Vers une extension du délai de résiliation en matière d’assurance emprunteur

Passé inaperçu ce jeudi 29 septembre 2016, les députés réunis en séance publique ont validé l’article 29 Bis B du projet de loi Sapin 2 permettant la résiliation annuelle en matière d’assurance emprunteur. Dans la droite ligne de la loi Hamon promulguée en 2014, le législateur a franchi une nouvelle étape dans la protection des droits de l’emprunteur.

Pour rappel, la loi Hamon promulguée le 18 mars 2014 est venue étendre la protection de l’emprunteur non professionnel qui sollicite un prêt d’un professionnel, pour financer des opérations sur un immeuble à usage d’habitation ou mixte. Cette protection, issue de la loi Scrivener du 13 juillet 1979, se retrouve codifiée aux articles L312-1 et suivants du code de la consommation.

Depuis cette date, l’emprunteur qui souscrit une assurance emprunteur dans le cadre de son acquisition immobilière, a la possibilité dans les 12 mois qui suivent sa souscription, de librement résilier son contrat d’assurance au profit d’un autre contrat qui apporterait des couvertures équivalentes à celui souscrit initialement. La question cependant était restée en suspens concernant les possibilités offertes à l’emprunteur passé ce délai de 12 mois.

Cet article 29 Bis B vient apporter la réponse à cette question et ainsi mettre fin à une Jurisprudence récente de la Cour de Cassation qui, par sa 1ère chambre civile le 9 mars 2016, avait refusé toute ouverture de la loi Hamon à la reconnaissance d’une résiliation annuelle des contrats d’assurance emprunteur.

La 2e conséquence du vote de cet article sera très probablement l’ouverture de ce marché encore très peu concurrentiel, accaparé aujourd’hui en grande partie par les banques. La loi Hamon avait déjà pour objectif en 2014 de mettre un terme à ces contrats d’assurance « groupe » dont les tarifs étaient très souvent supérieurs à ceux proposés par les assurances individuelles. De nombreux établissements refusaient en effet avant cette date toute délégation d’assurance et mettaient ainsi indirectement la pression sur l’emprunteur et sur son acquisition.

Le vote de cet article fin septembre est une avancée notable car l’assurance emprunteur représente aujourd’hui pour les banques une marge importante, pouvant même aller jusqu’à 30% à 40% du crédit. Si dans le cadre d’un investissement locatif une telle possibilité aura très peu d’impact (coût déductible), les économies réalisées dans le cadre d’un achat en résidence principale seront-elles très importantes.

Exemple d’un cas traité récemment :

-Emprunt sur 15 ans pour l’achat d’une Résidence Principale pour un montant de 446 000€

-Coût du contrat groupe proposé  (Taux : 0.34%) : 22 746€ sur la période

-Coût de la délégation conseillée (Taux : 0.049%) :3 254€ sur la période

*Gain enregistré pour le client : 19 492€

 


Vers la fin des fonds en euros?

Ce jeudi 29 septembre 2016, les députés réunis en séance publique ont adopté l’article 21 bis du projet de loi Sapin 2, article prévoyant le renforcement des pouvoirs macro prudentiels du Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) afin de préserver le secteur de l’assurance vie en cas de risque systémique. Le contexte de taux bas a accéléré l’adoption de cette loi qui a aujourd’hui deux objectifs : éviter une crise grave en cas de remontée des taux et encadrer les rémunérations des fonds en euros.

Si la presse spécialisée et généraliste s’est faite l’écho ces derniers jours de cette mesure particulièrement contraignante pour l’épargnant français, article prévoyant que le HCSF sur proposition du gouverneur de la Banque de France pourra « suspendre, retarder ou limiter, pour tout ou partie du portefeuille, le paiement des valeurs de rachat, la faculté d’arbitrages ou le versement d’avances sur contrat », il est nécessaire de rappeler que l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) disposait déjà de cette faculté néanmoins limitée à un niveau microprudentiel c’est-à-dire à une compagnie d’assurance déterminée. Lors du krach boursier de 2008 lié aux subprimes, il avait été question un moment de la mettre en application pour protéger certains acteurs français des répercussions de cette crise américaine sur le marché français. La loi Sapin 2 élargit aujourd’hui cette disposition en y intégrant par ailleurs le blocage possible des arbitrages ou des demandes d'avance, mesure limitée toutefois à 3 mois renouvelables.

Le deuxième volet de cette loi a pour objectif également de rappeler à l’assureur que dans un contexte actuel de taux de très faible (l'OAT à 10 ans étant à 0,12 % au 28 septembre 2016) il est inconcevable de proposer à l’épargnant un rendement garanti supérieur à 2%. Le texte prévoit ainsi de limiter la rémunération des fonds en euros en permettant au HCSF la possibilité de « moduler les règles de constitution et de reprise de la provision pour participation aux bénéfices ».

Il en ressort aujourd’hui pour l’épargnant français un double constat. Il est nécessaire pour lui de diversifier ses actifs sur plusieurs assureurs et de limiter son investissement en fonds en euros et cela à double titre. D’une part les rendements risquent de se dégrader fortement, la disparition même du fonds en euros est ces dernier mois fortement débattus, et d’autre part en cas de remontée des taux, les sorties du fonds en euros et les arbitrages sur unités de compte pourraient être gelés engendrant une indisponibilité des actifs sur contrat d’assurance vie.

