2018, une année décisive pour le conseil en gestion de patrimoine
2018 marque l’entrée en vigueur en droit français de deux directives européennes et un règlement européen importants et connus sous leurs acronymes réglementaires (MIF 2, DDA et PRIIPS). D’après une étude Morningstar réalisée pour Patrimonia, le principal salon du secteur qui s'est tenu à Lyon les 28 et 29 septembre, ce changement de réglementation constitue un défi majeur pour une grande majorité des cabinets de gestion de patrimoine français. Considéré comme nécessaire dans le cadre d'un conseil indépendant et impartial, ce changement de réglementation a été largement anticipé par Scala Patrimoine, notamment dès septembre 2016 par la nomination de son directeur général Robert Devin, ancien avocat de formation et spécialiste de la réglementation. Parallèlement, le cabinet continue de renforcer ses pôles d’expertises avec l’arrivée récente de deux nouvelles intervenantes.
Des directives et un règlement bouleversant un marché de professionnels inquiets
Le 1er janvier 2018 prochain entrera en vigueur le Règlement sur les produits d’investissements packagés de détail et fondés sur l’assurance (Packaged Retail Investment and Insurance-based Products ou PRIIPS)[1]. D’application directe, PRIIPS n’a besoin d’aucune ordonnance ou loi de transposition pour s’appliquer à tous les professionnels des secteurs assurantiels et financiers. Il vise principalement à améliorer la transparence d’une large gamme de produits assurantiels (contrats d’assurance-vie et de capitalisation) et financiers (obligations convertibles, produits structurés, véhicules de titrisation, etc.). A la manière de ce qui a été fait en matière d’organismes de placements collectifs en valeurs mobilières (OPCVM) et de fonds d’investissement alternatif (FIA), le législateur européen créera un document d’information clé (DIC) PRIIPS, document informationnel standardisé applicable aux produits précités indépendamment de leur forme ou de leur structure. Les DIC PRIIPS, DICI OPCVM et DICI FIA vous aideront à comparer vos différents produits assurantiels et financiers grâce à une information précontractuelle uniformisée (type d’investissement, objectifs, profil de risque, perte maximale, coûts directs et indirects, coûts totaux agrégés, réclamations, etc.).
Le 3 janvier 2018 prochain entrera, ensuite, définitivement en vigueur la deuxième Directive sur les marchés d’instruments financiers (MIF 2)[2]. La Directive MIF 2 aura vocation à rendre les marchés financiers plus efficients, résilients et transparents. Elle renforcera la protection des investisseurs financiers en imposant de nouvelles règles d’organisation et de bonne conduite notamment à votre conseiller en investissements financiers (CIF) par un encadrement accru des risques de conflits d’intérêts, tout en renforçant l’exécution de vos ordres et votre information.
Il conviendra, enfin, d’attendre le 23 février 2018 prochain pour voir entrée en vigueur, la Directive sur la distribution d’assurances (DDA)[3] équivalente à la Directive MIF 2 dans le secteur assurantiel et applicable à votre courtier d’assurance ou réassurance (COA). Elle offrira un nouveau cadre pour la distribution de produits d’assurance par notamment un renforcement des informations précontractuelles, une meilleure gestion des conflits d’intérêts et plus précisément des incitations financières ainsi que la mise en place d’une formation continue obligatoire applicable à tous les professionnels de l’assurance et indépendamment de leurs statuts (salariés, responsables de distribution et collaborateurs participant directement à la distribution de produits d’assurance).
Dans un tel contexte le choix d’un CIF de qualité deviendra encore plus déterminant pour éviter tous les conseils misleading et à fausses promesses (cf. sur la question notre article Investissements financiers atypiques : attention aux fausses promesses) tout comme votre COA ou encore votre courtier en opérations de banque et en services de paiement (COBSP).
Des équipes renforcées dans un objectif croissant d'accompagnement et de satisfaction client
Lors du salon Patrimonia, plus de 34% des CGP interrogés par Morningstar[4] se disaient particulièrement préoccupés et considéraient les réglementations précitées toujours plus complexes constituant le principal défi de demain. Plus grave, 58% d’entre eux se disaient ne pas être sereins quant à l’application de DDA, 67% ne pas être prêts à la mise en application de PRIPS sachant que seulement 49% se déclaraient prêts face à la mise en œuvre de MIF 2.
