et « les plus-values non réalisées ». L’OFCE préconise donc la taxation des loyers implicites, c’est-à-dire le montant que les propriétaires auraient à payer s’ils étaient locataires de leur résidence principale. Ce revenu serait ainsi fiscalisé. Cette taxe a d’ailleurs déjà existé en France, de 1914 à 1964, jusqu’à ce que Valéry Giscard D’Estaing l’abroge en 1965.

L’OFCE estime également qu’il est légitime de faire payer l’impôt sur les plus-values latentes dans les cas de transmission par donations ou d’héritage : « Aujourd’hui un riche actionnaire peut loger ses titres dans une société ad hoc qui reçoit ses dividendes, utiliser les titres de cette société comme caution pour obtenir des prêts de sa banque qui lui fournit les sommes dont il a besoin pour vivre et ainsi ne pas déclarer de revenu, puis léguer les titres de cette société à ses enfants, qui ne paient pas d’impôt sur les plus-values ».

L’Observatoire indique qu’au-delà de la portée symbolique en termes de justice sociale, l’ISF ne représente aujourd’hui dans les caisses de l’Etat, qu’un revenu très faible. En effet, les sommes récoltées grâce aux taxes foncières des ménages et aux droits de successions s’élèvent à près de 30 milliards d’euros pour l’année 2014, contre 5,2 milliards pour l’impôt sur la fortune. La réforme de l'ISF serait donc à coupler selon l'OFCE avec la mise en place d'une nouvelle taxation pour les propriétaires occupants et d'une taxation sur les plus values latentes.

En conclusion, l’OFCE propose trois solutions :

  • "Supprimer cet impôt (ISF) pour augmenter l’attractivité tout en compensant les pertes des recettes par des déductions de dépenses publiques et sociales".
  • Supprimer l’ISF en le compensant par "une certaine taxation des loyers implicites (et) la généralisation de la taxation des plus-values latentes".
  • Maintenir l’ISF en abaissant le taux maximum à 1% et en imposant une taxation des français à l’étranger.

La deuxième proposition semble être la solution à tous les maux soulevés par la note de l’OFCE. Toutefois, il n’est pas sûr que cette stratégie convienne aux propriétaires occupants, qui seraient alors soumis, une fois de plus, à une énième taxation.


"Indemnités de licenciement, par ici les gros chèques!"

Magazine Capital n° 302 - Novembre 2016 - Rubrique Economie - Indemnités de licenciement, par ici les gros chèques! - Interview de Guillaume Lucchini sur la gestion des indemnités de licenciement suite au licenciement de Laurent Blanc de son poste d'entraineur du PSG.

GDE Erreur: Erreur lors de la récupération du fichier - si nécessaire, arrêtez la vérification d'erreurs (404:Not Found)

François Hollande et le Football, un divorce consommé

Dans un ouvrage sorti ce jeudi 13 octobre intitulé « Un président ne devrait pas dire ça… », Fabrice Lhomme et Gérard Davet, tous deux journalistes du Monde, publient les confidences de notre actuel Président de la République François Hollande. Outre les passages liés à la politique, François Hollande égratigne le monde du football, ses joueurs comme sa fédération.

« Ils sont passés de gosses mal éduqués à vedettes richissimes, sans préparation », « La Fédération, c’est pas tellement des entraînements qu’elle devrait organiser, ce sont des formations. C’est de la musculation de cerveau ».

Ces deux phrases en quelques jours ont engendré une vague de colère et d’indignation au sein des instances fédérales et chez de nombreux joueurs. Toutefois, outre les réprobations quant au respect de la fonction présidentielle, ces déclarations mettent en exergue les principales difficultés rencontrées dans la gestion et l’accompagnement de ces footballeurs.

Tout professionnel œuvrant au contact de ces joueurs et dans le milieu du football pourra vous affirmer la même chose. Avocat spécialisé en droit du sport, Agent d’image ou encore conseil en gestion de fortune, ces enfants ne sont absolument pas préparés à une carrière professionnelle ou du moins à ses conséquences. Ils n’ont à aucun moment reçu, eux ou leurs parents, les informations et l’accompagnement nécessaire leur permettant du jour au lendemain, d’appréhender et de comprendre les enjeux liés à ce monde de luxe, paillettes et argent. Et il sera encore plus difficile de s’y préparer quand on bascule dans ce monde à tout juste 18 ans pour les plus précoces d’entre eux.