Si les fonds en euros dernière génération vont tirer leur épingle du jeu de cette situation, il est fort à parier que leur limitation en montant sera monnaie courante à l’avenir. Certains assureurs ont d’ailleurs commencé à restreindre l’accès à leurs fonds en euros, Spirica ou Apicil pour ne citer qu’eux. Pour d’autres, le constat actuel nécessiterait des modifications plus en profondeur. Chez Axa, « la garantie totale en capitale devrait être repensée au profit d’une garantie partielle » selon Thomas Buberl son nouveau patron.

Il est désormais loin le temps du rendement sans risque. L’épargnant devra intégrer désormais la prime de risque dans l’élaboration de sa stratégie patrimoniale, ce qui nécessitera un minimum de réflexion et un accompagnement sur le long terme.

 


BCE

Baisse des taux, la spirale infernale

La situation est inédite: les taux n’ont jamais été aussi bas. Le plus déroutant est que ce phénomène dure maintenant depuis de nombreux mois et qu’à chaque baisse enregistrée, on a l’impression de repousser les limites du possible et du raisonnable. A titre d'exemple, c'est comme si à chaque départ du 100m pris par Usain Bolt le record du monde de la discipline était pulvérisé. Déstabilisant non ?

Pourtant la menace d’une hausse des taux existe et elle serait sans nul doute salvatrice pour notre économie réelle à moyen/long terme. On attendait début septembre une action dans ce sens de la FED, il n’en fût rien. On comprend la difficulté des présidents des banques centrales américaines et européenne à prendre une décision dont on sait d’avance qu’elle entraînera des conséquences notables sur l’économie à l’échelle mondiale.

Si cette baisse des taux présente un intérêt évident pour l’investisseur, il n’en est rien pour l’épargnant. Baisse de la rentabilité des fonds en euros et du livret A, limitation de l’accès à ces supports garantis par l’assureur au profit d’un arbitrage vers des supports en unités de compte, et dernier épisode en date, vote à l’assemblée nationale du projet de loi Sapin 2 permettant dans son article 21 le gel des actifs pour une période reconductible de 3 mois en cas de crise systémique faisant suite à une remontée des taux importante.

Pour l’investisseur le bilan est plutôt rose, ou du moins on essaye de le lui faire croire. Les taux d’emprunt sont désormais sous la barre des 1% à 15 ans et le fixe au détriment du variable est toujours d’actualité. La création de richesse est désormais dans l’emprunt, la baisse des taux ayant gonflé le pouvoir d’achat des investisseurs. Pour autant, en cas de forte remontée des taux, le marché immobilier pourrait en être fortement impacté. Certaines études tablent depuis quelques temps sur une baisse importante du prix de l’immobilier, les taux bas de ces dernières années en limiteraient aujourd’hui l’impact.

Si l’achat de la résidence principale est une vraie question au regard du contexte actuel, l’épargnant/investisseur a tout intérêt aujourd’hui à utiliser son levier d’emprunt dans l’immobilier locatif. En effet, le contexte de taux bas limite son apport dans le cadre de ce type d’investissement, et par la même occasion, via le jeu des loyers, limite son impact en cas de baisse de l’immobilier. Pour autant la bonne affaire n’est pas automatique et il faut rester vigilant à l’effet pervers que peut susciter un tel contexte. La faiblesse des taux pourrait en effet pousser certains investisseurs à être moins regardant sur leur placement.

La baisse des taux invite donc l’investisseur à financer mais également refinancer son immobilier. Créer de la dette sur un actif déjà payé a un effet bénéfique notamment en cas de forte imposition. Par ailleurs, dans un objectif de transmission, le financement permettra à l’investisseur de récupérer des liquidités, d’optimiser les plafonds des contrats d’assurance vie, et de transmettre à ses héritiers un actif diminué du passif.

L’investisseur a également intérêt à renégocier ses crédits, et cela même si la dernière renégociation date il y a à peine d’un an. A chaque crédit son assurance emprunteur, il sera également judicieux de mettre en pratique la loi Hamon permettant de faire jouer la concurrence et éviter ainsi les contrats « groupe », contrats d’assurance très souvent dans la fourchette haute du marché. Avant toute renégociation ou de rachat de crédit, une étude sera indispensable notamment en cas d’Indemnité de Remboursement Anticipé (IRA). Selon la durée de l’emprunt et vos objectifs personnels, il sera quelque fois plus coûteux de baisser le taux de vos emprunts que de conserver l’existant, même si celui-ci s’avère plus élevé.


Prélèvement à la source et année blanche, quels impacts pour le contribuable?

Annoncé en 2015, le dispositif du prélèvement à la source (PAS), est en passe d’être débattu à l’Assemblée nationale dans le cadre du projet de loi de finances pour 2017. Il vient d’être présenté en Conseil des ministres ce 28 septembre 2016. Le texte est donc loin d’être définitif mais les contours les plus importants de la réforme se dessinent progressivement. Le premier PAS devant intervenir en 2018.

La question d’un prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu a fait son apparition dans l’hexagone dans les années 1930, et a même été mis en œuvre en 1939 et en 1948. L’Etat français a, à l’époque, recours au PAS pour la perception des prélèvements sociaux, des charges salariales ou encore les prélèvements libératoires forfaitaires sur les revenus du capital. Il s’agit ici « d’un mode de recouvrement de l’impôt consistant à faire prélever son montant par un tiers payeur, le plus souvent employeur ou banquier, au moment du versement au contribuable des revenus sur lesquels porte l’impôt »[1].