Loin de partager les inquiétudes de marchés, Scala Patrimoine n’a jamais considéré ces réglementations comme un chant du cygne. Bien au contraire, les équipes de Scala Patrimoine se forment régulièrement aux changements réglementaires assurantiels, bancaires et financiers. Le cabinet anticipe ainsi avec sérénité les réglementations futures et cette anticipation trouve également échos dans des recrutements de qualité.
Tiphaine Menand, notaire de formation, a rejoint début septembre Scala Patrimoine pour renforcer le pôle ingénierie patrimoniale notamment de ses expertises notariales (cf. Tiphaine Menand rejoint Scala Patrimoine en tant qu’ingénieur patrimonial sénior). Après, 6 années passées à la direction de la communication de la Fédération française du sport automobile (FFSA), Marion Aburto s’occupera dès ce mois d’octobre du pilotage de la communication du cabinet. L'objectif toujours premier étant de servir et de répondre au mieux aux attentes de nos clients.
[1] Règlement n°1286 du Parlement européen et du Conseil du 26 novembre 2014 sur les documents d’informations clés relatifs aux produits d’investissement packagés de détail et fondés sur l’assurance.
[2] Directive 2014/65/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 concernant les marchés d’instruments financiers et modifiant la Directive 2002/92/CE et la Directive 2011/61/UE transposée le jour du Brexit en droit français par l’Ordonnance 2016-827 du 23 juin 2016 relative aux marchés d’instruments financiers.
[3] Directive 2016/97/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 janvier 2016 sur la distribution d’assurances en attente d’ordonnance de transposition en droit français.
[4] Morningstar est une entreprise d’investissements spécialisée dans la recherche en investissements sur les placements en Amérique du Nord, en Europe, en Australie et en Asie (Cf. enquête menée à Patrimonia : http://poolo.kermeet.com/Data/kmewexv8/block/F_36bf14e23bffa2448cccabb5bca7af9159bf9bc16ff59.pdf).
2018, l’année des mobilités en demi-teinte ?
La mobilité assurantielle au travers du libre choix d’une assurance emprunteur a été largement renforcée par la publication récente d’une recommandation de l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR). Parallèlement, la mobilité bancaire pourrait connaître une amélioration seulement en demi-teinte. En effet, une ordonnance récente autorise les banques prêteuses à subordonner leurs offres de prêts à des domiciliations de salaires ou revenus assimilés sur des comptes de paiement ouverts dans leurs livres. De telles domiciliations bancaires ne risquent-elles pas d’être en défaveur des emprunteurs et façonner des mobilités à deux vitesses ? Explications sur des dispositions entrant en vigueur au 1er janvier 2018 :
Une recommandation ACPR salutaire : depuis 2010, tous les emprunteurs sont libres d’opter pour les contrats d’assurances externes de leur choix dès lors qu’ils présentent des niveaux de garanties équivalents à ceux proposés par leurs banques prêteuses. Cette mobilité assurantielle a été renforcée par le législateur à deux reprises respectivement par la loi Séparation et de régulation des activités bancaires de 2013[1] et la loi Hamon de 2014[2]. Passé cette date, tous les emprunteurs sont en droit de procéder à la déliaison entre leurs prêts immobiliers et leurs assurances emprunteurs associées et ce même, sous certaines conditions, dans les 12 mois suivant la signature de leurs offres de prêts (cf. nos articles Assurance emprunteur : résiliation et prise en compte du droit à l’oubli du 20/02/2017, Enième rebondissement pour l’extension du délai de résiliation de l’assurance emprunteur du 16/01/2017, Validation de l’extension du délai de résiliation en matière d’assurance emprunteur du 28/11/2016, Vers une extension du délai de résiliation en matière d’assurance emprunteur du 09/10/2016). En effet, les banques prêteuses ne peuvent refuser en garantie des contrats d’assurances externes dès lors que ces derniers présentent un niveau de garantie équivalent à leurs contrats d’assurance de groupe[3]. Début 2015, le Comité Consultatif du Secteur Financier (CCSF) a publié un avis[4] imposant aux banques prêteuses de choisir parmi un listing précis de critères stricts d’équivalence de garanties, avis par la suite repris en norme professionnelle par la Fédération Bancaire Française (FBF)[5] et applicable aux principaux établissements bancaires de place.