Alors pourquoi un tel manque d’accompagnement ? Ne devrions-nous pas considérer ces personnes comme vulnérables au sens strict du droit ? Ne devrait-il pas exister une sorte de « curatelle » opérée par la Fédération ou une instance Etatique qui serait alors responsable de l’accompagnement de ces jeunes majeurs ?

Si les grands gagnants du Loto bénéficient d’un accompagnement psychologique opéré par la Française des Jeux, ces footballeurs ou leurs proches devraient pouvoir bénéficier des mêmes prestations. En effet, il sera difficile de se faire conseiller par ses proches quand les rémunérations sur une année peuvent représenter pour ces derniers le salaire de toute une vie.

Le footballeur devient du jour au lendemain une PME à part entière faisant vivre famille, amis, et vautours. La décision d’une bonne gestion est entre les mains des plus proches, dont toute la difficulté sera de mettre une barrière entre l’entourage nocif et le joueur.

Si les clubs pourraient être le 1er échelon dans l’accompagnement de ces joueurs, nombreux sont ceux qui ne veulent pas en être mêlés au regard du sujet particulièrement épineux. Comment procéder, qui recommander, quel impact si cela se passe mal ?

Si les propos de François Hollande ont eu pour effet de donner un coup de pied dans la fourmilière, il serait judicieux aujourd’hui de pousser la réflexion un peu plus loin et de mettre en place, au niveau de l’Etat, une commission de réflexion à ce sujet. Fédérations, clubs, joueurs, agents ou avocats, cela permettrait à chacun d’apporter ses idées sur le sujet et d’élaborer un modèle qui éviterait peut être à l’avenir, de telles déclarations.


Vers une simplification du changement de régime matrimonial pour le chef d'entreprise

«  Le Gouvernement réfléchit actuellement à de nouvelles mesures de simplification en faveur des entreprises […] la question de l’obstacle que peut constituer le changement de régime matrimonial à une reprise d’entreprise est expertisée, notamment en ce qui concerne la pertinence du délai de deux ans pour changer de régime matrimonial ».

C’est par ces mots que le 27 septembre 2016, le Ministère de la justice, par le biais d’une réponse ministérielle, est venu confirmer la volonté du Gouvernement de simplifier les transmissions d’entreprise, notamment en facilitant le changement de régime matrimonial des entrepreneurs. La question du changement de régime matrimonial avait déjà été soulignée dans un rapport du 7 juillet 2015 remis au ministre de l’Economie, de l’industrie et du numérique. Ce document mettant notamment en exergue l’incompatibilité du régime légal et du statut d’entrepreneur.

Le régime matrimonial détermine le niveau d’engagement du patrimoine personnel du chef d’entreprise et de son conjoint. Le régime légal qui s’applique automatiquement est celui de la communauté réduite aux acquêts, or celui-ci est le moins protecteur pour les entrepreneurs et leur famille. En effet tous les biens et revenus du couple sont engagés et donc saisissables par les créanciers, en dehors des biens propres de chaque conjoint. Cette fragilité s’accentue en cas de divorce si l’entreprise constitue l’essentiel du patrimoine du couple puisque la séparation peut rendre la vente inévitable. C’est pour cette raison et dans un souci de protection d’une activité entrepreneuriale qu’il s’avère souvent nécessaire de changer de régime, et de basculer sous un régime de séparation des biens pour protéger le patrimoine familial lorsque cette situation n’a pas été envisagée avant le mariage.

Mais cette procédure est souvent longue et coûteuse. En effet, selon les dispositions de l’article 1397 du Code civil, il faut que le régime matrimonial initialement choisi ait été appliqué pendant au moins 2 ans et que les époux soient d’accord tous les deux. Depuis une loi du 23 juin 2005, le contrôle judiciaire du changement de régime n’est plus systématique, mais il faudra néanmoins s’adresser à un notaire pour qu’il délivre un acte authentique établissant la nouvelle convention matrimoniale.