Ce système de recouvrement a été adopté par bon nombre de pays occidentaux (Canada, Etats-Unis, Royaume-Uni, Belgique, Allemagne, Danemark, Pays-Bas) pour des besoins différents : simplification de l’imposition, amélioration du recouvrement ou encore augmentation des gains de productivité de l’administration fiscale. L’Etat français souhaite aujourd’hui franchir le pas. Quels sont les principaux changements attendus  pour le contribuable?

L’apport principal sera bien entendu une taxation contemporaine des revenus, avec une taxation des revenus n, l’année n. Le système français actuel, impose les revenus obtenus l’année n, l’année n+1. La retenue à la source permettra au contribuable de voir son imposition adaptée à la variation de son revenu. De même cela évitera, un blocage l’année n+1 lorsqu’une baisse de revenu s’ajoute à une forte imposition sur les revenus élevés de l’année n.

1/ Les revenus concernés par la réforme sont les traitements et salaires, les pensions, les revenus de remplacement, les rentes viagères. Ceux-ci seront retenus à la source par l’organisme versant le revenu (employeur, organismes de retraites,…) selon un taux que l’administration fiscale aura préalablement communiqué.

Les revenus des indépendants (BIC, BNC et BA), ainsi que les revenus fonciers sont eux aussi concernés par la réforme. Ces revenus seront également taxés de manière contemporaine mais sous forme d’acomptes sur 12 mois, toujours en application d’un taux communiqué par l’administration fiscale.

Le taux de PAS sera transmis par l’administration à partir du second semestre 2017, et sera actualisé tous les ans en fonction des revenus perçus par le contribuable. Ce dernier devra donc continuer à déclarer ses revenus chaque année.

Pour les autres types de revenus, les modalités ne seront pas modifiées : revenus de capitaux mobiliers (prélèvement à la source) ; plus-values immobilières (prélèvement forfaitaire libératoire).

Il faut préciser que seul le dispositif de prélèvement de l’impôt est modifié et non pas les méthodes de calcul de celui-ci, lesquelles resteront inchangées.

2/ Sur option, les couples mariés ou pacsés (effectuant une déclaration commune) pourront opter pour un taux d’imposition individualisé en fonction de leur revenu respectif. Ceci aura pour effet de ne pas faire supporter à l’époux ayant le salaire le plus bas, la pression fiscale engendrée par les gains de son conjoint.

3/ Plusieurs questions se posent quant à la confidentialité des informations personnelles des contribuables, communiquées notamment aux employeurs pour qu’ils procèdent à la déclaration auprès de l’administration. Le Conseil d’Etat a demandé au gouvernement de prévoir plusieurs garanties à même d’éviter les discriminations à l’embauche ou encore les discriminations dans la détermination des salaires.

Pour ce faire, le projet de loi prévoit notamment qu’un contribuable pourra opter pour un taux neutre ou un « taux par défaut ». Le contribuable n’aura plus à communiquer l’étendue de sa situation patrimoniale à son employeur (lequel appliquera simplement le taux neutre). En contrepartie, le salarié devra régler directement à l’administration fiscale, le solde de l’impôt réellement dû.

4/ Comment l’année de transition sera-t-elle organisée ? En 2017, l’impôt exigible sera calculé sur les revenus 2016 et sera soumis au système que nous connaissons actuellement, puisque c’est le contribuable qui payera directement l’impôt auprès de l’administration fiscale. Les revenus 2018 seront soumis au PAS en 2018. En conséquence il n’y aura aucune année sans impôt.

Pour autant quid des revenus 2017 ? Les revenus 2017 devront néanmoins être déclarés au printemps 2018, d’une part pour établir le taux de prélèvement mais également pour calculer le CRM ou Crédit d’impôt Modernisation Recouvrement.

Ce que l’on sait aujourd’hui, c’est que ces revenus 2017 devraient échapper à l’impôt. Oui mais pas à 100%. Afin d’éviter tout abus, Bercy a initié une série de dispositions visant à limiter une « optimisation » des revenus sur l’année 2017. Ainsi, professionnels libéraux ou chefs d’entreprises sont dans l’œil du viseur, professions pouvant décaler une rémunération d’une année sur l’autre. Pour ce faire, Bercy prévoit une série de dispositifs visant à exclure tout risque de fraude.

Les revenus exceptionnels seront notamment exclus du dispositif. Cette liste, particulièrement longue, entend par là les indemnités de rupture du contrat de travail, le dédommagement d'un changement de lieu de travail, les sommes perçues pour la participation et l'intéressement, indemnités de cessation des fonctions des mandataires sociaux et dirigeants, indemnités de clientèle de cessation d'activité, ventes d'actions gratuites et gains de stock-options...

Concernant les dividendes, plus-values mobilières et immobilières, ces revenus n’entrent pas dans le champ de la réforme et devront être payés au titre de l’impôt sur le revenu 2017.

Pour les indépendants, l’administration fiscale retiendra le revenu maximal sur les trois dernières années et de l’année suivante pour déterminer le taux de prélèvement.

Les grands « perdants » de cette réforme sont les jeunes professionnels débutants dans la vie active en 2018, puisqu’ils seront imposés dès la première année et non plus en n+1. A l’inverse, les professionnels, jeunes retraités dès 2018, seront imposés sur le montant de leurs pensions de retraite et non pas sur leurs revenus d’activité réalisés en 2017.

[1] Conseil des prélèvements obligatoires, Prélèvements à la source et impôt sur le revenu, Synthèse, Février 2012


Interprofessionnalité, quelles perspectives?