Constatant des freins dans la mise en œuvre de la mobilité assurantielle dans le cadre de différents contrôles sur pièces et sur place menés au sein de principaux établissements bancaires, l’ACPR a décidé de publier récemment une recommandation[6] salutaire. Salutaire car dans un contexte de taux bas rendant l’activité de financement/refinancement peu rentables pour des établissements de crédits sous fortes pressions de leurs clients, le coût de l’assurance associée à toute offre de prêt devient donc un enjeu majeur de négociation. Lors de l’adoption de la loi Lagarde en 2010, plus de 8 emprunts immobiliers sur 10 étaient conclus dans le cadre d’une assurance de groupe[7]. Passée cette date, les traitements de demandes d’assurances externes seront grandement fluidifiés et un certain nombre de pratiques dilatoires visant à ralentir ou dissuader l’exercice de sa mobilité assurantielle au travers d’un changement d’assurance emprunteur seront prohibées. A titre illustratif, les banques prêteuses ne pourront plus, en cours de négociation, modifier le taux applicable à votre futur prêt, ni exiger le paiement de frais supplémentaires liés aux travaux d’analyse du contrat d’assurance externe trouvé par les soins de votre courtier ou encore vous forcer à vous déplacer à une agence pour déposer votre dossier ou en obtenir son traitement. En termes de délais, les banques prêteuses auront l’obligations d’indiquer par écrit dans un délai de l’ordre de 2 à 3 jours ouvrés si les demandes sont jugées incomplètes sachant qu’il conviendra de compter un délai maximum de 10 jours ouvrés pour le traitement de toute demande de changement d’assurance emprunteur avant l’émission d’offres de prêt. Elles devront enfin mettre à la disposition du grand public notamment les critères d’équivalences de garanties établis par le CSSF directement sur leur site internet par un lien internet simple et visible d’accès.
Une ordonnance n°2017-1090 bienvenue mais en demi-teinte : depuis 2009, les principales banques françaises avaient l’obligation de proposer à leurs clients un service d’aide à la mobilité bancaire conformément à des normes professionnelles[8]. En 2014, le législateur transforme cette obligation professionnelle en véritable obligation légale[9] par la mise en place d’un service automatisé de mobilité bancaire et en 2015, la loi Macron[10] vient décharger les clients souhaitant changer de banque de toutes formalités administratives particulières (cf. notre article 22 jours ouvrés pour changer de banque ! du 7 février 2017). Entrée en vigueur le 6 février dernier sous toutes ces facettes opérationnelles[11], le changement simple de banque ou la possibilité de devenir multi-bancarisés en vue de trouver les meilleures relations bancaires, de financement, de refinancement ou de rachat de crédit a été largement facilité. Les clients concernés donnent un mandat à leur nouvelle banque d’accueil de réaliser l’ensemble des démarchages administratives nécessaires à son transfert auprès de son ancienne banque d’origine.
L’enjeu de la mobilité bancaire n’est, en effet, pas neutre lorsque l’on sait qu’en 2013, ISILIS, principal prestataire sous-traitant de plus de 65 banques françaises (contre 58 en 2010) avait à traiter plus de 3 millions de changements de domiciliations bancaires (contre 2 million en 2010)[12]. Parallèlement, les clôtures de comptes bancaires de particuliers étaient estimées par les professionnels sur la même période à 3,5 millions par an soit un taux de mobilité de l’ordre de 4,5% par an[13]. A titre de comparaison, la téléphonie mobile connaissait un taux de mobilité oscillant entre 6 et 8% et les services de gaz et électricité autour de 8% d'après les chiffres de la Commission européenne sur la même période2.