Cette nouvelle convention devra être homologuée par un juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance dans les cas où certaines personnes s’opposeraient à ce changement ou si l’un ou l’autre des époux a une enfant mineur. Cette dernière possibilité étant la plus répandue, une homologation judiciaire sera donc indispensable.

Le rapport en date du 27 septembre 2016 propose donc pour faciliter l’activité entrepreneuriale:

  • de supprimer le délai de 2 ans au terme duquel le couple pourra demander le changement de régime matrimonial en se calquant ainsi sur le couple pacsé dont le changement de régime peut être réalisé sans délai.
  • de supprimer le passage devant un juge en présence de mineurs, le changement de régime matrimonial pouvant être réalisé par un simple acte notarié.

Ces propositions n’en sont aujourd’hui qu’au stade de réflexions mais s’inscrivent dans une volonté gouvernementale de développement et de protection du monde de l’entreprise français.


Vers une extension du délai de résiliation en matière d’assurance emprunteur

Passé inaperçu ce jeudi 29 septembre 2016, les députés réunis en séance publique ont validé l’article 29 Bis B du projet de loi Sapin 2 permettant la résiliation annuelle en matière d’assurance emprunteur. Dans la droite ligne de la loi Hamon promulguée en 2014, le législateur a franchi une nouvelle étape dans la protection des droits de l’emprunteur.

Pour rappel, la loi Hamon promulguée le 18 mars 2014 est venue étendre la protection de l’emprunteur non professionnel qui sollicite un prêt d’un professionnel, pour financer des opérations sur un immeuble à usage d’habitation ou mixte. Cette protection, issue de la loi Scrivener du 13 juillet 1979, se retrouve codifiée aux articles L312-1 et suivants du code de la consommation.

Depuis cette date, l’emprunteur qui souscrit une assurance emprunteur dans le cadre de son acquisition immobilière, a la possibilité dans les 12 mois qui suivent sa souscription, de librement résilier son contrat d’assurance au profit d’un autre contrat qui apporterait des couvertures équivalentes à celui souscrit initialement. La question cependant était restée en suspens concernant les possibilités offertes à l’emprunteur passé ce délai de 12 mois.

Cet article 29 Bis B vient apporter la réponse à cette question et ainsi mettre fin à une Jurisprudence récente de la Cour de Cassation qui, par sa 1ère chambre civile le 9 mars 2016, avait refusé toute ouverture de la loi Hamon à la reconnaissance d’une résiliation annuelle des contrats d’assurance emprunteur.

La 2e conséquence du vote de cet article sera très probablement l’ouverture de ce marché encore très peu concurrentiel, accaparé aujourd’hui en grande partie par les banques. La loi Hamon avait déjà pour objectif en 2014 de mettre un terme à ces contrats d’assurance « groupe » dont les tarifs étaient très souvent supérieurs à ceux proposés par les assurances individuelles. De nombreux établissements refusaient en effet avant cette date toute délégation d’assurance et mettaient ainsi indirectement la pression sur l’emprunteur et sur son acquisition.

Le vote de cet article fin septembre est une avancée notable car l’assurance emprunteur représente aujourd’hui pour les banques une marge importante, pouvant même aller jusqu’à 30% à 40% du crédit. Si dans le cadre d’un investissement locatif une telle possibilité aura très peu d’impact (coût déductible), les économies réalisées dans le cadre d’un achat en résidence principale seront-elles très importantes.

Exemple d’un cas traité récemment :

-Emprunt sur 15 ans pour l’achat d’une Résidence Principale pour un montant de 446 000€

-Coût du contrat groupe proposé  (Taux : 0.34%) : 22 746€ sur la période

-Coût de la délégation conseillée (Taux : 0.049%) :3 254€ sur la période

*Gain enregistré pour le client : 19 492€

 


Vers la fin des fonds en euros?

Ce jeudi 29 septembre 2016, les députés réunis en séance publique ont adopté l’article 21 bis du projet de loi Sapin 2, article prévoyant le renforcement des pouvoirs macro prudentiels du Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) afin de préserver le secteur de l’assurance vie en cas de risque systémique. Le contexte de taux bas a accéléré l’adoption de cette loi qui a aujourd’hui deux objectifs : éviter une crise grave en cas de remontée des taux et encadrer les rémunérations des fonds en euros.