L'interprofessionnalité introduite cette année par le gouvernement offre de nouvelles perspectives pour les professionnels du chiffre et du droit, tout en garantissant les intérêts de leurs clients.
Prise en application de la loi Macron[1], l'Ordonnance n°2016-394 du 31 mars 2016[2] et ses différents décrets récents d’application[3] ont pour objectif affiché de faciliter la création de sociétés ayant pour objet l’exercice en commun de plusieurs professions réglementées.

L'Ordonnance autorise en effet la constitution de société pluri-professionnelle d’exercice (SPE) ayant pour objet l’exercice en commun de plusieurs professions : avocat, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, commissaire-priseur judiciaire, huissier de justice, notaire, administrateur judiciaire, mandataire judiciaire, conseil en propriété industrielle et expert-comptable.
Les SPE peuvent revêtir toute forme sociale, à l'exception de celles conférant à leurs associés la qualité de commerçant (notamment la société en nom collectif).

La loi offre également de nouvelles opportunités commerciales : les SPE sont en mesure de « proposer des gammes complètes de prestations à des prix rendus plus attractifs par la mutalisation des charges »[4]. Elles peuvent en outre exercer toute activité commerciale à titre accessoire (le caractère accessoire ne devant pas s'entendre en termes de parts de chiffre d'affaires mais en termes de lien avec l'activité principale d'une ou des professionels du chiffre et du droit composant la SPE). A titre d'exemple les avocats seront donc en mesure de créer des Family office2.

S'agissant des clients de SPE, leurs intérêts seront également respectés de différentes manières.
Les SPE sont classiquement tenus au respect des obligations de loyauté, de confidentialité ou de secret professionnel à leur égard. Toutefois, ces obligations ne font pas obstacle à ce que les professionnels du chiffre et du droit puissent communiquer entre eux toute information nécessaire à l'accomplissement des actes professionnels et à l'organisation du travail au sein de la SPE. Cette transmission est autorisée dès lors que les clients ont été préalablement avertis et qu'ils ont donné leur accord.
Ils bénéficient par ailleurs de l'application de procédures de conflict check obligatoires puisque chaque professionnel devra informer la SPE et les autres professionnels la composant de l'existence de tout conflit d'intérêt susceptible de naitre. Sont également concernés les conflits d'intérêts pouvant naitre entre l'exercice de son activité professionnelle et l'exercice par les autres professionnels.

Enfin, les SPE doivent souscrire à une assurance couvrant les risques liés à la responsabilité civile professionnelle comme toute autre société.

Au sein de Scala Patrimoine, nous avons d’ores et déjà entamé ce processus en recrutant cette année deux avocats et une notaire de formation pour satisfaire au mieux les exigences de nos clients. Dans ce contexte d’interprofessionnalité, le client final appréciera une telle révolution anticipée en bénéficiant de conseils à haute valeur ajoutée, aux plus près de ses besoins et exigences personnelles.

Robert Devin – Directeur juridique Scala Patrimoine

[1] Article 65 de la Loi n°2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
[2] Ordonnance n°2016-394 du 31 mars 2016 relative aux sociétés constituées pour l’exercice en commun de plusieurs professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé.
[3] Les 9 Décrets n°2016-874 à 2016-883 du 29 juin 2016.
[4] Rapport au Président de la République relative à l'Ordonnance n°2016-394 du 31 mars 2016 relative aux sociétés constituées pour l'exercice en commun de pusieurs professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé.


Annonce de l’extension de l’encadrement des loyers à la petite couronne parisienne

La ministre du Logement, Emmanuelle Cosse, a annoncé ce jeudi 30 juin, avoir signé un arrêté autorisant l’extension du dispositif d’encadrement des loyers, jusqu’alors limité à la seule ville de Paris, à 412 communes d’Île-de-France situées en petite couronne. Sont concernées les agglomérations : des Hauts-de-Seine, de Seine-Saint-Denis, du Val-de-Marne, ainsi qu’une partie des Yvelines, du Val-d’Oise, de l’Essonne et de la Seine-et-Marne.

Apparu avec la loi ALUR du 24 mars 2014, et précisé par un décret du 10 juin 2015, l’encadrement des loyers vise à limiter l’augmentation croissante du prix des loyers dans plusieurs zones tendues (il en existe 1 149 réparties sur tout le territoire français), et a pour objectif d’assurer une augmentation du pouvoir d’achat des ménages.

Il faut ici distinguer deux cas de figure :

- Dans toutes les zones tendues (indiquées sur le décret n°2013-392 du 10 mai 2013), le plafonnement des loyers consistent à l’impossibilité pour le propriétaire d’augmenter le loyer au moment d’un changement de locataire. Il s’agit d’un encadrement des loyers à la "relocation", le propriétaire peut donc librement fixer le prix du loyer lors de la première mise en location du bien. Le montant du loyer est gelé et ne peut faire l’objet que d’une indexation selon l’Indice de Référence des Loyers (IRL).

Le propriétaire ne pourra augmenter le loyer que dans trois cas :

  • La réalisation de travaux importants ;
  • Une mise en location du bien après 18 mois d’absence de locataire ;
  • Le prix du loyer est manifestement sous-évalué en comparaison des montants pratiqués dans le quartier.