Cette année, le législateur achève en apparence son cycle de renforcement de la mobilité bancaire en adoptant le 1er juin 2017, l’Ordonnance n°2017-1090[14] dont les dispositions entreront en vigueur le 1er janvier 2018. Passé cette date, les conditions de subordination d’offres de prêt à des domiciliations de salaires ou revenus assimilés d’emprunteurs sur des comptes de paiements ouverts chez des banques prêteuses seront largement encadrés et une telle pratique bancaire courante sera limitée dans le temps. Jusqu’à présent purement oral du fait de l’interdiction des ventes liées, de telles domiciliations seront désormais possibles sous conditions strictes. Les emprunteurs concernés devront tirer en contrepartie de ces domiciliations un avantage individualisé[15]. Ce dernier devra être vérifié dans chacun des contrats de crédits composant les opérations de financement figurant dans les offres de prêts. L’absence d’un tel avantage pourra être lourde de conséquence pour les banques prêteuses fautives puisque les clauses imposant des offres de prêts subordonnées à des domiciliations sans avantages seront réputées non écrites[16]. En pratique, ces clauses seront donc sans effet pour les emprunteurs concernés qui pourront retrouver leur liberté et une mobilité bancaire. Mais que devons nous entendre par avantage individualisé ? Est-ce le taux, est-ce une durée courte de domiciliation, est ce des tarifications préférentielles sur d’autres services bancaires (virement, prélèvement, carte bleue, etc.) ? Pour retrouver cette notion, il conviendra en pratique de se rapporter directement aux offres de prêts pour analyser les avantages individualisés accordés en contrepartie de domiciliation (article L.313-25 du Code de la consommation). Un travail d’analyse sera donc nécessaire par vos soins ou avec l’aide de votre courtier en opérations de banque et en services de paiement. S’agissant de leur durée, les banques prêteuses ne pourront imposer les domiciliations précitées au-delà d’une durée maximum de 10 ans suivant la conclusion des offres de crédits, et le cas échéant, la signature d’avenants à leur contrat de crédit initial[17].
La mobilité assurantielle et/ou bancaire sera donc à vérifier et analyser au cas par cas dans les offres bancaires ou d’assurances emprunteurs ainsi que leurs éventuels avenants passé le 1er janvier 2018.
[1] Loi n°2013-672 du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires.
[2] Loi n°2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation dite Loi Hamon.
[3] Article L.313-30 du Code de la consommation.
[4] Avis du Comité Consultatif du Secteur Financier du 13 janvier 2015 sur l’équivalence du niveau de garantie en assurance emprunteur impose une liste limitative de caractéristiques de garanties minimales.
[5] Norme FBF juillet 2015, assurance emprunteur des prêts immobiliers aux particuliers équivalence du niveau de garantie.
[6] Recommandation ACPR-R-01 du 26 juin 2017 sur le libre choix de l’assurance emprunteur souscrite en couverture d’un crédit immobilier.
[7] Rapport n°447 de Philippe Dominti du 2 juin 2009 au nombre de la commission spéciale sur le projet de loi portant réforme du crédit à la consommation, source : Minefe et l’Observatoire des crédits aux ménages.
[8] Changer de banque : un service gratuit pris en charge par les banques, Communiqué de presse FBF du 9 décembre 2014,
[9] Loi n°2014-344 du 17 mars 2014 dite loi Hamon imposant cette obligation au travers des dispositions de l’article L.312-1-7 du Code de la consommation.
[10] Article 43 de la Loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques dite Loi Macron est définitivement entrée en vigueur le 6 février 2017.
[11] Dans son principe, son automatisation, responsabilité des établissements bancaires et l’indemnisation des titulaires de comptes en cas de dysfonctionnement dudit service.
[12] Rapport sur la mobilité bancaire d’Ines Mercereau, Décembre 2014.
[13] Lettre FBF n°562 « actualités bancaires » de la FBF de juin 2013 page 2).
[14] Ordonnance n°2017-1090 du 1er juin 2017 relative aux offres de prêt immobilier conditionnées à la domiciliation des salaires ou revenus assîmes de l’emprunteur sur un compte de paiement dont les dispositions ont été prises sur le fondement du II de l’article 67 de la Loi n°2016-1691 du 9 décembre relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique dite loi Sapin II.
[15] Article L.313-25-1 du Code de la consommation.
[16] Article L.341-34-1 du Code de la consommation.