Si la presse spécialisée et généraliste s’est faite l’écho ces derniers jours de cette mesure particulièrement contraignante pour l’épargnant français, article prévoyant que le HCSF sur proposition du gouverneur de la Banque de France pourra « suspendre, retarder ou limiter, pour tout ou partie du portefeuille, le paiement des valeurs de rachat, la faculté d’arbitrages ou le versement d’avances sur contrat », il est nécessaire de rappeler que l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) disposait déjà de cette faculté néanmoins limitée à un niveau microprudentiel c’est-à-dire à une compagnie d’assurance déterminée. Lors du krach boursier de 2008 lié aux subprimes, il avait été question un moment de la mettre en application pour protéger certains acteurs français des répercussions de cette crise américaine sur le marché français. La loi Sapin 2 élargit aujourd’hui cette disposition en y intégrant par ailleurs le blocage possible des arbitrages ou des demandes d'avance, mesure limitée toutefois à 3 mois renouvelables.

Le deuxième volet de cette loi a pour objectif également de rappeler à l’assureur que dans un contexte actuel de taux de très faible (l'OAT à 10 ans étant à 0,12 % au 28 septembre 2016) il est inconcevable de proposer à l’épargnant un rendement garanti supérieur à 2%. Le texte prévoit ainsi de limiter la rémunération des fonds en euros en permettant au HCSF la possibilité de « moduler les règles de constitution et de reprise de la provision pour participation aux bénéfices ».

Il en ressort aujourd’hui pour l’épargnant français un double constat. Il est nécessaire pour lui de diversifier ses actifs sur plusieurs assureurs et de limiter son investissement en fonds en euros et cela à double titre. D’une part les rendements risquent de se dégrader fortement, la disparition même du fonds en euros est ces dernier mois fortement débattus, et d’autre part en cas de remontée des taux, les sorties du fonds en euros et les arbitrages sur unités de compte pourraient être gelés engendrant une indisponibilité des actifs sur contrat d’assurance vie.

Si les fonds en euros dernière génération vont tirer leur épingle du jeu de cette situation, il est fort à parier que leur limitation en montant sera monnaie courante à l’avenir. Certains assureurs ont d’ailleurs commencé à restreindre l’accès à leurs fonds en euros, Spirica ou Apicil pour ne citer qu’eux. Pour d’autres, le constat actuel nécessiterait des modifications plus en profondeur. Chez Axa, « la garantie totale en capitale devrait être repensée au profit d’une garantie partielle » selon Thomas Buberl son nouveau patron.

Il est désormais loin le temps du rendement sans risque. L’épargnant devra intégrer désormais la prime de risque dans l’élaboration de sa stratégie patrimoniale, ce qui nécessitera un minimum de réflexion et un accompagnement sur le long terme.

 


BCE

Baisse des taux, la spirale infernale

La situation est inédite: les taux n’ont jamais été aussi bas. Le plus déroutant est que ce phénomène dure maintenant depuis de nombreux mois et qu’à chaque baisse enregistrée, on a l’impression de repousser les limites du possible et du raisonnable. A titre d'exemple, c'est comme si à chaque départ du 100m pris par Usain Bolt le record du monde de la discipline était pulvérisé. Déstabilisant non ?

Pourtant la menace d’une hausse des taux existe et elle serait sans nul doute salvatrice pour notre économie réelle à moyen/long terme. On attendait début septembre une action dans ce sens de la FED, il n’en fût rien. On comprend la difficulté des présidents des banques centrales américaines et européenne à prendre une décision dont on sait d’avance qu’elle entraînera des conséquences notables sur l’économie à l’échelle mondiale.

Si cette baisse des taux présente un intérêt évident pour l’investisseur, il n’en est rien pour l’épargnant. Baisse de la rentabilité des fonds en euros et du livret A, limitation de l’accès à ces supports garantis par l’assureur au profit d’un arbitrage vers des supports en unités de compte, et dernier épisode en date, vote à l’assemblée nationale du projet de loi Sapin 2 permettant dans son article 21 le gel des actifs pour une période reconductible de 3 mois en cas de crise systémique faisant suite à une remontée des taux importante.