- A Paris, le marché locatif fait l’objet d’un encadrement encore plus poussé puisque se superpose une obligation de respecter un plafond prévu par le législateur. Le montant de référence est indiqué sur le site  « Référence Loyer IDF », et dépend de quatre critères : le nombre de pièces du bien loué ; l’année de construction ; le caractère vide ou meublé du bien ; et son adresse.

Une augmentation du loyer au-dessus du plafond majoré est possible dans deux cas :

  • Si le bien était loué à un montant supérieur au montant majoré lors de la mise en place du dispositif ;
  • Si le bien peut justifier d’un caractère exceptionnel (mais cette condition reste difficile à évaluer).

Le décret signé par la ministre du Logement, a vocation à étendre aux 412 communes d’Île-de-France en question, cette seconde contrainte de plafonnement du prix du loyer. Une fois le dispositif étendu, les loyers ne pourront plus être augmentés au moment d’une "relocation", mais plus encore, ils devront respecter le plafond majoré déterminé par arrêté préfectoral comme c’est le cas à Paris.

Le Premier ministre, Manuel Valls, semblait septique, dès l’adoption de la loi ALUR, quant à l’opportunité d’étendre le dispositif parisien à d’autres communes. De ce fait, l’extension de l’encadrement des loyers, lequel nécessite l’étude du marché locatif local afin de déterminer le loyer de référence majoré, a pris du retard et ne sera effectif qu’après une collecte de données de 12 à 18 mois (horizon 2018).

Il y a quelques jours, Emmanuelle Cosse a également annoncé que le dispositif expérimental qui ne concernait que Paris, aura vocation à s’appliquer à Lille (horizon fin 2016) et à Grenoble (horizon fin 2017).


Brexit, quels arbitrages à réaliser?

Coup de tonnerre ce vendredi 24 juin 2016 à 8h08. Le Brexit vient d’être donné gagnant avec 51.9% des voix. Contre toute attente, et après avoir vu le Brexit s’éloigner en début de scrutin la veille lors des premiers dépouillements, la sortie du Royaume-Uni de l’UE par référendum vient d’être confirmée.

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Choc historique, choc politique, et choc financier sur les différentes places financières.

Dès 5h20, la panique l’emporte sur les marchés asiatiques. La livre sterling chute à 1.3466 dollar, son plus bas depuis 30 ans et cela même avant la proclamation définitive des résultats de ce scrutin.

Les répercussions financières trouvent écho dès 9h00 sur les places européennes. Londres perd 9% à l’ouverture, Francfort 9.5% et Paris 10%.

Ce vendredi noir sur les marchés, entrecoupé par les réactions politiques européennes, laisse place aujourd’hui à la réflexion quant aux décisions à prendre suite à cette 1ère historique.

Des conséquences plus politiques que financières

Pour de nombreux gérants, les conséquences engendrées par le scrutin de jeudi dernier sont plus politiques que financières. Le Royaume-Uni va entrer dans une zone d’incertitude, et devra faire face très certainement à l’envie de l’Ecosse et de l’Irlande du Nord de rester dans l’UE. Par ailleurs, Londres a déjà manifesté son souhait d’y rester. Le rôle de la City dans le paysage financier étant une raison bien évidente pour justifier cette position.

Même si ce vendredi a pu être qualifié de « noir » sur les marchés, il est important de préciser que cette chute des bourses a été néanmoins contrôlée par les différents acteurs.

Tous les observateurs s’accordent à dire que malgré les ressemblances, la situation n’est pas comparable à celle de la faillite de Lehman Brother. Les marchés auraient simplement réagi à un tournant politique et non pas à une situation de défaut du système financier dans son ensemble comme cela a pu être le cas en 2008 et en 2011 (pertes sur le marché du crédit et conséquences d’un endettement massif).

La Banque Centrale Européenne ainsi que la Banque d’Angleterre peuvent aujourd’hui intervenir efficacement dans ces situations de stress. Cette dernière ayant annoncé dès vendredi matin sa capacité à débloquer 250 milliards de livres pour soutenir son marché.

Il est à noter que de nombreuses maisons avaient déjà anticipé un possible Brexit dans le cadre de cette campagne. Pour preuve, Jean-Jacques Friedman, directeur des investissements de Vega Investment Managers expliquait dès vendredi que « depuis quelques semaines les fonds d’investissement en actions européennes avaient dégagé des liquidités importantes de l’ordre de 5% et que nous-mêmes, dans nos allocations, nous avions écrêté certaines de nos positions autour de 4 440 points avant de racheter voici deux semaines vers 4 150 points ».bourse

Pour d’autres acteurs, ce positionnement défensif était une stratégie depuis le début de l’année. Nadine Trémollières, directrice générale de Stamina Asset Management, nous écrivait dès le 13 juin 2016 que « depuis le début de l’année, nous avons gardé un profil plutôt défensif au sein de notre portefeuille phare Stamina Patrimoine tout en acceptant de renoncer à un fort rebond potentiel des marchés d’actions. Ainsi notre sensibilité au risque actions s’établit à 35% du portefeuille : nous avons orienté nos allocations vers les marchés internationaux, les actions européennes ne représentant aujourd’hui que 17% d’exposition dans notre fonds ».

Ce positionnement très en amont n’a pas été partagé par tous. Même si des stratégies de couvertures avaient pu être adoptées sur une petite partie du portefeuille, des maisons comme H2O Asset Management, ont préféré ne pas couper certaines positions vendredi afin de ne pas « compromettre l’équilibre des risques des portefeuilles et entraver leur potentiel de performance ».