[17] Article R.313-21-1 du Code de la consommation dont les dispositions ont été décrétées par le Décret n°2017-1099 du 14 juin 2017 fixant la durée pendant laquelle le prêteur peut imposer à l’emprunteur la domiciliation de ses salaires ou revenus assimilés sur un compte de paiement.
Réforme de l’ISF : quels arbitrages réaliser sur votre patrimoine ?
« Récompenser ceux qui prennent des risques »[1]. Telle est la philosophie du gouvernement dans le projet de loi de finances pour 2018 qui sera présenté le 27 septembre, et notamment de la réforme de l’ISF voulue par Emmanuel Macron. Dès le 1er janvier 2018, l’ISF ne serait pas supprimé mais serait transformé en Impôt sur la fortune immobilière (IFI), qui taxerait uniquement les patrimoines immobiliers nets supérieurs à 1,3 million d'euros. Les conséquences de cette réforme ne seront pas les mêmes selon le montant et la composition de votre patrimoine. Par ailleurs, une question se pose : est-il judicieux de vendre vos biens immobiliers pour échapper au futur IFI ?
Quelles sont les implications de cette réforme pour votre patrimoine ?
Alors que l’assiette imposable de l’actuel ISF comprend tous les biens (meubles et immeubles), droits (usufruit, droit d’usage, etc.) et valeurs (actions, titres, etc.), celle du futur Impôt sur la fortune immobilière (IFI) serait circonscrite aux seuls biens immobiliers. Le patrimoine financier étant ainsi exclu de ce nouvel impôt sur la fortune, tous vos contrats d’assurance-vie, contrats de capitalisation, comptes-titres, PEA, comptes sur livret et autres liquidités seraient donc entièrement exonérés. L’objectif du Président de la République est d’orienter l’épargne des Français vers l’économie réelle et productive, et ainsi favoriser l’investissement en actions et parts sociales permettant de financer les entreprises, contrairement à la « rente immobilière ».
Le seuil d’assujettissement (valeur nette du patrimoine d’au moins 1,3 million d’euros), les taux et les barèmes de la version actuelle de l’ISF devraient rester inchangés, de même que l’abattement de 30% sur la résidence principale, ainsi que l’exonération des biens immobiliers professionnels. La règle du plafonnement, selon laquelle la somme de l'IFI et de l'impôt sur le revenu ne pourra pas excéder 75% des revenus, devrait aussi être maintenue. Pour le reste, les contours de la réforme sont encore à préciser, notamment le sort de certains actifs financiers ayant pour sous-jacent l’immobilier, tels que les OPCI et SCPI.
Une chose est claire : a priori, cette réforme de l’ISF profitera à tous puisqu’elle n’induira aucune augmentation d’impôt, y compris pour les contribuables détenant majoritairement de l’immobilier, et aboutira au contraire à faire baisser voire à supprimer l’impôt sur la fortune des contribuables dont le patrimoine est essentiellement composé d’actifs financiers.
Toutefois, sur les 342.942 foyers fiscaux[2] concernés pas l’ISF, certains seront plus gagnants que d’autres : les plus fortunés des contribuables ISF, c’est-à-dire ceux dont le patrimoine a une valeur supérieure à 2,4 millions d’euros, lequel est composé à 80% d’actifs financiers, contrairement aux « petits contribuables » ISF, dont le patrimoine est compris entre 1,3 et 2,4 millions d’euros et composé à 80% d’immobilier[3].
Faut-il vendre vos biens immobiliers pour investir dans les actifs financiers ?
Pour échapper à l’IFI, certains contribuables envisagent d’ores et déjà de se débarrasser de leurs biens locatifs pour investir dans des actifs financiers. Mais cette décision est plus complexe qu’elle n’y parait.