Pour l’investisseur le bilan est plutôt rose, ou du moins on essaye de le lui faire croire. Les taux d’emprunt sont désormais sous la barre des 1% à 15 ans et le fixe au détriment du variable est toujours d’actualité. La création de richesse est désormais dans l’emprunt, la baisse des taux ayant gonflé le pouvoir d’achat des investisseurs. Pour autant, en cas de forte remontée des taux, le marché immobilier pourrait en être fortement impacté. Certaines études tablent depuis quelques temps sur une baisse importante du prix de l’immobilier, les taux bas de ces dernières années en limiteraient aujourd’hui l’impact.

Si l’achat de la résidence principale est une vraie question au regard du contexte actuel, l’épargnant/investisseur a tout intérêt aujourd’hui à utiliser son levier d’emprunt dans l’immobilier locatif. En effet, le contexte de taux bas limite son apport dans le cadre de ce type d’investissement, et par la même occasion, via le jeu des loyers, limite son impact en cas de baisse de l’immobilier. Pour autant la bonne affaire n’est pas automatique et il faut rester vigilant à l’effet pervers que peut susciter un tel contexte. La faiblesse des taux pourrait en effet pousser certains investisseurs à être moins regardant sur leur placement.

La baisse des taux invite donc l’investisseur à financer mais également refinancer son immobilier. Créer de la dette sur un actif déjà payé a un effet bénéfique notamment en cas de forte imposition. Par ailleurs, dans un objectif de transmission, le financement permettra à l’investisseur de récupérer des liquidités, d’optimiser les plafonds des contrats d’assurance vie, et de transmettre à ses héritiers un actif diminué du passif.

L’investisseur a également intérêt à renégocier ses crédits, et cela même si la dernière renégociation date il y a à peine d’un an. A chaque crédit son assurance emprunteur, il sera également judicieux de mettre en pratique la loi Hamon permettant de faire jouer la concurrence et éviter ainsi les contrats « groupe », contrats d’assurance très souvent dans la fourchette haute du marché. Avant toute renégociation ou de rachat de crédit, une étude sera indispensable notamment en cas d’Indemnité de Remboursement Anticipé (IRA). Selon la durée de l’emprunt et vos objectifs personnels, il sera quelque fois plus coûteux de baisser le taux de vos emprunts que de conserver l’existant, même si celui-ci s’avère plus élevé.


Prélèvement à la source et année blanche, quels impacts pour le contribuable?

Annoncé en 2015, le dispositif du prélèvement à la source (PAS), est en passe d’être débattu à l’Assemblée nationale dans le cadre du projet de loi de finances pour 2017. Il vient d’être présenté en Conseil des ministres ce 28 septembre 2016. Le texte est donc loin d’être définitif mais les contours les plus importants de la réforme se dessinent progressivement. Le premier PAS devant intervenir en 2018.

La question d’un prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu a fait son apparition dans l’hexagone dans les années 1930, et a même été mis en œuvre en 1939 et en 1948. L’Etat français a, à l’époque, recours au PAS pour la perception des prélèvements sociaux, des charges salariales ou encore les prélèvements libératoires forfaitaires sur les revenus du capital. Il s’agit ici « d’un mode de recouvrement de l’impôt consistant à faire prélever son montant par un tiers payeur, le plus souvent employeur ou banquier, au moment du versement au contribuable des revenus sur lesquels porte l’impôt »[1].

Ce système de recouvrement a été adopté par bon nombre de pays occidentaux (Canada, Etats-Unis, Royaume-Uni, Belgique, Allemagne, Danemark, Pays-Bas) pour des besoins différents : simplification de l’imposition, amélioration du recouvrement ou encore augmentation des gains de productivité de l’administration fiscale. L’Etat français souhaite aujourd’hui franchir le pas. Quels sont les principaux changements attendus  pour le contribuable?

L’apport principal sera bien entendu une taxation contemporaine des revenus, avec une taxation des revenus n, l’année n. Le système français actuel, impose les revenus obtenus l’année n, l’année n+1. La retenue à la source permettra au contribuable de voir son imposition adaptée à la variation de son revenu. De même cela évitera, un blocage l’année n+1 lorsqu’une baisse de revenu s’ajoute à une forte imposition sur les revenus élevés de l’année n.