Quoiqu’il en soit, la plupart des gérants de fonds s’accordent à dire que la situation est somme toute politique et que seuls les gouvernements européens sont en mesure d’apporter une réponse effective à ces circonstances exceptionnelles. La décision de la population britannique ne fait que relancer, une énième fois, le débat de la gouvernance de l’Union Européenne et du niveau d’intégration des Etats membres. En somme, il s’agit d’un problème britannico-européen qui n’aura que peu d’impact sur l’économie mondiale.

 

Quelle stratégie alors à adopter ?

La forte volatilité engendrée par ce scrutin sur les marchés va engendrer un comportement négatif pour la prise de risque. « Il n’est qu’à regarder l’effet de panique à l’ouverture des places européennes. Les vendeurs à l’ouverture se sont fait massacrer » dixit Waldemar Brun-Theremin, Directeur Général de Turgot Asset Management. Le Dax a ouvert à 9226 points et cotait au-dessus des 9600 points à 10h. La société générale, elle, ouvrait à 25€ pour coter 30€ à 10h.

La première posture à adopter est donc de ne pas céder à la panique. La diversification de vos investissements est en mesure de résister à une volatilité de marché soudaine et brusque comme celle que nous avons connu la semaine passée.

Pour certains gérants, nous retrouverons un positionnement sécuritaire de la part de nombreux investisseurs. Selon David Zahn, responsable Taux Europe chez Franklin Templeton Investments « il est fort à parier que de nombreux investisseurs vont délaisser les actifs « risqués » comme les actions et obligations d’entreprise et que l’on constatera une fuite vers les titres de qualité, considérés comme moins risqués, comme les Gilt et les Bunds ».

Ce positionnement est-il bien raisonnable ? Nous pensons aujourd’hui qu’une stratégie financière se réfléchit dans la durée et non dans l’instant. D’ailleurs, nos allocations aujourd’hui sont composées de fonds dont la stratégie dominante est patrimoniale et ce sur une projection moyen-long terme. Il est donc important de ne pas agir en précipitation et nous vous conseillons de conserver vos positions. D’ailleurs pour Jean Jacques Friedman, les entreprises européennes qu’il sélectionne, « ne verront pas leurs business models bouleversés par le Brexit ».

Pour autant, ces corrections de marché laissent la porte à des opportunités sur certaines valeurs que les gérants sauront saisir. Ce sera bien entendu sans oublier les investisseurs institutionnels internationaux qui trouveront là une opportunité pour profiter d’actions européennes sous valorisées.

Même s'il est difficile de maintenir une perspective à long terme dans des marchés agités où règne une forte volatilité, nous vous conseillons de conserver une approche patrimoniale. Pour autant, il pourrait être intéressant de profiter de cette baisse des marchés pour en saisir certaines opportunités notamment au travers du stock picking. Soit en augmentant votre part d’UC dans vos allocations d’assurance-vie ou pour les détenteurs d’un compte-titres en procédant à certains investissements en titres vifs (par exemple vers des valeurs bancaires qui ont été l’objet d’une dévaluation importante ces derniers jours).

angleterre islande euro 2016 (002)

Les marchés financiers devraient se relever à court terme de cette décision éminemment politique. Ce vendredi 24 juin restera historique pour l’Union Européenne et pour ces Anglais qui ne souhaitaient pas sortir.

Ironie du sort ce lundi 27 juin, c’est l’Islande qui avait refusé son entrée dans l’UE l’année dernière qui a précipité la sortie des Anglais du championnat d’Europe. On peut donc bien jouer au football sans être membre de l’UE. Mauvaise semaine pour les British !

 


Primes Olympiques, quid de la fiscalité associée?

Quelques semaines après la diffusion du logo qui portera la candidature de la Ville de Paris pour l’organisation des Jeux Olympiques d’Eté 2024, c’est bien vers la participation aux JO de Rio 2016 que l’ensemble des sportifs français en activité sont tournés. D’autant que le 29 avril 2016 dernier, le CNOSF a annoncé le montant des primes olympiques qui seront versées à nos meilleurs athlètes.

L’impact d’une médaille olympique dans la carrière de l’athlète de haut niveau peut être sans commune mesure en fonction des différentes disciplines. L’exposition médiatique des jeux est considérable à l’échelle planétaire. A titre d’exemple, les JO de Londres 2012 ont été diffusés dans 204 pays ou territoires à travers le monde, le nombre de téléspectateurs cumulé est lui estimé à 5 milliards sur l’ensemble de l’événement.

Remporter une des 302 médailles d’Or (chiffre pour Londres 2012) mise en jeu peut donc bouleverser la vie patrimoniale du sportif de haut niveau, dans la mesure où les marques chercheront à exploiter le potentiel médiatique de l’athlète.

Au-delà des contrats d’image, l’Etat français verse depuis les jeux Olympiques de Los Angeles de 1984 des primes aux sportifs en fonction de la médaille remportée. Pour les JO de Rio (comme pour ceux de Londres), une médaille d’or rapportera aux sportifs olympiques et paralympiques français (ainsi que leur guide ayant participé à l’épreuve) 50 000€, une médaille d’argent 20 000€ et une médaille de bronze 13 000€.

Pour les sportifs les plus performants ces primes peuvent se cumuler et atteindre des montants conséquents. A titre d’exemple, les performances de Yannick Agnel lui ont permis d’obtenir une somme de 120 000€ lors des JO de Londres, tout comme Martin Fourcade pendant les JO Sotchi de 2014.