Force est de constater qu’à partir de 2018, l’immobilier sera sûrement l’actif le plus taxé en France : tout d’abord lors de la perception des revenus fonciers, lesquels sont soumis à l’impôt sur le revenu à votre tranche marginale d’imposition (pouvant aller jusqu’à 45%) ainsi qu’aux prélèvements sociaux au taux de 15,5% (bientôt porté à 17,2% avec la future augmentation d’1,7 points de la CSG), soit une imposition totale de 60,5% au maximum ; ensuite, tous les ans, le simple fait de détenir au 1er janvier un patrimoine immobilier dont la valeur est supérieure à 1,3 million d’euros entraînera l’assujettissement à l’IFI, ce qui ne sera plus le cas des actifs financiers. Sans oublier les impôts locaux tels que la taxe foncière et la taxe d’habitation. L’accumulation de ces impôts directs et indirects vient donc amputer la rentabilité brute de votre investissement immobilier. Or, c’est bien la rentabilité nette après impôt qui est déterminante pour mesurer la performance de votre investissement locatif. A l’approche de cette réforme de l’ISF, il est donc judicieux de faire le point sur la rentabilité de vos biens locatifs, afin de vous séparer des moins rentables d’entre eux. C’est également l’occasion de faire réévaluer vos biens, afin de déterminer l’éventuelle plus-value latente, et d’analyser l’état et la dynamique du marché immobilier dans votre ville.
Toutefois, n’oubliez pas que lors de la cession d’un bien immobilier (autre que la résidence principale), l’éventuelle plus-value réalisée (après avoir été diminuée d’un abattement au-delà de 5 ans de détention, progressif avec le temps) est taxée à l’impôt sur le revenu au taux forfaitaire de 19 % ainsi qu’aux prélèvements sociaux au taux de 15,5 %, soit une imposition totale de 34,5%. Les plus-values de cession ne sont totalement exonérées qu’après 22 ans de détention au titre de l’impôt sur le revenu et qu’après 30 ans de détention au titre des prélèvements sociaux. Attention donc à ne pas prendre de décisions trop hâtives dans l’unique but d’échapper à un IFI annuel de quelques milliers d’euros, au risque de devoir acquitter en une seule fois une fiscalité sur les plus-values immobilières de plusieurs dizaines de milliers d’euros.
De plus, la fiscalité ne doit pas être l’unique paramètre à prendre en compte lors de votre décision de désinvestissement et de réinvestissement. En effet, céder un bien immobilier pour réinvestir le produit de cession sur les marchés financiers, c’est aussi s’exposer à un autre couple rendement/risque. Quels risques êtes-vous prêt à prendre ? Quel est votre horizon d’investissement ? Quelle proportion de votre patrimoine représente le montant ainsi investi ? Quelle enveloppe choisir : assurance-vie, contrat de capitalisation, PEA ? Autant de questions à se poser avant de se lancer sur le marché actions.
Quelles sont les stratégies alternatives permettant d’éviter le futur IFI ?
Sans vous séparer définitivement de vos biens immobiliers, il est également possible de recourir à des stratégies patrimoniales permettant de faire sortir temporairement un bien immobilier de votre patrimoine, par exemple en procédant à une donation temporaire d’usufruit à vos enfants, ou de créer une dette déductible en face de votre actif imposable notamment grâce au refinancement d’un immeuble via un prêt hypothécaire (cf notre article Crédit Hypothécaire).
Il sera également toujours possible d’obtenir la réduction d’impôt de 75% pour les dons à des associations caritatives ou des fondations. En revanche, le Ministre de l’Economie et des Finances Bruno Le Maire vient d’annoncer[4] que la réduction d'ISF de 50% en cas d'investissement au capital des PME sera supprimée, mesure sonnant ainsi le glas d’un dispositif pourtant très efficace depuis sa création puisqu’il permettait à lui seul d’injecter chaque année 1 milliard d’euros dans l’économie réelle.
Face à tous ces changements fiscaux, il est donc primordial d’actualiser votre stratégie patrimoniale.
[1] Bruno Le Maire, Ministre de l’Economie et des Finances, dans l’entretien paru aux Echos le 12 septembre 2017 : https://www.challenges.fr/economie/fiscalite/ifi-pel-assurance-vie-le-maire-precise-les-mesures-fiscales-du-gouvernement-dans-les-echos_498746
[2] Chiffres de la Direction Générale des Finances Publiques pour l’année 2015.
[3] Pour plus de précisions, cf l’article de Frédéric Douet « Réforme de l’ISF : tout changer pour que rien ne change ? » paru au Monde le 5 juillet 2017 : http://www.lemonde.fr/argent/article/2017/07/05/reforme-de-l-isf-tout-changer-pour-que-rien-ne-change_5156274_1657007.html
[4] Cf note 1.