1/ Les revenus concernés par la réforme sont les traitements et salaires, les pensions, les revenus de remplacement, les rentes viagères. Ceux-ci seront retenus à la source par l’organisme versant le revenu (employeur, organismes de retraites,…) selon un taux que l’administration fiscale aura préalablement communiqué.

Les revenus des indépendants (BIC, BNC et BA), ainsi que les revenus fonciers sont eux aussi concernés par la réforme. Ces revenus seront également taxés de manière contemporaine mais sous forme d’acomptes sur 12 mois, toujours en application d’un taux communiqué par l’administration fiscale.

Le taux de PAS sera transmis par l’administration à partir du second semestre 2017, et sera actualisé tous les ans en fonction des revenus perçus par le contribuable. Ce dernier devra donc continuer à déclarer ses revenus chaque année.

Pour les autres types de revenus, les modalités ne seront pas modifiées : revenus de capitaux mobiliers (prélèvement à la source) ; plus-values immobilières (prélèvement forfaitaire libératoire).

Il faut préciser que seul le dispositif de prélèvement de l’impôt est modifié et non pas les méthodes de calcul de celui-ci, lesquelles resteront inchangées.

2/ Sur option, les couples mariés ou pacsés (effectuant une déclaration commune) pourront opter pour un taux d’imposition individualisé en fonction de leur revenu respectif. Ceci aura pour effet de ne pas faire supporter à l’époux ayant le salaire le plus bas, la pression fiscale engendrée par les gains de son conjoint.

3/ Plusieurs questions se posent quant à la confidentialité des informations personnelles des contribuables, communiquées notamment aux employeurs pour qu’ils procèdent à la déclaration auprès de l’administration. Le Conseil d’Etat a demandé au gouvernement de prévoir plusieurs garanties à même d’éviter les discriminations à l’embauche ou encore les discriminations dans la détermination des salaires.

Pour ce faire, le projet de loi prévoit notamment qu’un contribuable pourra opter pour un taux neutre ou un « taux par défaut ». Le contribuable n’aura plus à communiquer l’étendue de sa situation patrimoniale à son employeur (lequel appliquera simplement le taux neutre). En contrepartie, le salarié devra régler directement à l’administration fiscale, le solde de l’impôt réellement dû.

4/ Comment l’année de transition sera-t-elle organisée ? En 2017, l’impôt exigible sera calculé sur les revenus 2016 et sera soumis au système que nous connaissons actuellement, puisque c’est le contribuable qui payera directement l’impôt auprès de l’administration fiscale. Les revenus 2018 seront soumis au PAS en 2018. En conséquence il n’y aura aucune année sans impôt.

Pour autant quid des revenus 2017 ? Les revenus 2017 devront néanmoins être déclarés au printemps 2018, d’une part pour établir le taux de prélèvement mais également pour calculer le CRM ou Crédit d’impôt Modernisation Recouvrement.

Ce que l’on sait aujourd’hui, c’est que ces revenus 2017 devraient échapper à l’impôt. Oui mais pas à 100%. Afin d’éviter tout abus, Bercy a initié une série de dispositions visant à limiter une « optimisation » des revenus sur l’année 2017. Ainsi, professionnels libéraux ou chefs d’entreprises sont dans l’œil du viseur, professions pouvant décaler une rémunération d’une année sur l’autre. Pour ce faire, Bercy prévoit une série de dispositifs visant à exclure tout risque de fraude.

Les revenus exceptionnels seront notamment exclus du dispositif. Cette liste, particulièrement longue, entend par là les indemnités de rupture du contrat de travail, le dédommagement d'un changement de lieu de travail, les sommes perçues pour la participation et l'intéressement, indemnités de cessation des fonctions des mandataires sociaux et dirigeants, indemnités de clientèle de cessation d'activité, ventes d'actions gratuites et gains de stock-options...

Concernant les dividendes, plus-values mobilières et immobilières, ces revenus n’entrent pas dans le champ de la réforme et devront être payés au titre de l’impôt sur le revenu 2017.