Mais ces primes sont-elles imposées de la même manière que l’ensemble des rémunérations des sportifs ? Ou l’Etat exonère-t-il d’impôt, des sommes exceptionnelles pouvant être perçues une fois tous les quatre ans ?

Le régime fiscal des primes olympiques a évolué au fil du temps et semble aujourd’hui avoir trouvé une certaine stabilité.

La loi de finances rectificative de 1991 (depuis 1996 pour les athlètes paralympiques) avait institué une certaine coutume à partir des JO de Barcelone (Eté 1992) et d’Albertville (Hiver 1992) qui consistait à considérer comme exonérés d’impôt ces revenus exceptionnels que constituaient les récompenses olympiques. Cette exonération était d’une part motivée par le coté exceptionnel de l’évènement mais également par le symbole que représente la performance sportive obtenue au nom de la Nation française. L’avantage fiscal ainsi établi s’est répété pour les JO d’Atlanta (1995), de Nagano (1998), Sydney (2000), Salt Lake City (2002) jusqu’aux Jeux Olympiques de Pékin inclus (2008).

Un tournant a en effet été réalisé par la loi de finance du 29 décembre 2010 pour 2011, applicable aux primes olympiques distribuées pendant les JO de Vancouver de 2010. Le législateur a considéré que l’effort pour améliorer l’état des finances publiques de l’Etat français concernait l’ensemble de la population, y compris les sportifs. En conséquence, l’exonération fiscale des primes olympiques disparaissait au profit d’un mécanisme d’imposition somme toute avantageux.

Le dispositif de 2011 prévoyait initialement une imposition « différée » des primes olympiques, à l’impôt sur le revenu, au travers d’un « lissage » sur 6 années (année de perception de la prime et les 5 années suivantes). Le sportif pouvait opter pour cette option qui consistait à répartir de manière égale sur 6 ans le montant des primes perçues. Ceci permet de limiter l’impact fiscal des récompenses sur l’année de perception. Ainsi, chaque année une part égale de ou des primes versée(s) sera soumise à l’impôt sur le revenu, plutôt que la totalité de celle(s)-ci l’année de perception.

Pour les JO de Londres (2012) et de Sotchi (2014) aucun mécanisme d’imposition n’était prévu. Une solution pérenne devait être adoptée pour sécuriser la situation des sportifs. C’est chose faite depuis la codification dans le Code Général des Impôts (CGI) de l’imposition « différée » par la loi du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

Le nouvel article 163-0 A ter CGI dispose désormais, que le sportif peut opter pour le mécanisme de lissage du montant de ses récompenses. Différence majeure : le lissage ne peut être établi que sur une durée de 4 années et non plus 6 comme c’était le cas en 2011.

Concernant les prélèvements sociaux, L’Etat en tant que partie versante prélèvera 7,5% du montant de la prime au titre de la Contribution Sociale Généralisée (CSG) sur salaires et revenus d’activité et 0,5% au titre de la Contribution pour le Remboursement de la Dette Sociale (CRDS)

A juste titre, seules les primes olympiques versées par l’Etat et/ou par les fédérations sportives délégataires au profit du sportif (et le cas échéant son encadrement) sont concernées par cette imposition différée. En sont exclues l’ensemble des rémunérations habituelles du sportif (rémunérations par le club, prize money,…), tout comme les revenus d’image post-olympiques qui pourraient directement découler des performances pendant les jeux.

Il s’agit là d’une option irrévocable, de telle manière que si le sportif opte pour ce dispositif il ne pourra plus se voir appliquer le mécanisme du quotient applicable aux revenus exceptionnels prévu à l’article 163-0 CGI.

La réforme visant à faire participer les sportifs à l’effort national en faveur des finances publiques est très symbolique. En 2010, l’imposition des primes olympiques représentée, pour l’Etat, un gain de 46 000€ selon la commission des finances du Sénat. Néanmoins l’imposition différée permet aussi de préserver le symbole d’une victoire pour le drapeau tricolore, en limitant les conséquences fiscales auxquelles le sportif pourrait être soumis du fait de ses performances.


Taux Bas sur l'immobilier commercial par Jean-Pierre Pinart

Taux bas – Effets et conséquences sur l’immobilier commercial

L’immobilier commercial regroupe un certain nombre d’actifs dont les propriétaires en retirent un revenu à titre habituel, sous forme de loyer commercial.

Il s’agit des bureaux, locaux d’activité et de logistique, locaux commerciaux en pied d’immeuble et centres commerciaux, hôtels, établissements de santé, de loisirs et de retraite, et parkings.

Cette classe d’actifs est sensible d’une part à la conjoncture économique (évolution des loyers, taux de vacance, mesures d’accompagnement des locataires) mais aussi à des logiques purement financières qui affectent l’attractivité de ce type de placements vis à vis d’autres classes d’actifs financiers (actions, obligations).

La baisse continue des taux a fortement favorisé l’investissement dans l’immobilier commercial depuis plusieurs années et le montant des investissements s’est accéléré depuis 2014 du fait (i) de la recherche par les investisseurs de rendement plus élevé que celui offert par les obligations (par exemple avec la sortie des fonds en euros) et (ii) de leur capacité à s’endetter à des taux attractifs : l’environnement de taux très bas soutenant le rendement relatif des actifs immobiliers, une liquidité abondante et un contexte persistant d’incertitude sur les marchés boursiers et obligataires expliquent le regain d’intérêt récent pour cette classe d’actifs jugée défensive (cf. rapport du Haut Commissariat de Stabilité Financière).

La France constitue le 3ème marché européen derrière le Royaume Uni et l’Allemagne avec 29 Mds€ d’investissements en 2015 soit quasiment le même niveau qu’en 2007, 76% des investissements sont effectués en Ile de France et principalement en bureaux (61%).

 

La baisse continue et marquée des taux a conduit au fait que les prix sont repartis à la hausse depuis 2010 après avoir reculé entre 2007 et 2009, dépassant en 2015 leur niveau de 2007. A noter que la baisse des rendements locatifs est continue depuis 2000 mais qu’elle s’est accélérée récemment sous le double effet de la progression des prix et de la modération des loyers économiques (globalement on constate même que la France est devenu le pays le moins rentable en 2014 !)

Dans ce contexte la poursuite de la progression des prix peut sembler paradoxale mais s’explique notamment par la baisse continue des taux d’intérêt qui est plus rapide que celle des rendements locatifs, ce qui a permis à l’immobilier commercial d’avoir un statut de valeur refuge.

Cette situation d’intérêt marqué par un nombre croissant d’acteurs pour cette classe d’actifs alimente parfois une surévaluation des prix entre 15% et 20% : dans ce contexte, il importe donc d’être très vigilant sur le choix des investissements.


Opérations d'apport: l'abus est dans la soulte

L’administration fiscale a récemment mis à jour la liste des montages qu’elle considère abusifs en y ajoutant une fiche intitulée « Echange de titres avec soulte - Cas d'abus de droit fiscal ».

Sont visées les opérations d’apport rémunérées à la fois par la remise de titres de la société bénéficiaire et par l’attribution à l’apporteur d’une somme d’argent (soulte) prélevée directement sur les liquidités de la société ou inscrite en compte courant d’associé.

Conformément aux dispositions des articles 150-0 B et 150-0 B ter du Code Général des Impôts, ces opérations bénéficient d’un différé d’imposition pour autant que certaines conditions soient remplies, notamment le fait que la soulte n’excède pas 10% de la valeur nominale des titres reçus à l’occasion de l’apport.

En pratique, de nombreux contribuables se sont placés dans le champ de ces textes afin de réaliser, à l’occasion d’un apport à une société holding, une opération de cash-out en franchise d’impôt immédiate (le plus souvent dans un contexte d’apport-cession ou d’OBO).

L’ajout de cette opération à la liste des montages abusifs ne surprend pas dans la mesure où une récente doctrine administrative publiée au BOFiP (BOI-RPPM-PVBMI-30-10-60-20150702 n°170) révélait déjà l’intention de l’administration d’attaquer ce genre de schéma. La fiche publiée fournit cependant des indications sur les situations spécifiquement visées par l’administration, comme celle d’un contribuable réalisant un apport à une société qu’il constitue, avec une soulte (inférieure à 10%) inscrite au crédit du compte-courant de l’apporteur et remboursée par une distribution de dividendes de la société bénéficiaire.

L’administration fiscale estime ainsi pouvoir mettre en œuvre la procédure de l’abus de droit[1] dès lors que le schéma envisagé révèle (i) la volonté de l'apporteur d'appréhender des liquidités en franchise d'impôt et (ii) l’absence d'intérêt économique pour la société bénéficiaire de l'apport. Ceci devrait avoir pour conséquence de rendre la soulte imposable à l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux, avec éventuellement application de majorations de 80%. Par contre, il semble que la perception d’une soulte ne remette pas en cause l’application du différé d’imposition obtenu lors de l’apport.

L’administration fiscale invite par ailleurs les contribuables concernés par de telles opérations à se rapprocher de leur centre des impôts afin de « mettre en conformité leur situation », sans préciser si cette démarche volontaire serait de nature à éviter automatiquement les pénalités encourues.

Cette annonce intervient dans un cadre plus général de remise en cause des apports avec soulte et doit inciter les contribuables réalisant de telles opérations à la prudence. Nous avons en effet connaissance de plusieurs contentieux dans lesquels l’administration – en dehors de toute procédure d’abus de droit – conteste les valorisations retenues lors d’opérations d’apports afin de pouvoir prétendre que le montant de la soulte est supérieur à 10%. L’effet de ce type de redressement est d’autant plus redoutable qu’il conduit à priver l’apporteur du bénéfice du différé d’imposition sur l’ensemble de la plus-value d’apport (et non seulement à hauteur de la soulte).

La position de l’administration peut être contestée et devra être confirmée par les tribunaux, aucune jurisprudence significative n’existant en la matière. Il sera alors nécessaire de démontrer le fait que l’opération répond à une motivation exclusivement fiscale et qu’il a été fait une application littérale des textes, contraire à l’intention du législateur. Les travaux parlementaires des textes précités, comme l’étude de la directive fusion qui prévoit la notion de soulte, ne permettent pourtant pas de déterminer si la soulte doit nécessairement répondre à une finalité particulière.

Toute opération d’apport avec soulte n’est pas pour autant condamnée. Dans de nombreux cas, elle répond en effet à des motifs juridiques ou économiques et présente un intérêt réel pour la société bénéficiaire, qu’il s’agisse de résoudre la problématique des rompus ou qu’elle permette de rééquilibrer des participations dans le cadre d’opérations d’apports conjoints. C’est la raison d’être du mécanisme de la soulte mais cela ne devrait pas être la seule.

[1] Art. L. 64 du Livre des Procédures Fiscales