Pour les indépendants, l’administration fiscale retiendra le revenu maximal sur les trois dernières années et de l’année suivante pour déterminer le taux de prélèvement.

Les grands « perdants » de cette réforme sont les jeunes professionnels débutants dans la vie active en 2018, puisqu’ils seront imposés dès la première année et non plus en n+1. A l’inverse, les professionnels, jeunes retraités dès 2018, seront imposés sur le montant de leurs pensions de retraite et non pas sur leurs revenus d’activité réalisés en 2017.

[1] Conseil des prélèvements obligatoires, Prélèvements à la source et impôt sur le revenu, Synthèse, Février 2012


Interprofessionnalité, quelles perspectives?

L'interprofessionnalité introduite cette année par le gouvernement offre de nouvelles perspectives pour les professionnels du chiffre et du droit, tout en garantissant les intérêts de leurs clients.
Prise en application de la loi Macron[1], l'Ordonnance n°2016-394 du 31 mars 2016[2] et ses différents décrets récents d’application[3] ont pour objectif affiché de faciliter la création de sociétés ayant pour objet l’exercice en commun de plusieurs professions réglementées.

L'Ordonnance autorise en effet la constitution de société pluri-professionnelle d’exercice (SPE) ayant pour objet l’exercice en commun de plusieurs professions : avocat, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, commissaire-priseur judiciaire, huissier de justice, notaire, administrateur judiciaire, mandataire judiciaire, conseil en propriété industrielle et expert-comptable.
Les SPE peuvent revêtir toute forme sociale, à l'exception de celles conférant à leurs associés la qualité de commerçant (notamment la société en nom collectif).

La loi offre également de nouvelles opportunités commerciales : les SPE sont en mesure de « proposer des gammes complètes de prestations à des prix rendus plus attractifs par la mutalisation des charges »[4]. Elles peuvent en outre exercer toute activité commerciale à titre accessoire (le caractère accessoire ne devant pas s'entendre en termes de parts de chiffre d'affaires mais en termes de lien avec l'activité principale d'une ou des professionels du chiffre et du droit composant la SPE). A titre d'exemple les avocats seront donc en mesure de créer des Family office2.

S'agissant des clients de SPE, leurs intérêts seront également respectés de différentes manières.
Les SPE sont classiquement tenus au respect des obligations de loyauté, de confidentialité ou de secret professionnel à leur égard. Toutefois, ces obligations ne font pas obstacle à ce que les professionnels du chiffre et du droit puissent communiquer entre eux toute information nécessaire à l'accomplissement des actes professionnels et à l'organisation du travail au sein de la SPE. Cette transmission est autorisée dès lors que les clients ont été préalablement avertis et qu'ils ont donné leur accord.
Ils bénéficient par ailleurs de l'application de procédures de conflict check obligatoires puisque chaque professionnel devra informer la SPE et les autres professionnels la composant de l'existence de tout conflit d'intérêt susceptible de naitre. Sont également concernés les conflits d'intérêts pouvant naitre entre l'exercice de son activité professionnelle et l'exercice par les autres professionnels.

Enfin, les SPE doivent souscrire à une assurance couvrant les risques liés à la responsabilité civile professionnelle comme toute autre société.

Au sein de Scala Patrimoine, nous avons d’ores et déjà entamé ce processus en recrutant cette année deux avocats et une notaire de formation pour satisfaire au mieux les exigences de nos clients. Dans ce contexte d’interprofessionnalité, le client final appréciera une telle révolution anticipée en bénéficiant de conseils à haute valeur ajoutée, aux plus près de ses besoins et exigences personnelles.

Robert Devin – Directeur juridique Scala Patrimoine

[1] Article 65 de la Loi n°2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
[2] Ordonnance n°2016-394 du 31 mars 2016 relative aux sociétés constituées pour l’exercice en commun de plusieurs professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé.
[3] Les 9 Décrets n°2016-874 à 2016-883 du 29 juin 2016.
[4] Rapport au Président de la République relative à l'Ordonnance n°2016-394 du 31 mars 2016 relative aux sociétés constituées pour l'exercice en commun de pusieurs professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé.